Cour de cassation, civile, Chambre civile 3, 4 mars 2021, 20-14.141, Inédit
Cour de cassation, civile, Chambre civile 3, 4 mars 2021, 20-14.141, Inédit
Cour de cassation - Chambre civile 3
- N° de pourvoi : 20-14.141
- ECLI:FR:CCASS:2021:C300208
- Non publié au bulletin
- Solution : Rejet
Audience publique du jeudi 04 mars 2021
Décision attaquée : Cour d'appel de Nancy, du 09 janvier 2020- Président
- M. Chauvin (président)
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 3
JL
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 4 mars 2021
Rejet
M. CHAUVIN, président
Arrêt n° 208 F-D
Pourvoi n° J 20-14.141
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 4 MARS 2021
1°/ M. S... P..., domicilié [...] ,
2°/ l'Earl de la Terre Bleue, exploitation agricole à responsabilité limitée, dont le siège est [...] ,
ont formé le pourvoi n° J 20-14.141 contre l'arrêt rendu le 9 janvier 2020 par la cour d'appel de Nancy (2e chambre civile), dans le litige les opposant :
1°/ à M. W... M...,
2°/ à Mme Y... I..., épouse M...,
tous deux domiciliés [...] ,
3°/ à M. H... M..., domicilié [...] ,
défendeurs à la cassation.
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Barbieri, conseiller, les observations de la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat de M. P... et l'Earl de la Terre Bleue, de la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat des consorts M..., après débats en l'audience publique du 19 janvier 2021 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Barbieri, conseiller rapporteur, M. Echappé, conseiller doyen, et Mme Berdeaux, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Nancy, 9 janvier 2020), par acte du 3 octobre 2006, M. et Mme I... ont consenti à MM. P... et H... M..., ainsi qu'au groupement agricole d'exploitation en commun de la Terre Bleue, transformé depuis en exploitation agricole à responsabilité limitée (l'EARL), un bail rural d'une durée de dix-huit années.
2. L'assemblée générale extraordinaire de l'EARL du 25 mars 2013 a constaté le retrait de M. M... de la société.
3. Par actes des 9 octobre 2009 et 19 septembre 2013, M. et Mme I... ont vendu à M. W... M... et à son épouse les parcelles objet du bail.
4. Par déclaration du 15 septembre 2017, M. et Mme M... ont saisi le tribunal paritaire des baux ruraux en résiliation du bail en soutenant que M. H... M... avait cessé de participer à l'exploitation des terres et que les autres preneurs n'avaient pas demandé la poursuite du bail à leur profit.
Examen des moyens
Sur le premier moyen
Enoncé du moyen
5. M. P... et l'EARL font grief à l'arrêt de prononcer la résiliation du bail et d'ordonner leur expulsion, alors :
« 1°/ que, lorsqu'un des copreneurs cesse de participer à l'exploitation du bien loué, le copreneur qui continue à exploiter dispose de trois mois à compter de cette cessation pour demander au bailleur par lettre recommandée avec demande d'avis de réception que le bail se poursuive à son seul nom ; qu'il s'ensuit que la demande de poursuite du bail ne s'impose que lorsqu'il ne subsiste, à la suite du retrait d'un copreneur, qu'un seul preneur exploitant susceptible de poursuivre le bail ; qu'en retenant, pour prononcer la résiliation du bail, que le retrait le 25 mars 2013 de H... M..., l'un des trois copreneurs du bail, de l'Earl de la Terre Bleue se serait traduit par la cessation de sa participation à l'exploitation des terres et, qu'en conséquence, S... P... et l'Earl de la Terre Bleue, s'ils souhaitaient continuer à exploiter les parcelles en qualité de copreneurs, auraient dû demander aux bailleurs que le bail se poursuive à leurs seuls noms, quand elle constatait qu'à la suite du retrait de H... M... subsistaient deux copreneurs, M. P... et l'Earl de la Terre Bleue, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles L. 411-35 et L. 411-31 du code rural et de la pêche maritime ;
2°/ que la demande de poursuite du bail à la suite du retrait d'un copreneur ne s'impose qu'en présence de copreneurs personnes physiques ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a relevé que M. P... et l'Earl de la Terre Bleue étaient demeurés copreneurs du bail à la suite du retrait de H... M... de la société ; qu'en retenant, pour prononcer la résiliation du bail, qu'à la suite de son retrait de l'Earl de la Terre Bleue, H... M... aurait cessé de participer à l'exploitation des terres et, qu'en conséquence, M. P... et l'Earl, s'ils souhaitaient continuer à exploiter les parcelles en qualité de copreneurs, auraient dû demander aux bailleurs que le bail se poursuive à leurs seuls noms quand elle avait constaté que l'Earl de la Terre Bleue était copreneur du bail, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles L. 411-35 et L. 411-31 du code rural et de la pêche maritime ;
3°/ qu'il est interdit aux juges du fond de dénaturer l'objet du litige tel qu'il résulte des conclusions respectives des parties ; qu'en l'espèce, les parties s'opposaient sur le point de savoir si, à la suite de son retrait de l'Earl de la Terre Bleue, H... M... avait ou non continué à exploiter les terres prises à bail, W... et Y... M... soutenant qu'il avait cessé toute exploitation de ces terres tandis que M. P... et l'Earl de la Terre Bleue soutenaient qu'il avait conservé sa qualité de preneur à bail des terres litigieuses et continué de participer à leur exploitation ; qu'en affirmant, pour prononcer la résiliation du bail, qu'il est constant que le retrait de H... M... de l'Earl le 25 mars 2013 s'est traduit pour lui par la cessation de l'exploitation des terres de l'Earl, la cour d'appel a dénaturé les termes du litige et violé, en conséquence, l'article 4 du code de procédure civile ;
4°/ que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'il ne peut fonder sa décision sur les moyens qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; qu'en relevant d'office, pour prononcer la résiliation du bail, qu'il serait constant que le bail avait été conclu pour permettre au Gaec de la Terre Bleue devenu Earl de la Terre Bleue et à ses deux co-gérants, S... P... et H... M..., d'exploiter le foncier ainsi donné en location quand ce moyen n'avait été soulevé par aucune des parties, la cour d'appel, qui n'a pas préalablement recueilli les observations des parties, a méconnu le principe de la contradiction et violé l'article 16 du code de procédure civile ;
5° / que son retrait de la société locataire ne fait pas perdre sa qualité de co-preneur à l'associé qui a par ailleurs conclu le bail à titre personnel ; qu'en l'espèce, M. P... et l'Earl de la Terre Bleue faisaient valoir qu'à la suite de son retrait de l'Earl le 25 mars 2013, H... M... avait conservé sa qualité de preneur à bail des terres litigieuses et continué de participer à leur exploitation ainsi que cela ressortait tant de l'acte authentique de vente des terres du 19 septembre 2013, auquel H... M... était intervenu en qualité de fermier preneur en place aux fins de renoncer à son droit de préemption, que de sa reconstitution de carrière versée aux débats de laquelle il ressortait qu'il avait continué à être chef d'exploitation sur la période du 1er avril 2013 au 31 décembre 2018 ; qu'en prononçant la résiliation du bail sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si H... M... n'avait pas continué à être exploitant à la suite de son retrait de l'Earl, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 411-35 du code rural et de la pêche maritime ;
6°/ que son retrait de la société locataire ne fait pas perdre sa qualité de co-preneur à l'associé qui a par ailleurs conclu le bail à titre personnel ; que M. P... et l'Earl de la Terre Bleue faisaient valoir qu'à la suite de son retrait de l'Earl le 25 mars 2013, H... M... avait conservé sa qualité de preneur à bail des terres litigieuses et continué de participer à leur exploitation ainsi que cela ressortait tant de l'acte authentique de vente des terres du 19 septembre 2013, auquel H... M... était intervenu en qualité de fermier preneur en place aux fins de renoncer à son droit de préemption, que de sa reconstitution de carrière versée aux débats de laquelle il ressortait qu'il avait continué à être chef d'exploitation sur la période du 1er avril 2013 au 31 décembre 2018 ; qu'en retenant, pour prononcer la résiliation du bail, qu'il serait constant que le bail avait été conclu pour permettre au Gaec de la Terre Bleue (devenu Earl de la Terre Bleue) et à ses deux co-gérants, S... P... et H... M..., d'exploiter le foncier ainsi donné en location, la cour d'appel qui a statué par des motifs inopérants, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 411-35 du code rural et de la pêche maritime ;
7°/ en toute hypothèse, que la fraude corrompt tout ; qu'en l'espèce, M. P... et l'Earl de la Terre Bleue faisaient valoir qu'à la suite d'un incident de communication de pièces, rendu nécessaire par le refus des consorts M... de produire les pièces sollicitées tendant à clarifier leurs liens, ils avaient appris que les bailleurs avaient conclu le 1er septembre 2017 avec H... M..., qui était leur neveu, un contrat de travail à durée indéterminée à temps complet en qualité d'ouvrier agricole et que, concomitamment à la conclusion de ce contrat, le 14 septembre 2017, ils avaient saisi le tribunal paritaire des baux ruraux en résiliation du bail en raison de la cessation d'exploitation des terres par leur neveu ; qu'en se bornant à retenir, pour accueillir la demande de résiliation du bail, que le fait que H... M... soit le neveu des bailleurs et soit même devenu leur salarié ou leur associé ne permettait pas de qualifier de fraude sa cessation d'exploitation des terres données à bail sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si la concomitance de la conclusion d'un contrat de travail à durée indéterminée à temps complet avec l'un des copreneurs à bail et de l'action en résiliation de ce même bail pour cessation d'exploitation de ce même copreneur ne caractérisait pas une fraude des bailleurs au statut du fermage, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe fraus omnia corrumpit, ensemble les articles L. 411-35 et L. 411-31 du code rural et de la pêche maritime ;
8° / en toute hypothèse, que, sauf stipulation conventionnelle expresse la seule volonté d'un copreneur de résilier le bail rural ne peut suffire à mettre fin au contrat à l'égard des autres copreneurs ; qu'en conséquence, le contrat de bail rural se poursuit automatiquement à l'égard de ces derniers et il appartient alors au bailleur informé qui souhaite s'y opposer de saisir le tribunal paritaire des baux ruraux ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté qu'il ressortait des liens familiaux entre les propriétaires et le copreneur sortant, H... M..., leur neveu, ainsi que des déclarations de ce dernier à l'audience, que les époux M... savaient, dès 2013, qu'il avait cessé d'exploiter les parcelles en cause ; qu'en retenant, pour prononcer la résiliation du bail, que la preuve de la connaissance de la situation de départ d'un copreneur par les propriétaires n'est pas suffisante pour écarter la résiliation du bail, la cour d'appel a violé l'article L. 411-35 du code rural et de la pêche maritime, ensemble l'article 1134 devenu 1103 du code civil ;
9°/ en toute hypothèse, que le non-respect de l'obligation d'information à la charge du preneur continuant l'exploitation à la suite du départ d'un copreneur ne saurait donner lieu à résiliation en l'absence d'agissement de nature à compromettre la bonne exploitation du fonds ; qu'en se bornant, pour prononcer la résiliation du bail, à relever que H... M... aurait cessé d'exploiter les terres en mars 2013 et que M. P... et l'Earl de la Terre Bleue n'avaient pas demandé aux bailleurs que le bail se poursuive à leurs seuls noms dans le délai requis, sans constater que la bonne exploitation du fonds avait été compromise, la cour d'appel a violé les articles L. 411-31 et L. 411-35 du code rural et de la pêche maritime. »
Réponse de la Cour
6. En premier lieu, la cour d'appel a énoncé à bon droit, d'une part, que l'article L. 411-31, II, 1°, du code rural et de la pêche maritime permet au bailleur de demander la résiliation du bail s'il justifie de toute contravention aux dispositions de l'article L. 411-35 du même code, d'autre part, que le défaut d'accomplissement de l'obligation d'information du propriétaire, en cas de cessation d'activité de l'un des copreneurs, constitue un manquement aux obligations nées du bail et une violation du texte précité, lequel, de portée générale, ne fait aucune distinction entre les personnes physiques et les personnes morales exploitantes.
7. Elle a constaté que M. M... avait cessé toute exploitation des terres prises à bail et retenu que M. P... et l'EARL, ses copreneurs, n'avaient pas sollicité, dans le délai qui leur était imparti, la continuation de la location de leur chef.
8. C'est sans méconnaître l'objet du litige ni violer le principe de la contradiction qu'elle en a exactement déduit que la résiliation du bail constituait la sanction d'une telle omission.
9. En second lieu, la cour d'appel a retenu, souverainement, que le retrait de M. M... de l'EARL s'était traduit, pour lui, par la cessation de l'exploitation des terres qu'il avait prises à bail et que la preuve d'un montage frauduleux avec ses proches n'était pas établie et, exactement, que la connaissance de ce départ par les bailleurs était sans incidence, ceux-ci n'étant pas tenus, par ailleurs, de démontrer un préjudice, ni une atteinte à la bonne exploitation du fonds.
10. Ayant procédé aux recherches prétendument omises, elle a pu prononcer la résiliation aux torts des trois preneurs.
11. Le moyen n'est donc pas fondé.
Sur le second moyen
Enoncé du moyen
12. M. P... et l'EARL font grief à l'arrêt de rejeter la demande de condamnation de M. M... au titre de la liquidation de l'astreinte, alors :
« 1°/ que le juge qui constate l'inexécution ou le retard dans l'exécution de l'injonction assortie d'astreinte ne peut pas rejeter entièrement la demande de condamnation au titre de la liquidation de l'astreinte ; qu'en l'espèce, il ressort de la procédure que par jugement du 26 juillet 2018, notifié le 23 août suivant, le tribunal paritaire des baux ruraux de Verdun a ordonné à H... M... de communiquer sa reconstitution de carrière établie par la MSA à la date la plus proche sous astreinte de 30 euros par jour de retard à compter d'un délai de deux mois après la présente décision ; que la cour d'appel a constaté que H... M... n'a produit le document intitulé "reconstitution de carrière" établi par la MSA que par lettre du 11 janvier 2019, soit plusieurs mois après la date limite qui lui avait été fixée par le tribunal paritaire pour ce faire ; qu'en rejetant néanmoins la demande de condamnation au titre de la liquidation de l'astreinte, la cour d'appel qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article L. 131-4 du code des procédures civiles d'exécution ;
2°/ que l'astreinte provisoire ou définitive ne peut être supprimée en tout ou partie que s'il est établi que l'inexécution ou le retard dans l'exécution de l'injonction du juge provient, en tout ou partie, d'une cause étrangère ; qu'en retenant, pour rejeter la demande de condamnation au titre de la liquidation de l'astreinte, que l'injonction donnée à H... M... par le tribunal a été satisfaite en substance dans le délai imparti, ce dernier ayant communiqué dans le délai son contrat de travail permettant de savoir qu'il est salarié des époux M... depuis le 1er septembre 2017, sans constater qu'une cause étrangère avait empêché H... M... de produire, en temps utile, le document reconstitution de carrière établi par la MSA, la cour d'appel, qui a statué par un motif inopérant, a privé son arrêt de base légale au regard de l'article L. 131-4 du code des procédures civiles d'exécution ;
3°/ que, si l'astreinte provisoire est liquidée en tenant compte du comportement de celui à qui l'injonction a été adressée et des difficultés qu'il a rencontrées pour l'exécuter, l'inexécution de l'obligation est un fait objectif qui doit être apprécié abstraction faite de l'opinion que pouvait en avoir le débiteur ; qu'en l'espèce, la production du document intitulé "reconstitution de carrière" établi par la MSA dans le délai imparti par le tribunal ne présentait aucune difficulté pour H... M... ; que la cour d'appel a constaté que H... M... n'avait pas produit ce document dans le délai imparti ; qu'en retenant, pour rejeter la demande de condamnation au titre de la liquidation de l'astreinte, que l'injonction donnée à H... M... par le tribunal a été satisfaite en substance dans le délai imparti, ce dernier ayant communiqué dans le délai son contrat de travail permettant de savoir qu'il est salarié des époux M... depuis le 1er septembre 2017 quand il importait peu que H... M... estimât que la production de ce document suffisait à l'exécution de l'obligation, fait objectif, la cour d'appel a violé l'article L. 131-4 du code des procédures civiles d'exécution. »
Réponse de la Cour
13. Ayant relevé que l'injonction de communication de pièces prononcée par le jugement avait pour objet de déterminer la date d'engagement de M. H... M... en qualité de salarié de M. et Mme M... et que celui-ci avait communiqué dans le délai imparti le contrat de travail qu'il avait conclu, ce qui permettait d'accéder à l'information attendue, la cour d'appel, qui a constaté que l'injonction avait été satisfaite en substance et qui n'était pas tenue de rechercher si une cause étrangère était établie, en a souverainement déduit que la liquidation de l'astreinte était devenue sans objet.
14. Le moyen n'est donc pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. P... et l'Earl de la Terre Bleue aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatre mars deux mille vingt et un. MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils, pour M. P... et l'Earl de la Terre Bleue
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR prononcé la résiliation du bail en date du 3 octobre 2006 liant M. S... P..., M. H... M... et l'Earl de la Terre Bleue à M. et Mme Y... et W... M... portant sur des parcelles situées sur la Commune de Luzy Saint Martin pour 26ha 3a 5ca, d'AVOIR dit qu'en conséquence, M. S... P..., M. H... M... et l'Earl de la Terre Bleue, et tous occupants de leur chef, devront laisser lesdites terres libres après un délai d'un mois à compter de la signification de la présente décision et d'AVOIR dit qu'au cas où ils se maintiendraient indûment sur ces terres, ils pourront en être expulsés conformément à la loi et avec l'assistance de la force publique si besoin;
AUX MOTIFS PROPRES QUE - Sur la résiliation du bail – L'article L411-35 du code rural et de la pêche maritime, aliénas 3 et 4, dans leur rédaction actuelle, dispose : « Lorsqu'un des copreneurs du bail cesse de participer à l'exploitation du bien loué, le copreneur qui continue à exploiter dispose de trois mois à compter de cette cessation pour demander au bailleur par lettre recommandée avec demande d'avis de réception que le bail se poursuive à son seul nom. Le propriétaire ne peut s'y opposer qu'en saisissant dans un délai fixé par décret le tribunal paritaire, qui statue alors sur la demande. Le présent alinéa est applicable aux baux conclus depuis plus de trois ans, sauf si la cessation d'activité du copreneur est due à un cas de force majeure. A peine de nullité, la lettre recommandée doit, d'une part, reproduire intégralement les dispositions du troisième alinéa du présent article et, d'autre part, mentionner expressément les motifs allégués pour cette demande ainsi que la date de cessation de l'activité du copreneur. » Cette rédaction est issue de la loi n°2014-1170 du 13 octobre 2014, entrée en vigueur le 14 octobre 2014. L'article 4-V-B de ladite loi dispose que les deux alinéas précités sont applicables aux baux en cours et que si l'un des copreneurs a cessé de participer à l'exploitation avant la date de publication de la présente loi, le délai de trois mois mentionné à l'aliéna 3 précité commence à courir à compter de cette date (c'est-à-dire le 14 octobre 2014). M. S... P... et l'Earl de la Terre Bleue ne peuvent donc reprocher aux époux W... et Y... M... de vouloir faire une application rétroactive de la loi du 13 octobre 2014, puisqu'ils ne font que demander l'application des dispositions transitoires prévues par la loi elle-même. Il en résulte que M. S... P... et l'Earl de la Terre Bleue, s'ils souhaitaient continuer à exploiter les parcelles en qualité de copreneurs devaient, entre le 14 octobre 2014 et 14 janvier 2015, demander aux bailleurs, les époux W... et Y... M..., que le bail se poursuive à leurs seuls noms. Il n'est pas contesté qu'ils n'ont jamais formé cette demande. La sanction de cette abstention telle qu'elle est prévue par l'article L411-31 du code rural et de la pêche maritime est la résiliation du bail. Pour tenter d'échapper à cette sanction, M. S... P... et l'Earl de la Terre Bleue font valoir que si M. H... M... a quitté leur structure sociétaire, il serait resté exploitant des parcelles données à bail. Toutefois, il est constant que ce bail avait été conclu pour permettre au Gaec de la Terre Bleue (auquel l'Earl de la Terre Bleue a fait suite ultérieurement) et à ses deux co-gérants, M. S... P... et M. H... M..., d'exploiter le foncier ainsi donné en location et que le retrait de M. H... M... de l'Earl le 25 mars 2013 s'est traduit pour lui par la cessation de l'exploitation des terres de l'Earl. Par ailleurs, le fait que M. H... M... soit le neveu des époux W... et Y... M... et qu'il soit devenu leur salarié ou leur associé ne permet pas de qualifier de « fraude » sa cessation d'exploitation des terres données à bail. Dès lors aucun des arguments développés par M. S... P... et l'Earl de la Terre Bleue ne permet d'écarter l'application des dispositions combinées des articles L 411-35 et L 411-31 du code rural et de la pêche maritime et, par voie de conséquence, de prononcer la résiliation du bail ;
ET AUX MOTIFS A LES SUPPOSER ADOPTES QUE - Sur la résiliation du bail – L'article L 411-31 du Code rural et de la pêche maritime prévoit, depuis la loi du 13 octobre 2014 que « lorsqu'un des copreneurs du bail cesse de participer à l'exploitation du bien loué, le copreneur qui continue à exploiter dispose de trois mois à compter de cette cessation pour demander au bailleur par lettre recommandée avec demande d'avis de réception que le bail se poursuive à son seul nom. Le propriétaire ne peut s'y opposer qu'en saisissant dans un délai fixé par décret le tribunal paritaire, qui statue alors sur la demande. Le présent alinéa est applicable aux baux conclus depuis plus de trois ans, sauf si la cessation d'activité du copreneur est due à un cas de force majeure. A peine de nullité, la lettre recommandée doit, d'une part, reproduire intégralement les dispositions du troisième alinéa du présent article et, d'autre part, mentionner expressément les motifs allégués pour cette demande ainsi que la date de cessation de l'activité du copreneur. » La loi n°2014-1170 du 13 octobre 2014 a expressément précisé en son article 4-V-B que ces dispositions s'appliquent aux baux en cours et que si l'un des copreneurs a cessé de participer à l'exploitation avant la date de publication de ladite loi, le délai de trois mois mentionné au troisième aliéna du présent article commence à courir à compter de cette date. Et l'article L 411-31 du même Code prévoit que « le bailleur peut également demander la résiliation du bail s'il justifie d'un des motifs suivants : 1°Toute contravention aux dispositions de l'article L411-35 ». Il est constant que le bail en cause a été signé le 3 octobre 2006 et que l'un de ses trois copreneurs, M. H... M..., a cessé d'exploiter cette parcelle à compter de 2013, soit plus de trois ans après le début du bail, et ce par choix et non pour un cas de force majeure. Par ailleurs, il ressort des liens familiaux entre le copreneur sortant et les propriétaires (neveu) et des déclarations de M. H... M... à l'audience que M. et Mme Y... et W... M... savaient dès 2013 qu'il avait cessé d'exploiter leur parcelle en cause. Cependant, l'article L 411-31 du Code rural prévoit les formes très précises que doit prendre cette formalité. Il ne s'agit d'ailleurs pas seulement d'informer les propriétaires du seul fait qu'un des copreneurs part mais surtout de motiver le fait que les copreneurs restants souhaitent continuer d'exploiter la parcelle et en ont les capacités, sans nuire aux intérêts du propriétaire, qui peut s'y opposer. La loi a donc prévu que cette demande devait se faire par courrier recommandé contenant des mentions précises sous peine de nullité. Au vu notamment de la sanction de la nullité encourue, il s'agit donc d'une disposition d'ordre public, à laquelle il ne peut être dérogé. La preuve par tout moyen de la connaissance de la situation de départ d'un copreneur par les propriétaires n'est donc pas suffisante. En l'espèce, les copreneurs restants, à savoir l'Earl de la Terre Bleue et M. S... P..., n'ont pas adressé leur demande de poursuite du bail sans M. H... M... dans les trois mois de la publication de la loi du 13 octobre 2014. Cette formalité substantielle n'ayant pas été respectée, il s'agit d'une contravention aux dispositions de l'article L411-35 du Code rural. En vertu de l'article L411-31, il y a donc lieu de prononcer la résiliation du bail en cause et d'ordonner l'expulsion des preneurs à compter du jugement en cause ;
1) ALORS QUE lorsqu'un des copreneurs cesse de participer à l'exploitation du bien loué, le copreneur qui continue à exploiter dispose de trois mois à compter de cette cessation pour demander au bailleur par lettre recommandée avec demande d'avis de réception que le bail se poursuive à son seul nom ; qu'il s'ensuit que la demande de poursuite du bail ne s'impose que lorsqu'il ne subsiste, à la suite du retrait d'un copreneur, qu'un seul preneur exploitant susceptible de poursuivre le bail ; qu'en retenant, pour prononcer la résiliation du bail, que le retrait le 25 mars 2013 de H... M..., l'un des trois copreneurs du bail, de l'Earl de la Terre Bleue se serait traduit par la cessation de sa participation à l'exploitation des terres et, qu'en conséquence, S... P... et l'Earl de la Terre Bleue, s'ils souhaitaient continuer à exploiter les parcelles en qualité de copreneurs, auraient dû demander aux bailleurs que le bail se poursuive à leurs seuls noms, quand elle constatait qu'à la suite du retrait de H... M... subsistaient deux copreneurs, M. P... et l'Earl de la Terre Bleue, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles L. 411-35 et L. 411-31 du code rural et de la pêche maritime ;
2) ALORS, en toute hypothèse, QUE la demande de poursuite du bail à la suite du retrait d'un copreneur ne s'impose qu'en présence de copreneurs personnes physiques ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a relevé que M. P... et l'Earl de la Terre Bleue étaient demeurés copreneurs du bail à la suite du retrait de H... M... de la société ; qu'en retenant, pour prononcer la résiliation du bail, qu'à la suite de son retrait de l'Earl de la Terre Bleue, H... M... aurait cessé de participer à l'exploitation des terres et, qu'en conséquence, M. P... et l'Earl, s'ils souhaitaient continuer à exploiter les parcelles en qualité de copreneurs, auraient dû demander aux bailleurs que le bail se poursuive à leurs seuls noms quand elle avait constaté que l'Earl de la Terre Bleue était copreneur du bail, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles L. 411-35 et L. 411-31 du code rural et de la pêche maritime ;
3) ALORS QU'il est interdit aux juges du fond de dénaturer l'objet du litige tel qu'il résulte des conclusions respectives des parties ; qu'en l'espèce, les parties s'opposaient sur le point de savoir si, à la suite de son retrait de l'Earl de la Terre Bleue, H... M... avait ou non continué à exploiter les terres prises à bail, W... et Y... M... soutenant qu'il avait cessé toute exploitation de ces terres tandis que M. P... et l'Earl de la Terre Bleue soutenaient qu'il avait conservé sa qualité de preneur à bail des terres litigieuses et continué de participer à leur exploitation ; qu'en affirmant, pour prononcer la résiliation du bail, qu'il est constant que le retrait de H... M... de l'Earl le 25 mars 2013 s'est traduit pour lui par la cessation de l'exploitation des terres de l'Earl, la cour d'appel a dénaturé les termes du litige et violé, en conséquence, l'article 4 du code de procédure civile ;
4) ALORS QUE le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'il ne peut fonder sa décision sur les moyens qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; qu'en relevant d'office, pour prononcer la résiliation du bail, qu'il serait constant que le bail avait été conclu pour permettre au Gaec de la Terre Bleue devenu Earl de la Terre Bleue et à ses deux co-gérants, S... P... et H... M..., d'exploiter le foncier ainsi donné en location quand ce moyen n'avait été soulevé par aucune des parties, la cour d'appel, qui n'a pas préalablement recueilli les observations des parties, a méconnu le principe de la contradiction et violé l'article 16 du code de procédure civile ;
5) ALORS QUE son retrait de la société locataire ne fait pas perdre sa qualité de co-preneur à l'associé qui a par ailleurs conclu le bail à titre personnel ; qu'en l'espèce, M. P... et l'Earl de la Terre Bleue faisaient valoir qu'à la suite de son retrait de l'Earl le 25 mars 2013, H... M... avait conservé sa qualité de preneur à bail des terres litigieuses et continué de participer à leur exploitation ainsi que cela ressortait tant de l'acte authentique de vente des terres du 19 septembre 2013, auquel H... M... était intervenu en qualité de fermier preneur en place aux fins de renoncer à son droit de préemption, que de sa reconstitution de carrière versée aux débats de laquelle il ressortait qu'il avait continué à être chef d'exploitation sur la période du 1er avril 2013 au 31 décembre 2018 ; qu'en prononçant la résiliation du bail sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si H... M... n'avait pas continué à être exploitant à la suite de son retrait de l'Earl, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 411-35 du code rural et de la pêche maritime ;
6) ALORS QUE son retrait de la société locataire ne fait pas perdre sa qualité de co-preneur à l'associé qui a par ailleurs conclu le bail à titre personnel M. P... et l'Earl de la Terre Bleue faisaient valoir qu'à la suite de son retrait de l'Earl le 25 mars 2013, H... M... avait conservé sa qualité de preneur à bail des terres litigieuses et continué de participer à leur exploitation ainsi que cela ressortait tant de l'acte authentique de vente des terres du 19 septembre 2013, auquel H... M... était intervenu en qualité de fermier preneur en place aux fins de renoncer à son droit de préemption, que de sa reconstitution de carrière versée aux débats de laquelle il ressortait qu'il avait continué à être chef d'exploitation sur la période du 1er avril 2013 au 31 décembre 2018 ; qu'en retenant, pour prononcer la résiliation du bail, qu'il serait constant que le bail avait été conclu pour permettre au Gaec de la Terre Bleue (devenu Earl de la Terre Bleue) et à ses deux co-gérants, S... P... et H... M..., d'exploiter le foncier ainsi donné en location, la cour d'appel qui a statué par des motifs inopérants, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 411-35 du code rural et de la pêche maritime ;
7) ALORS, en toute hypothèse, QUE la fraude corrompt tout ; qu'en l'espèce, M. P... et l'Earl de la Terre Bleue faisaient valoir qu'à la suite d'un incident de communication de pièces, rendu nécessaire par le refus des consorts M... de produire les pièces sollicitées tendant à clarifier leurs liens, ils avaient appris que les bailleurs avaient conclu le 1er septembre 2017 avec H... M..., qui était leur neveu, un contrat de travail à durée indéterminée à temps complet en qualité d'ouvrier agricole et que, concomitamment à la conclusion de ce contrat, le 14 septembre 2017, ils avaient saisi le tribunal paritaire des baux ruraux en résiliation du bail en raison de la cessation d'exploitation des terres par leur neveu ; qu'en se bornant à retenir, pour accueillir la demande de résiliation du bail, que le fait que H... M... soit le neveu des bailleurs et soit même devenu leur salarié ou leur associé ne permettait pas de qualifier de fraude sa cessation d'exploitation des terres données à bail sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si la concomitance de la conclusion d'un contrat de travail à durée indéterminée à temps complet avec l'un des copreneurs à bail et de l'action en résiliation de ce même bail pour cessation d'exploitation de ce même copreneur ne caractérisait pas une fraude des bailleurs au statut du fermage, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe fraus omnia corrumpit, ensemble les articles L. 411-35 et L. 411-31 du code rural et de la pêche maritime ;
8) ALORS, en toute hypothèse, QUE sauf stipulation conventionnelle expresse la seule volonté d'un copreneur de résilier le bail rural ne peut suffire à mettre fin au contrat à l'égard des autres copreneurs ; qu'en conséquence, le contrat de bail rural se poursuit automatiquement à l'égard de ces derniers et il appartient alors au bailleur informé qui souhaite s'y opposer de saisir le tribunal paritaire des baux ruraux ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté qu'il ressortait des liens familiaux entre les propriétaires et le copreneur sortant, H... M..., leur neveu, ainsi que des déclarations de ce dernier à l'audience, que les époux M... savaient, dès 2013, qu'il avait cessé d'exploiter les parcelles en cause ; qu'en retenant, pour prononcer la résiliation du bail, que la preuve de la connaissance de la situation de départ d'un copreneur par les propriétaires n'est pas suffisante pour écarter la résiliation du bail, la cour d'appel a violé l'article L. 411-35 du code rural et de la pêche maritime, ensemble l'article 1134 devenu 1103 du code civil ;
9) ALORS, en toute hypothèse, QUE le non-respect de l'obligation d'information à la charge du preneur continuant l'exploitation à la suite du départ d'un copreneur ne saurait donner lieu à résiliation en l'absence d'agissement de nature à compromettre la bonne exploitation du fonds ; qu'en se bornant, pour prononcer la résiliation du bail, à relever que H... M... aurait cessé d'exploiter les terres en mars 2013 et que M. P... et l'Earl de la Terre Bleue n'avaient pas demandé aux bailleurs que le bail se poursuive à leurs seuls noms dans le délai requis, sans constater que la bonne exploitation du fonds avait été compromise, la cour d'appel a violé les articles L. 411-31 et L. 411-35 du code rural et de la pêche maritime.
SECOND MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté la demande de condamnation de H... M... au titre de la liquidation de l'astreinte ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE – Sur la liquidation de l'astreinte – Par jugement avant dire droit rendu le 26 juillet 2018, le tribunal paritaire des baux ruraux de Verdun a ordonné à M. H... M... de communiquer aux autres parties "sa reconstitution de carrière établie par la MSA à la date la plus proche, sous peine d'une astreinte de 30 euros par jour de retard (pendant un mois maximum) à compter d'un délai de deux mois", le tribunal se réservant expressément la faculté de liquider l'astreinte. Ce jugement a été notifié le 23 août 2018 à M. H... M..., lequel devait donc produire les pièces réclamées le 23 octobre 2018 au plus tard. Il ressort des motifs de ce jugement que le but de cette demande de communication de pièce était de "clarifier depuis quand M. H... M... est le salarié des époux M...". Or, M. H... M... n'a produit le document intitulé "reconstitution de carrière" établi par la MSA que par lettre du 11 janvier 2019, soit plusieurs mois après la date limite qui lui avait été fixée par le tribunal paritaire pour ce faire, mais ce document, beaucoup plus laconique n'a rien ajouté à l'information déjà donnée grâce à la production du contrat de travail (au contraire, le contrat de travail permet de savoir de qui M. M... est devenu salarié, alors que l'imprimé de reconstitution de carrière délivré par la MSA ne donne pas le nom de l'employeur). Par conséquence l'injonction donnée à M. H... M... par le tribunal ayant été satisfaite en substance dans le délai imparti, il n'y a pas lieu à liquidation d'astreinte ;
ET AUX MOTIFS A LES SUPPOSER ADOPTES QUE – Sur la demande de liquidation d'astreinte – Par jugement en date du 26 juillet 2018, le Tribunal a ordonné à M. H... M... de communiquer aux autres parties sa reconstitution de carrière établie par la MSA à la date la plus proche, sous astreinte de 30 euros par jour de retard à compter d'un délai de deux mois après ce jugement, et ce pendant un délai d'un mois. Le Tribunal s'est réservé la possibilité de liquider l'astreinte. M. M... devait donc communiquer ce document avant le 26 septembre 2018. Il est établi qu'il a adressé au Tribunal et aux avocats dans ce délai sa reconstitution de carrière éditée depuis son espace personnel du site internet info-retraite. Il a aussi joint une copie de son contrat de travail. Cette communication de pièces devait avoir pour but, selon le jugement, « de clarifier depuis quand il est salarié des époux M... ». Or, cette information n'apparaît pas dans le relevé de carrière MSA, ni celui tiré du site internet, ni celui édité par la MSA elle-même et fourni en janvier 2019. Mais cette information a été fournie spontanément par M. H... M... via la communication de la copie de son contrat de travail démontrant de ce qu'il est le salarié des demandeurs depuis le 1er septembre 2017. Il a aussi été précisé spontanément lors de l'audience de plaidoirie qu'il est désormais associé des demandeurs depuis le 1er février 2019. Au vu de ces éléments, la demande de liquidation de l'astreinte sera rejetée. ;
1) ALORS QUE le juge qui constate l'inexécution ou le retard dans l'exécution de l'injonction assortie d'astreinte ne peut pas rejeter entièrement la demande de condamnation au titre de la liquidation de l'astreinte ; qu'en l'espèce, il ressort de la procédure que par jugement du 26 juillet 2018, notifié le 23 août suivant, le tribunal paritaire des baux ruraux de Verdun a ordonné à H... M... de communiquer sa reconstitution de carrière établie par la MSA à la date la plus proche sous astreinte de 30 euros par jour de retard à compter d'un délai de deux mois après la présente décision ; que la cour d'appel a constaté que H... M... n'a produit le document intitulé "reconstitution de carrière" établi par la MSA que par lettre du 11 janvier 2019, soit plusieurs mois après la date limite qui lui avait été fixée par le tribunal paritaire pour ce faire ; qu'en rejetant néanmoins la demande de condamnation au titre de la liquidation de l'astreinte, la cour d'appel qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article L. 131-4 du code des procédures civiles d'exécution ;
2) ALORS QUE l'astreinte provisoire ou définitive ne peut être supprimée en tout ou partie que s'il est établi que l'inexécution ou le retard dans l'exécution de l'injonction du juge provient, en tout ou partie, d'une cause étrangère ; qu'en retenant, pour rejeter la demande de condamnation au titre de la liquidation de l'astreinte, que l'injonction donnée à H... M... par le tribunal a été satisfaite en substance dans le délai imparti, ce dernier ayant communiqué dans le délai son contrat de travail permettant de savoir qu'il est salarié des époux M... depuis le 1er septembre 2017, sans constater qu'une cause étrangère avait empêché H... M... de produire, en temps utile, le document reconstitution de carrière établi par la MSA, la cour d'appel, qui a statué par un motif inopérant, a privé son arrêt de base légale au regard de l'article L. 131-4 du code des procédures civiles d'exécution ;
3) ALORS QUE si l'astreinte provisoire est liquidée en tenant compte du comportement de celui à qui l'injonction a été adressée et des difficultés qu'il a rencontrées pour l'exécuter, l'inexécution de l'obligation est un fait objectif qui doit être apprécié abstraction faite de l'opinion que pouvait en avoir le débiteur ; qu'en l'espèce, la production du document intitulé "reconstitution de carrière "établi par la MSA dans le délai imparti par le tribunal ne présentait aucune difficulté pour H... M... ; que la cour d'appel a constaté que H... M... n'avait pas produit ce document dans le délai imparti ; qu'en retenant, pour rejeter la demande de condamnation au titre de la liquidation de l'astreinte, que l'injonction donnée à H... M... par le tribunal a été satisfaite en substance dans le délai imparti, ce dernier ayant communiqué dans le délai son contrat de travail permettant de savoir qu'il est salarié des époux M... depuis le 1er septembre 2017 quand il importait peu que H... M... estimât que la production de ce document suffisait à l'exécution de l'obligation, fait objectif, la cour d'appel a violé l'article L. 131-4 du code des procédures civiles d'exécution.ECLI:FR:CCASS:2021:C300208
CIV. 3
JL
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 4 mars 2021
Rejet
M. CHAUVIN, président
Arrêt n° 208 F-D
Pourvoi n° J 20-14.141
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 4 MARS 2021
1°/ M. S... P..., domicilié [...] ,
2°/ l'Earl de la Terre Bleue, exploitation agricole à responsabilité limitée, dont le siège est [...] ,
ont formé le pourvoi n° J 20-14.141 contre l'arrêt rendu le 9 janvier 2020 par la cour d'appel de Nancy (2e chambre civile), dans le litige les opposant :
1°/ à M. W... M...,
2°/ à Mme Y... I..., épouse M...,
tous deux domiciliés [...] ,
3°/ à M. H... M..., domicilié [...] ,
défendeurs à la cassation.
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Barbieri, conseiller, les observations de la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat de M. P... et l'Earl de la Terre Bleue, de la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat des consorts M..., après débats en l'audience publique du 19 janvier 2021 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Barbieri, conseiller rapporteur, M. Echappé, conseiller doyen, et Mme Berdeaux, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Nancy, 9 janvier 2020), par acte du 3 octobre 2006, M. et Mme I... ont consenti à MM. P... et H... M..., ainsi qu'au groupement agricole d'exploitation en commun de la Terre Bleue, transformé depuis en exploitation agricole à responsabilité limitée (l'EARL), un bail rural d'une durée de dix-huit années.
2. L'assemblée générale extraordinaire de l'EARL du 25 mars 2013 a constaté le retrait de M. M... de la société.
3. Par actes des 9 octobre 2009 et 19 septembre 2013, M. et Mme I... ont vendu à M. W... M... et à son épouse les parcelles objet du bail.
4. Par déclaration du 15 septembre 2017, M. et Mme M... ont saisi le tribunal paritaire des baux ruraux en résiliation du bail en soutenant que M. H... M... avait cessé de participer à l'exploitation des terres et que les autres preneurs n'avaient pas demandé la poursuite du bail à leur profit.
Examen des moyens
Sur le premier moyen
Enoncé du moyen
5. M. P... et l'EARL font grief à l'arrêt de prononcer la résiliation du bail et d'ordonner leur expulsion, alors :
« 1°/ que, lorsqu'un des copreneurs cesse de participer à l'exploitation du bien loué, le copreneur qui continue à exploiter dispose de trois mois à compter de cette cessation pour demander au bailleur par lettre recommandée avec demande d'avis de réception que le bail se poursuive à son seul nom ; qu'il s'ensuit que la demande de poursuite du bail ne s'impose que lorsqu'il ne subsiste, à la suite du retrait d'un copreneur, qu'un seul preneur exploitant susceptible de poursuivre le bail ; qu'en retenant, pour prononcer la résiliation du bail, que le retrait le 25 mars 2013 de H... M..., l'un des trois copreneurs du bail, de l'Earl de la Terre Bleue se serait traduit par la cessation de sa participation à l'exploitation des terres et, qu'en conséquence, S... P... et l'Earl de la Terre Bleue, s'ils souhaitaient continuer à exploiter les parcelles en qualité de copreneurs, auraient dû demander aux bailleurs que le bail se poursuive à leurs seuls noms, quand elle constatait qu'à la suite du retrait de H... M... subsistaient deux copreneurs, M. P... et l'Earl de la Terre Bleue, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles L. 411-35 et L. 411-31 du code rural et de la pêche maritime ;
2°/ que la demande de poursuite du bail à la suite du retrait d'un copreneur ne s'impose qu'en présence de copreneurs personnes physiques ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a relevé que M. P... et l'Earl de la Terre Bleue étaient demeurés copreneurs du bail à la suite du retrait de H... M... de la société ; qu'en retenant, pour prononcer la résiliation du bail, qu'à la suite de son retrait de l'Earl de la Terre Bleue, H... M... aurait cessé de participer à l'exploitation des terres et, qu'en conséquence, M. P... et l'Earl, s'ils souhaitaient continuer à exploiter les parcelles en qualité de copreneurs, auraient dû demander aux bailleurs que le bail se poursuive à leurs seuls noms quand elle avait constaté que l'Earl de la Terre Bleue était copreneur du bail, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles L. 411-35 et L. 411-31 du code rural et de la pêche maritime ;
3°/ qu'il est interdit aux juges du fond de dénaturer l'objet du litige tel qu'il résulte des conclusions respectives des parties ; qu'en l'espèce, les parties s'opposaient sur le point de savoir si, à la suite de son retrait de l'Earl de la Terre Bleue, H... M... avait ou non continué à exploiter les terres prises à bail, W... et Y... M... soutenant qu'il avait cessé toute exploitation de ces terres tandis que M. P... et l'Earl de la Terre Bleue soutenaient qu'il avait conservé sa qualité de preneur à bail des terres litigieuses et continué de participer à leur exploitation ; qu'en affirmant, pour prononcer la résiliation du bail, qu'il est constant que le retrait de H... M... de l'Earl le 25 mars 2013 s'est traduit pour lui par la cessation de l'exploitation des terres de l'Earl, la cour d'appel a dénaturé les termes du litige et violé, en conséquence, l'article 4 du code de procédure civile ;
4°/ que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'il ne peut fonder sa décision sur les moyens qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; qu'en relevant d'office, pour prononcer la résiliation du bail, qu'il serait constant que le bail avait été conclu pour permettre au Gaec de la Terre Bleue devenu Earl de la Terre Bleue et à ses deux co-gérants, S... P... et H... M..., d'exploiter le foncier ainsi donné en location quand ce moyen n'avait été soulevé par aucune des parties, la cour d'appel, qui n'a pas préalablement recueilli les observations des parties, a méconnu le principe de la contradiction et violé l'article 16 du code de procédure civile ;
5° / que son retrait de la société locataire ne fait pas perdre sa qualité de co-preneur à l'associé qui a par ailleurs conclu le bail à titre personnel ; qu'en l'espèce, M. P... et l'Earl de la Terre Bleue faisaient valoir qu'à la suite de son retrait de l'Earl le 25 mars 2013, H... M... avait conservé sa qualité de preneur à bail des terres litigieuses et continué de participer à leur exploitation ainsi que cela ressortait tant de l'acte authentique de vente des terres du 19 septembre 2013, auquel H... M... était intervenu en qualité de fermier preneur en place aux fins de renoncer à son droit de préemption, que de sa reconstitution de carrière versée aux débats de laquelle il ressortait qu'il avait continué à être chef d'exploitation sur la période du 1er avril 2013 au 31 décembre 2018 ; qu'en prononçant la résiliation du bail sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si H... M... n'avait pas continué à être exploitant à la suite de son retrait de l'Earl, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 411-35 du code rural et de la pêche maritime ;
6°/ que son retrait de la société locataire ne fait pas perdre sa qualité de co-preneur à l'associé qui a par ailleurs conclu le bail à titre personnel ; que M. P... et l'Earl de la Terre Bleue faisaient valoir qu'à la suite de son retrait de l'Earl le 25 mars 2013, H... M... avait conservé sa qualité de preneur à bail des terres litigieuses et continué de participer à leur exploitation ainsi que cela ressortait tant de l'acte authentique de vente des terres du 19 septembre 2013, auquel H... M... était intervenu en qualité de fermier preneur en place aux fins de renoncer à son droit de préemption, que de sa reconstitution de carrière versée aux débats de laquelle il ressortait qu'il avait continué à être chef d'exploitation sur la période du 1er avril 2013 au 31 décembre 2018 ; qu'en retenant, pour prononcer la résiliation du bail, qu'il serait constant que le bail avait été conclu pour permettre au Gaec de la Terre Bleue (devenu Earl de la Terre Bleue) et à ses deux co-gérants, S... P... et H... M..., d'exploiter le foncier ainsi donné en location, la cour d'appel qui a statué par des motifs inopérants, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 411-35 du code rural et de la pêche maritime ;
7°/ en toute hypothèse, que la fraude corrompt tout ; qu'en l'espèce, M. P... et l'Earl de la Terre Bleue faisaient valoir qu'à la suite d'un incident de communication de pièces, rendu nécessaire par le refus des consorts M... de produire les pièces sollicitées tendant à clarifier leurs liens, ils avaient appris que les bailleurs avaient conclu le 1er septembre 2017 avec H... M..., qui était leur neveu, un contrat de travail à durée indéterminée à temps complet en qualité d'ouvrier agricole et que, concomitamment à la conclusion de ce contrat, le 14 septembre 2017, ils avaient saisi le tribunal paritaire des baux ruraux en résiliation du bail en raison de la cessation d'exploitation des terres par leur neveu ; qu'en se bornant à retenir, pour accueillir la demande de résiliation du bail, que le fait que H... M... soit le neveu des bailleurs et soit même devenu leur salarié ou leur associé ne permettait pas de qualifier de fraude sa cessation d'exploitation des terres données à bail sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si la concomitance de la conclusion d'un contrat de travail à durée indéterminée à temps complet avec l'un des copreneurs à bail et de l'action en résiliation de ce même bail pour cessation d'exploitation de ce même copreneur ne caractérisait pas une fraude des bailleurs au statut du fermage, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe fraus omnia corrumpit, ensemble les articles L. 411-35 et L. 411-31 du code rural et de la pêche maritime ;
8° / en toute hypothèse, que, sauf stipulation conventionnelle expresse la seule volonté d'un copreneur de résilier le bail rural ne peut suffire à mettre fin au contrat à l'égard des autres copreneurs ; qu'en conséquence, le contrat de bail rural se poursuit automatiquement à l'égard de ces derniers et il appartient alors au bailleur informé qui souhaite s'y opposer de saisir le tribunal paritaire des baux ruraux ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté qu'il ressortait des liens familiaux entre les propriétaires et le copreneur sortant, H... M..., leur neveu, ainsi que des déclarations de ce dernier à l'audience, que les époux M... savaient, dès 2013, qu'il avait cessé d'exploiter les parcelles en cause ; qu'en retenant, pour prononcer la résiliation du bail, que la preuve de la connaissance de la situation de départ d'un copreneur par les propriétaires n'est pas suffisante pour écarter la résiliation du bail, la cour d'appel a violé l'article L. 411-35 du code rural et de la pêche maritime, ensemble l'article 1134 devenu 1103 du code civil ;
9°/ en toute hypothèse, que le non-respect de l'obligation d'information à la charge du preneur continuant l'exploitation à la suite du départ d'un copreneur ne saurait donner lieu à résiliation en l'absence d'agissement de nature à compromettre la bonne exploitation du fonds ; qu'en se bornant, pour prononcer la résiliation du bail, à relever que H... M... aurait cessé d'exploiter les terres en mars 2013 et que M. P... et l'Earl de la Terre Bleue n'avaient pas demandé aux bailleurs que le bail se poursuive à leurs seuls noms dans le délai requis, sans constater que la bonne exploitation du fonds avait été compromise, la cour d'appel a violé les articles L. 411-31 et L. 411-35 du code rural et de la pêche maritime. »
Réponse de la Cour
6. En premier lieu, la cour d'appel a énoncé à bon droit, d'une part, que l'article L. 411-31, II, 1°, du code rural et de la pêche maritime permet au bailleur de demander la résiliation du bail s'il justifie de toute contravention aux dispositions de l'article L. 411-35 du même code, d'autre part, que le défaut d'accomplissement de l'obligation d'information du propriétaire, en cas de cessation d'activité de l'un des copreneurs, constitue un manquement aux obligations nées du bail et une violation du texte précité, lequel, de portée générale, ne fait aucune distinction entre les personnes physiques et les personnes morales exploitantes.
7. Elle a constaté que M. M... avait cessé toute exploitation des terres prises à bail et retenu que M. P... et l'EARL, ses copreneurs, n'avaient pas sollicité, dans le délai qui leur était imparti, la continuation de la location de leur chef.
8. C'est sans méconnaître l'objet du litige ni violer le principe de la contradiction qu'elle en a exactement déduit que la résiliation du bail constituait la sanction d'une telle omission.
9. En second lieu, la cour d'appel a retenu, souverainement, que le retrait de M. M... de l'EARL s'était traduit, pour lui, par la cessation de l'exploitation des terres qu'il avait prises à bail et que la preuve d'un montage frauduleux avec ses proches n'était pas établie et, exactement, que la connaissance de ce départ par les bailleurs était sans incidence, ceux-ci n'étant pas tenus, par ailleurs, de démontrer un préjudice, ni une atteinte à la bonne exploitation du fonds.
10. Ayant procédé aux recherches prétendument omises, elle a pu prononcer la résiliation aux torts des trois preneurs.
11. Le moyen n'est donc pas fondé.
Sur le second moyen
Enoncé du moyen
12. M. P... et l'EARL font grief à l'arrêt de rejeter la demande de condamnation de M. M... au titre de la liquidation de l'astreinte, alors :
« 1°/ que le juge qui constate l'inexécution ou le retard dans l'exécution de l'injonction assortie d'astreinte ne peut pas rejeter entièrement la demande de condamnation au titre de la liquidation de l'astreinte ; qu'en l'espèce, il ressort de la procédure que par jugement du 26 juillet 2018, notifié le 23 août suivant, le tribunal paritaire des baux ruraux de Verdun a ordonné à H... M... de communiquer sa reconstitution de carrière établie par la MSA à la date la plus proche sous astreinte de 30 euros par jour de retard à compter d'un délai de deux mois après la présente décision ; que la cour d'appel a constaté que H... M... n'a produit le document intitulé "reconstitution de carrière" établi par la MSA que par lettre du 11 janvier 2019, soit plusieurs mois après la date limite qui lui avait été fixée par le tribunal paritaire pour ce faire ; qu'en rejetant néanmoins la demande de condamnation au titre de la liquidation de l'astreinte, la cour d'appel qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article L. 131-4 du code des procédures civiles d'exécution ;
2°/ que l'astreinte provisoire ou définitive ne peut être supprimée en tout ou partie que s'il est établi que l'inexécution ou le retard dans l'exécution de l'injonction du juge provient, en tout ou partie, d'une cause étrangère ; qu'en retenant, pour rejeter la demande de condamnation au titre de la liquidation de l'astreinte, que l'injonction donnée à H... M... par le tribunal a été satisfaite en substance dans le délai imparti, ce dernier ayant communiqué dans le délai son contrat de travail permettant de savoir qu'il est salarié des époux M... depuis le 1er septembre 2017, sans constater qu'une cause étrangère avait empêché H... M... de produire, en temps utile, le document reconstitution de carrière établi par la MSA, la cour d'appel, qui a statué par un motif inopérant, a privé son arrêt de base légale au regard de l'article L. 131-4 du code des procédures civiles d'exécution ;
3°/ que, si l'astreinte provisoire est liquidée en tenant compte du comportement de celui à qui l'injonction a été adressée et des difficultés qu'il a rencontrées pour l'exécuter, l'inexécution de l'obligation est un fait objectif qui doit être apprécié abstraction faite de l'opinion que pouvait en avoir le débiteur ; qu'en l'espèce, la production du document intitulé "reconstitution de carrière" établi par la MSA dans le délai imparti par le tribunal ne présentait aucune difficulté pour H... M... ; que la cour d'appel a constaté que H... M... n'avait pas produit ce document dans le délai imparti ; qu'en retenant, pour rejeter la demande de condamnation au titre de la liquidation de l'astreinte, que l'injonction donnée à H... M... par le tribunal a été satisfaite en substance dans le délai imparti, ce dernier ayant communiqué dans le délai son contrat de travail permettant de savoir qu'il est salarié des époux M... depuis le 1er septembre 2017 quand il importait peu que H... M... estimât que la production de ce document suffisait à l'exécution de l'obligation, fait objectif, la cour d'appel a violé l'article L. 131-4 du code des procédures civiles d'exécution. »
Réponse de la Cour
13. Ayant relevé que l'injonction de communication de pièces prononcée par le jugement avait pour objet de déterminer la date d'engagement de M. H... M... en qualité de salarié de M. et Mme M... et que celui-ci avait communiqué dans le délai imparti le contrat de travail qu'il avait conclu, ce qui permettait d'accéder à l'information attendue, la cour d'appel, qui a constaté que l'injonction avait été satisfaite en substance et qui n'était pas tenue de rechercher si une cause étrangère était établie, en a souverainement déduit que la liquidation de l'astreinte était devenue sans objet.
14. Le moyen n'est donc pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. P... et l'Earl de la Terre Bleue aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatre mars deux mille vingt et un. MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils, pour M. P... et l'Earl de la Terre Bleue
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR prononcé la résiliation du bail en date du 3 octobre 2006 liant M. S... P..., M. H... M... et l'Earl de la Terre Bleue à M. et Mme Y... et W... M... portant sur des parcelles situées sur la Commune de Luzy Saint Martin pour 26ha 3a 5ca, d'AVOIR dit qu'en conséquence, M. S... P..., M. H... M... et l'Earl de la Terre Bleue, et tous occupants de leur chef, devront laisser lesdites terres libres après un délai d'un mois à compter de la signification de la présente décision et d'AVOIR dit qu'au cas où ils se maintiendraient indûment sur ces terres, ils pourront en être expulsés conformément à la loi et avec l'assistance de la force publique si besoin;
AUX MOTIFS PROPRES QUE - Sur la résiliation du bail – L'article L411-35 du code rural et de la pêche maritime, aliénas 3 et 4, dans leur rédaction actuelle, dispose : « Lorsqu'un des copreneurs du bail cesse de participer à l'exploitation du bien loué, le copreneur qui continue à exploiter dispose de trois mois à compter de cette cessation pour demander au bailleur par lettre recommandée avec demande d'avis de réception que le bail se poursuive à son seul nom. Le propriétaire ne peut s'y opposer qu'en saisissant dans un délai fixé par décret le tribunal paritaire, qui statue alors sur la demande. Le présent alinéa est applicable aux baux conclus depuis plus de trois ans, sauf si la cessation d'activité du copreneur est due à un cas de force majeure. A peine de nullité, la lettre recommandée doit, d'une part, reproduire intégralement les dispositions du troisième alinéa du présent article et, d'autre part, mentionner expressément les motifs allégués pour cette demande ainsi que la date de cessation de l'activité du copreneur. » Cette rédaction est issue de la loi n°2014-1170 du 13 octobre 2014, entrée en vigueur le 14 octobre 2014. L'article 4-V-B de ladite loi dispose que les deux alinéas précités sont applicables aux baux en cours et que si l'un des copreneurs a cessé de participer à l'exploitation avant la date de publication de la présente loi, le délai de trois mois mentionné à l'aliéna 3 précité commence à courir à compter de cette date (c'est-à-dire le 14 octobre 2014). M. S... P... et l'Earl de la Terre Bleue ne peuvent donc reprocher aux époux W... et Y... M... de vouloir faire une application rétroactive de la loi du 13 octobre 2014, puisqu'ils ne font que demander l'application des dispositions transitoires prévues par la loi elle-même. Il en résulte que M. S... P... et l'Earl de la Terre Bleue, s'ils souhaitaient continuer à exploiter les parcelles en qualité de copreneurs devaient, entre le 14 octobre 2014 et 14 janvier 2015, demander aux bailleurs, les époux W... et Y... M..., que le bail se poursuive à leurs seuls noms. Il n'est pas contesté qu'ils n'ont jamais formé cette demande. La sanction de cette abstention telle qu'elle est prévue par l'article L411-31 du code rural et de la pêche maritime est la résiliation du bail. Pour tenter d'échapper à cette sanction, M. S... P... et l'Earl de la Terre Bleue font valoir que si M. H... M... a quitté leur structure sociétaire, il serait resté exploitant des parcelles données à bail. Toutefois, il est constant que ce bail avait été conclu pour permettre au Gaec de la Terre Bleue (auquel l'Earl de la Terre Bleue a fait suite ultérieurement) et à ses deux co-gérants, M. S... P... et M. H... M..., d'exploiter le foncier ainsi donné en location et que le retrait de M. H... M... de l'Earl le 25 mars 2013 s'est traduit pour lui par la cessation de l'exploitation des terres de l'Earl. Par ailleurs, le fait que M. H... M... soit le neveu des époux W... et Y... M... et qu'il soit devenu leur salarié ou leur associé ne permet pas de qualifier de « fraude » sa cessation d'exploitation des terres données à bail. Dès lors aucun des arguments développés par M. S... P... et l'Earl de la Terre Bleue ne permet d'écarter l'application des dispositions combinées des articles L 411-35 et L 411-31 du code rural et de la pêche maritime et, par voie de conséquence, de prononcer la résiliation du bail ;
ET AUX MOTIFS A LES SUPPOSER ADOPTES QUE - Sur la résiliation du bail – L'article L 411-31 du Code rural et de la pêche maritime prévoit, depuis la loi du 13 octobre 2014 que « lorsqu'un des copreneurs du bail cesse de participer à l'exploitation du bien loué, le copreneur qui continue à exploiter dispose de trois mois à compter de cette cessation pour demander au bailleur par lettre recommandée avec demande d'avis de réception que le bail se poursuive à son seul nom. Le propriétaire ne peut s'y opposer qu'en saisissant dans un délai fixé par décret le tribunal paritaire, qui statue alors sur la demande. Le présent alinéa est applicable aux baux conclus depuis plus de trois ans, sauf si la cessation d'activité du copreneur est due à un cas de force majeure. A peine de nullité, la lettre recommandée doit, d'une part, reproduire intégralement les dispositions du troisième alinéa du présent article et, d'autre part, mentionner expressément les motifs allégués pour cette demande ainsi que la date de cessation de l'activité du copreneur. » La loi n°2014-1170 du 13 octobre 2014 a expressément précisé en son article 4-V-B que ces dispositions s'appliquent aux baux en cours et que si l'un des copreneurs a cessé de participer à l'exploitation avant la date de publication de ladite loi, le délai de trois mois mentionné au troisième aliéna du présent article commence à courir à compter de cette date. Et l'article L 411-31 du même Code prévoit que « le bailleur peut également demander la résiliation du bail s'il justifie d'un des motifs suivants : 1°Toute contravention aux dispositions de l'article L411-35 ». Il est constant que le bail en cause a été signé le 3 octobre 2006 et que l'un de ses trois copreneurs, M. H... M..., a cessé d'exploiter cette parcelle à compter de 2013, soit plus de trois ans après le début du bail, et ce par choix et non pour un cas de force majeure. Par ailleurs, il ressort des liens familiaux entre le copreneur sortant et les propriétaires (neveu) et des déclarations de M. H... M... à l'audience que M. et Mme Y... et W... M... savaient dès 2013 qu'il avait cessé d'exploiter leur parcelle en cause. Cependant, l'article L 411-31 du Code rural prévoit les formes très précises que doit prendre cette formalité. Il ne s'agit d'ailleurs pas seulement d'informer les propriétaires du seul fait qu'un des copreneurs part mais surtout de motiver le fait que les copreneurs restants souhaitent continuer d'exploiter la parcelle et en ont les capacités, sans nuire aux intérêts du propriétaire, qui peut s'y opposer. La loi a donc prévu que cette demande devait se faire par courrier recommandé contenant des mentions précises sous peine de nullité. Au vu notamment de la sanction de la nullité encourue, il s'agit donc d'une disposition d'ordre public, à laquelle il ne peut être dérogé. La preuve par tout moyen de la connaissance de la situation de départ d'un copreneur par les propriétaires n'est donc pas suffisante. En l'espèce, les copreneurs restants, à savoir l'Earl de la Terre Bleue et M. S... P..., n'ont pas adressé leur demande de poursuite du bail sans M. H... M... dans les trois mois de la publication de la loi du 13 octobre 2014. Cette formalité substantielle n'ayant pas été respectée, il s'agit d'une contravention aux dispositions de l'article L411-35 du Code rural. En vertu de l'article L411-31, il y a donc lieu de prononcer la résiliation du bail en cause et d'ordonner l'expulsion des preneurs à compter du jugement en cause ;
1) ALORS QUE lorsqu'un des copreneurs cesse de participer à l'exploitation du bien loué, le copreneur qui continue à exploiter dispose de trois mois à compter de cette cessation pour demander au bailleur par lettre recommandée avec demande d'avis de réception que le bail se poursuive à son seul nom ; qu'il s'ensuit que la demande de poursuite du bail ne s'impose que lorsqu'il ne subsiste, à la suite du retrait d'un copreneur, qu'un seul preneur exploitant susceptible de poursuivre le bail ; qu'en retenant, pour prononcer la résiliation du bail, que le retrait le 25 mars 2013 de H... M..., l'un des trois copreneurs du bail, de l'Earl de la Terre Bleue se serait traduit par la cessation de sa participation à l'exploitation des terres et, qu'en conséquence, S... P... et l'Earl de la Terre Bleue, s'ils souhaitaient continuer à exploiter les parcelles en qualité de copreneurs, auraient dû demander aux bailleurs que le bail se poursuive à leurs seuls noms, quand elle constatait qu'à la suite du retrait de H... M... subsistaient deux copreneurs, M. P... et l'Earl de la Terre Bleue, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles L. 411-35 et L. 411-31 du code rural et de la pêche maritime ;
2) ALORS, en toute hypothèse, QUE la demande de poursuite du bail à la suite du retrait d'un copreneur ne s'impose qu'en présence de copreneurs personnes physiques ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a relevé que M. P... et l'Earl de la Terre Bleue étaient demeurés copreneurs du bail à la suite du retrait de H... M... de la société ; qu'en retenant, pour prononcer la résiliation du bail, qu'à la suite de son retrait de l'Earl de la Terre Bleue, H... M... aurait cessé de participer à l'exploitation des terres et, qu'en conséquence, M. P... et l'Earl, s'ils souhaitaient continuer à exploiter les parcelles en qualité de copreneurs, auraient dû demander aux bailleurs que le bail se poursuive à leurs seuls noms quand elle avait constaté que l'Earl de la Terre Bleue était copreneur du bail, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles L. 411-35 et L. 411-31 du code rural et de la pêche maritime ;
3) ALORS QU'il est interdit aux juges du fond de dénaturer l'objet du litige tel qu'il résulte des conclusions respectives des parties ; qu'en l'espèce, les parties s'opposaient sur le point de savoir si, à la suite de son retrait de l'Earl de la Terre Bleue, H... M... avait ou non continué à exploiter les terres prises à bail, W... et Y... M... soutenant qu'il avait cessé toute exploitation de ces terres tandis que M. P... et l'Earl de la Terre Bleue soutenaient qu'il avait conservé sa qualité de preneur à bail des terres litigieuses et continué de participer à leur exploitation ; qu'en affirmant, pour prononcer la résiliation du bail, qu'il est constant que le retrait de H... M... de l'Earl le 25 mars 2013 s'est traduit pour lui par la cessation de l'exploitation des terres de l'Earl, la cour d'appel a dénaturé les termes du litige et violé, en conséquence, l'article 4 du code de procédure civile ;
4) ALORS QUE le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'il ne peut fonder sa décision sur les moyens qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; qu'en relevant d'office, pour prononcer la résiliation du bail, qu'il serait constant que le bail avait été conclu pour permettre au Gaec de la Terre Bleue devenu Earl de la Terre Bleue et à ses deux co-gérants, S... P... et H... M..., d'exploiter le foncier ainsi donné en location quand ce moyen n'avait été soulevé par aucune des parties, la cour d'appel, qui n'a pas préalablement recueilli les observations des parties, a méconnu le principe de la contradiction et violé l'article 16 du code de procédure civile ;
5) ALORS QUE son retrait de la société locataire ne fait pas perdre sa qualité de co-preneur à l'associé qui a par ailleurs conclu le bail à titre personnel ; qu'en l'espèce, M. P... et l'Earl de la Terre Bleue faisaient valoir qu'à la suite de son retrait de l'Earl le 25 mars 2013, H... M... avait conservé sa qualité de preneur à bail des terres litigieuses et continué de participer à leur exploitation ainsi que cela ressortait tant de l'acte authentique de vente des terres du 19 septembre 2013, auquel H... M... était intervenu en qualité de fermier preneur en place aux fins de renoncer à son droit de préemption, que de sa reconstitution de carrière versée aux débats de laquelle il ressortait qu'il avait continué à être chef d'exploitation sur la période du 1er avril 2013 au 31 décembre 2018 ; qu'en prononçant la résiliation du bail sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si H... M... n'avait pas continué à être exploitant à la suite de son retrait de l'Earl, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 411-35 du code rural et de la pêche maritime ;
6) ALORS QUE son retrait de la société locataire ne fait pas perdre sa qualité de co-preneur à l'associé qui a par ailleurs conclu le bail à titre personnel M. P... et l'Earl de la Terre Bleue faisaient valoir qu'à la suite de son retrait de l'Earl le 25 mars 2013, H... M... avait conservé sa qualité de preneur à bail des terres litigieuses et continué de participer à leur exploitation ainsi que cela ressortait tant de l'acte authentique de vente des terres du 19 septembre 2013, auquel H... M... était intervenu en qualité de fermier preneur en place aux fins de renoncer à son droit de préemption, que de sa reconstitution de carrière versée aux débats de laquelle il ressortait qu'il avait continué à être chef d'exploitation sur la période du 1er avril 2013 au 31 décembre 2018 ; qu'en retenant, pour prononcer la résiliation du bail, qu'il serait constant que le bail avait été conclu pour permettre au Gaec de la Terre Bleue (devenu Earl de la Terre Bleue) et à ses deux co-gérants, S... P... et H... M..., d'exploiter le foncier ainsi donné en location, la cour d'appel qui a statué par des motifs inopérants, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 411-35 du code rural et de la pêche maritime ;
7) ALORS, en toute hypothèse, QUE la fraude corrompt tout ; qu'en l'espèce, M. P... et l'Earl de la Terre Bleue faisaient valoir qu'à la suite d'un incident de communication de pièces, rendu nécessaire par le refus des consorts M... de produire les pièces sollicitées tendant à clarifier leurs liens, ils avaient appris que les bailleurs avaient conclu le 1er septembre 2017 avec H... M..., qui était leur neveu, un contrat de travail à durée indéterminée à temps complet en qualité d'ouvrier agricole et que, concomitamment à la conclusion de ce contrat, le 14 septembre 2017, ils avaient saisi le tribunal paritaire des baux ruraux en résiliation du bail en raison de la cessation d'exploitation des terres par leur neveu ; qu'en se bornant à retenir, pour accueillir la demande de résiliation du bail, que le fait que H... M... soit le neveu des bailleurs et soit même devenu leur salarié ou leur associé ne permettait pas de qualifier de fraude sa cessation d'exploitation des terres données à bail sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si la concomitance de la conclusion d'un contrat de travail à durée indéterminée à temps complet avec l'un des copreneurs à bail et de l'action en résiliation de ce même bail pour cessation d'exploitation de ce même copreneur ne caractérisait pas une fraude des bailleurs au statut du fermage, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe fraus omnia corrumpit, ensemble les articles L. 411-35 et L. 411-31 du code rural et de la pêche maritime ;
8) ALORS, en toute hypothèse, QUE sauf stipulation conventionnelle expresse la seule volonté d'un copreneur de résilier le bail rural ne peut suffire à mettre fin au contrat à l'égard des autres copreneurs ; qu'en conséquence, le contrat de bail rural se poursuit automatiquement à l'égard de ces derniers et il appartient alors au bailleur informé qui souhaite s'y opposer de saisir le tribunal paritaire des baux ruraux ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté qu'il ressortait des liens familiaux entre les propriétaires et le copreneur sortant, H... M..., leur neveu, ainsi que des déclarations de ce dernier à l'audience, que les époux M... savaient, dès 2013, qu'il avait cessé d'exploiter les parcelles en cause ; qu'en retenant, pour prononcer la résiliation du bail, que la preuve de la connaissance de la situation de départ d'un copreneur par les propriétaires n'est pas suffisante pour écarter la résiliation du bail, la cour d'appel a violé l'article L. 411-35 du code rural et de la pêche maritime, ensemble l'article 1134 devenu 1103 du code civil ;
9) ALORS, en toute hypothèse, QUE le non-respect de l'obligation d'information à la charge du preneur continuant l'exploitation à la suite du départ d'un copreneur ne saurait donner lieu à résiliation en l'absence d'agissement de nature à compromettre la bonne exploitation du fonds ; qu'en se bornant, pour prononcer la résiliation du bail, à relever que H... M... aurait cessé d'exploiter les terres en mars 2013 et que M. P... et l'Earl de la Terre Bleue n'avaient pas demandé aux bailleurs que le bail se poursuive à leurs seuls noms dans le délai requis, sans constater que la bonne exploitation du fonds avait été compromise, la cour d'appel a violé les articles L. 411-31 et L. 411-35 du code rural et de la pêche maritime.
SECOND MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté la demande de condamnation de H... M... au titre de la liquidation de l'astreinte ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE – Sur la liquidation de l'astreinte – Par jugement avant dire droit rendu le 26 juillet 2018, le tribunal paritaire des baux ruraux de Verdun a ordonné à M. H... M... de communiquer aux autres parties "sa reconstitution de carrière établie par la MSA à la date la plus proche, sous peine d'une astreinte de 30 euros par jour de retard (pendant un mois maximum) à compter d'un délai de deux mois", le tribunal se réservant expressément la faculté de liquider l'astreinte. Ce jugement a été notifié le 23 août 2018 à M. H... M..., lequel devait donc produire les pièces réclamées le 23 octobre 2018 au plus tard. Il ressort des motifs de ce jugement que le but de cette demande de communication de pièce était de "clarifier depuis quand M. H... M... est le salarié des époux M...". Or, M. H... M... n'a produit le document intitulé "reconstitution de carrière" établi par la MSA que par lettre du 11 janvier 2019, soit plusieurs mois après la date limite qui lui avait été fixée par le tribunal paritaire pour ce faire, mais ce document, beaucoup plus laconique n'a rien ajouté à l'information déjà donnée grâce à la production du contrat de travail (au contraire, le contrat de travail permet de savoir de qui M. M... est devenu salarié, alors que l'imprimé de reconstitution de carrière délivré par la MSA ne donne pas le nom de l'employeur). Par conséquence l'injonction donnée à M. H... M... par le tribunal ayant été satisfaite en substance dans le délai imparti, il n'y a pas lieu à liquidation d'astreinte ;
ET AUX MOTIFS A LES SUPPOSER ADOPTES QUE – Sur la demande de liquidation d'astreinte – Par jugement en date du 26 juillet 2018, le Tribunal a ordonné à M. H... M... de communiquer aux autres parties sa reconstitution de carrière établie par la MSA à la date la plus proche, sous astreinte de 30 euros par jour de retard à compter d'un délai de deux mois après ce jugement, et ce pendant un délai d'un mois. Le Tribunal s'est réservé la possibilité de liquider l'astreinte. M. M... devait donc communiquer ce document avant le 26 septembre 2018. Il est établi qu'il a adressé au Tribunal et aux avocats dans ce délai sa reconstitution de carrière éditée depuis son espace personnel du site internet info-retraite. Il a aussi joint une copie de son contrat de travail. Cette communication de pièces devait avoir pour but, selon le jugement, « de clarifier depuis quand il est salarié des époux M... ». Or, cette information n'apparaît pas dans le relevé de carrière MSA, ni celui tiré du site internet, ni celui édité par la MSA elle-même et fourni en janvier 2019. Mais cette information a été fournie spontanément par M. H... M... via la communication de la copie de son contrat de travail démontrant de ce qu'il est le salarié des demandeurs depuis le 1er septembre 2017. Il a aussi été précisé spontanément lors de l'audience de plaidoirie qu'il est désormais associé des demandeurs depuis le 1er février 2019. Au vu de ces éléments, la demande de liquidation de l'astreinte sera rejetée. ;
1) ALORS QUE le juge qui constate l'inexécution ou le retard dans l'exécution de l'injonction assortie d'astreinte ne peut pas rejeter entièrement la demande de condamnation au titre de la liquidation de l'astreinte ; qu'en l'espèce, il ressort de la procédure que par jugement du 26 juillet 2018, notifié le 23 août suivant, le tribunal paritaire des baux ruraux de Verdun a ordonné à H... M... de communiquer sa reconstitution de carrière établie par la MSA à la date la plus proche sous astreinte de 30 euros par jour de retard à compter d'un délai de deux mois après la présente décision ; que la cour d'appel a constaté que H... M... n'a produit le document intitulé "reconstitution de carrière" établi par la MSA que par lettre du 11 janvier 2019, soit plusieurs mois après la date limite qui lui avait été fixée par le tribunal paritaire pour ce faire ; qu'en rejetant néanmoins la demande de condamnation au titre de la liquidation de l'astreinte, la cour d'appel qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article L. 131-4 du code des procédures civiles d'exécution ;
2) ALORS QUE l'astreinte provisoire ou définitive ne peut être supprimée en tout ou partie que s'il est établi que l'inexécution ou le retard dans l'exécution de l'injonction du juge provient, en tout ou partie, d'une cause étrangère ; qu'en retenant, pour rejeter la demande de condamnation au titre de la liquidation de l'astreinte, que l'injonction donnée à H... M... par le tribunal a été satisfaite en substance dans le délai imparti, ce dernier ayant communiqué dans le délai son contrat de travail permettant de savoir qu'il est salarié des époux M... depuis le 1er septembre 2017, sans constater qu'une cause étrangère avait empêché H... M... de produire, en temps utile, le document reconstitution de carrière établi par la MSA, la cour d'appel, qui a statué par un motif inopérant, a privé son arrêt de base légale au regard de l'article L. 131-4 du code des procédures civiles d'exécution ;
3) ALORS QUE si l'astreinte provisoire est liquidée en tenant compte du comportement de celui à qui l'injonction a été adressée et des difficultés qu'il a rencontrées pour l'exécuter, l'inexécution de l'obligation est un fait objectif qui doit être apprécié abstraction faite de l'opinion que pouvait en avoir le débiteur ; qu'en l'espèce, la production du document intitulé "reconstitution de carrière "établi par la MSA dans le délai imparti par le tribunal ne présentait aucune difficulté pour H... M... ; que la cour d'appel a constaté que H... M... n'avait pas produit ce document dans le délai imparti ; qu'en retenant, pour rejeter la demande de condamnation au titre de la liquidation de l'astreinte, que l'injonction donnée à H... M... par le tribunal a été satisfaite en substance dans le délai imparti, ce dernier ayant communiqué dans le délai son contrat de travail permettant de savoir qu'il est salarié des époux M... depuis le 1er septembre 2017 quand il importait peu que H... M... estimât que la production de ce document suffisait à l'exécution de l'obligation, fait objectif, la cour d'appel a violé l'article L. 131-4 du code des procédures civiles d'exécution.