Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 23 juin 2021, 19-15.737, Publié au bulletin
Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 23 juin 2021, 19-15.737, Publié au bulletin
Cour de cassation - Chambre sociale
- N° de pourvoi : 19-15.737
- ECLI:FR:CCASS:2021:SO00801
- Publié au bulletin
- Solution : Cassation partielle
Audience publique du mercredi 23 juin 2021
Décision attaquée : Cour d'appel de Colmar, du 26 mars 2019- Président
- M. Cathala
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
SOC.
CF
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 23 juin 2021
Cassation partielle
M. CATHALA, président
Arrêt n° 801 FS-B sur 1re, 2e et 4e branches
Pourvoi n° Y 19-15.737
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 23 JUIN 2021
La société Schindler, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° Y 19-15.737 contre l'arrêt rendu le 26 mars 2019 par la cour d'appel de Colmar (chambre sociale, section B), dans le litige l'opposant :
1°/ à M. [G] [B], domicilié [Adresse 2],
2°/ au syndicat CGT Schindler, dont le siège est [Adresse 3],
défendeurs à la cassation.
M. [B] et le syndicat CGT Schindler ont formé un pourvoi incident contre le même arrêt.
La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Les demandeurs au pourvoi incident invoquent, à l'appui de leur recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Le Lay, conseiller, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Schindler, de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de M. [B] et du syndicat CGT Schindler, et l'avis de Mme Berriat, avocat général, après débats en l'audience publique du 11 mai 2021 où étaient présents M. Cathala, président, Mme Le Lay, conseiller rapporteur, Mme Leprieur, conseiller doyen, M. Pietton, Mme Mariette, MM. Barincou, Séguy, conseillers, Mme Duvallet, M. Le Corre, Mmes Prache, Marguerite, conseillers référendaires, Mme Berriat, avocat général, et Mme Lavigne, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Colmar, 26 mars 2019), M. [B], employé par la société Schindler depuis le 10 octobre 1994, en qualité de technicien de maintenance, a fait l'objet de trois sanctions disciplinaires les 9 septembre 2014, 23 mars 2015 et 30 mai 2016, prévues par le règlement intérieur entré en vigueur le 5 septembre 1983 et modifié en 1985, pour n'avoir pas respecté les règles de sécurité figurant dans le manuel de sécurité et la fiche de consignes C8.
2. Le salarié a saisi la juridiction prud'homale aux fins d'annulation de ces trois sanctions, le syndicat CGT Schindler s'étant joint à l'instance.
Examen des moyens
Sur le moyen du pourvoi incident
Enoncé du moyen
3. Le salarié et le syndicat font grief à l'arrêt d'infirmer le jugement en ce qu'il a déclaré le règlement intérieur inopposable à tous les salariés, alors « que pour réformer le jugement en ce qu'il a déclaré le règlement intérieur inopposable à tous les salariés, l'arrêt retient que " seulement saisi d'un litige individuel auquel n'était attaché qu'un effet relatif, ce n'était qu'envers M. [B] que l'inopposabilité du texte considéré pouvait être retenue et ceci dans les limites des conséquences sur l'objet du litige" ; qu'en statuant ainsi, quand le syndicat intervenait pour la défense de l'intérêt collectif de la profession et sollicitait l'inopposabilité du règlement intérieur à l'ensemble des salariés, ce dont il résultait que les juges n'étaient pas seulement saisis d'un litige individuel, la cour d'appel a méconnu l'objet du litige et violé l'article 4 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
4. La cour d'appel n'a pas méconnu l'objet du litige mais s'est prononcée sur sa compétence pour connaître de la demande du syndicat.
5. Le moyen ne saurait dès lors être accueilli.
Mais sur le moyen du pourvoi principal, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
6. L'employeur fait grief à l'arrêt d'annuler les sanctions disciplinaires notifiées au salarié les 9 septembre 2014, 23 mars 2015, et 30 mai 2016, de dire que les sanctions devront être retirées de son dossier individuel et qu'il sera interdit à l'employeur d'y faire référence, de déclarer le règlement intérieur inopposable au salarié, de le condamner à lui payer des dommages-intérêts ainsi qu'au syndicat, de le condamner à transmettre sous astreinte une copie de la décision et de le débouter de ses autres demandes, alors « que l'employeur n'est pas tenu de consulter les institutions représentatives du personnel lorsque les modifications du règlement intérieur résultent exclusivement d'une injonction de l'inspection du travail à laquelle il est dans l'obligation de se conformer ; qu'au cas présent, la société Schindler faisait valoir que les modifications qu'elle avait apportées au règlement intérieur en 1985 résultaient exclusivement d'une injonction de l'inspection du travail à laquelle elle s'était conformée, en sorte qu'elle n'avait pas à consulter les institutions représentatives du personnel ; qu'en reprochant à l'exposante de ne pas avoir consulté les institutions représentatives du personnel sur cette modification pour déclarer le règlement intérieur inopposable à M. [B], cependant que celle-ci résultait exclusivement d'une injonction de l'inspection du travail à laquelle elle n'avait fait que se conformer comme elle y était légalement tenue, la cour d'appel a violé les articles L. 1321-4 et L. 1322-2 du code du travail. »
Réponse de la Cour
Vu l'article L. 122-36, alinéa 1 du code du travail dans sa version postérieure à la loi n° 82-689 du 4 août 1982 et l'article L. 122-37 du code du travail dans sa version postérieure à la loi n° 82-689 du 4 août 1982 et antérieure à la loi n° 94-665 du 4 août 1994 :
7. Selon le premier de ces textes, le règlement intérieur ne peut être introduit qu'après avoir été soumis à l'avis du comité d'entreprise ou, à défaut, à l'avis des délégués du personnel ainsi que, pour les matières relevant de sa compétence, à l'avis du comité d'hygiène et de sécurité. Selon le second, l'inspecteur du travail peut à tout moment exiger le retrait ou la modification des dispositions contraires aux articles L. 122-34 et L. 122-35 du code du travail.
8. Pour annuler les sanctions disciplinaires, la cour d'appel a déclaré inopposable au salarié le règlement intérieur au motif que l'employeur s'était abstenu de consulter les représentants du personnel lors de l'introduction en 1985 de modifications.
9. En statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que les modifications apportées en 1985 au règlement intérieur initial, qui avait été soumis à la consultation des institutions représentatives du personnel, résultaient uniquement des injonctions de l'inspection du travail auxquelles l'employeur ne pouvait que se conformer sans qu'il y ait lieu à nouvelle consultation, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
Sur le moyen du pourvoi principal, pris en sa deuxième branche
Enoncé du moyen
10. L'employeur fait les mêmes griefs à l'arrêt, alors « que l'employeur n'a pas à modifier la date d'entrée en vigueur du règlement intérieur lorsqu'il procède à sa révision ; qu'en reprochant cependant à la société Schindler de ne pas avoir modifié la date d'entrée en vigueur du règlement intérieur à la suite de sa modification en 1985, cependant qu'elle n'y était pas légalement tenue, la cour d'appel a violé l'article L. 1321-4 du code du travail. »
Réponse de la Cour
Vu l'article L. 122-36, alinéas 2 et 4 du code du travail dans sa version postérieure à la loi n° 82-689 du 4 août 1982 et l'article R. 122-14 du même code, dans sa version postérieure au décret n° 83-160 du 3 mars 1983 et antérieure au décret n° 91-415 du 26 avril 1991 :
11. Selon le premier de ces textes, le règlement intérieur doit indiquer la date à partir de laquelle il entre en vigueur. Cette date doit être postérieure d'un mois à l'accomplissement des formalités de dépôt et de publicité. Les dispositions prévues aux alinéas précédents sont applicables en cas de modification ou de retrait des clauses du règlement intérieur.
12. Selon le second de ces textes, le délai prévu au deuxième alinéa de l'article L. 122-36 court à compter de la dernière en date des formalités de publicité et de dépôt définies aux articles R. 122-12 et R.122-13.
13. Pour annuler les sanctions disciplinaires et déclarer inopposable au salarié le règlement intérieur, la cour d'appel a encore relevé que l'employeur s'était abstenu de modifier la date d'entrée en vigueur de celui-ci, restée fixée en 1983.
14. En statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que les diligences prévues à l'article L. 122-36 du code du travail avaient été accomplies, de sorte que le règlement intérieur modifié entrait en vigueur après la dernière date d'accomplissement des formalités de dépôt et de publicité, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
Et sur le moyen du pourvoi principal, pris en sa quatrième branche
Enoncé du moyen
15. L'employeur fait les mêmes griefs à l'arrêt, alors « que seules les notes de service ou autre document comportant des obligations générales et permanentes dans les matières mentionnées aux articles L. 1321-1 et L. 1321-2 du code du travail sont considérées comme des adjonctions au règlement intérieur ; que le document interne par lequel l'employeur se borne à rappeler le cadre législatif et réglementaire applicable dans l'entreprise en matière de sécurité ne crée pas une nouvelle obligation générale et permanente s'imposant au salarié, et ne constitue donc pas une adjonction ; qu'au cas présent, la société Schindler faisait expressément valoir que le manuel sécurité agence et la fiche consigne de sécurité C28 se limitaient à rappeler les lois, décrets et arrêtés s'imposant à la société en matière de sécurité et ne constituaient pas une adjonction au règlement intérieur ; que pour refuser à l'exposante le droit de se prévaloir de ces règlements de sécurité, la cour d'appel a estimé que ceux-ci constituaient des adjonctions au règlement intérieur pour lesquelles l'employeur n'avait pas consulté les représentants du personnel ; qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher si ces documents créaient de nouvelles obligations générales et permanentes à la charge des salariés, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1321-5 du code du travail. »
Réponse de la Cour
Vu les articles L. 1321-1 et L. 1321-5 alinéa premier du code du travail :
16. Selon le premier de ces articles, le règlement intérieur est un document écrit par lequel l'employeur fixe les mesures d'application de la réglementation en matière de santé et de sécurité dans l'entreprise ou l'établissement, notamment les instructions prévues à l'article L. 4122-1 ;
17. Selon le second, les notes de service ou tout autre document comportant des obligations générales et permanentes dans les matières mentionnées aux articles L. 1321-1 et L. 1321-2 sont, lorsqu'il existe un règlement intérieur, considérées comme des adjonctions à celui-ci. Ils sont, en toute hypothèse, soumis aux dispositions du titre intitulé « Règlement intérieur ».
18. Le document interne par lequel l'employeur se borne à rappeler les dispositions législatives et réglementaires applicables dans l'entreprise en matière de sécurité ne crée pas de nouvelles obligations générales et permanentes s'imposant aux salariés et ne constitue donc pas une adjonction au règlement intérieur.
19. Pour annuler les sanctions disciplinaires prononcées à l'encontre du salarié, la cour d'appel a retenu également que celles-ci étaient fondées sur l'inobservation du manuel de sécurité et de la fiche de sécurité C28, et que ces documents devaient être considérés comme une adjonction au règlement intérieur requérant dès lors les formalités de consultation et de publicité prévues à l'article L. 1321-4 du code du travail, lesquelles n'avaient pas été effectuées.
20. En se déterminant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si le manuel de sécurité agence et la fiche de sécurité C28 créaient de nouvelles obligations générales et permanentes s'imposant aux salariés, la cour d'appel a privé sa décision de base légale.
Portée et conséquences de la cassation
21. En application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation à intervenir sur la quatrième branche du moyen du pourvoi principal emporte cassation par voie de conséquence du chef de dispositif par lequel la cour d'appel a confirmé le jugement en ce qu'il a jugé inopposables aux salariés de l'entreprise Schindler le manuel de sécurité agence et la fiche C28.
22. La cassation emporte également cassation des chefs de dispositif de l'arrêt relatifs à l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :
REJETTE le pourvoi incident ;
CASSE ET ANNULE, sauf en ce que l'arrêt confirme le jugement en sa disposition ayant jugé le syndicat recevable et bien-fondé en son intervention volontaire et en ce qu'il infirme le jugement ayant déclaré le règlement intérieur inopposable à tous les salariés, l'arrêt rendu le 26 mars 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Colmar ;
Remet, sauf sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Metz ;
Condamne M. [B] et le syndicat CGT Schindler aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois juin deux mille vingt et un. MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat aux Conseils, pour la société Schindler, demanderesse au pourvoi principal
Il est fait grief à l'arrêt partiellement infirmatif attaqué d'AVOIR annulé les sanctions disciplinaires notifiées à Monsieur [B] les 9 septembre 2014, 23 mars 2015 et 30 mai 2016, d'AVOIR dit que ces sanctions devront être retirées de son dossier individuel et qu'il sera interdit à l'employeur d'y faire référence, d'AVOIR déclaré le règlement intérieur inopposable à M. [B], d'AVOIR condamné la société Schindler à payer au syndicat CGT Schindler la somme de 1.000 euros à titre de dommages et intérêts et à M. [B] la somme de 1.000 euros, nets de CSG et de CRDS et majorés des intérêts légaux en application de l'article 1153-1 du code civil à titre de préjudice subi, ainsi que d'AVOIR condamné la société Schindler à transmettre sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter du 15ème jour suivant la notification du jugement, une copie intégrale de la présente décision aux différents services de l'inspection du travail compétents - inspection du travail compétente pour le siège de la Société Schindler - inspection du travail compétente pour le lieu de travail de Monsieur [B], aux membres du comité central d'entreprise de la société Schindler et du comité d'établissement dont ressort Monsieur [B], et d'AVOIR débouté la société Schindler de ses autres demandes ;
AUX MOTIFS QUE « Attendu que M. [B], salarié de la SA Schindler France a introduit le 31 juillet 2016 une action aux fins d'annulation de trois sanctions disciplinaires qui lui ont été infligées, à savoir un recadrage le 9 septembre 2014 et deux avertissements les 23 mars 2015 et 30 mai 2016, et il a sollicité réparation du préjudice en résultant ; Que le syndicat est intervenu à se côtés pour voir réparer une atteinte à l'intérêt collectif de la profession ; Attendu - et les premiers juges l'ont du reste exactement fait ressortir - que la solution du litige s'agissant du bien-fondé des sanctions contestées, se trouve subordonnée à l'opposabilité à M. [B] du règlement intérieur de l'appelante qui occupe plus de vingt salariés ; Que certes l'appelante relève exactement que c'est en excédant leurs pouvoirs que les premiers juges ont déclaré le règlement intérieur inopposable à tous les salariés alors que seulement saisi d'un litige individuel auquel n'est attaché qu'un effet relatif, ce n'était qu'envers M. [B] que l'inopposabilité du texte considéré pouvait être retenue et ceci dans les limites des conséquences sur l'objet du litige ; Que sur ce point le jugement devra être réformé ; Attendu que sur les sanctions c'est en vain que l'appelante fait valoir que la validité ou pas du règlement intérieur n'a pas pour conséquence de la priver du droit de mettre en oeuvre son pouvoir disciplinaire inhérent à son pouvoir de direction ; Qu'en effet une sanction disciplinaire autre que le licenciement - et pour ce dernier l'employeur tient son pouvoir de l'article L 1232-1 du code du travail - ne peut être prononcé contre un salarié par un employeur occupant au moins vingt salariés que si elle est prévue par le règlement intérieur prescrit par l'article L 1311-2 du code du travail, ce qui est en l'espèce le cas ; Qu'il s'en suit que la validité de fond de la sanction est conditionnée par celle du règlement intérieur qui la prévoit ; Attendu que c'est à l'époque des sanctions litigieuses le règlement entré en vigueur le 5 septembre 1983 modifié en 1986 qui pouvait trouver à s'appliquer ; Que les premiers juges ont exactement constaté au vu des pièces du dossier - décrites sans dénaturation - et de l'aveu même des appelantes contenu dans leurs écritures, que l'employeur s'était abstenu d'abord de procéder aux consultations des représentants du personnel lors de l'introduction des modifications du règlement en 1985, puis de modifier la date d'entrée en vigueur de celui-ci, celle-ci sur le texte affiché demeurait en 1983 ; Que l'appelante, comme le font avec pertinence valoir les intimés, a ainsi méconnu les dispositions de l'article L 1321-4 du code du travail dans sa version alors en vigueur sous la codification L 122-36 du même code, et c'est à tort, dès lors que ce texte dispose de manière générale sans introduire d'exceptions aux obligations de consultation et de fixation de la date d'entrée en vigueur qu'il impose, que celle-là prétend se justifier en soulignant que les modifications de 1985 n'étaient pas afférentes au pouvoir disciplinaire, ou qu'elles avaient été ordonnées par l'inspection du travail ; Qu'il en est de même de la circonstance - et le syndicat le fait avec pertinence valoir - que le Manuel de Sécurité Agence (MSA) et la fiche de sécurité C28, au contraire du prescrit de l'article L 1321-5 (anciennement codifié L 122-39) du code du travail n'ont pas été considérés par l'appelante comme des adjonctions au règlement intérieur et donc ces textes n'ont fait l'objet d'aucune des consultations et publicité ( affichage, entrée en vigueur) prévues pour ce dernier, ce que reconnaît l'appelante ; Que pourtant c'est sur le fondement de ces réglementations de sécurité que M. [B] a été sanctionné ; Attendu qu'il s'évince du tout que le règlement intérieur et les notes de service qui le complètent ne peuvent produire effet que si l'employeur a accompli les diligences prévues par l'article L 1321-4 du code du travail qui ont vocation à assurer de manière certaine la connaissance par les salariés des obligations qui en découlent et des sanctions de leur méconnaissance, en sorte qu'à défaut, comme en l'espèce lesdites dispositions doivent être déclarées inopposables à M. [B] et elles ne peuvent fonder les reproches émis contre lui pour ses prétendus manquements à celles-ci, ce qui fait encourir l'annulation aux trois sanctions dont s'agit ; Qu'en conséquence c'est aussi à tort que l'appelante soutient que l'article L 1322-4 du code du travail limiterait le droit d'un salarié à invoquer l'inopposabilité du règlement aux manquements qu'il énumère (L 1321'1, 1321-3 et 1321-6) au rang desquels ne figure pas l'article L 1321-4 du code du travail ; Attendu que le jugement sera confirmé de ce dernier chef ainsi que sur les dommages et intérêts alloués à M. [B] en réparation de son entier préjudice ; Attendu qu'en revanche c'est l'infirmation du jugement qui s'impose en ce qu'il a condamné sous astreinte la SA Schindler à transmettre la copie du jugement aux représentants du personnel et à l'Inspection du Travail ; Que ce faisant les premiers juges ont ajouté à l'article 1322-4 du code du travail et ils ont donc inexactement appliqué ce texte ; Qu'en effet la transmission prévue par ce texte n'est prescrite que si le règlement intérieur est contraire aux articles L 1321-1, 1321-3 et 1321-6 du code du travail, ce qui n'est pas le cas en l'espèce, en sorte qu'en présence d'un manquement au prescrit de l'article L 1321-4 tel qu'il a été précédemment constaté la transmission non prévue par l'article L 1322-4 ne pouvait être ordonnée ; Attendu que la recevabilité de l'action du syndicat n'est pas contestée ; Que celle-ci est bien fondée alors que les manquements précédemment constatés ont porté atteinte aux intérêts collectifs de la profession ; Que cependant les premiers juges ont surestimé l'étendue du préjudice en résultant ; Que la condamnation de la SA Schindler France à payer au syndicat la somme de 1000 euros à titre de dommages et intérêts remplira celui-ci de son droit à réparation ; Que pour le surplus le syndicat verra sa demande d'indemnisation rejetée, faute de preuve suffisante d'un préjudice distinct de celui-ci dessus réparé tiré d'un prétendu abus de pouvoir ; Attendu que le jugement sera confirmé sur les frais irrépétibles et les dépens ; Que la SA Schindler France qui succombe principalement sera condamnée aux dépens d'appel ainsi qu'à payer à M. [B] la somme de 2500 euros pour frais irrépétibles d'appel et toutes les autres demandes à ce titre seront rejetées » ;
ET AUX MOTIFS DES PREMIERS JUGES, EN LES SUPPOSANT ADOPTES, QUE « (?); L'article L. 1333-1 du code du travail prévoit en effet que : en cas de litige, le conseil de prud'hommes apprécie la régularité de la procédure suivie et si les faits reprochés au salarié sont de nature à justifier une sanction. L'employeur fournit au conseil de prud'hommes les éléments retenus pour prendre la sanction. Au vu de ces éléments et de ceux qui sont fournis par le salarié à l'appui de ses allégations, le conseil de prud'hommes forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié. Mais c'est avec raison que le syndicat CGT fait valoir que le cadre du présent litige, la question de la régularité de la procédure ? c'est-àdire le respect de l'ensemble des garanties de fond prévues par le législateur ? doit être examinée par le Conseil. Et que parmi ces garanties figure le règlement intérieur, qui détermine l'exercice du pouvoir disciplinaire de l'employeur dans toute entreprise de plus de 20 salariés : « mais attendu, d'une part, qu'une sanction disciplinaire autre que le licenciement ne peut être prononcée contre un salarié par un employeur employant habituellement au moins vingt salariés que si elle est prévue par le règlement intérieur prescrit par l'article L. 1311-2 du code du travail ; » (Cass. Soc. 23 mars 2017, n° 17-23.090) La question du règlement intérieur se trouve en conséquence au coeur du présent litige. De son existe, ou de son inexistence au sein de la SA Schindler France, de son opposabilité au salarié [G] [B], dans le cadre des dispositions de l'article L. 1321-4 du code du travail, se déduire la possibilité, ou l'impossibilité, pour l'employeur de sanctionner un salarié de l'entreprise. La SA Schindler France fait plaider in limine litis que le conseil de prud'hommes n'est pas compétent pour statuer sur le point de savoir si un règlement intérieur contrevient aux dispositions de l'article L. 1321-4 du code du travail, que le juge judiciaire (conseil de prud'hommes ou TGI) n'est pas compétent lorsque le règlement intérieur a fait l'objet d'une décision administrative, et qu'en conséquence, le conseil de prud'hommes doit considérer qu'il est incompétent pour statuer sur les demandes qui lui sont faites, au profit du Tribunal Administratif. La cour de cassation a posé le principe suivant : « Mais attendu que le règlement intérieur est un acte juridique de droit privé et que le contrôle de légalité dévolu à l'inspecteur du Travail par l'article L. 122-37, alinéa 1er, du Code du travail, ne saurait lui ôter sa nature pour le transformer en un acte administratif ; qu'il appartient aux juges de l'ordre judiciaire de connaître de la contestation qui s'élève sur la validité de ses dispositions, l'article L. 122-37, alinéa 3, de ce Code qui reconnaît au conseil de prud'hommes la faculté, à l'occasion d'un litige individuel, d'écarter une clause illicite, n'interdisant pas à la juridiction de droit commun de l'ordre judiciaire de connaître d'une action principale en annulation d'une ou plusieurs clauses dudit règlement ; qu'il en résulte que la cour d'appel a distingué à bon droit les clauses modifiées à la suite de la décision de l'inspecteur du Travail, de celles au sujet desquelles l'autorité administrative ne s'est pas prononcée » (Cass. soc., 16 déc. 1992,n° 90-14.337) Ce principe a été repris dans un arrêt très récent de la cour d'appel de Versailles, qui après avoir rappelé que : le règlement intérieur dans une entreprise est un acte juridique de droit privé et que le contrôle de légalité dévolu à l'inspecteur du travail ne saurait lui ôter sa nature (?), précise que : cependant, dans la présente instance le syndicat CGT ne met pas en cause les clauses du règlement intérieur de 1983 mais soulève la question de l'opposabilité de ce règlement intérieur aux salariés pour nonrespect des dispositions de l'article L. 1321-4 du code du travail. Il s'en suit que le juge judiciaire est compétent pour apprécier les demandes du syndicat CGT et la décision du premier juge qui s'est déclaré incompétent au profit du juge administratif sera infirmée. (cour d'appel de versailles, 14ème chambre, 16 novembre 2017, RG 17/04228) Certes l'arrêt ci-dessus a été rendu dans le cadre d'un litige de droit collectif opposant, devant le juge des référés, le syndicat CGT de SCHINDLER à la SA SCHINDLER. Mais la solution adoptée est applicable pour « le juge judiciaire », qu'il s'agisse d'un TGI ou d'un conseil de prud'hommes. L'exception d'incompétence du conseil de prud'hommes au profit du juge administratif soulevée par la SA SCHINDLER France est rejetée. Sur la mise en place d'un règlement intérieur et son opposabilité à [G] [B] : le conseil remarque qu'avant tout examen éventuel des arguments et éléments de preuve produits par l'employeur pour fonder ses décisions de sanctionner le salarié, il lui appartient d'examiner et s'assurer du respect par l'employeur des obligations légales et règlementaires lui incombant avant de pouvoir faire usage de son pouvoir disciplinaire. Et que pour pouvoir exercer son pouvoir disciplinaire, l'employeur d'une entreprise de plus de 20 salariés doit avoir mis en place un règlement intérieur. Pour être opposable au salarié, la mise en place dudit règlement doit avoir respecté les formalités de consultations des IRP, de dépôt et de publicité. L'article L. 1321-4 du code du travail prévoit en effet que : Le règlement intérieur ne peut être introduit qu'après avoir été soumis à l'avis du comité d'entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel ainsi que, pour les matières relevant de sa compétence, à l'avis du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail. Le règlement intérieur indique la date de son entrée en vigueur. Cette date doit être postérieure d'un mois à l'accomplissement des formalités de dépôt et de publicité. En même temps qu'il fait l'objet des mesures de publicité, le règlement intérieur, accompagné de l'avis du comité d'entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel et, le cas échéant, du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail, est communiqué à l'inspecteur du travail. Ces dispositions s'appliquent également en cas de modification ou de retrait des clauses du règlement intérieur. Le Conseil reprend l'historique des faits concernant le règlement intérieur, tel que proposé par la partie intervenante, et non contesté quant aux dates évoqués : règlement intérieur de l'établissement RCS Mulhouse : date d'entrée en vigueur : 1er septembre 1983 ; règlement intérieur des établissements RCS Vélizy-Île-de-FranceRouen-Toulouse? date de dépôt inspection du travail [Localité 1] : 02 août 1983 ; date d'entrée en vigueur : 05 septembre 1983 ; 25 juillet 1985 : décision modification de l'inspection du travail [Localité 1] 23 septembre 1985 : courrier de réponse de la direction Schindler à la décision modificative 27 septembre 1985 : le recours hiérarchique de la société Schindler 23 janvier 1986 : décision du directeur régional du travail Île-de-France 20 février 1986 : dépôt du règlement intérieur modifié auprès de l'inspection du travail et du greffe du conseil de prud'hommes de Versailles 17 juin 2004 : décision du TGI de Versailles annulant la mise en place de la charte éthique et rappelant les formalités obligatoires d'adoption d'un règlement intérieur. 26 octobre 2010 et 24 novembre 2010 : arrêts de la chambre sociale de la Cour de cassation relatifs à l'inscription dans le règlement intérieur de la durée maximale de la mise à pied disciplinaire 05 septembre 2014 : cinq ordonnances de référés CPH Versailles rappelant l'illicéité des sanctions chez Schindler (n° de RG : R 14/00080, R 14/00082, R 14/00083, R 14/00148 et R 14/00149) 12 septembre 2014 : second projet de règlement intérieur Schindler intégrant la jurisprudence concernant la durée des mises à pied et les autres dispositions obligatoires : date d'entrée en vigueur prévue : 16 mars 2015 ; 11 mars 2015 : courrier de l'inspection du travail signalant le défaut de la procédure de dépôt auprès de la Direccte ? la direction laisse le règlement intérieur 2015 invalidé à l'affichage. 23 juin 2015 : deux arrêts de la cour d'appel de Versailles, déclarant le règlement intérieur Schindler 1983 illicite (arrêts n° 400/15 et 401/15). Depuis décembre 2015 : constats de carence d'affichage ou d'affichage du RI invalidé dans plusieurs agences Schindler ? constats réalisés par les élus de la CGT Schindler. 17 octobre 2016 : constat de carence agence [Localité 2]. 26 mai 2016 : six arrêts de la cour d'appel de Versailles, déclarant le règlement intérieur Schindler 1983 illicite (arrêts n° 187-2016 à 192-2016). 21 octobre 2016 et 24 janvier 2017 : courriers de l'inspection du travail concluant à l'inopposabilité du règlement intérieur de 1983. 13 avril 2017 : courrier d'observations de l'inspection du travail confirmant entre autres l'absence de formalités de dépôt et de publicité des consignes de sécurité. Le conseil remarque qu'outre les nombreuses décisions de justice intervenues, l'inspection du travail, voire la Direccte, ont été saisies par les différentes parties au litige. L'inspection du travail a répondu, notamment le 21 octobre 2016, le 24 janvier 2017 et le 13 avril 2017. Le courrier du 21 octobre 2016, adressé au syndicat CGT par l'inspectrice du travail [P] [H], reprend l'intégralité du courrier que cette dernière a adressé le même jour au représentant de la SA SCHINDLER France, M. [W]. Il est adressé, au chapitre 2 « concernant le règlement intérieur » : « A mon arrivée dans vos locaux le 3 octobre 2016, je vous ai demandé une copie du règlement intérieur affiché et en vigueur dans l'entreprise. Il s'agit d'un document de 1983 dont l'entrée en vigueur est « fixée au 5 septembre 1983 » selon sa partie V. Cependant, il ressort de nos échanges que, sans même parle de date précise, l'année d'entrée en vigueur ne correspond pas à l'année dans laquelle cette version du règlement intérieur a été affichée. En effet : par une décision de l'inspectrice du travail du 25 juillet 1985, le règlement intérieur de la société SCHINDLER, alors dénommée R.C.S qui avait transmis à l'administration le 2 août 1983, a été modifié en plusieurs de ses articles : vous m'avez fourni une copie de la réponse de la direction du personnel de R.C.S datée du 23 septembre 1985 ; il y est indiqué que des articles du règlement intérieur de 1983 sont modifiés ou supprimés dans le sens demande par l'inspection du travail ; le texte affiché dans vos locaux comporte clairement ces modifications réalisées en 1985, postérieurement à la décision de l'inspectrice du travail (par exemple, voir article 4c ou l'article 5) Après avoir réalisé ces modifications, la direction de l'entreprise n'a cependant pas modifié la date d'entrée en vigueur de la nouvelle version du règlement intérieur qui est restée fixée au 5 septembre 1983 ; les formalité de dépôt du nouveau texte ne semblent pas non plus avoir été réalisées (à l'inspection du travail et au greffe des prud'hommes). Or, la modification d'un règlement intérieur à la suite d'une décision de l'inspection du travail entraîne obligatoirement un nouveau dépôt et un nouvel affichage, ce qui doit également donner lieu à une nouvelle date d'entrée en vigueur. Ceci avait été précisé dès 1983 dans la circulaire DRT n° 5-83 du 15 mars 1983. C'est aussi ce dont disposent les articles L. 1321-4 du code du travail. La jurisprudence est venue préciser qu'en cas de non-respect des conditions d'entrée en vigueur du règlement intérieur dont fait partie les formalités de de dépôt et de publicité, en particulier en l'absence de communication du texte modifié à l'inspection du travail, celui-ci est sans effet et inopposable aux salariés (voir Cass. soc. 9 mai 2012, n° 11-13687, publié au Bulletin « attendu que le règlement intérieur et les notes de services qui le complètent ne pouvant produire effet que si l'employeur a accompli les diligences prévues par l'article L. 1321-4 du code du travail »). En conséquence, j'en conclue, sous réserve de l'appréciation souveraine des juges, que votre règlement intérieur de 1983 est sans effet et n'est pas applicable aux salariés ». L'inspection du travail renouvelle son analyse par courrier du 21 janvier 2017 et précise : « ainsi sous réserve de l'appréciation souveraine des juges du fond, votre règlement intérieur modifié, bien que déposé selon vos assertions le 20 février 1986, ne fixe pas sa nouvelle date d'entrée en vigueur, qui devait être postérieure d'un mois à l'accomplissement des formalités de dépôt et de publicité, est par conséquent susceptible d'être jugé sans effet et inapplicable aux salariés ». Le conseil de prudhommes n'est pas lié par les appréciations de l'inspection du travail, fussent-elles confirmées par la voie hiérarchique. Pas plus qu'il n'est lié par les abondantes produites, qui toutes concluent à l'illicéité et l'inopposabilité du règlement intérieur au sein de la SA SCHINDLER France, qu'il s'agisse des nombreuses décisions de la cour d'appel de Versailles, dont deux au moins on été confirmés, certes de façon incidente mais néanmoins explicite, dans deux arrêts du 4 mai 2017 de la chambre sociale de la cour de cassation (Cass. Soc. 4 mai 2017, n° 15-254400 et n° 15-24401) ll ressort des propres constatations du conseil de céans, ainsi qu'il a déjà jugé dans une affaire précédente (VESAPHONG c/SA SCHINDLER France, 12 septembre 2017, RG 16/583), que la SA SCHINDLER France est dans l'incapacité de rapporter la preuve que le règlement intérieur est affiché de façon régulière, qu'il a bénéficié des publicités et formalités de dépôt auprès de l'inspection du travail. Et y rajoutant, il est remarqué que la SA SCHINDLER France n'apporte strictement aucun élément, autre que ses propres allégations, qui répondraient de façon pertinente aux recommandations, voire injonctions, de l'inspection du travail. En vain produirait-elle, le 20 novembre 2017, soit 40 jours après la clôture des débats et sans autorisation du président d'audience sous forme d'une note en délibéré, une copie d'un arrêt de la cour d'appel de Versailles du 20 novembre 2017. Car cet arrêt, s'il infirme une ordonnance du CPH de Versailles disant n'y avoir lieu à référé sur les demandes présentées par la CGT, en raison de l'absence d'évidence de l'existence d'un trouble manifestement illicite, se déclare tout de même compétent pour statuer sur les demandes de la CGT, et ne préjuge pas du fond. Il ressort de l'ensemble des éléments du dossier, en particulier des interventions de l'inspection du travail et des jurisprudences ci-dessus évoquées, que le Conseil forme sa conviction qu'il y a eu, de la part de la SA SCHINDLER France, violation des garanties de fond. L'art L. 1333-2 précité prévoit que le conseil de prud'hommes peut annuler une sanction irrégulière en la forme ou injustifiée ou disproportionnée à la faute commise. La carence de l'employeur dans la réalisation des obligations définies par les articles L. 1311-2, L. 1321-4 et L. 1321-5 du code du travail doit conduire à l'annulation des sanctions, sans qu'il soit besoin d'examiner les arguments de l'employeur cités à l'appui de sa décision. En cas de carence de l'employeur, l'annulation n'est plus une simple faculté, mais une obligation. C'est ce qu'a déjà jugé la Cour de cassation concernant : l'absence des formalités de dépôt et de publicité : « qu'en se déterminant ainsi, alors que le règlement intérieur ne peut produire effet que si l'employeur a accompli les diligences prévues par l'article L. 1321-4 du code du travail, la cour d'appel, qui n'a pas recherché si le règlement intérieur invoqué par l'employeur avait été communiqué à l'inspecteur du travail accompagné de l'avis du comité d'entreprise, ou à défaut des délégués du personnel, a privé sa décision de base légale ; » (Cass. soc. 9 mai 2012, n° 11-13.687, Cass. soc. 06 mars 2017, n° 15-26.356) ? L'absence de durée maximale de la mise à pied : (Cass. Soc. 26 oct. 2010, n° 09-42.740, 24 nov. 2010, n° 09-42.267 et 7 janv. 2015, n° 13-15.630) ; - L'absence de mise en place du règlement intérieur : « mais attendu, d'une part, qu'une sanction disciplinaire autre que le licenciement ne peut être prononcée contre un salarié par un employeur employant habituellement au moins vingt salariés que si elle est prévue par le règlement intérieur prescrit par l'article L. 1311-2 du code du travail ; » (Cass. Soc. 23 mars 2017, n° 15-23.090) C'est avec pertinence que la partie intervenante rappelle que la violation d'une liberté fondamentale emporte nullité de toute sanction, quelle qu'elle soit. La seule violation emporte par elle-même annulation de la sanction. Il s'en suit que la sanction de l'infraction clairement constituée par les manquements de l'employeur à l'encontre des garanties de fond prévues par le législateur ne peut être que l'annulation pleine et entière de toutes les sanctions prises envers [G] [B] sur la base d'un règlement intérieur inopposable. S'agissant des documents intitulés : - MSA (Manuel Sécurité Agence) ; - Fiche de consigne de sécurité C28 (bloque-porte), le conseil juge que c'est avec raison que les demandes font valoir qu'i résulte de la combinaison des articles L. 1321-1, 1er alinéa, et L. 1321-5 du code du travail que les documents prescrivant des mesures générales et permanentes en matière de sécurité sont considérés comme des adjonctions au règlement intérieur. Et que dès lors, lesdites consignes doivent respecter les mesures d'entrée en vigueur prescrites pour le règlement intérieur, conformément à l'art L. 1321-5 du même code. La Direccte confirme cette analyse dans le courrier d'observations rédigé en accompagnement de la décision administration de modification du règlement intérieur devant initialement entrer en vigueur le 18 avril 2017. L'inspecteur du travail y rappelle la nécessité de procéder aux formalités de dépôt et de publicité des consignes de sécurité, comme en dispose l'art L. 1321-5 du code du travail. Dès lors, à l'instar du règlement intérieur, le conseil ne peut que constater l'absence de toute justification de la part de l'employeur de l'accomplissement des formalités de dépôt et de publicité des consignes de sécurité. Il y a lieu, là encore, de constater les carences de dépôt et de publicité du MSA et de la consigne de sécurité C28, et par suite, de juger le MSA et la fiche C28 inopposables au salarié pour violation des articles L. 1321-1 1er alinéa, L. 1321-4 et L. 1321-5 du code du travail. Les sanctions prises au visa des documents MSA et C28, seront, pour les mêmes raisons développées ci-dessus, annulées. Il y a lieu, de faire obligation à la SA SCHINDLER FRANCE d'annuler les 3 sanctions prises à l'encontre de [G] [B], et d'en supprimer toute mention dans le dossier individuel du salarié. La SA SCHINDLER FRANCE sera condamnée à payer à [G] [B] la somme de 1 000 ? réclamée à titre de préjudice moral subi du fait de ces sanctions abusives. Sur l'intervention volontaire du syndicat CGT SCHINDLER : Le Conseil juge l'intervention recevable, tant sur la forme (attestation de mandat et de pouvoir délivrée à M. [W] [L] par M. [M], secrétaire général du syndicat, statuts déposés en mairie et produits devant le Conseil, extrait des délibérations de la commission exécutive également produit) que sur le fond. Le Conseil a déjà relevé que la SA SCHINDLER FRANCE est dans l'incapacité de rapporter la preuve que le règlement intérieur est affiché de façon régulière, qu'il a bénéficié des publicités et formalités de dépôt auprès de l'inspection du travail. La SA SCHINDLER FRANCE a démontré, dans le présent dossier, mais également dans de nombreux autres, une certaine constance à ne pas vouloir se conformer aux recommandations de l'inspection du travail, et à ne pas tirer les conséquences de ses manquements en matière de publicités et de formalités de dépôt du règlement intérieur, et des documents s'y rattachant. S'il n'appartient pas au Conseil de dire que cette constance doit s'analyser en une sorte d'acharnement, comme le suggère le syndicat CGT, il y a lieu de constater par contre une persistance manifeste et délibérée dans le non-respect des obligations imposées par les articles L. 1321-4 et L 1321-5 et dans la violation des garanties de fond en résultant. Le Conseil juge qu'il y a indiscutablement une atteinte grave, de la part de la SA SCHINDLER FRANCE, aux intérêts collectifs de la profession, qui justifie de plus fort l'intervention et les demandes du syndicat CGT. De ce fait la demande du syndicat CGT est jugée comme étant amplement justifiée, et il y a lieu de faire droit à la demande conformément à l'art 12311 du code civil, et de condamner la SA SCHINDLER FRANCE à payer au syndicat CGT la somme réclamée de 10 000,00 ?. De la même façon, la SA SCHINDLER FRANCE sera condamnée à payer au syndicat CGT une somme de 5 000,00 ? pour abus de pouvoir. Sur la communication de la décision aux services de l'inspection du travail et aux élus de l'entreprise : L'article L 1322-4 du code du travail prévoit que : « lorsque, à l'occasion d'un litige individuel, le conseil de prud'hommes écarte l'application d'une disposition contraire aux articles L. 1321-1 à L. 1321-3 et L. 1321-6, une copie du jugement est adressée à l'inspecteur du travail et aux membres du comité d'entreprise ou, à défaut, aux délégués du personnel, ainsi qu'aux membres du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail pour les matières relevant de sa compétence. » Le Conseil juge qu'en raison de l'attitude la SA SCHINDLER FRANCE une copie de cette décision devra être transmise par l'employeur aux différents services de l'inspection du travail compétents : inspection du travail compétente pour le siège ; inspection du travail compétente pour le lieu de travail de [G] [B]. Qu'une copie de la décision sera également transmise aux membres du comité central d'entreprise de la société Schindler ainsi qu'aux membres du comité d'établissement dont ressort [G] [B]. Pour assurer l'effectivité de cette transmission, le Conseil assortira l'obligation d'une astreinte fixée à 500? par jour de retard à compter du 15ème jour suivant l'astreinte ordonnée, en application de l'article L. 131-3 du code des procédures civiles d'exécution. Sur l'exécution provisoire du jugement : Concernant les dommages-intérêts ainsi que les sommes attribuées au titre de l'article 700 du CPC, le Conseil constate que l'exécution provisoire est nécessaire et compatible avec la nature de l'affaire ; qu'elle n'est pas interdite par loi ; qu'il y a lieu de l'ordonner sur tout le jugement, hormis les dépens, ainsi qu'il est précisé à l'article 515 du CPC. Sur les montants réclamés au titre de l'article 700 du CPC : [G] [B] réclame un montant de 1 000,00 ? à ce titre. Aux termes de l'article 700 du CPC, dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou, à défaut, la partie perdante à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Pour faire valoir ses droits reconnus comme partiellement légitimes par le Conseil, [G] [B] s'est trouvé dans l'obligation de recourir aux services d'un avocat, et d'engager des frais non compris dans les dépens. Il y a lieu de faire droit à sa demande, à hauteur du montant réclamé de 1000?, majorité des intérêts légaux, en application de l'article 115361 du code civil. Le syndicat CGT SCHINDLER bénéficiera du même montant au titre de son intervention volontaire. Par suite, la demande formulée au même titre par la défenderesse est écartée. Sur les frais et dépens Compte tenu de l'issue de l'instance, il y a lieu de les laisser à la charge de la partie défenderesse, y compris l'intégralité des honoraires, émoluments et frais et de toute nature liés à une éventuelle exécution du présent jugement par voie d'huissier » ;
1. ALORS QUE l'employeur n'est pas tenu de consulter les institutions représentatives du personnel lorsque les modifications du règlement intérieur résultent exclusivement d'une injonction de l'inspection du travail à laquelle il est dans l'obligation de se conformer ; qu'au cas présent, la société Schindler faisait valoir que les modifications qu'elle avait apportées au règlement intérieur en 1985 résultaient exclusivement d'une injonction de l'inspection du travail à laquelle elle s'était conformée, en sorte qu'elle n'avait pas à consulter les institutions représentatives du personnel (conclusion Schindler p.12) ; qu'en reprochant à l'exposante de ne pas avoir consulté les institutions représentatives du personnel sur cette modification pour déclarer le règlement intérieur inopposable à M. [B], cependant que celle-ci résultait exclusivement d'une injonction de l'inspection du travail à laquelle elle n'avait fait que se conformer comme elle y était légalement tenue, la cour d'appel a violé les articles L. 1321-4 et L. 1322-2 du code du travail ;
2. ALORS QUE l'employeur n'a pas à modifier la date d'entrée en vigueur du règlement intérieur lorsqu'il procède à sa révision ; qu'en reprochant cependant à la société Schindler de ne pas avoir modifié la date d'entrée en vigueur du règlement intérieur à la suite de sa modification en 1985, cependant qu'elle n'y était pas légalement tenue, la cour d'appel a violé l'article L. 1321-4 du code du travail ;
3. ALORS, EN TOUT ETAT DE CAUSE, QUE seules les modifications du règlement intérieur dépourvues de date d'entrée en vigueur sont inopposables au salarié ; que les clauses du règlement intérieur qui n'ont pas été modifiées demeurent opposables au salarié ; qu'au cas présent, la société Schindler faisait valoir que les modifications non datées en 1985 ne se rapportaient pas aux règles disciplinaires, en sorte qu'elle avait pu valablement sanctionner M. [B] par un courrier de recadrage et des avertissements (conclusions Schindler pp. 10 à 15) ; qu'en déclarant l'intégralité du règlement intérieur inopposable à M. [B] aux motifs que les modifications qui lui avaient été apportées en 1985 ne comportaient pas de date d'entrée en vigueur, cependant que l'employeur se prévalait de clauses n'ayant pas été modifiées en 1985, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article L. 1321-4 du code du travail ;
4. ALORS QUE seules les notes de service ou autre document comportant des obligations générales et permanentes dans les matières mentionnées aux articles L. 1321-1 et L. 1321-2 du code du travail sont considérées comme des adjonctions au règlement intérieur ; que le document interne par lequel l'employeur se borne à rappeler le cadre législatif et règlementaire applicable dans l'entreprise en matière de sécurité ne crée pas une nouvelle obligation générale et permanente s'imposant au salarié, et ne constitue donc pas une adjonction ; qu'au cas présent, la société Schindler faisait expressément valoir que le manuel sécurité agence et la fiche consigne de sécurité C28 se limitaient à rappeler les lois, décrets et arrêtés s'imposant à la société en matière de sécurité et ne constituaient pas une adjonction au règlement intérieur (conclusions Schindler pp.13 à 15) ; que pour refuser à l'exposante le droit de se prévaloir de ces règlements de sécurité, la cour d'appel a estimé que ceux-ci constituaient des adjonctions au règlement intérieur pour lesquelles l'employeur n'avait pas consulté les représentants du personnel (arrêt p. 3 al. 4 à 6) ; qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher si ces documents créaient de nouvelles obligations générales et permanentes à la charge des salariés, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1321-5 du code du travail ;
5. ALORS, SUBSIDIAIREMENT, QUE pour être opposable au salarié, le règlement intérieur doit avoir été communiqué à l'inspecteur du travail ; qu'au cas présent, la société Schindler faisait valoir qu'elle avait communiqué le règlement intérieur modifié à l'inspection du travail ainsi qu'au greffe du conseil de prud'hommes le 20 février 1986, et versait au débat le courrier de transmission du règlement modifié à l'inspection du travail (conclusions pp. 10 à 15, production) ; qu'en estimant que le règlement intérieur n'était pas opposable à M. [B], sans rechercher si la société Schindler avait régulièrement communiqué à l'inspecteur du travail le règlement intérieur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L.1321-4 du code du travail ;
6. ALORS, SUBSIDIAIREMENT, QUE l'employeur est tenu de se conformer à la décision de l'inspection du travail exigeant la modification ou le retrait de dispositions du règlement intérieur ; qu'au cas présent, la société Schindler faisait valoir qu'elle avait modifié son règlement intérieur conformément aux injonctions de l'inspection du travail et versait aux débats de nombreux courriers de l'inspection du travail démontrant que le règlement modifié en 1985 était conforme à ces injonctions (conclusions pp. 10 à 15, productions) ; qu'en estimant que le règlement intérieur n'était pas opposable à M. [B], sans rechercher si la société Schindler ne l'avait pas modifié en 1985 conformément aux injonctions de l'inspection du travail, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1321-4 et L. 1322-1 du code du travail. Moyen produit par la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat aux Conseils, pour M. [B] et le syndicat CGT Schindler, demandeurs au pourvoi incident
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR infirmé le jugement déféré en ce qu'il a déclaré le règlement intérieur inopposable à tous les salariés.
AUX MOTIFS QUE l'appelante relève exactement que c'est en excédant leurs pouvoirs que les premiers juges ont déclaré le règlement intérieur inopposable à tous les salariés alors que seulement saisi d'un litige individuel auquel n'était attaché qu'un effet relatif, ce n'était qu'envers M. [B] que l'inopposabilité du texte considéré pouvait être retenue et ceci dans les limites des conséquences sur l'objet du litige.
ALORS QUE pour réformer le jugement en ce qu'il a déclaré le règlement intérieur inopposable à tous les salariés, l'arrêt retient que « seulement saisi d'un litige individuel auquel n'était attaché qu'un effet relatif, ce n'était qu'envers M. [B] que l'inopposabilité du texte considéré pouvait être retenue et ceci dans les limites des conséquences sur l'objet du litige » ; qu'en statuant ainsi, quand le syndicat intervenait pour la défense de l'intérêt collectif de la profession et sollicitait l'inopposabilité du règlement intérieur à l'ensemble des salariés, ce dont il résultait que les juges n'étaient pas seulement saisis d'un litige individuel, la cour d'appel a méconnu l'objet du litige et violé l'article du 4 du code de procédure civile.ECLI:FR:CCASS:2021:SO00801
SOC.
CF
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 23 juin 2021
Cassation partielle
M. CATHALA, président
Arrêt n° 801 FS-B sur 1re, 2e et 4e branches
Pourvoi n° Y 19-15.737
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 23 JUIN 2021
La société Schindler, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° Y 19-15.737 contre l'arrêt rendu le 26 mars 2019 par la cour d'appel de Colmar (chambre sociale, section B), dans le litige l'opposant :
1°/ à M. [G] [B], domicilié [Adresse 2],
2°/ au syndicat CGT Schindler, dont le siège est [Adresse 3],
défendeurs à la cassation.
M. [B] et le syndicat CGT Schindler ont formé un pourvoi incident contre le même arrêt.
La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Les demandeurs au pourvoi incident invoquent, à l'appui de leur recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Le Lay, conseiller, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Schindler, de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de M. [B] et du syndicat CGT Schindler, et l'avis de Mme Berriat, avocat général, après débats en l'audience publique du 11 mai 2021 où étaient présents M. Cathala, président, Mme Le Lay, conseiller rapporteur, Mme Leprieur, conseiller doyen, M. Pietton, Mme Mariette, MM. Barincou, Séguy, conseillers, Mme Duvallet, M. Le Corre, Mmes Prache, Marguerite, conseillers référendaires, Mme Berriat, avocat général, et Mme Lavigne, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Colmar, 26 mars 2019), M. [B], employé par la société Schindler depuis le 10 octobre 1994, en qualité de technicien de maintenance, a fait l'objet de trois sanctions disciplinaires les 9 septembre 2014, 23 mars 2015 et 30 mai 2016, prévues par le règlement intérieur entré en vigueur le 5 septembre 1983 et modifié en 1985, pour n'avoir pas respecté les règles de sécurité figurant dans le manuel de sécurité et la fiche de consignes C8.
2. Le salarié a saisi la juridiction prud'homale aux fins d'annulation de ces trois sanctions, le syndicat CGT Schindler s'étant joint à l'instance.
Examen des moyens
Sur le moyen du pourvoi incident
Enoncé du moyen
3. Le salarié et le syndicat font grief à l'arrêt d'infirmer le jugement en ce qu'il a déclaré le règlement intérieur inopposable à tous les salariés, alors « que pour réformer le jugement en ce qu'il a déclaré le règlement intérieur inopposable à tous les salariés, l'arrêt retient que " seulement saisi d'un litige individuel auquel n'était attaché qu'un effet relatif, ce n'était qu'envers M. [B] que l'inopposabilité du texte considéré pouvait être retenue et ceci dans les limites des conséquences sur l'objet du litige" ; qu'en statuant ainsi, quand le syndicat intervenait pour la défense de l'intérêt collectif de la profession et sollicitait l'inopposabilité du règlement intérieur à l'ensemble des salariés, ce dont il résultait que les juges n'étaient pas seulement saisis d'un litige individuel, la cour d'appel a méconnu l'objet du litige et violé l'article 4 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
4. La cour d'appel n'a pas méconnu l'objet du litige mais s'est prononcée sur sa compétence pour connaître de la demande du syndicat.
5. Le moyen ne saurait dès lors être accueilli.
Mais sur le moyen du pourvoi principal, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
6. L'employeur fait grief à l'arrêt d'annuler les sanctions disciplinaires notifiées au salarié les 9 septembre 2014, 23 mars 2015, et 30 mai 2016, de dire que les sanctions devront être retirées de son dossier individuel et qu'il sera interdit à l'employeur d'y faire référence, de déclarer le règlement intérieur inopposable au salarié, de le condamner à lui payer des dommages-intérêts ainsi qu'au syndicat, de le condamner à transmettre sous astreinte une copie de la décision et de le débouter de ses autres demandes, alors « que l'employeur n'est pas tenu de consulter les institutions représentatives du personnel lorsque les modifications du règlement intérieur résultent exclusivement d'une injonction de l'inspection du travail à laquelle il est dans l'obligation de se conformer ; qu'au cas présent, la société Schindler faisait valoir que les modifications qu'elle avait apportées au règlement intérieur en 1985 résultaient exclusivement d'une injonction de l'inspection du travail à laquelle elle s'était conformée, en sorte qu'elle n'avait pas à consulter les institutions représentatives du personnel ; qu'en reprochant à l'exposante de ne pas avoir consulté les institutions représentatives du personnel sur cette modification pour déclarer le règlement intérieur inopposable à M. [B], cependant que celle-ci résultait exclusivement d'une injonction de l'inspection du travail à laquelle elle n'avait fait que se conformer comme elle y était légalement tenue, la cour d'appel a violé les articles L. 1321-4 et L. 1322-2 du code du travail. »
Réponse de la Cour
Vu l'article L. 122-36, alinéa 1 du code du travail dans sa version postérieure à la loi n° 82-689 du 4 août 1982 et l'article L. 122-37 du code du travail dans sa version postérieure à la loi n° 82-689 du 4 août 1982 et antérieure à la loi n° 94-665 du 4 août 1994 :
7. Selon le premier de ces textes, le règlement intérieur ne peut être introduit qu'après avoir été soumis à l'avis du comité d'entreprise ou, à défaut, à l'avis des délégués du personnel ainsi que, pour les matières relevant de sa compétence, à l'avis du comité d'hygiène et de sécurité. Selon le second, l'inspecteur du travail peut à tout moment exiger le retrait ou la modification des dispositions contraires aux articles L. 122-34 et L. 122-35 du code du travail.
8. Pour annuler les sanctions disciplinaires, la cour d'appel a déclaré inopposable au salarié le règlement intérieur au motif que l'employeur s'était abstenu de consulter les représentants du personnel lors de l'introduction en 1985 de modifications.
9. En statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que les modifications apportées en 1985 au règlement intérieur initial, qui avait été soumis à la consultation des institutions représentatives du personnel, résultaient uniquement des injonctions de l'inspection du travail auxquelles l'employeur ne pouvait que se conformer sans qu'il y ait lieu à nouvelle consultation, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
Sur le moyen du pourvoi principal, pris en sa deuxième branche
Enoncé du moyen
10. L'employeur fait les mêmes griefs à l'arrêt, alors « que l'employeur n'a pas à modifier la date d'entrée en vigueur du règlement intérieur lorsqu'il procède à sa révision ; qu'en reprochant cependant à la société Schindler de ne pas avoir modifié la date d'entrée en vigueur du règlement intérieur à la suite de sa modification en 1985, cependant qu'elle n'y était pas légalement tenue, la cour d'appel a violé l'article L. 1321-4 du code du travail. »
Réponse de la Cour
Vu l'article L. 122-36, alinéas 2 et 4 du code du travail dans sa version postérieure à la loi n° 82-689 du 4 août 1982 et l'article R. 122-14 du même code, dans sa version postérieure au décret n° 83-160 du 3 mars 1983 et antérieure au décret n° 91-415 du 26 avril 1991 :
11. Selon le premier de ces textes, le règlement intérieur doit indiquer la date à partir de laquelle il entre en vigueur. Cette date doit être postérieure d'un mois à l'accomplissement des formalités de dépôt et de publicité. Les dispositions prévues aux alinéas précédents sont applicables en cas de modification ou de retrait des clauses du règlement intérieur.
12. Selon le second de ces textes, le délai prévu au deuxième alinéa de l'article L. 122-36 court à compter de la dernière en date des formalités de publicité et de dépôt définies aux articles R. 122-12 et R.122-13.
13. Pour annuler les sanctions disciplinaires et déclarer inopposable au salarié le règlement intérieur, la cour d'appel a encore relevé que l'employeur s'était abstenu de modifier la date d'entrée en vigueur de celui-ci, restée fixée en 1983.
14. En statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que les diligences prévues à l'article L. 122-36 du code du travail avaient été accomplies, de sorte que le règlement intérieur modifié entrait en vigueur après la dernière date d'accomplissement des formalités de dépôt et de publicité, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
Et sur le moyen du pourvoi principal, pris en sa quatrième branche
Enoncé du moyen
15. L'employeur fait les mêmes griefs à l'arrêt, alors « que seules les notes de service ou autre document comportant des obligations générales et permanentes dans les matières mentionnées aux articles L. 1321-1 et L. 1321-2 du code du travail sont considérées comme des adjonctions au règlement intérieur ; que le document interne par lequel l'employeur se borne à rappeler le cadre législatif et réglementaire applicable dans l'entreprise en matière de sécurité ne crée pas une nouvelle obligation générale et permanente s'imposant au salarié, et ne constitue donc pas une adjonction ; qu'au cas présent, la société Schindler faisait expressément valoir que le manuel sécurité agence et la fiche consigne de sécurité C28 se limitaient à rappeler les lois, décrets et arrêtés s'imposant à la société en matière de sécurité et ne constituaient pas une adjonction au règlement intérieur ; que pour refuser à l'exposante le droit de se prévaloir de ces règlements de sécurité, la cour d'appel a estimé que ceux-ci constituaient des adjonctions au règlement intérieur pour lesquelles l'employeur n'avait pas consulté les représentants du personnel ; qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher si ces documents créaient de nouvelles obligations générales et permanentes à la charge des salariés, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1321-5 du code du travail. »
Réponse de la Cour
Vu les articles L. 1321-1 et L. 1321-5 alinéa premier du code du travail :
16. Selon le premier de ces articles, le règlement intérieur est un document écrit par lequel l'employeur fixe les mesures d'application de la réglementation en matière de santé et de sécurité dans l'entreprise ou l'établissement, notamment les instructions prévues à l'article L. 4122-1 ;
17. Selon le second, les notes de service ou tout autre document comportant des obligations générales et permanentes dans les matières mentionnées aux articles L. 1321-1 et L. 1321-2 sont, lorsqu'il existe un règlement intérieur, considérées comme des adjonctions à celui-ci. Ils sont, en toute hypothèse, soumis aux dispositions du titre intitulé « Règlement intérieur ».
18. Le document interne par lequel l'employeur se borne à rappeler les dispositions législatives et réglementaires applicables dans l'entreprise en matière de sécurité ne crée pas de nouvelles obligations générales et permanentes s'imposant aux salariés et ne constitue donc pas une adjonction au règlement intérieur.
19. Pour annuler les sanctions disciplinaires prononcées à l'encontre du salarié, la cour d'appel a retenu également que celles-ci étaient fondées sur l'inobservation du manuel de sécurité et de la fiche de sécurité C28, et que ces documents devaient être considérés comme une adjonction au règlement intérieur requérant dès lors les formalités de consultation et de publicité prévues à l'article L. 1321-4 du code du travail, lesquelles n'avaient pas été effectuées.
20. En se déterminant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si le manuel de sécurité agence et la fiche de sécurité C28 créaient de nouvelles obligations générales et permanentes s'imposant aux salariés, la cour d'appel a privé sa décision de base légale.
Portée et conséquences de la cassation
21. En application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation à intervenir sur la quatrième branche du moyen du pourvoi principal emporte cassation par voie de conséquence du chef de dispositif par lequel la cour d'appel a confirmé le jugement en ce qu'il a jugé inopposables aux salariés de l'entreprise Schindler le manuel de sécurité agence et la fiche C28.
22. La cassation emporte également cassation des chefs de dispositif de l'arrêt relatifs à l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :
REJETTE le pourvoi incident ;
CASSE ET ANNULE, sauf en ce que l'arrêt confirme le jugement en sa disposition ayant jugé le syndicat recevable et bien-fondé en son intervention volontaire et en ce qu'il infirme le jugement ayant déclaré le règlement intérieur inopposable à tous les salariés, l'arrêt rendu le 26 mars 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Colmar ;
Remet, sauf sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Metz ;
Condamne M. [B] et le syndicat CGT Schindler aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois juin deux mille vingt et un. MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat aux Conseils, pour la société Schindler, demanderesse au pourvoi principal
Il est fait grief à l'arrêt partiellement infirmatif attaqué d'AVOIR annulé les sanctions disciplinaires notifiées à Monsieur [B] les 9 septembre 2014, 23 mars 2015 et 30 mai 2016, d'AVOIR dit que ces sanctions devront être retirées de son dossier individuel et qu'il sera interdit à l'employeur d'y faire référence, d'AVOIR déclaré le règlement intérieur inopposable à M. [B], d'AVOIR condamné la société Schindler à payer au syndicat CGT Schindler la somme de 1.000 euros à titre de dommages et intérêts et à M. [B] la somme de 1.000 euros, nets de CSG et de CRDS et majorés des intérêts légaux en application de l'article 1153-1 du code civil à titre de préjudice subi, ainsi que d'AVOIR condamné la société Schindler à transmettre sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter du 15ème jour suivant la notification du jugement, une copie intégrale de la présente décision aux différents services de l'inspection du travail compétents - inspection du travail compétente pour le siège de la Société Schindler - inspection du travail compétente pour le lieu de travail de Monsieur [B], aux membres du comité central d'entreprise de la société Schindler et du comité d'établissement dont ressort Monsieur [B], et d'AVOIR débouté la société Schindler de ses autres demandes ;
AUX MOTIFS QUE « Attendu que M. [B], salarié de la SA Schindler France a introduit le 31 juillet 2016 une action aux fins d'annulation de trois sanctions disciplinaires qui lui ont été infligées, à savoir un recadrage le 9 septembre 2014 et deux avertissements les 23 mars 2015 et 30 mai 2016, et il a sollicité réparation du préjudice en résultant ; Que le syndicat est intervenu à se côtés pour voir réparer une atteinte à l'intérêt collectif de la profession ; Attendu - et les premiers juges l'ont du reste exactement fait ressortir - que la solution du litige s'agissant du bien-fondé des sanctions contestées, se trouve subordonnée à l'opposabilité à M. [B] du règlement intérieur de l'appelante qui occupe plus de vingt salariés ; Que certes l'appelante relève exactement que c'est en excédant leurs pouvoirs que les premiers juges ont déclaré le règlement intérieur inopposable à tous les salariés alors que seulement saisi d'un litige individuel auquel n'est attaché qu'un effet relatif, ce n'était qu'envers M. [B] que l'inopposabilité du texte considéré pouvait être retenue et ceci dans les limites des conséquences sur l'objet du litige ; Que sur ce point le jugement devra être réformé ; Attendu que sur les sanctions c'est en vain que l'appelante fait valoir que la validité ou pas du règlement intérieur n'a pas pour conséquence de la priver du droit de mettre en oeuvre son pouvoir disciplinaire inhérent à son pouvoir de direction ; Qu'en effet une sanction disciplinaire autre que le licenciement - et pour ce dernier l'employeur tient son pouvoir de l'article L 1232-1 du code du travail - ne peut être prononcé contre un salarié par un employeur occupant au moins vingt salariés que si elle est prévue par le règlement intérieur prescrit par l'article L 1311-2 du code du travail, ce qui est en l'espèce le cas ; Qu'il s'en suit que la validité de fond de la sanction est conditionnée par celle du règlement intérieur qui la prévoit ; Attendu que c'est à l'époque des sanctions litigieuses le règlement entré en vigueur le 5 septembre 1983 modifié en 1986 qui pouvait trouver à s'appliquer ; Que les premiers juges ont exactement constaté au vu des pièces du dossier - décrites sans dénaturation - et de l'aveu même des appelantes contenu dans leurs écritures, que l'employeur s'était abstenu d'abord de procéder aux consultations des représentants du personnel lors de l'introduction des modifications du règlement en 1985, puis de modifier la date d'entrée en vigueur de celui-ci, celle-ci sur le texte affiché demeurait en 1983 ; Que l'appelante, comme le font avec pertinence valoir les intimés, a ainsi méconnu les dispositions de l'article L 1321-4 du code du travail dans sa version alors en vigueur sous la codification L 122-36 du même code, et c'est à tort, dès lors que ce texte dispose de manière générale sans introduire d'exceptions aux obligations de consultation et de fixation de la date d'entrée en vigueur qu'il impose, que celle-là prétend se justifier en soulignant que les modifications de 1985 n'étaient pas afférentes au pouvoir disciplinaire, ou qu'elles avaient été ordonnées par l'inspection du travail ; Qu'il en est de même de la circonstance - et le syndicat le fait avec pertinence valoir - que le Manuel de Sécurité Agence (MSA) et la fiche de sécurité C28, au contraire du prescrit de l'article L 1321-5 (anciennement codifié L 122-39) du code du travail n'ont pas été considérés par l'appelante comme des adjonctions au règlement intérieur et donc ces textes n'ont fait l'objet d'aucune des consultations et publicité ( affichage, entrée en vigueur) prévues pour ce dernier, ce que reconnaît l'appelante ; Que pourtant c'est sur le fondement de ces réglementations de sécurité que M. [B] a été sanctionné ; Attendu qu'il s'évince du tout que le règlement intérieur et les notes de service qui le complètent ne peuvent produire effet que si l'employeur a accompli les diligences prévues par l'article L 1321-4 du code du travail qui ont vocation à assurer de manière certaine la connaissance par les salariés des obligations qui en découlent et des sanctions de leur méconnaissance, en sorte qu'à défaut, comme en l'espèce lesdites dispositions doivent être déclarées inopposables à M. [B] et elles ne peuvent fonder les reproches émis contre lui pour ses prétendus manquements à celles-ci, ce qui fait encourir l'annulation aux trois sanctions dont s'agit ; Qu'en conséquence c'est aussi à tort que l'appelante soutient que l'article L 1322-4 du code du travail limiterait le droit d'un salarié à invoquer l'inopposabilité du règlement aux manquements qu'il énumère (L 1321'1, 1321-3 et 1321-6) au rang desquels ne figure pas l'article L 1321-4 du code du travail ; Attendu que le jugement sera confirmé de ce dernier chef ainsi que sur les dommages et intérêts alloués à M. [B] en réparation de son entier préjudice ; Attendu qu'en revanche c'est l'infirmation du jugement qui s'impose en ce qu'il a condamné sous astreinte la SA Schindler à transmettre la copie du jugement aux représentants du personnel et à l'Inspection du Travail ; Que ce faisant les premiers juges ont ajouté à l'article 1322-4 du code du travail et ils ont donc inexactement appliqué ce texte ; Qu'en effet la transmission prévue par ce texte n'est prescrite que si le règlement intérieur est contraire aux articles L 1321-1, 1321-3 et 1321-6 du code du travail, ce qui n'est pas le cas en l'espèce, en sorte qu'en présence d'un manquement au prescrit de l'article L 1321-4 tel qu'il a été précédemment constaté la transmission non prévue par l'article L 1322-4 ne pouvait être ordonnée ; Attendu que la recevabilité de l'action du syndicat n'est pas contestée ; Que celle-ci est bien fondée alors que les manquements précédemment constatés ont porté atteinte aux intérêts collectifs de la profession ; Que cependant les premiers juges ont surestimé l'étendue du préjudice en résultant ; Que la condamnation de la SA Schindler France à payer au syndicat la somme de 1000 euros à titre de dommages et intérêts remplira celui-ci de son droit à réparation ; Que pour le surplus le syndicat verra sa demande d'indemnisation rejetée, faute de preuve suffisante d'un préjudice distinct de celui-ci dessus réparé tiré d'un prétendu abus de pouvoir ; Attendu que le jugement sera confirmé sur les frais irrépétibles et les dépens ; Que la SA Schindler France qui succombe principalement sera condamnée aux dépens d'appel ainsi qu'à payer à M. [B] la somme de 2500 euros pour frais irrépétibles d'appel et toutes les autres demandes à ce titre seront rejetées » ;
ET AUX MOTIFS DES PREMIERS JUGES, EN LES SUPPOSANT ADOPTES, QUE « (?); L'article L. 1333-1 du code du travail prévoit en effet que : en cas de litige, le conseil de prud'hommes apprécie la régularité de la procédure suivie et si les faits reprochés au salarié sont de nature à justifier une sanction. L'employeur fournit au conseil de prud'hommes les éléments retenus pour prendre la sanction. Au vu de ces éléments et de ceux qui sont fournis par le salarié à l'appui de ses allégations, le conseil de prud'hommes forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié. Mais c'est avec raison que le syndicat CGT fait valoir que le cadre du présent litige, la question de la régularité de la procédure ? c'est-àdire le respect de l'ensemble des garanties de fond prévues par le législateur ? doit être examinée par le Conseil. Et que parmi ces garanties figure le règlement intérieur, qui détermine l'exercice du pouvoir disciplinaire de l'employeur dans toute entreprise de plus de 20 salariés : « mais attendu, d'une part, qu'une sanction disciplinaire autre que le licenciement ne peut être prononcée contre un salarié par un employeur employant habituellement au moins vingt salariés que si elle est prévue par le règlement intérieur prescrit par l'article L. 1311-2 du code du travail ; » (Cass. Soc. 23 mars 2017, n° 17-23.090) La question du règlement intérieur se trouve en conséquence au coeur du présent litige. De son existe, ou de son inexistence au sein de la SA Schindler France, de son opposabilité au salarié [G] [B], dans le cadre des dispositions de l'article L. 1321-4 du code du travail, se déduire la possibilité, ou l'impossibilité, pour l'employeur de sanctionner un salarié de l'entreprise. La SA Schindler France fait plaider in limine litis que le conseil de prud'hommes n'est pas compétent pour statuer sur le point de savoir si un règlement intérieur contrevient aux dispositions de l'article L. 1321-4 du code du travail, que le juge judiciaire (conseil de prud'hommes ou TGI) n'est pas compétent lorsque le règlement intérieur a fait l'objet d'une décision administrative, et qu'en conséquence, le conseil de prud'hommes doit considérer qu'il est incompétent pour statuer sur les demandes qui lui sont faites, au profit du Tribunal Administratif. La cour de cassation a posé le principe suivant : « Mais attendu que le règlement intérieur est un acte juridique de droit privé et que le contrôle de légalité dévolu à l'inspecteur du Travail par l'article L. 122-37, alinéa 1er, du Code du travail, ne saurait lui ôter sa nature pour le transformer en un acte administratif ; qu'il appartient aux juges de l'ordre judiciaire de connaître de la contestation qui s'élève sur la validité de ses dispositions, l'article L. 122-37, alinéa 3, de ce Code qui reconnaît au conseil de prud'hommes la faculté, à l'occasion d'un litige individuel, d'écarter une clause illicite, n'interdisant pas à la juridiction de droit commun de l'ordre judiciaire de connaître d'une action principale en annulation d'une ou plusieurs clauses dudit règlement ; qu'il en résulte que la cour d'appel a distingué à bon droit les clauses modifiées à la suite de la décision de l'inspecteur du Travail, de celles au sujet desquelles l'autorité administrative ne s'est pas prononcée » (Cass. soc., 16 déc. 1992,n° 90-14.337) Ce principe a été repris dans un arrêt très récent de la cour d'appel de Versailles, qui après avoir rappelé que : le règlement intérieur dans une entreprise est un acte juridique de droit privé et que le contrôle de légalité dévolu à l'inspecteur du travail ne saurait lui ôter sa nature (?), précise que : cependant, dans la présente instance le syndicat CGT ne met pas en cause les clauses du règlement intérieur de 1983 mais soulève la question de l'opposabilité de ce règlement intérieur aux salariés pour nonrespect des dispositions de l'article L. 1321-4 du code du travail. Il s'en suit que le juge judiciaire est compétent pour apprécier les demandes du syndicat CGT et la décision du premier juge qui s'est déclaré incompétent au profit du juge administratif sera infirmée. (cour d'appel de versailles, 14ème chambre, 16 novembre 2017, RG 17/04228) Certes l'arrêt ci-dessus a été rendu dans le cadre d'un litige de droit collectif opposant, devant le juge des référés, le syndicat CGT de SCHINDLER à la SA SCHINDLER. Mais la solution adoptée est applicable pour « le juge judiciaire », qu'il s'agisse d'un TGI ou d'un conseil de prud'hommes. L'exception d'incompétence du conseil de prud'hommes au profit du juge administratif soulevée par la SA SCHINDLER France est rejetée. Sur la mise en place d'un règlement intérieur et son opposabilité à [G] [B] : le conseil remarque qu'avant tout examen éventuel des arguments et éléments de preuve produits par l'employeur pour fonder ses décisions de sanctionner le salarié, il lui appartient d'examiner et s'assurer du respect par l'employeur des obligations légales et règlementaires lui incombant avant de pouvoir faire usage de son pouvoir disciplinaire. Et que pour pouvoir exercer son pouvoir disciplinaire, l'employeur d'une entreprise de plus de 20 salariés doit avoir mis en place un règlement intérieur. Pour être opposable au salarié, la mise en place dudit règlement doit avoir respecté les formalités de consultations des IRP, de dépôt et de publicité. L'article L. 1321-4 du code du travail prévoit en effet que : Le règlement intérieur ne peut être introduit qu'après avoir été soumis à l'avis du comité d'entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel ainsi que, pour les matières relevant de sa compétence, à l'avis du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail. Le règlement intérieur indique la date de son entrée en vigueur. Cette date doit être postérieure d'un mois à l'accomplissement des formalités de dépôt et de publicité. En même temps qu'il fait l'objet des mesures de publicité, le règlement intérieur, accompagné de l'avis du comité d'entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel et, le cas échéant, du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail, est communiqué à l'inspecteur du travail. Ces dispositions s'appliquent également en cas de modification ou de retrait des clauses du règlement intérieur. Le Conseil reprend l'historique des faits concernant le règlement intérieur, tel que proposé par la partie intervenante, et non contesté quant aux dates évoqués : règlement intérieur de l'établissement RCS Mulhouse : date d'entrée en vigueur : 1er septembre 1983 ; règlement intérieur des établissements RCS Vélizy-Île-de-FranceRouen-Toulouse? date de dépôt inspection du travail [Localité 1] : 02 août 1983 ; date d'entrée en vigueur : 05 septembre 1983 ; 25 juillet 1985 : décision modification de l'inspection du travail [Localité 1] 23 septembre 1985 : courrier de réponse de la direction Schindler à la décision modificative 27 septembre 1985 : le recours hiérarchique de la société Schindler 23 janvier 1986 : décision du directeur régional du travail Île-de-France 20 février 1986 : dépôt du règlement intérieur modifié auprès de l'inspection du travail et du greffe du conseil de prud'hommes de Versailles 17 juin 2004 : décision du TGI de Versailles annulant la mise en place de la charte éthique et rappelant les formalités obligatoires d'adoption d'un règlement intérieur. 26 octobre 2010 et 24 novembre 2010 : arrêts de la chambre sociale de la Cour de cassation relatifs à l'inscription dans le règlement intérieur de la durée maximale de la mise à pied disciplinaire 05 septembre 2014 : cinq ordonnances de référés CPH Versailles rappelant l'illicéité des sanctions chez Schindler (n° de RG : R 14/00080, R 14/00082, R 14/00083, R 14/00148 et R 14/00149) 12 septembre 2014 : second projet de règlement intérieur Schindler intégrant la jurisprudence concernant la durée des mises à pied et les autres dispositions obligatoires : date d'entrée en vigueur prévue : 16 mars 2015 ; 11 mars 2015 : courrier de l'inspection du travail signalant le défaut de la procédure de dépôt auprès de la Direccte ? la direction laisse le règlement intérieur 2015 invalidé à l'affichage. 23 juin 2015 : deux arrêts de la cour d'appel de Versailles, déclarant le règlement intérieur Schindler 1983 illicite (arrêts n° 400/15 et 401/15). Depuis décembre 2015 : constats de carence d'affichage ou d'affichage du RI invalidé dans plusieurs agences Schindler ? constats réalisés par les élus de la CGT Schindler. 17 octobre 2016 : constat de carence agence [Localité 2]. 26 mai 2016 : six arrêts de la cour d'appel de Versailles, déclarant le règlement intérieur Schindler 1983 illicite (arrêts n° 187-2016 à 192-2016). 21 octobre 2016 et 24 janvier 2017 : courriers de l'inspection du travail concluant à l'inopposabilité du règlement intérieur de 1983. 13 avril 2017 : courrier d'observations de l'inspection du travail confirmant entre autres l'absence de formalités de dépôt et de publicité des consignes de sécurité. Le conseil remarque qu'outre les nombreuses décisions de justice intervenues, l'inspection du travail, voire la Direccte, ont été saisies par les différentes parties au litige. L'inspection du travail a répondu, notamment le 21 octobre 2016, le 24 janvier 2017 et le 13 avril 2017. Le courrier du 21 octobre 2016, adressé au syndicat CGT par l'inspectrice du travail [P] [H], reprend l'intégralité du courrier que cette dernière a adressé le même jour au représentant de la SA SCHINDLER France, M. [W]. Il est adressé, au chapitre 2 « concernant le règlement intérieur » : « A mon arrivée dans vos locaux le 3 octobre 2016, je vous ai demandé une copie du règlement intérieur affiché et en vigueur dans l'entreprise. Il s'agit d'un document de 1983 dont l'entrée en vigueur est « fixée au 5 septembre 1983 » selon sa partie V. Cependant, il ressort de nos échanges que, sans même parle de date précise, l'année d'entrée en vigueur ne correspond pas à l'année dans laquelle cette version du règlement intérieur a été affichée. En effet : par une décision de l'inspectrice du travail du 25 juillet 1985, le règlement intérieur de la société SCHINDLER, alors dénommée R.C.S qui avait transmis à l'administration le 2 août 1983, a été modifié en plusieurs de ses articles : vous m'avez fourni une copie de la réponse de la direction du personnel de R.C.S datée du 23 septembre 1985 ; il y est indiqué que des articles du règlement intérieur de 1983 sont modifiés ou supprimés dans le sens demande par l'inspection du travail ; le texte affiché dans vos locaux comporte clairement ces modifications réalisées en 1985, postérieurement à la décision de l'inspectrice du travail (par exemple, voir article 4c ou l'article 5) Après avoir réalisé ces modifications, la direction de l'entreprise n'a cependant pas modifié la date d'entrée en vigueur de la nouvelle version du règlement intérieur qui est restée fixée au 5 septembre 1983 ; les formalité de dépôt du nouveau texte ne semblent pas non plus avoir été réalisées (à l'inspection du travail et au greffe des prud'hommes). Or, la modification d'un règlement intérieur à la suite d'une décision de l'inspection du travail entraîne obligatoirement un nouveau dépôt et un nouvel affichage, ce qui doit également donner lieu à une nouvelle date d'entrée en vigueur. Ceci avait été précisé dès 1983 dans la circulaire DRT n° 5-83 du 15 mars 1983. C'est aussi ce dont disposent les articles L. 1321-4 du code du travail. La jurisprudence est venue préciser qu'en cas de non-respect des conditions d'entrée en vigueur du règlement intérieur dont fait partie les formalités de de dépôt et de publicité, en particulier en l'absence de communication du texte modifié à l'inspection du travail, celui-ci est sans effet et inopposable aux salariés (voir Cass. soc. 9 mai 2012, n° 11-13687, publié au Bulletin « attendu que le règlement intérieur et les notes de services qui le complètent ne pouvant produire effet que si l'employeur a accompli les diligences prévues par l'article L. 1321-4 du code du travail »). En conséquence, j'en conclue, sous réserve de l'appréciation souveraine des juges, que votre règlement intérieur de 1983 est sans effet et n'est pas applicable aux salariés ». L'inspection du travail renouvelle son analyse par courrier du 21 janvier 2017 et précise : « ainsi sous réserve de l'appréciation souveraine des juges du fond, votre règlement intérieur modifié, bien que déposé selon vos assertions le 20 février 1986, ne fixe pas sa nouvelle date d'entrée en vigueur, qui devait être postérieure d'un mois à l'accomplissement des formalités de dépôt et de publicité, est par conséquent susceptible d'être jugé sans effet et inapplicable aux salariés ». Le conseil de prudhommes n'est pas lié par les appréciations de l'inspection du travail, fussent-elles confirmées par la voie hiérarchique. Pas plus qu'il n'est lié par les abondantes produites, qui toutes concluent à l'illicéité et l'inopposabilité du règlement intérieur au sein de la SA SCHINDLER France, qu'il s'agisse des nombreuses décisions de la cour d'appel de Versailles, dont deux au moins on été confirmés, certes de façon incidente mais néanmoins explicite, dans deux arrêts du 4 mai 2017 de la chambre sociale de la cour de cassation (Cass. Soc. 4 mai 2017, n° 15-254400 et n° 15-24401) ll ressort des propres constatations du conseil de céans, ainsi qu'il a déjà jugé dans une affaire précédente (VESAPHONG c/SA SCHINDLER France, 12 septembre 2017, RG 16/583), que la SA SCHINDLER France est dans l'incapacité de rapporter la preuve que le règlement intérieur est affiché de façon régulière, qu'il a bénéficié des publicités et formalités de dépôt auprès de l'inspection du travail. Et y rajoutant, il est remarqué que la SA SCHINDLER France n'apporte strictement aucun élément, autre que ses propres allégations, qui répondraient de façon pertinente aux recommandations, voire injonctions, de l'inspection du travail. En vain produirait-elle, le 20 novembre 2017, soit 40 jours après la clôture des débats et sans autorisation du président d'audience sous forme d'une note en délibéré, une copie d'un arrêt de la cour d'appel de Versailles du 20 novembre 2017. Car cet arrêt, s'il infirme une ordonnance du CPH de Versailles disant n'y avoir lieu à référé sur les demandes présentées par la CGT, en raison de l'absence d'évidence de l'existence d'un trouble manifestement illicite, se déclare tout de même compétent pour statuer sur les demandes de la CGT, et ne préjuge pas du fond. Il ressort de l'ensemble des éléments du dossier, en particulier des interventions de l'inspection du travail et des jurisprudences ci-dessus évoquées, que le Conseil forme sa conviction qu'il y a eu, de la part de la SA SCHINDLER France, violation des garanties de fond. L'art L. 1333-2 précité prévoit que le conseil de prud'hommes peut annuler une sanction irrégulière en la forme ou injustifiée ou disproportionnée à la faute commise. La carence de l'employeur dans la réalisation des obligations définies par les articles L. 1311-2, L. 1321-4 et L. 1321-5 du code du travail doit conduire à l'annulation des sanctions, sans qu'il soit besoin d'examiner les arguments de l'employeur cités à l'appui de sa décision. En cas de carence de l'employeur, l'annulation n'est plus une simple faculté, mais une obligation. C'est ce qu'a déjà jugé la Cour de cassation concernant : l'absence des formalités de dépôt et de publicité : « qu'en se déterminant ainsi, alors que le règlement intérieur ne peut produire effet que si l'employeur a accompli les diligences prévues par l'article L. 1321-4 du code du travail, la cour d'appel, qui n'a pas recherché si le règlement intérieur invoqué par l'employeur avait été communiqué à l'inspecteur du travail accompagné de l'avis du comité d'entreprise, ou à défaut des délégués du personnel, a privé sa décision de base légale ; » (Cass. soc. 9 mai 2012, n° 11-13.687, Cass. soc. 06 mars 2017, n° 15-26.356) ? L'absence de durée maximale de la mise à pied : (Cass. Soc. 26 oct. 2010, n° 09-42.740, 24 nov. 2010, n° 09-42.267 et 7 janv. 2015, n° 13-15.630) ; - L'absence de mise en place du règlement intérieur : « mais attendu, d'une part, qu'une sanction disciplinaire autre que le licenciement ne peut être prononcée contre un salarié par un employeur employant habituellement au moins vingt salariés que si elle est prévue par le règlement intérieur prescrit par l'article L. 1311-2 du code du travail ; » (Cass. Soc. 23 mars 2017, n° 15-23.090) C'est avec pertinence que la partie intervenante rappelle que la violation d'une liberté fondamentale emporte nullité de toute sanction, quelle qu'elle soit. La seule violation emporte par elle-même annulation de la sanction. Il s'en suit que la sanction de l'infraction clairement constituée par les manquements de l'employeur à l'encontre des garanties de fond prévues par le législateur ne peut être que l'annulation pleine et entière de toutes les sanctions prises envers [G] [B] sur la base d'un règlement intérieur inopposable. S'agissant des documents intitulés : - MSA (Manuel Sécurité Agence) ; - Fiche de consigne de sécurité C28 (bloque-porte), le conseil juge que c'est avec raison que les demandes font valoir qu'i résulte de la combinaison des articles L. 1321-1, 1er alinéa, et L. 1321-5 du code du travail que les documents prescrivant des mesures générales et permanentes en matière de sécurité sont considérés comme des adjonctions au règlement intérieur. Et que dès lors, lesdites consignes doivent respecter les mesures d'entrée en vigueur prescrites pour le règlement intérieur, conformément à l'art L. 1321-5 du même code. La Direccte confirme cette analyse dans le courrier d'observations rédigé en accompagnement de la décision administration de modification du règlement intérieur devant initialement entrer en vigueur le 18 avril 2017. L'inspecteur du travail y rappelle la nécessité de procéder aux formalités de dépôt et de publicité des consignes de sécurité, comme en dispose l'art L. 1321-5 du code du travail. Dès lors, à l'instar du règlement intérieur, le conseil ne peut que constater l'absence de toute justification de la part de l'employeur de l'accomplissement des formalités de dépôt et de publicité des consignes de sécurité. Il y a lieu, là encore, de constater les carences de dépôt et de publicité du MSA et de la consigne de sécurité C28, et par suite, de juger le MSA et la fiche C28 inopposables au salarié pour violation des articles L. 1321-1 1er alinéa, L. 1321-4 et L. 1321-5 du code du travail. Les sanctions prises au visa des documents MSA et C28, seront, pour les mêmes raisons développées ci-dessus, annulées. Il y a lieu, de faire obligation à la SA SCHINDLER FRANCE d'annuler les 3 sanctions prises à l'encontre de [G] [B], et d'en supprimer toute mention dans le dossier individuel du salarié. La SA SCHINDLER FRANCE sera condamnée à payer à [G] [B] la somme de 1 000 ? réclamée à titre de préjudice moral subi du fait de ces sanctions abusives. Sur l'intervention volontaire du syndicat CGT SCHINDLER : Le Conseil juge l'intervention recevable, tant sur la forme (attestation de mandat et de pouvoir délivrée à M. [W] [L] par M. [M], secrétaire général du syndicat, statuts déposés en mairie et produits devant le Conseil, extrait des délibérations de la commission exécutive également produit) que sur le fond. Le Conseil a déjà relevé que la SA SCHINDLER FRANCE est dans l'incapacité de rapporter la preuve que le règlement intérieur est affiché de façon régulière, qu'il a bénéficié des publicités et formalités de dépôt auprès de l'inspection du travail. La SA SCHINDLER FRANCE a démontré, dans le présent dossier, mais également dans de nombreux autres, une certaine constance à ne pas vouloir se conformer aux recommandations de l'inspection du travail, et à ne pas tirer les conséquences de ses manquements en matière de publicités et de formalités de dépôt du règlement intérieur, et des documents s'y rattachant. S'il n'appartient pas au Conseil de dire que cette constance doit s'analyser en une sorte d'acharnement, comme le suggère le syndicat CGT, il y a lieu de constater par contre une persistance manifeste et délibérée dans le non-respect des obligations imposées par les articles L. 1321-4 et L 1321-5 et dans la violation des garanties de fond en résultant. Le Conseil juge qu'il y a indiscutablement une atteinte grave, de la part de la SA SCHINDLER FRANCE, aux intérêts collectifs de la profession, qui justifie de plus fort l'intervention et les demandes du syndicat CGT. De ce fait la demande du syndicat CGT est jugée comme étant amplement justifiée, et il y a lieu de faire droit à la demande conformément à l'art 12311 du code civil, et de condamner la SA SCHINDLER FRANCE à payer au syndicat CGT la somme réclamée de 10 000,00 ?. De la même façon, la SA SCHINDLER FRANCE sera condamnée à payer au syndicat CGT une somme de 5 000,00 ? pour abus de pouvoir. Sur la communication de la décision aux services de l'inspection du travail et aux élus de l'entreprise : L'article L 1322-4 du code du travail prévoit que : « lorsque, à l'occasion d'un litige individuel, le conseil de prud'hommes écarte l'application d'une disposition contraire aux articles L. 1321-1 à L. 1321-3 et L. 1321-6, une copie du jugement est adressée à l'inspecteur du travail et aux membres du comité d'entreprise ou, à défaut, aux délégués du personnel, ainsi qu'aux membres du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail pour les matières relevant de sa compétence. » Le Conseil juge qu'en raison de l'attitude la SA SCHINDLER FRANCE une copie de cette décision devra être transmise par l'employeur aux différents services de l'inspection du travail compétents : inspection du travail compétente pour le siège ; inspection du travail compétente pour le lieu de travail de [G] [B]. Qu'une copie de la décision sera également transmise aux membres du comité central d'entreprise de la société Schindler ainsi qu'aux membres du comité d'établissement dont ressort [G] [B]. Pour assurer l'effectivité de cette transmission, le Conseil assortira l'obligation d'une astreinte fixée à 500? par jour de retard à compter du 15ème jour suivant l'astreinte ordonnée, en application de l'article L. 131-3 du code des procédures civiles d'exécution. Sur l'exécution provisoire du jugement : Concernant les dommages-intérêts ainsi que les sommes attribuées au titre de l'article 700 du CPC, le Conseil constate que l'exécution provisoire est nécessaire et compatible avec la nature de l'affaire ; qu'elle n'est pas interdite par loi ; qu'il y a lieu de l'ordonner sur tout le jugement, hormis les dépens, ainsi qu'il est précisé à l'article 515 du CPC. Sur les montants réclamés au titre de l'article 700 du CPC : [G] [B] réclame un montant de 1 000,00 ? à ce titre. Aux termes de l'article 700 du CPC, dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou, à défaut, la partie perdante à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Pour faire valoir ses droits reconnus comme partiellement légitimes par le Conseil, [G] [B] s'est trouvé dans l'obligation de recourir aux services d'un avocat, et d'engager des frais non compris dans les dépens. Il y a lieu de faire droit à sa demande, à hauteur du montant réclamé de 1000?, majorité des intérêts légaux, en application de l'article 115361 du code civil. Le syndicat CGT SCHINDLER bénéficiera du même montant au titre de son intervention volontaire. Par suite, la demande formulée au même titre par la défenderesse est écartée. Sur les frais et dépens Compte tenu de l'issue de l'instance, il y a lieu de les laisser à la charge de la partie défenderesse, y compris l'intégralité des honoraires, émoluments et frais et de toute nature liés à une éventuelle exécution du présent jugement par voie d'huissier » ;
1. ALORS QUE l'employeur n'est pas tenu de consulter les institutions représentatives du personnel lorsque les modifications du règlement intérieur résultent exclusivement d'une injonction de l'inspection du travail à laquelle il est dans l'obligation de se conformer ; qu'au cas présent, la société Schindler faisait valoir que les modifications qu'elle avait apportées au règlement intérieur en 1985 résultaient exclusivement d'une injonction de l'inspection du travail à laquelle elle s'était conformée, en sorte qu'elle n'avait pas à consulter les institutions représentatives du personnel (conclusion Schindler p.12) ; qu'en reprochant à l'exposante de ne pas avoir consulté les institutions représentatives du personnel sur cette modification pour déclarer le règlement intérieur inopposable à M. [B], cependant que celle-ci résultait exclusivement d'une injonction de l'inspection du travail à laquelle elle n'avait fait que se conformer comme elle y était légalement tenue, la cour d'appel a violé les articles L. 1321-4 et L. 1322-2 du code du travail ;
2. ALORS QUE l'employeur n'a pas à modifier la date d'entrée en vigueur du règlement intérieur lorsqu'il procède à sa révision ; qu'en reprochant cependant à la société Schindler de ne pas avoir modifié la date d'entrée en vigueur du règlement intérieur à la suite de sa modification en 1985, cependant qu'elle n'y était pas légalement tenue, la cour d'appel a violé l'article L. 1321-4 du code du travail ;
3. ALORS, EN TOUT ETAT DE CAUSE, QUE seules les modifications du règlement intérieur dépourvues de date d'entrée en vigueur sont inopposables au salarié ; que les clauses du règlement intérieur qui n'ont pas été modifiées demeurent opposables au salarié ; qu'au cas présent, la société Schindler faisait valoir que les modifications non datées en 1985 ne se rapportaient pas aux règles disciplinaires, en sorte qu'elle avait pu valablement sanctionner M. [B] par un courrier de recadrage et des avertissements (conclusions Schindler pp. 10 à 15) ; qu'en déclarant l'intégralité du règlement intérieur inopposable à M. [B] aux motifs que les modifications qui lui avaient été apportées en 1985 ne comportaient pas de date d'entrée en vigueur, cependant que l'employeur se prévalait de clauses n'ayant pas été modifiées en 1985, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article L. 1321-4 du code du travail ;
4. ALORS QUE seules les notes de service ou autre document comportant des obligations générales et permanentes dans les matières mentionnées aux articles L. 1321-1 et L. 1321-2 du code du travail sont considérées comme des adjonctions au règlement intérieur ; que le document interne par lequel l'employeur se borne à rappeler le cadre législatif et règlementaire applicable dans l'entreprise en matière de sécurité ne crée pas une nouvelle obligation générale et permanente s'imposant au salarié, et ne constitue donc pas une adjonction ; qu'au cas présent, la société Schindler faisait expressément valoir que le manuel sécurité agence et la fiche consigne de sécurité C28 se limitaient à rappeler les lois, décrets et arrêtés s'imposant à la société en matière de sécurité et ne constituaient pas une adjonction au règlement intérieur (conclusions Schindler pp.13 à 15) ; que pour refuser à l'exposante le droit de se prévaloir de ces règlements de sécurité, la cour d'appel a estimé que ceux-ci constituaient des adjonctions au règlement intérieur pour lesquelles l'employeur n'avait pas consulté les représentants du personnel (arrêt p. 3 al. 4 à 6) ; qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher si ces documents créaient de nouvelles obligations générales et permanentes à la charge des salariés, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1321-5 du code du travail ;
5. ALORS, SUBSIDIAIREMENT, QUE pour être opposable au salarié, le règlement intérieur doit avoir été communiqué à l'inspecteur du travail ; qu'au cas présent, la société Schindler faisait valoir qu'elle avait communiqué le règlement intérieur modifié à l'inspection du travail ainsi qu'au greffe du conseil de prud'hommes le 20 février 1986, et versait au débat le courrier de transmission du règlement modifié à l'inspection du travail (conclusions pp. 10 à 15, production) ; qu'en estimant que le règlement intérieur n'était pas opposable à M. [B], sans rechercher si la société Schindler avait régulièrement communiqué à l'inspecteur du travail le règlement intérieur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L.1321-4 du code du travail ;
6. ALORS, SUBSIDIAIREMENT, QUE l'employeur est tenu de se conformer à la décision de l'inspection du travail exigeant la modification ou le retrait de dispositions du règlement intérieur ; qu'au cas présent, la société Schindler faisait valoir qu'elle avait modifié son règlement intérieur conformément aux injonctions de l'inspection du travail et versait aux débats de nombreux courriers de l'inspection du travail démontrant que le règlement modifié en 1985 était conforme à ces injonctions (conclusions pp. 10 à 15, productions) ; qu'en estimant que le règlement intérieur n'était pas opposable à M. [B], sans rechercher si la société Schindler ne l'avait pas modifié en 1985 conformément aux injonctions de l'inspection du travail, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1321-4 et L. 1322-1 du code du travail. Moyen produit par la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat aux Conseils, pour M. [B] et le syndicat CGT Schindler, demandeurs au pourvoi incident
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR infirmé le jugement déféré en ce qu'il a déclaré le règlement intérieur inopposable à tous les salariés.
AUX MOTIFS QUE l'appelante relève exactement que c'est en excédant leurs pouvoirs que les premiers juges ont déclaré le règlement intérieur inopposable à tous les salariés alors que seulement saisi d'un litige individuel auquel n'était attaché qu'un effet relatif, ce n'était qu'envers M. [B] que l'inopposabilité du texte considéré pouvait être retenue et ceci dans les limites des conséquences sur l'objet du litige.
ALORS QUE pour réformer le jugement en ce qu'il a déclaré le règlement intérieur inopposable à tous les salariés, l'arrêt retient que « seulement saisi d'un litige individuel auquel n'était attaché qu'un effet relatif, ce n'était qu'envers M. [B] que l'inopposabilité du texte considéré pouvait être retenue et ceci dans les limites des conséquences sur l'objet du litige » ; qu'en statuant ainsi, quand le syndicat intervenait pour la défense de l'intérêt collectif de la profession et sollicitait l'inopposabilité du règlement intérieur à l'ensemble des salariés, ce dont il résultait que les juges n'étaient pas seulement saisis d'un litige individuel, la cour d'appel a méconnu l'objet du litige et violé l'article du 4 du code de procédure civile.