Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 10 février 2021, 19-14.315, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


SOC.

SG



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 10 février 2021




Rejet


M. HUGLO, conseiller doyen faisant fonction de président



Arrêt n° 206 F-D

Pourvoi n° C 19-14.315




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 10 FÉVRIER 2021

M. G... Q..., domicilié [...] , a formé le pourvoi n° C 19-14.315 contre l'arrêt rendu le 29 janvier 2019 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 8), dans le litige l'opposant à la société Saint-Honoré, dont le siège est [...] , venant aux droits de la société [...] , défenderesse à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les cinq moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Sommé, conseiller, les observations de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de M. Q..., de la SCP Gadiou et Chevallier, avocat de la société Saint-Honoré, après débats en l'audience publique du 16 décembre 2020 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Sommé, conseiller rapporteur, M. Rinuy, conseiller, et Mme Jouanneau, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 29 janvier 2019), M. Q... a été engagé à compter du 18 mars 2002 en qualité de responsable des ressources humaines par la société [...] , devenue société [...] , aux droits de laquelle vient la société Saint-Honoré.

2. Le salarié a été licencié pour faute lourde par lettre du 26 juin 2011.

3. Se prévalant d'un mandat de conseiller prud'homme, il a saisi la juridiction prud'homale, le 8 février 2012, de demandes tendant à titre principal à la nullité de son licenciement pour défaut d'autorisation préalable par l'inspecteur du travail et au paiement de diverses sommes à titre salarial et indemnitaire.

Examen des moyens

Sur le deuxième moyen, pris en ses première et deuxième branches, le troisième et le cinquième moyens, ci-après annexés

4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

5. Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de ses demandes tendant à la nullité de son licenciement et au paiement de diverses sommes à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'indemnité pour méconnaissance du statut protecteur, d'indemnisation du préjudice résultant de la non perception des accessoires conventionnels et contractuels, de rappel de salaire sur mise à pied outre les congés payés afférents, d'indemnité compensatrice de congés payés, d'indemnité de préavis outre les congés payés afférents et d'indemnité conventionnelle de licenciement, alors « que le salarié investi d'un mandat de conseiller prud'homme ne peut être licencié sans autorisation administrative dès lors qu'il a informé l'employeur de l'existence de ce mandat ou s'il rapporte la preuve que l'employeur en avait connaissance ; qu'en retenant que le salarié ne démontrait pas que l'employeur avait connaissance de son mandat sans rechercher si, ainsi qu'il était soutenu devant elle, cette connaissance ne résultait pas des nombreuses absences du salarié de son poste de travail pour les besoins de son mandat, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 2411-1-17 et L. 2411-22 du code du travail.»

Réponse de la Cour

6. Il appartient au salarié qui se prévaut du statut protecteur lié à un mandat extérieur à l'entreprise d'établir qu'il a informé son employeur de l'existence de ce mandat au plus tard lors de l'entretien préalable au licenciement, ou, s'il s'agit d'une rupture ne nécessitant pas un entretien préalable, au plus tard avant la notification de l'acte de rupture, ou que celui-ci en avait connaissance.

7. La cour d'appel qui a constaté qu'en l'absence d'élément probant, la connaissance par l'employeur de la qualité de conseiller prud'homme du salarié, avant le licenciement de celui-ci, ne revêtait aucun caractère certain, de sorte que l'intéressé, n'ayant fait état de cette qualité auprès de son employeur que postérieurement à son licenciement, ne pouvait se prévaloir du statut protecteur attaché à ce mandat, a, sans être tenue de suivre le salarié dans le détail de son argumentation, légalement justifié sa décision.

Sur le deuxième moyen, pris en ses troisième à sixième branches

Enoncé du moyen

8. Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de ses demandes tendant à dire son licenciement sans cause réelle et sérieuse et à condamner l'employeur au paiement de diverses sommes à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'indemnisation du préjudice résultant de la non perception des accessoires conventionnels et contractuels, de rappel de salaire sur mise à pied outre les congés payés afférents, d'indemnité compensatrice de congés payés, d'indemnité de préavis outre les congés payés afférents et d'indemnité conventionnelle de licenciement, alors :

« 3°/ que la lettre de licenciement fixe les termes du litige ; qu'en retenant, pour dire le licenciement justifié par une faute lourde, que le salarié avait fait preuve d'une déloyauté incontestable preuve de sa détermination à faire prévaloir dans l'exécution du contrat de travail son intérêt sur celui de l'employer quand aucun manquement du salarié à son obligation de loyauté n'était invoqué dans la lettre de licenciement, la cour d'appel a violé les articles L. 1232-6 et L. 3141-26 du code du travail ;

4°/ que l'objet du litige est déterminé par les conclusions respectives des parties ; qu'en retenant, pour dire le licenciement justifié par une faute lourde, que le salarié avait fait preuve de déloyauté dans l'exécution de son contrat quand il n'était pas soutenu par l'employeur que les faits reprochés au salarié auraient caractérisé un manquement de l'intéressé à son obligation de loyauté, la cour d'appel a modifié les termes du litige en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;

5°/ que la faute lourde se caractérise par l'intention de nuire à l'employeur, laquelle implique la volonté du salarié de lui porter préjudice dans la commission du fait fautif ; qu'en disant le licenciement justifié par une faute lourde sans constater la volonté du salarié de porter préjudice à son employeur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard l'article L. 3141-26 du code du travail ;

6°/ en tout état de cause que la faute lourde se caractérise par l'intention de nuire à l'employeur, laquelle implique la volonté du salarié de lui porter préjudice dans la commission du fait fautif ; que la déloyauté éventuelle du salarié ne suffit pas à caractériser une intention de nuire à son employeur ; qu'en retenant, pour dire le licenciement fondé sur une faute lourde, que le salarié avait fait preuve d'une déloyauté incontestable preuve de sa détermination à faire prévaloir son intérêt sur celui de l'employeur, la cour d'appel n'a pas caractérisé l'intention de nuire du salarié et violé l'article L. 3141-26 du code du travail. »

Réponse de la Cour

9. En premier lieu, s'agissant d'un licenciement prononcé à titre disciplinaire, si la lettre de licenciement fixe les limites du litige en ce qui concerne les griefs articulés à l'encontre du salarié et les conséquences que l'employeur entend en tirer quant aux modalités de la rupture, il appartient au juge de qualifier les faits invoqués.

10. En deuxième lieu, la faute lourde est caractérisée par l'intention de nuire à l'employeur, laquelle implique la volonté du salarié de lui porter préjudice dans la commission du fait fautif et ne résulte pas de la seule commission d'un acte préjudiciable à l'entreprise.

11. La cour d'appel, qui a, d'une part constaté que la réalité des divers contrats conclus par le salarié par l'intermédiaire notamment de la société STT Conseils dont il était, à l'insu de son employeur, associé majoritaire, avec plusieurs sociétés, clientes ou filiales de la société [...] , ayant généré des facturations ignorées de celle-ci, n'était ni contestable ni contestée et que l'intéressé avait laissé sans réponse la légitime interrogation de l'employeur, qui face à la découverte des fonctions exercées par le salarié au sein des groupements concernés, évoquait à juste titre une situation de conflit d'intérêts, d'autre part retenu que la dissimulation par le salarié de son intérêt personnel dans la réalisation d'opérations financières mettant en cause le fonctionnement de la société [...] , constitutive d'un manquement à l'obligation de loyauté, établissait la volonté de l'intéressé de faire prévaloir son intérêt personnel sur celui de l'employeur, a fait ressortir l'intention de nuire du salarié.

12. Le moyen n'est donc pas fondé.

Sur le quatrième moyen

Enoncé du moyen

13. Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande au titre des jours de RTT restant dus, alors que « ce chef de l'arrêt sera censuré en conséquence de la cassation à intervenir sur le premier ou le deuxième moyen par application de l'article 624 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

14. Le rejet des premier et deuxième moyens rend sans portée le quatrième moyen qui invoque une cassation par voie de conséquence.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. Q... aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix février deux mille vingt et un.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat aux Conseils, pour M. Q....

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement en ce qu'il a débouté le salarié de ses demandes tendant à ce que son licenciement soit dit nul et que l'employeur soit condamné à lui payer des sommes à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'indemnité pour méconnaissance du statut protecteur, d'indemnisation du préjudice résultant de la non perception des accessoires conventionnels et contractuels, de rappel de salaire sur mise à pied outre les congés payés afférents, d'indemnité compensatrice de congés payés, d'indemnité de préavis outre les congés payés afférents et d'indemnité conventionnelle de licenciement.

AUX MOTIFS propres QUE M. Q... ne prétendant pas avoir informé la société [...] de son élection en qualité de juge prud'homal, il lui revient donc de prouver que la société [...] avait connaissance de celle-ci; que l'instance pénale engagée contre M. Q... par la société [...] , pour abus de blanc seing et faux à propos des lettres d'embauche, comme salariée, de l'épouse de M. Q... a donné lieu à un jugement de relaxe en date du 1er septembre 2015 M. F... ayant indiqué qu'il signait énormément de documents sans en prendre toujours connaissance ; que cependant, la signature de M. F..., figurant apparemment sur la lettre de candidature de M. Q... aux élections prud'homales, a été, elle, reconnue non authentique par expertise diligentée à la demande de M. F... ; qu'enfin, le document précité du 14 mars 2011 dont M. Q... faisant allusion au mandat prud'homal de ce dernier a, lui aussi, fait l'objet d'une expertise graphologique concluant, certes, à l'authenticité de la signature mais son exemplaire original, soumis à la cour par l'appelant, n'apparaît pas correspondre à celui qui a été présenté à l'expert puisque ce dernier évoque une signature tracée au « stylo à bille », alors que l'exemplaire en possession de la cour présente une impression sans trace d'encre ni de pression ; qu'il résulte des énonciations qui précèdent qu'en l'absence d'élément probant, la connaissance par la société [...] de la qualité de conseiller prud'homme de M. Q..., avant le licenciement de celui-ci, ne revêt aucun caractère certain ; que dans ces conditions, M. Q... qui n'a fait état de cette qualité auprès de son employeur que postérieurement à son licenciement ne saurait opposer son statut protecteur à la société SAINTE HONORE.

AUX MOTIFS adoptés QUE M. Q... présente au Conseil dans ses conclusions la copie d'une lettre datée du 14 mars 2011 et comportant une signature de M. J... F..., président directeur général de la S.A. SAINT-HONORE (sise au [...] ) ; Que cette lettre est rédigée ainsi : «Objet : adhésion de l'[...] à GE Filiance, Monsieur le Président, Par la présente lettre, je donne mandat et pouvoir à Monsieur G... Q..., DRH du [...] , de faire adhérer notamment l'[...] au GE Filiance, dans son établissement francilien sis [...] , à compter du 1er avril 2011 aux fins d'externaliser tous les salariés dit « extras ». Par ailleurs, dans le cadre d'une bonne gouvernance et d'un bon suivi de la gestion de votre groupement d'employeurs à notre égard, je sollicite votre bienveillance pour confirmer Monsieur G... Q... en tant que personne qualifiée, ou autre, au sein de votre organisation. Il vous apportera toutes ses compétences dans le domaine des ressources humaines, par ses mandats de négociateur à la mixte paritaire nationale et de mutualiste, et dans le domaine du droit social par son mandat de conseiller prud'homal. Enfin, j'ai bien pris note de l'ampleur de la gestion de nos extras du fait de notre adhésion et du risque transféré à votre égard. Pour pallier cela, je m'engage à être adhérent jusqu'à la fin de cette année 2011. À défaut, si l'[...] devait rompre son adhésion, quel que soit le motif, avant le 31 décembre 2011, je m'engage à honorer toutes vos prestations, ainsi qu'une pénalité forfaitaire de 10.000 euros, dans le mois qui suit la rupture de mon adhésion. Je vous prie de croire, Monsieur le Président, en l'expression de mes salutations distinguées. Monsieur J... F..., Président Directeur Général » ; que M. Q... présente à la barre un document qu'il déclare être l'original de cette lettre ; que la société [...] déclare : - avoir demandé depuis des mois, sans succès, de voir cet original et le voir pour la première fois ; - reconnaître son papier à en-tête ; - reconnaître la signature de M. F... : - que le texte de cette lettre est incohérent et ne peut pas avoir été dicté par M. F... ; - qu'il arrivait à M. F... de signer et de remettre à M. Q... des feuilles vierges à en-tête de la société ; - que cette lettre a été écrite par M. Q... sur une feuille de papier de la société signée en blanc par M. F... ; que le Conseil demande à M. Q... de lui remettre l'original de la lettre du 14 mars 2011 pour un examen approfondi dans le cadre du délibéré ; que M. Q... déclare accepter de la remettre au Conseil ; que le Conseil : - constate, au moment du délibéré, que M. Q... ne l'a pas remise ; - estime que, de ce fait, M. Q... a placé le Conseil dans l'impossibilité de pouvoir examiner celte lettre dans les meilleures conditions.

ALORS QUE le salarié investi d'un mandat de conseiller prud'homme ne peut être licencié sans autorisation administrative dès lors qu'il a informé l'employeur de l'existence de ce mandat ou s'il rapporte la preuve que l'employeur en avait connaissance ; qu'en retenant que le salarié ne démontrait pas que l'employeur avait connaissance de son mandat sans rechercher si, ainsi qu'il était soutenu devant elle, cette connaissance ne résultait pas des nombreuses absences du salarié de son poste de travail pour les besoins de son mandat, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 2411-1-17 et L. 2411-22 du code du travail

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION (subsidiaire)

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement en ce qu'il a débouté le salarié de ses demandes tendant à ce que son licenciement soit dit sans cause réelle et sérieuse et que l'employeur soit condamné à lui payer diverses sommes à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'indemnisation du préjudice résultant de la non perception des accessoires conventionnels et contractuels, de rappel de salaire sur mise à pied outre les congés payés afférents, d'indemnité compensatrice de congés payés, d'indemnité de préavis outre les congés payés afférents et d'indemnité conventionnelle de licenciement.

AUX MOTIFS propres QUE les premiers juges ont estimé que les reproches énoncés dans la lettre de licenciement étaient précis et détaillés et caractérisaient une faute lourde ; qu'ils étaient contestés par M. Q... mais que ce dernier ne présentait pas de justification ; qu'il y a lieu d'ajouter que la preuve de la faute lourde incombe au seul employeur ; que la lettre de licenciement datée du 26 juin 2011 retient à l'encontre de M. Q... les faits suivants : -utilisation frauduleuse du tampon portant la signature du directeur général de la société (M. T...) pour signer des virements à hauteur de 80 000 € ainsi qu'un chèque de 10 000 €, au profit de l'association GE FILIANCE , présidée par M. Q... ; - participation , sans en avoir informé son employeur, à une société SST CONSEIL qui facturait plusieurs de ses filiales ; - signature par M. Q... d'un contrat collectif d'assurance de « frais santé » et d'autres contrats, pour le compte de plusieurs sociétés, clientes ou filiales du [...] , représentées par ce même M. Q..., avec une société, SST CONSEIL, dont ce dernier était, à l'insu de son employeur, l'associé majoritaire, qui ont entraîné des facturations ignorées du [...] ; - découverte d'une mise à disposition de personnel, au profit de cette société, par une association RESO 75, depuis janvier 2011 ; - découverte de ce que M. Q... était associé depuis 2008, de diverses sociétés de conseil et de sociétés financières ; - découverte de l'engagement salarié de l'épouse de M. Q... dont le contrat de travail porte la signature de M. F..., soumise à l'expertise et au jugement du tribunal correctionnel du 1er septembre 2015, qui, comme dit ci-dessus, a relaxé M. Q..., poursuivi pour avoir falsifié les lettres d'engagement de Mme Q... dont la lettre de licenciement qui se référait aux bulletins de paye seulement, ne faisait pas état ; que la réalité des divers contrats conclus par M. Q... n'est ni contestable, ni contestée ; que l'appelant objecte seulement que la société [...] n'a jamais contesté les contrats et factures litigieux avant que ne lui soit réclamé en 2014 le paiement de certaines factures ; qu'au delà de la souscription des contrats qui lui est reprochée, le grief imputé à M. Q... a trait à l'ignorance par la société [...] de l' implication personnelle de M. Q... dans les sociétés et organes divers, contractant avec son employeur, le [...] , et les clients de celui-ci ; que la conclusion de la lettre de licenciement est claire sur ce point : « vous ne vous êtes pas expliqué (...) sur le et / ou les contrats d'assurance que vous avez fait souscrire par l'intermédiaire de votre société SST, les factures de cette même société (...), les différentes sociétés que vous avez fondées à notre insu et conflit d'intérêt avec notre société, concurremment à vos obligations contractuelles (...) » et aussi: « vous avez bénéficié de fonds considérables sans aucune légitimité ni autorisation, par le biais de structures que vous avez occultées à notre égard (...) » ; qu'or force est bien de constater que face à la découverte des fonctions exercées par M. Q... au sein des groupements concernés, invoquée par la société [...] dans la lettre de licenciement, et aussi dans deux correspondances antérieures des 18 et 30 mai 2011, M. Q... laisse sans réponse, y compris dans ses conclusions, cette légitime interrogation de son employeur, évoquant à juste titre une situation de conflit d'intérêt ; que M. Q... ne prétend à aucun moment qu'il aurait informé son employeur des participations litigieuses ; que si l'embauche de son épouse, comme l'utilisation du tampon de la société, peuvent ne pas apparaître établies - en l'absence d'élément certain probant - la dissimulation de son intérêt personnel par M. Q... dans la réalisation d'opérations financières mettant en cause le fonctionnement de la société [...] , caractérise, elle, à la charge de M. Q..., une déloyauté incontestable, preuve de la détermination du salarié à faire prévaloir, dans l'exécution de son contrat de travail, son intérêt sur celui de l'employeur.

AUX MOTIFS adoptés QUE à la lecture de la lettre de licenciement, les griefs reprochés à M. Q... par la société [...] sont précis et détaillés : - utilisation frauduleuse d'un tampon comportant la signature d'un supérieur hiérarchique pour obtenir un versement de 80.000,00 euros au bénéfice de la société GE FILIANCE dont le président est M. Q..., lui-même ; - utilisation frauduleuse du même tampon pour obtenir le versement de 10.000,00 euros ; - utilisation de sa position dans le [...] pour signer des contrats avec plusieurs sociétés dont il était président ou actionnaire majoritaire ; - emploi fictif de son épouse, sous son nom de jeune fille, embauchée par M. Q... au sein de la S.A.S. [...] pendant près de six ans ; que M. Q... conteste ces faits, mais ne présente pas de justification entrant dans le cadre de son contrat de travail ; que le Conseil estime que les griefs reprochés à M. Q... dans sa lettre de licenciement constituent des fautes lourdes et intentionnelles dans le but de s'enrichir au détriment de son employeur.

1° ALORS QUE l'autorité de la chose jugée au pénal s'attache à l'ensemble des constatations qui sont le soutien nécessaire de la décision pénale ; qu'un salarié ne peut donc être licencié pour les mêmes faits que ceux ayant donné lieu à une décision de relaxe ; que l'exposant a bénéficié d'une décision de relaxe pour les faits d'utilisation frauduleuse d'un tampon de l'entreprise et de recrutement de son épouse sur un emploi fictif invoqués dans la lettre de licenciement ; qu'en disant néanmoins le licenciement du salarié justifié par une faute lourde, la cour d'appel a violé le principe de l'autorité au civil de la chose juge pénal.

2° ALORS QUE l'autorité de la chose jugée au pénal s'attache à l'ensemble des constatations qui sont le soutien nécessaire de la décision pénale ; qu'un salarié ne peut donc être licencié pour les mêmes faits que ceux ayant donné lieu à une décision de relaxe ; qu'en disant le licenciement justifié par une faute lourde sans rechercher si, ainsi qu'il était soutenu devant elle, les griefs invoqués dans la lettre de licenciement étaient les mêmes que ceux ayant donné lieu à une décision de relaxe, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe de l'autorité au civil de la chose juge pénal.

3° ALORS QUE la lettre de licenciement fixe les termes du litige ; qu'en retenant, pour dire le licenciement justifié par une faute lourde, que le salarié avait fait preuve d'une déloyauté incontestable preuve de sa détermination à faire prévaloir dans l'exécution du contrat de travail son intérêt sur celui de l'employer quand aucun manquement du salarié à son obligation de loyauté n'était invoqué dans la lettre de licenciement, la cour d'appel a violé les articles L. 1232-6 et L. 3141-26 du code du travail.

4° ALORS QUE l'objet du litige est déterminé par les conclusions respectives des parties ; qu'en retenant, pour dire le licenciement justifié par une faute lourde, que le salarié avait fait preuve de déloyauté dans l'exécution de son contrat quand il n'était pas soutenu par l'employeur que les faits reprochés au salarié auraient caractérisé un manquement de l'intéressé à son obligation de loyauté, la cour d'appel a modifié les termes du litige en violation de l'article 4 du code de procédure civile.

5° ALORS QUE la faute lourde se caractérise par l'intention de nuire à l'employeur, laquelle implique la volonté du salarié de lui porter préjudice dans la commission du fait fautif ; qu'en disant le licenciement justifié par une faute lourde sans constater la volonté du salarié de porter préjudice à son employeur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard l'article L. 3141-26 du code du travail.

6° ALORS en tout état de cause QUE la faute lourde se caractérise par l'intention de nuire à l'employeur, laquelle implique la volonté du salarié de lui porter préjudice dans la commission du fait fautif ; que la déloyauté éventuelle du salarié ne suffit pas à caractériser une intention de nuire à son employeur ; qu'en retenant, pour dire le licenciement fondé sur une faute lourde, que le salarié avait fait preuve d'une déloyauté incontestable preuve de sa détermination à faire prévaloir son intérêt sur celui de l'employeur, la cour d'appel n'a pas caractérisé l'intention de nuire du salarié et violé l'article L. 3141-26 du code du travail.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement en ce qu'il a débouté le salarié de sa demande d'indemnisation pour licenciement vexatoire.

AUX MOTIFS propres QUE M. Q... ne justifie d'aucun élément ni préjudice au soutien de ses demandes de dommages intérêts pour licenciement vexatoire.

AUX MOTIFS adoptés QUE le licenciement n'était pas vexatoire dans son déroulement.

ALORS QUE les conditions brutales ou vexatoires du licenciement causent au salarié un préjudice distinct de celui résultant de la perte de son emploi dont il est fondé à solliciter la réparation ; que le licenciement doit être regardé comme étant intervenu dans des conditions vexatoires lorsque l'employeur a mis en cause de manière injustifiée la probité du salarié ; qu'en déboutant l'exposant sans rechercher si, ainsi qu'il était soutenu devant elle, la mise en cause injustifiée de sa probité ne lui avait pas causé un préjudice distinct de celui résultant de son emploi, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 devenu 1240 du code civil.

QUATRIEME MOYEN DE CASSATION

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement en ce qu'il a débouté le salarié de sa demande au titre des jours de RTT restant dus.

AUX MOTIFS propres QUE sa réclamation formée au titre des RTT n'est pas établie.

AUX MOTIFS adoptés QUE le licenciement de M. Q... pour faute lourde était justifié ; que, dans ces conditions, les demandes de salaire et accessoires de salaires revendiqués par M. Q... ne sont pas justifiées.

ALORS QUE ce chef de l'arrêt sera censuré en conséquence de la cassation à intervenir sur le premier ou le deuxième moyen par application de l'article 624 du code de procédure civile.

CINQUIEME MOYEN DE CASSATION

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement en ce qu'il a débouté le salarié de sa demande au titre de son droit individuel à la formation.

AUX MOTIFS propres QUE M. Q... ne justifie d'aucun élément ni préjudice au soutien de ses demandes de dommages intérêts pour inobservation des dispositions relatives au DIF.

AUX MOTIFS adoptés QUE le licenciement de M. Q... pour faute lourde était justifié ; que, dans ces conditions, les demandes de salaire et accessoires de salaires revendiqués par M. Q... ne sont pas justifiées.

ALORS QUE ce chef de l'arrêt sera censuré en conséquence de la cassation à intervenir sur le premier ou le deuxième moyen par application de l'article 624 du code de procédure civile.ECLI:FR:CCASS:2021:SO00206
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