Cour de cassation, civile, Chambre civile 3, 25 mars 2021, 20-15.307, Publié au bulletin

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

MF



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 25 mars 2021




Rejet


M. CHAUVIN, président



Arrêt n° 286 FS-P

Pourvoi n° B 20-15.307




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 25 MARS 2021

Le syndicat des copropriétaires [...] sis [...] , dont le siège est [...] , représenté par son syndic la société Immo de France Normandie, dont le siège est [...] et ayant un établissement [...] , a formé le pourvoi n° B 20-15.307 contre l'arrêt rendu le 12 février 2020 par la cour d'appel de Rouen (1re chambre civile), dans le litige l'opposant à la société Gan assurances, société anonyme, dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Jariel, conseiller référendaire, les observations de la SCP Foussard et Froger, avocat du syndicat des copropriétaires [...] sis [...] , et l'avis de Mme Morel-Coujard, avocat général, après débats en l'audience publique du 16 février 2021 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Jariel, conseiller référendaire rapporteur, M. Echappé, conseiller doyen, MM. Parneix, Barbieri, Jessel, David, Jobert, conseillers, Mme Collomp, M. Béghin, Mmes Schmitt, Aldigé, conseillers référendaires, et Mme Berdeaux, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Rouen, 12 février 2020), le 16 novembre 2017, un syndicat de copropriétaires, se plaignant de désordres dans la construction de l'immeuble, a, après expertise, assigné en réparation de son préjudice la société Gan Assurances, assureur de la société chargée du gros oeuvre.

2. Le 25 avril 2019, se prévalant du défaut d'habilitation du syndic, la société Gan Assurances a signifié des conclusions d'incident demandant l'annulation de l'assignation.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

3. Le syndicat fait grief à l'arrêt d'annuler l'assignation délivrée à la société Gan Assurances, alors :

« 1°/ que les lois relatives à la procédure sont d'application immédiate ; qu'il résulte de l'article 55 du décret n° 67-223 du 17 mars 1967 dans sa version issue du décret n° 2019-650 du 27 juin 2019 que seuls les copropriétaires peuvent se prévaloir de l'absence d'autorisation du syndic à agir en justice ; qu'en faisant droit à la demande d'annulation de l'assignation du 16 novembre 2017, fondée sur l'absence d'autorisation de la copropriété, formulée par un tiers, l'assureur du constructeur, l'arrêt a violé l'article 55 du décret n° 67-223 du 17 mars 1967, dans sa rédaction issue du décret n° 2019-650 du 27 juin 2019, ensemble l'article 12 du code de procédure civile et l'article 6 §1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

2°/ que, et à tout le moins, dès lors que le syndic a le pouvoir de représenter la copropriété à raison de sa désignation, l'exigence d'une autorisation émise par l'assemblée générale, à l'effet d'engager une action en justice, a pour seul objet de sauvegarder les intérêts de la copropriété en évitant qu'une action en justice ne soit exercée par le syndic avec les conséquences qu'elle peut comporter sans que l'assemblée générale l'ait voulu ; que si même l'article 55 du décret n° 67-223 du 17 mars 1967 réservant à la copropriété le droit d'invoquer l'absence d'autorisation, n'est entré en vigueur que le 29 juin 2019, il révèle l'objet de la règle telle qu'elle doit être comprise, sans égard à la date d'introduction de la demande ; qu'il y a dès lors lieu de considérer, pour les instances intervenues antérieurement, qu'un tiers, privé d'intérêt, ne saurait se prévaloir d'un éventuel défaut d'autorisation ; que l'arrêt doit être censuré pour violation des articles 32 du Code de procédure civile, 117 du même code, 55 du décret n° 67-223 du 17 mars 1967, dans sa rédaction antérieure au décret n° 2019-650 du 27 juin 2019, ensemble le principe suivant lequel une irrégularité ne peut être invoquée que par la partie que la règle vise à protéger. »

Réponse de la Cour

4. D'une part, l'article 12 du décret n° 2019-650 du 27 juin 2019 a inséré, après le premier alinéa de l'article 55 du décret du 17 mars 1967, un alinéa aux termes duquel seuls les copropriétaires peuvent se prévaloir de l'absence d'autorisation du syndic à agir en justice.

5. Publié au Journal officiel du 28 juin 2019, ce texte est, en l'absence de disposition spécifique, entré en vigueur le 29 juin 2019.

6. Si, relatif à la procédure, il est immédiatement applicable aux instances en cours à cette date, il n'a pas pour conséquence, en l'absence d'une disposition expresse, de priver de leurs effets les actes qui ont été régulièrement accomplis sous l'empire du texte ancien (2e Civ., 30 avril 2003, pourvoi n° 00-14.333, Bull. 2003, II, n° 123).

7. Dès lors, il n'est appelé à régir les exceptions de nullité tirées du défaut d'autorisation donnée au syndic pour agir en justice au nom du syndicat des copropriétaires que si celles-ci ont été présentées à compter du 29 juin 2019.

8. Les conclusions d'incident de la société Gan Assurances ayant été signifiées antérieurement à cette date, c'est sans encourir le premier grief du moyen que la cour d'appel a statué en l'état du droit antérieur à l'application du décret du 27 juin 2019.

9. D'autre part, le défaut d'autorisation du syndic d'agir en justice au nom du syndicat constitue, lorsqu'elle est exigée, une irrégularité de fond, dont le régime est fixé par les articles 117 à 121 du code de procédure civile et qui peut être invoquée par tout défendeur à l'action (3e Civ., 12 octobre 1988, pourvoi n° 86-19.403, Bull. 1988, III, n° 140 ; Ass. plén., 15 mai 1992, pourvoi n° 89-18.021, Bull. 1992, AP, n° 5).

10. C'est par conséquent sans encourir le second grief du moyen que la cour d'appel a statué sur l'exception de nullité présentée par la société Gan Assurances.

11. Le moyen n'est donc pas fondé.

Sur les deuxième et troisième moyens, réunis

Enoncé des moyens

12. Par son deuxième moyen, le syndicat fait le même grief à l'arrêt, alors « que à partir du moment où une autorisation d'agir a été donnée au syndic notamment à partir des constatations résultant du rapport d'expertise, l'action exercée au nom de la copropriété l'est sur la base d'une assignation régulière ; qu'il est exclu qu'un tiers, tel qu'un constructeur, puisse se prévaloir de ce que, lors de l'assemblée générale, les copropriétaires n'avaient pas eu connaissance ou connaissance suffisante du rapport d'expertise sur la base duquel ils ont délibéré ; qu'en décidant le contraire, pour considérer comme irrégulière l'assemblée générale du 25 février 2019 quand seuls les copropriétaires pouvaient se prévaloir d'une irrégularité éventuelle, les juges du fond ont violé les articles 31 et 32 du code de procédure civile, 110 du même Code, 55 du décret n° 67-223 du 17 mars 1967, dans sa rédaction antérieure au 29 juin 2019, ensemble le principe suivant lequel seule la partie protégée par la règle violée peut invoquer l'irrégularité. »

13. Par son troisième moyen, le syndicat fait encore le même grief à l'arrêt, alors « que le syndic ne peut intenter une action en justice au nom du syndicat sans y avoir été autorisé par une décision de l'assemblée générale ; qu'en considérant que le syndic ne disposait pas d'une habilitation régulière tout en retenant que le procès-verbal d'assemblée générale de la copropriété en date du 25 février 2019 mentionnait la société Gan Assurances et précisait que le syndic « entendait se prévaloir du rapport d'expertise de Monsieur C... en date du 17 mai 2017 et obtenir réparation de l'ensemble des préjudices décrits dans ledit rapport », sachant que le rapport avait été précédemment présenté aux copropriétaires et les préjudices énoncés, ce dont il ressortait que tous les copropriétaires étaient parfaitement au courant de la situation, les juges du fond, qui ont omis de tirer les conséquences légales de leurs propres constatations, ont violé l'article 55 du décret n° 67-223 du 17 mars 1967 dans sa version applicable au litige. »

Réponse de la Cour

14. D'une part, ayant souverainement retenu que la résolution votée lors de l'assemblée générale du 25 février 2019 identifiait la personne à poursuivre mais ne contenait aucune désignation des désordres et procédait par renvoi au rapport d'expertise, alors qu'aucune mention du procès-verbal n'indiquait qu'il aurait été présenté aux copropriétaires lors de son déroulement et que la liste des pièces annexées à la convocation n'en faisait pas mention, la cour d'appel a pu en déduire que l'habilitation votée afin de régulariser l'assignation était atteinte par un vice.

15. D'autre part, ayant à bon droit énoncé que l'information devait être délivrée aux copropriétaires concomitamment au vote de l'habilitation et que le syndicat ne pouvait se prévaloir, pour régulariser l'absence de mention des désordres, d'une présentation du rapport faite antérieurement à cette assemblée, la cour d'appel en a exactement déduit que l'assignation devait être annulée.

16. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne le syndicat des copropriétaires [...] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par le syndicat des copropriétaires [...] ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq mars deux mille vingt et un. MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Foussard et Froger, avocat aux Conseils, pour le syndicat des copropriétaires [...] sis [...] .

PREMIER MOYEN DE CASSATION

L'arrêt infirmatif attaqué encourt la censure ;

EN CE QU'il a annulé l'assignation du 16 novembre 2017 délivrée à la SA GAN ASSURANCES et constaté que la Cour d'appel n'était régulièrement saisie d'aucune demande à l'encontre de cette entité ;

AUX MOTIFS QU' « en application de l'article 117 du Code de procédure civile, le défaut de capacité d'ester en justice constitue une irrégularité de fond ; qu'en vertu de l'article 55 du décret n°67-223 du 17 mars 1967, le syndic ne peut agir en justice au nom du syndicat des copropriétaires sans y avoir été autorisé par une décision de l'assemblée générale des copropriétaires ; que le défaut d'habilitation du syndic par l'assemblée générale des copropriétaires est assimilé à un défaut de pouvoir d'agir en justice ; qu'il constitue une irrégularité de fond affectant la validité de l'assignation au sens de l'article 117 du Code de procédure civile ; que cette nullité est susceptible d'être couverte y compris en cause d'appel ; qu'afin d'être régulier, le mandat spécial donné au syndic d'agir en justice doit permettre d'identifier les désordres et les défendeurs que le syndicat entend mettre en cause ; que les désordre objet de l'action doivent être décrits dans la résolution soumise au vote de l'assemblée générale, mais peuvent être désignés par référence à un document tel un rapport d'expertise, sous réserve que ce document ait été analysé par les copropriétaires, ce qui suppose qu'il leur ait été présenté lors de l'assemblée générale ou communiqué préalablement à celle-ci ; que l'assignation délivrée à la Société GAN ASSURANCES le 16 novembre 2017 n'est pas versées aux débats et l'exposé du litige de l'ordonnance querellée ne retranscrit pas dans le détail son dispositif ; que toutefois, il résulte des conclusions d'incident, concordantes sur ce point, que le syndicat des copropriétaires a fait assigner l'appelante, au visa des dispositions de l'article 1134 ancien du Code civil, aux fins de solliciter sa condamnation au paiement de 5.049 euros au titre du portier vidéo, 305.40 € au titre des travaux de purge des façades, 20.600 € en indemnisation d'un préjudice esthétique et 15.000 € au titre des frais irrépétibles ; qu'il y a lieu de vérifier que les résolutions successives adoptées par l'assemblée générale l'autorisent à saisir la juridiction de ces demandes ; que le procès-verbal de l'assemblée générale du 5 juin 2014, qui « autorise le syndic à ester en justice à l'encontre de CIR LOTISSEMENT ou toute autre personne physique ou morale qui lui serait substituée, le cabinet d'architecture L... et son assureur » n'habilite pas le syndic à agir contre GAN ASSURANCES ni son assurée ; que le procès-verbal d'assemblée générale du 16 juin 2016 qui « autorise le syndic à ester en justice à l'encontre de CIR LOTISSEMENT et tout autre intervenant à la procédure jugé nécessaire dans le cadre du référé-expertise pour les malfaçons et non-conformités suite à la réception de l'ouvrage » ne permet de déterminer précisément, ni les personnes qu'elle concerne, hormis CIR LOTISSEMENT, ni les désordres ; qu'il ne saurait donc valoir habilitation à agir contre la Société GAN ASSURANCES aux fins mentionnées ci-dessus ; que l'assignation initiale a donc été délivrée à l'égard de cette partie sans habilitation régulière ; que dans le but de régulariser la procédure, le syndic a organisé un nouveau vote de l'assemblée générale le 25 février 2019, à l'occasion duquel il a obtenu une habilitation à agir en justice à l'encontre de la Société GAN ASSURANCES, afin de « se prévaloir du rapport d'expertise de M. C... en date du 17 mai 2017 et obtenir la réparation de l'ensemble des préjudices décrits dans ledit rapport, obtenir une indemnité pour frais de procédure et le paiement des dépens » ; que si cette résolution est précise quant à la personne à poursuivre, elle ne contient aucune désignation des désordres et procède par renvoi au rapport d'expertise quant à la nature des « préjudices » ; qu'afin de déterminer si ce mandat est susceptible de régulariser l'assignation délivrée préalablement, il y a lieu de déterminer si les copropriétaires qui ont émis le vote ont eu connaissance de la nature des désordres concernés ; qu'or, il ne résulte d'aucune mention du procès-verbal de cette assemblée générale que le rapport aurait été présenté aux copropriétaires lors de son déroulement afin qu'ils puissent émettre un vote éclairé ; que la liste des pièces annexées à la convocation de l'assemblée générale concernée ne fait pas mention du rapport d'expertise ; que l'habilitation votée afin de régulariser l'assignation est donc elle-même atteinte par un vice ; qu'afin de démontrer que ce vice serait lui-même régularisé, le syndicat des copropriétaires se prévaut d'une mention d'un autre procès-verbal d'assemblée générale en date du 28 juin 2019, selon laquelle le rapport d'expertise aurait été présenté au cours d'une troisième assemblée générale, cette fois antérieure, datée du 22 juin 2017, puis à nouveau le 28 juin 2019 ; que toutefois, s'agissant de vérifier qu'au moment où l'habilitation a été donnée au syndic, les copropriétaires présents ou représentés à l'assemblée générale, étaient informés de la nature des désordres qui faisaient l'objet du vote, le syndicat ne saurait se prévaloir d'une information délivrée concomitamment au vote qu'elle a vocation à éclairer ; qu'or, aucun vote d'habilitation ou de régularisation n'a eu lieu ni lors de l'assemblée générale du 22 juin 2017, ni à celle du 28 juin 2019 ; qu'il s'ensuit que la décision querellée doit être infirmée, l'assignation délivrée à la Société GAN ASSURANCES annulée, et le syndicat des copropriétaires condamné aux dépens » ;

ALORS QUE, premièrement, les lois relatives à la procédure sont d'application immédiate ; qu'il résulte de l'article 55 du décret n° 67-223 du 17 mars 1967 dans sa version issue du décret n° 2019-650 du 27 juin 2019 que seuls les copropriétaires peuvent se prévaloir de l'absence d'autorisation du syndic à agir en justice ; qu'en faisant droit à la demande d'annulation de l'assignation du 16 novembre 2017, fondée sur l'absence d'autorisation de la copropriété, formulée par un tiers, l'assureur du constructeur, l'arrêt a violé l'article 55 du décret n°67-223 du 17 mars 1967, dans sa rédaction issue du décret n° 2019-650 du 27 juin 2019, ensemble l'article 12 du Code de procédure civile et l'article 6 §1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

ALORS QUE, deuxièmement, et à tout le moins, dès lors que le syndic a le pouvoir de représenter la copropriété à raison de sa désignation, l'exigence d'une autorisation émise par l'assemblée générale, à l'effet d'engager une action en justice, a pour seul objet de sauvegarder les intérêts de la copropriété en évitant qu'une action en justice ne soit exercée par le syndic avec les conséquences qu'elle peut comporter sans que l'assemblée générale l'ait voulu ; que si même l'article 55 du décret n° 67-223 du 17 mars 1967 réservant à la copropriété le droit d'invoquer l'absence d'autorisation, n'est entré en vigueur que le 29 juin 2019, il révèle l'objet de la règle telle qu'elle doit être comprise, sans égard à la date d'introduction de la demande ; qu'il y a dès lors lieu de considérer, pour les instances intervenues antérieurement, qu'un tiers, privé d'intérêt, ne saurait se prévaloir d'un éventuel défaut d'autorisation ; que l'arrêt doit être censuré pour violation des articles 32 du Code de procédure civile, 117 du même code, 55 du décret n°67-223 du 17 mars 1967, dans sa rédaction antérieure au décret n° 2019-650 du 27 juin 2019, ensemble le principe suivant lequel une irrégularité ne peut être invoquée que par la partie que la règle vise à protéger.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION (subsidiaire)

L'arrêt infirmatif attaqué encourt la censure ;

EN CE QU'il a annulé l'assignation du 16 novembre 2017 délivrée à la SA GAN ASSURANCES et constaté que la Cour d'appel n'était régulièrement saisie d'aucune demande à l'encontre de cette entité ;

AUX MOTIFS QU' « en application de l'article 117 du Code de procédure civile, le défaut de capacité d'ester en justice constitue une irrégularité de fond ; qu'en vertu de l'article 55 du décret n°67-223 du 17 mars 1967, le syndic ne peut agir en justice au nom du syndicat des copropriétaires sans y avoir été autorisé par une décision de l'assemblée générale des copropriétaires ; que le défaut d'habilitation du syndic par l'assemblée générale des copropriétaires est assimilé à un défaut de pouvoir d'agir en justice ; qu'il constitue une irrégularité de fond affectant la validité de l'assignation au sens de l'article 117 du Code de procédure civile ; que cette nullité est susceptible d'être couverte y compris en cause d'appel ; qu'afin d'être régulier, le mandat spécial donné au syndic d'agir en justice doit permettre d'identifier les désordres et les défendeurs que le syndicat entend mettre en cause ; que les désordre objet de l'action doivent être décrits dans la résolution soumise au vote de l'assemblée générale, mais peuvent être désignés par référence à un document tel un rapport d'expertise, sous réserve que ce document ait été analysé par les copropriétaires, ce qui suppose qu'il leur ait été présenté lors de l'assemblée générale ou communiqué préalablement à celle-ci ; que l'assignation délivrée à la Société GAN ASSURANCES le 16 novembre 2017 n'est pas versées aux débats et l'exposé du litige de l'ordonnance querellée ne retranscrit pas dans le détail son dispositif ; que toutefois, il résulte des conclusions d'incident, concordantes sur ce point, que le syndicat des copropriétaires a fait assigner l'appelante, au visa des dispositions de l'article 1134 ancien du Code civil, aux fins de solliciter sa condamnation au paiement de 5.049 euros au titre du portier vidéo, 305.40 € au titre des travaux de purge des façades, 20.600 € en indemnisation d'un préjudice esthétique et 15.000 € au titre des frais irrépétibles ; qu'il y a lieu de vérifier que les résolutions successives adoptées par l'assemblée générale l'autorisent à saisir la juridiction de ces demandes ; que le procès-verbal de l'assemblée générale du 5 juin 2014, qui « autorise le syndic à ester en justice à l'encontre de CIR LOTISSEMENT ou toute autre personne physique ou morale qui lui serait substituée, le cabinet d'architecture L... et son assureur » n'habilite pas le syndic à agir contre GAN ASSURANCES ni son assurée ; que le procès-verbal d'assemblée générale du 16 juin 2016 qui « autorise le syndic à ester en justice à l'encontre de CIR LOTISSEMENT et tout autre intervenant à la procédure jugé nécessaire dans le cadre du référé-expertise pour les malfaçons et non-conformités suite à la réception de l'ouvrage » ne permet de déterminer précisément, ni les personnes qu'elle concerne, hormis CIR LOTISSEMENT, ni les désordres ; qu'il ne saurait donc valoir habilitation à agir contre la Société GAN ASSURANCES aux fins mentionnées ci-dessus ; que l'assignation initiale a donc été délivrée à l'égard de cette partie sans habilitation régulière ; que dans le but de régulariser la procédure, le syndic a organisé un nouveau vote de l'assemblée générale le 25 février 2019, à l'occasion duquel il a obtenu une habilitation à agir en justice à l'encontre de la Société GAN ASSURANCES, afin de « se prévaloir du rapport d'expertise de M. C... en date du 17 mai 2017 et obtenir la réparation de l'ensemble des préjudices décrits dans ledit rapport, obtenir une indemnité pour frais de procédure et le paiement des dépens » ; que si cette résolution est précise quant à la personne à poursuivre, elle ne contient aucune désignation des désordres et procède par renvoi au rapport d'expertise quant à la nature des « préjudices » ; qu'afin de déterminer si ce mandat est susceptible de régulariser l'assignation délivrée préalablement, il y a lieu de déterminer si les copropriétaires qui ont émis le vote ont eu connaissance de la nature des désordres concernés ; qu'or, il ne résulte d'aucune mention du procès-verbal de cette assemblée générale que le rapport aurait été présenté aux copropriétaires lors de son déroulement afin qu'ils puissent émettre un vote éclairé ; que la liste des pièces annexées à la convocation de l'assemblée générale concernée ne fait pas mention du rapport d'expertise ; que l'habilitation votée afin de régulariser l'assignation est donc elle-même atteinte par un vice ; qu'afin de démontrer que ce vice serait lui-même régularisé, le syndicat des copropriétaires se prévaut d'une mention d'un autre procès-verbal d'assemblée générale en date du 28 juin 2019, selon laquelle le rapport d'expertise aurait été présenté au cours d'une troisième assemblée générale, cette fois antérieure, datée du 22 juin 2017, puis à nouveau le 28 juin 2019 ; que toutefois, s'agissant de vérifier qu'au moment où l'habilitation a été donnée au syndic, les copropriétaires présents ou représentés à l'assemblée générale, étaient informés de la nature des désordres qui faisaient l'objet du vote, le syndicat ne saurait se prévaloir d'une information délivrée concomitamment au vote qu'elle a vocation à éclairer ; qu'or, aucun vote d'habilitation ou de régularisation n'a eu lieu ni lors de l'assemblée générale du 22 juin 2017, ni à celle du 28 juin 2019 ; qu'il s'ensuit que la décision querellée doit être infirmée, l'assignation délivrée à la Société GAN ASSURANCES annulée, et le syndicat des copropriétaires condamné aux dépens » ;

ALORS QU' à partir du moment où une autorisation d'agir a été donnée au syndic notamment à partir des constatations résultant du rapport d'expertise, l'action exercée au nom de la copropriété l'est sur la base d'une assignation régulière ; qu'il est exclu qu'un tiers, tel qu'un constructeur, puisse se prévaloir de ce que, lors de l'assemblée générale, les copropriétaires n'avaient pas eu connaissance ou connaissance suffisante du rapport d'expertise sur la base duquel ils ont délibéré ; qu'en décidant le contraire, pour considérer comme irrégulière l'assemblée générale du 25 février 2019 quand seuls les copropriétaires pouvaient se prévaloir d'une irrégularité éventuelle, les juges du fond ont violé les articles 31 et 32 du Code de procédure civile, 110 du même Code, 55 du décret n°67-223 du 17 mars 1967, dans sa rédaction antérieure au 29 juin 2019, ensemble le principe suivant lequel seule la partie protégée par la règle violée peut invoquer l'irrégularité.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION (subsidiaire)

L'arrêt infirmatif attaqué encourt la censure ;

EN CE QU'il a annulé l'assignation du 16 novembre 2017 délivrée à la SA GAN ASSURANCES et constaté que la Cour d'appel n'était régulièrement saisie d'aucune demande à l'encontre de cette entité ;

AUX MOTIFS QU' « en application de l'article 117 du Code de procédure civile, le défaut de capacité d'ester en justice constitue une irrégularité de fond ; qu'en vertu de l'article 55 du décret n°67-223 du 17 mars 1967, le syndic ne peut agir en justice au nom du syndicat des copropriétaires sans y avoir été autorisé par une décision de l'assemblée générale des copropriétaires ; que le défaut d'habilitation du syndic par l'assemblée générale des copropriétaires est assimilé à un défaut de pouvoir d'agir en justice ; qu'il constitue une irrégularité de fond affectant la validité de l'assignation au sens de l'article 117 du Code de procédure civile ; que cette nullité est susceptible d'être couverte y compris en cause d'appel ; qu'afin d'être régulier, le mandat spécial donné au syndic d'agir en justice doit permettre d'identifier les désordres et les défendeurs que le syndicat entend mettre en cause ; que les désordre objet de l'action doivent être décrits dans la résolution soumise au vote de l'assemblée générale, mais peuvent être désignés par référence à un document tel un rapport d'expertise, sous réserve que ce document ait été analysé par les copropriétaires, ce qui suppose qu'il leur ait été présenté lors de l'assemblée générale ou communiqué préalablement à celle-ci ; que l'assignation délivrée à la Société GAN ASSURANCES le 16 novembre 2017 n'est pas versées aux débats et l'exposé du litige de l'ordonnance querellée ne retranscrit pas dans le détail son dispositif ; que toutefois, il résulte des conclusions d'incident, concordantes sur ce point, que le syndicat des copropriétaires a fait assigner l'appelante, au visa des dispositions de l'article 1134 ancien du Code civil, aux fins de solliciter sa condamnation au paiement de 5.049 euros au titre du portier vidéo, 305.40 € au titre des travaux de purge des façades, 20.600 € en indemnisation d'un préjudice esthétique et 15.000 € au titre des frais irrépétibles ; qu'il y a lieu de vérifier que les résolutions successives adoptées par l'assemblée générale l'autorisent à saisir la juridiction de ces demandes ; que le procès-verbal de l'assemblée générale du 5 juin 2014, qui « autorise le syndic à ester en justice à l'encontre de CIR LOTISSEMENT ou toute autre personne physique ou morale qui lui serait substituée, le cabinet d'architecture L... et son assureur » n'habilite pas le syndic à agir contre GAN ASSURANCES ni son assurée ; que le procès-verbal d'assemblée générale du 16 juin 2016 qui « autorise le syndic à ester en justice à l'encontre de CIR LOTISSEMENT et tout autre intervenant à la procédure jugé nécessaire dans le cadre du référé-expertise pour les malfaçons et non-conformités suite à la réception de l'ouvrage » ne permet de déterminer précisément, ni les personnes qu'elle concerne, hormis CIR LOTISSEMENT, ni les désordres ; qu'il ne saurait donc valoir habilitation à agir contre la Société GAN ASSURANCES aux fins mentionnées ci-dessus ; que l'assignation initiale a donc été délivrée à l'égard de cette partie sans habilitation régulière ; que dans le but de régulariser la procédure, le syndic a organisé un nouveau vote de l'assemblée générale le 25 février 2019, à l'occasion duquel il a obtenu une habilitation à agir en justice à l'encontre de la Société GAN ASSURANCES, afin de « se prévaloir du rapport d'expertise de M. C... en date du 17 mai 2017 et obtenir la réparation de l'ensemble des préjudices décrits dans ledit rapport, obtenir une indemnité pour frais de procédure et le paiement des dépens » ; que si cette résolution est précise quant à la personne à poursuivre, elle ne contient aucune désignation des désordres et procède par renvoi au rapport d'expertise quant à la nature des « préjudices » ; qu'afin de déterminer si ce mandat est susceptible de régulariser l'assignation délivrée préalablement, il y a lieu de déterminer si les copropriétaires qui ont émis le vote ont eu connaissance de la nature des désordres concernés ; qu'or, il ne résulte d'aucune mention du procès-verbal de cette assemblée générale que le rapport aurait été présenté aux copropriétaires lors de son déroulement afin qu'ils puissent émettre un vote éclairé ; que la liste des pièces annexées à la convocation de l'assemblée générale concernée ne fait pas mention du rapport d'expertise ; que l'habilitation votée afin de régulariser l'assignation est donc elle-même atteinte par un vice ; qu'afin de démontrer que ce vice serait lui-même régularisé, le syndicat des copropriétaires se prévaut d'une mention d'un autre procès-verbal d'assemblée générale en date du 28 juin 2019, selon laquelle le rapport d'expertise aurait été présenté au cours d'une troisième assemblée générale, cette fois antérieure, datée du 22 juin 2017, puis à nouveau le 28 juin 2019 ; que toutefois, s'agissant de vérifier qu'au moment où l'habilitation a été donnée au syndic, les copropriétaires présents ou représentés à l'assemblée générale, étaient informés de la nature des désordres qui faisaient l'objet du vote, le syndicat ne saurait se prévaloir d'une information délivrée concomitamment au vote qu'elle a vocation à éclairer ; qu'or, aucun vote d'habilitation ou de régularisation n'a eu lieu ni lors de l'assemblée générale du 22 juin 2017, ni à celle du 28 juin 2019 ; qu'il s'ensuit que la décision querellée doit être infirmée, l'assignation délivrée à la Société GAN ASSURANCES annulée, et le syndicat des copropriétaires condamné aux dépens » ;

ALORS QUE, le syndic ne peut intenter une action en justice au nom du syndicat sans y avoir été autorisé par une décision de l'assemblée générale ; qu'en considérant que le syndic ne disposait pas d'une habilitation régulière tout en retenant que le procès-verbal d'assemblée générale de la copropriété en date du 25 février 2019 mentionnait la société GAN ASSURANCES et précisait que le syndic « entendait se prévaloir du rapport d'expertise de Monsieur C... en date du 17 mai 2017 et obtenir réparation de l'ensemble des préjudices décrits dans ledit rapport », sachant que le rapport avait été précédemment présenté aux copropriétaires et les préjudices énoncés, ce dont il ressortait que tous les copropriétaires étaient parfaitement au courant de la situation, les juges du fond, qui ont omis de tirer les conséquences légales de leurs propres constatations, ont violé l'article 55 du décret n°67-223 du 17 mars 1967 dans sa version applicable au litige. ECLI:FR:CCASS:2021:C300286
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