Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 20 janvier 2021, 19-10.956, Publié au bulletin

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

LG



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 20 janvier 2021




Cassation partielle


M. CATHALA, président



Arrêt n° 104 FS-P+I sur le 1er moyen

Pourvoi n° B 19-10.956




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 20 JANVIER 2021

M. Q... S..., domicilié [...] , a formé le pourvoi n° B 19-10.956 contre l'arrêt rendu le 8 novembre 2018 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 5), dans le litige l'opposant au groupement d'intérêt économique (GIE) Inter mutuelles assistance, groupement d'intérêt économique, dont le siège est 118 avenue de Paris, BP 8000, 79033 Niort cedex 9, défendeur à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Thomas-Davost, conseiller référendaire, les observations de Me Haas, avocat de M. S..., de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat du GIE Inter mutuelles assistance, et l'avis de M. Desplan, avocat général, après débats en l'audience publique du 25 novembre 2020 où étaient présents M. Cathala, président, Mme Thomas-Davost, conseiller référendaire rapporteur, M. Schamber, conseiller doyen, Mmes Cavrois, Monge, MM. Sornay, Rouchayrole, Flores, Mme Lecaplain-Morel, conseillers, Mmes Ala, Prieur, Techer, conseillers référendaires, M. Desplan, avocat général, et Mme Jouanneau, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 8 novembre 2018), M. S... a été engagé le 21 mars 2001 par le groupement d'intérêt économique Inter mutuelles assistance (GIE IMA) en qualité de médecin transporteur dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée à temps partiel. Ce contrat stipulait qu'en raison du caractère imprévisible, temporaire et discontinu des transports médicalisés, l'activité se caractérisait par un travail à la demande en fonction des besoins du service et des disponibilités du salarié qu'il communiquait à l'employeur, étant précisé qu'un volume minimal de 600 heures annuelles lui serait proposé, et qu'il lui était demandé une disponibilité minimale correspondant aux exigences d'activité du métier de 15 jours au mois d'août et 132 jours de septembre à juillet inclus, une journée de disponibilité s'entendant de 0 à 24 heures.

2. Le salarié a été engagé par le même employeur selon un second contrat de travail à durée indéterminée à caractère intermittent, en date du 29 mai 2007, en qualité de médecin régulateur-transporteur. Le contrat garantissait au salarié une activité minimale de 345 heures par an, ce dernier s'engageant à être disponible au moins 6 jours calendaires par mois (8 jours au mois d'août), une disponibilité d'un jour s'entendant de 0 à 24 heures.

3. Le salarié a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes, notamment au titre des rémunérations d'astreintes.

Examen des moyens

Sur le second moyen :

4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le premier moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

5. Le salarié fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes de condamnation de son employeur à lui verser des rappels de rémunération au titre des contrats du 21 mars 2001 et du 29 mai 2007, des indemnités pour nullité des clauses d'exclusivité et pour non exécution de bonne foi du contrat, alors « que l'astreinte s'entend d'une période durant laquelle le salarié, sans être ni sur son lieu de travail, ni à la disposition permanente et immédiate de l'employeur, doit être en mesure d'intervenir pour accomplir un travail au service de l'entreprise, tout en restant libre de ses occupations durant cette attente ; qu'en l'espèce, les contrats liant le GIE IMA au docteur S... imposaient à ce dernier de se tenir à la disposition de son employeur en vue d'une éventuelle intervention immédiate, 147 jours, soit 3.528 heures, par an pour le contrat de 2001, et 74 jours, soit 1.776 heures, par an pour le contrat de 2007, quand le GIE IMA ne lui garantissait qu'une activité effective de 345 heures par an ; que pour juger que le docteur S... ne pouvait prétendre ni à l'astreinte revendiquée au titre de ces heures de disponibilités obligatoires, ni aux rappels de rémunération à ce titre, la cour d'appel a retenu de manière inopérante que le salarié avait la possibilité de choisir les périodes de disponibilités durant lesquelles des missions pourraient lui être proposées et pouvait les annuler ; qu'en statuant ainsi, bien que, nonobstant cette souplesse d'organisation et le caractère partiellement flottant dans l'année des horaires de disponibilité obligatoire, le docteur S... fût contractuellement tenu de rester chaque mois un certain nombre de jours à la disposition du GIE IMA dans des conditions contractuellement déterminées dans l'attente d'éventuelles missions à effectuer pour l'employeur, la cour d'appel a violé l'article L. 3121-5 du code du travail dans sa rédaction antérieure au 10 août 2016 et l'article L. 3121-9 du code du travail. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 3121-5 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 :

6. Selon ce texte, constitue une astreinte la période pendant laquelle le salarié, sans être à la disposition permanente et immédiate de l'employeur, a l'obligation de demeurer à son domicile ou à proximité afin d'être en mesure d'intervenir pour effectuer un travail au service de l'entreprise, la durée de cette intervention étant considérée comme un temps de travail effectif.

7. Pour rejeter les demandes du salarié de condamnation de son employeur à lui verser des rappels de rémunération au titre des temps de disponibilité en application des contrats du 21 mars 2001 et du 29 mai 2007, l'arrêt retient que pour chacun des contrats de travail, le salarié avait ou a l'initiative de communiquer, modifier voire annuler ses jours de disponibilité auprès de l'employeur sans que celui-ci ne lui impose à aucun moment l'obligation de demeurer à son domicile ou à proximité afin d'être en mesure d'intervenir pour accomplir un travail au service de l'entreprise, que dès lors, l'astreinte revendiquée par le salarié n'est pas caractérisée.

8. En statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté qu'aux termes des contrats de travail, le salarié était tenu d'être disponible un certain nombre de jours par mois pour pouvoir être joint afin de répondre à une éventuelle demande d'intervention immédiate au service de l'entreprise, ce dont il résultait que le salarié était contractuellement soumis à des astreintes, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

Portée et conséquences de la cassation

9. La cassation prononcée sur le premier moyen n'atteint pas les chefs de dispositif évoqués par ce même moyen déboutant le salarié de ses demandes en paiement d'indemnités pour nullité des clauses d'exclusivité des contrats du 21 mars 2001 et du 29 mai 2007et non-exécution de bonne foi de ces contrats.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. S... de ses demandes de condamnation du GIE IMA à lui verser des sommes au titre de la rémunération d'astreintes pour les périodes de 2005 à novembre 2006 et de mai 2007 à décembre 2013, l'arrêt rendu le 8 novembre 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ;

Condamne le GIE IMA aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par le GIE IMA et le condamne à payer à M. S... la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt janvier deux mille vingt et un.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par Me Haas, avocat aux Conseils, pour M. S...


PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté les demandes de M. S... tendant notamment à la condamnation du GIE IMA à lui verser, au titre du contrat du 21 mars 2001, 23.445,26 € de rappel de rémunération, 20.000 € d'indemnités pour nullité de la clause d'exclusivité et 20.000 € d'indemnités pour non-exécution de bonne foi du contrat, et, au titre du contrat du 29 mai 2007, 52.395 € de rappel de rémunération, 35.000 € d'indemnités pour nullité de la clause d'exclusivité et 35.000 € d'indemnités pour non-exécution de bonne foi du contrat ;

AUX MOTIFS QUE « l'appelant fait valoir que les dispositions contractuelles prévues par chaque contrat de travail tenant à la nécessité de se tenir à disposition de l'employeur pour un certain nombre de jours durant certaines périodes de l'année constitueraient des astreintes dont il demande le paiement. Le Gie intimé fait valoir qu'au titre de chaque contrat de travail, le salarié n'aurait pas eu à se tenir à sa disposition, car il donnait lui-même ses disponibilités et pouvait finalement ne pas y donner suite jusqu'à la veille de la mission proposée et qu'il avait d'ailleurs d'autres activités. L'article L. 3121-5 du code du travail dans sa version applicable au litige dispose qu'une période d'astreinte s'entend comme une période durant laquelle le salarié, sans être à la disposition permanente et immédiate de l'employeur, a l'obligation de demeurer à son domicile ou à proximité afin d'être en mesure d'intervenir pour accomplir un travail au service de l'entreprise et que la durée de cette intervention est considérée comme un temps de travail effectif. Le contrat de travail du 2 mars 2001 relatif à des fonctions de médecin transporteur prévoit que pour chaque mission, un ordre de mission et une fiche navette déterminant l'objet et la nature de la mission sont remis au salarié, que sa rémunération est calculée selon le barème établi pour cette activité de missions de transport, qu'en raison du caractère imprévisible, temporaire et discontinu des transports médicalisés, l'activité se caractérise par un travail à la demande en fonction des besoins du service et des disponibilités du salarié qu'il communique à l'employeur, étant précisé qu'un volume minimal de 00 heures annuelles lui sera proposé, et qu'il lui est demandé une disponibilité minimale correspondant aux exigences d'activité du métier, plus précisément de 15 jours par mois en août, période d'activité la plus intense, et de 2 jours entre septembre et juillet inclus dont les trois quarts en dehors des week-end et jours fériés avec un minimum de 8 jours par mois dont 6 en dehors des week-end et jours fériés, un jour de disponibilité s'entendant de 0 a 24 heures. Le contrat de travail a effet au 1er juillet 2007 relatif à des fonctions de médecin régulateur transporteur prévoit qu'au titre des deux activités distinctes de régulation médicale et de transport sanitaire, il est garanti au salarié une activité minimale de 4 heures par an, le salarié s'engageant à être disponible au moins 6 jours calendaires par mois (8 jours au mois d'août) majoritairement en semaine et sur les périodes de vacances scolaires, une disponibilité d'un jour s'entendant de 0 a 24 heures. Il est acquis que le temps de travail effectif correspond à l'exécution effective des missions relevant selon les contrats soit de la régulation médicale soit des transports sanitaires. Il convient de déterminer si les périodes de disponibilité en cause correspondent à des astreintes définies comme des périodes durant lesquelles le salarié, sans être à la disposition permanente et immédiate de l'employeur, a l'obligation de demeurer à son domicile ou à proximité afin d'être en mesure d'intervenir pour accomplir un travail au service de l'entreprise. L'appelant ne conteste pas la pièce produite au dossier par le Gie relative à la copie d'écran intitulée ‘‘web médical" correspondant à l'outil numérique mis à disposition du salarié sur lequel celui-ci saisit ses périodes de disponibilité, c'est-à-dire les périodes au cours desquelles il souhaite que lui soient proposées des missions dans le cadre tant du premier que du second contrat de travail plus précisément, le salarié saisit le ou les jours souhaités en optant pour une disponibilité journalière de 24 heures ou moins il a en outre la possibilité d'annuler sa disponibilité jusqu'à la veille du jour de disponibilité saisi ; sur le tableau produit par le Gie, il apparait par exemple que le 24 mai 2012, la case est noircie, ce qui correspond à une mission qu'il a refusée. Par ailleurs, le Gie produit une lettre du salarié datée du 28 septembre 2010 l'informant de la réduction de ses disponibilités à seulement trois jours pour le mois d'octobre 2010 en raison d'un voyage en Chine dans le cadre de la Croix-Rouge. En outre, le salarié ne conteste pas qu'il avait d'autres activités ; le Gie produit ainsi ses propres attestations sur l'honneur pour les années 2008 à 2016 dont il ressort que celui-ci avait aussi une activité salariée auprès des éditions Grancher, et en outre s'agissant de 2014 du centre hospitalier de Bourges et s'agissant de 2015 et 2016 du centre hospitalier de Nevers le salarié ne conteste pas non plus être le gérant de la société civile de moyens ‘‘centre médical Marceau" comme il ressort de l'extrait du site societe.com, et exercer une activité libérale de médecine. Il résulte de ce qui précède que pour chacun des contrats de travail, le salarié avait ou a l'initiative de communiquer, modifier voire annuler ses jours de disponibilités auprès de l'employeur sans que celui-ci ne lui impose à aucun moment l'obligation de demeurer à son domicile ou a proximité afin d'être en mesure d'intervenir pour accomplir un travail au service de l'entreprise. Dès lors, l'astreinte revendiquée par le salarié n'est pas caractérisée et le rappel de salaire de ce chef doit être rejeté. À titre subsidiaire, l'appelant forme une demande d'indemnisation en contrepartie des jours de disponibilités qui ne donnent pas nécessairement lieu à mission". Cependant, cette demande n'est fondée sur aucune disposition légale ou conventionnelle ; le caractère contraignant des jours de disponibilité à fournir au Gie, alors qu'il avait la totale maîtrise de leur détermination, de leur communication ainsi que de leur annulation, n'est pas démontré ; cette demande doit être rejetée » ;

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTÉS DU JUGEMENT QUE « en l'espèce il apparaît que :
- Le contrat prévoit que Monsieur Q... S... a l'obligation de prévoir un nombre de jour de disponibilité, mais ne prévoit pas que Monsieur Q... S... a l'obligation de demeurer à son domicile ou à proximité étant rappelé que Monsieur Q... S... avait par ailleurs une activité de médecin libéral ;
- Si Monsieur Q... S... rappelle, de manière générale, qu'en cas d'astreinte le salarié a, selon l'article L. 3121- du ode du travail, l'obligation de demeurer à domicile ou à proximité, il n'allègue pas ensuite, à propos de sa propre situation, qu'il ait été amené à demeurer à domicile ou à proximité pendant les jours où il devait se maintenir à la disposition de son employeur » ;

1°) ALORS QUE l'astreinte s'entend d'une période durant laquelle le salarié, sans être ni sur son lieu de travail, ni à la disposition permanente et immédiate de l'employeur, doit être en mesure d'intervenir pour accomplir un travail au service de l'entreprise, tout en restant libre de ses occupations durant cette attente ; qu'en l'espèce, les contrats liant le GIE IMA au docteur S... imposaient à ce dernier de se tenir à la disposition de son employeur en vue d'une éventuelle intervention immédiate, 147 jours, soit 3.528 heures, par an pour le contrat de 2001, et 74 jours, soit 1.776 heures, par an pour le contrat de 2007, quand le GIE IMA ne lui garantissait qu'une activité effective de 345 heures par an ; que pour juger que le docteur S... ne pouvait prétendre ni à l'astreinte revendiquée au titre de ces heures de disponibilités obligatoires, ni aux rappels de rémunération à ce titre, la cour d'appel a retenu de manière inopérante que le salarié avait la possibilité de choisir les périodes de disponibilités durant lesquelles des missions pourraient lui être proposées et pouvait les annuler ; qu'en statuant ainsi, bien que, nonobstant cette souplesse d'organisation et le caractère partiellement flottant dans l'année des horaires de disponibilité obligatoire, le docteur S... était contractuellement tenu de rester chaque mois un certain nombre de jours à la disposition du GIE IMA dans des conditions contractuellement déterminées dans l'attente d'éventuelles missions à effectuer pour l'employeur, la cour d'appel a violé l'article L. 3121-5 du Code du travail dans sa rédaction antérieure au 10 août 2016 et l'article L. 3121-9 du Code du travail ;

2°) ALORS QUE l'astreinte s'entend d'une période durant laquelle le salarié, sans être ni sur son lieu de travail, ni à la disposition permanente et immédiate de l'employeur, doit être en mesure d'intervenir pour accomplir un travail au service de l'entreprise, tout en restant libre de vaquer à ses occupations durant cette attente et peu important le lieu où il se trouve ainsi prêt à intervenir ; qu'en l'espèce, la cour a affirmé, par motifs adoptés du jugement, que le docteur S... ne pouvait prétendre à l'existence d'une astreinte, puisque ses contrats ne prévoyaient pas qu'il doive demeurer à son domicile ou à proximité ; qu'en statuant ainsi, bien que cette circonstance soit sans effet sur le fait que l'exposant ait été tenu, sans être sous la surveillance de l'employeur, de se tenir à la disposition de celui-ci pour intervenir sans délai en cas de sollicitation et, partant, qu'il ait bien été débiteur d'astreintes dans des conditions contractuellement définies, la cour d'appel a derechef violé l'article L. 3121-5 du Code du travail dans sa rédaction antérieure au 10 août 2016 et l'article L. 3121-9 du Code du travail ;

3°) ALORS SUBSIDIAIREMENT QUE l'astreinte s'entend d'une période durant laquelle le salarié, sans être ni sur son lieu de travail, ni à la disposition permanente et immédiate de l'employeur, doit être en mesure d'intervenir pour accomplir un travail au service de l'entreprise, tout en restant libre de ses occupations durant l'attente, peu important le lieu où il attend ; qu'en l'espèce, par motifs adoptés du jugement, la cour d'appel a écarté la qualification d'astreinte en reprochant au docteur S... de n'avoir pas prouvé être resté à son domicile ou à proximité pendant ces périodes de disponibilités ; qu'en statuant ainsi, bien que, en l'état d'un contrat imposant des heures de disponibilité au salarié, il appartenait au GIE IMA, tenu de rémunérer le salarié et qui s'y refusait, de prouver que l'exposant aurait manqué à ses obligations, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et violé l'article 1315 du Code civil, devenu article 1353 du Code civil.


SECOND MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté les demandes de M. S... tendant notamment à voir prononcer la nullité des clauses d'exclusivité figurant dans les contrats le liant au GIE IMA et la condamnation du GIE IMA à lui verser, au titre du contrat du 21 mars 2001, 20.000 € et, au titre du contrat du 29 mai 2007, 35.000 € d'indemnités pour nullité des clauses d'exclusivité stipulées et 20.000 € et 35.000 € pour non-exécution de bonne foi du contrat ;

AUX MOTIFS QUE « l'appelant fait valoir que les clauses d'exclusivité prévues à chaque contrat portent atteinte à sa liberté de travailler et auraient été illicites. Le GIE intimé fait valoir qu'aucune des dispositions contractuelles n'aurait porté atteinte à la liberté de travailler de Q... S.... Chaque contrat prévoit que le salarié conserve la liberté d'exercer toute fonction dans la limite de la durée maximale du travail autorisée par la loi, mais qu'il lui est interdit de collaborer sous quelque forme que ce soit avec une autre société d'assistance. Le GIE intimé fait valoir que le salarié avait la possibilité d'exercer d'autres activités, ce qui était d'ailleurs le cas de Q... S..., et que l'interdiction de travailler pour une autre société d'assistance serait motivée par le fait que le GIE aurait développé un réseau international de correspondants médicaux et d'établissements de soins avec lesquels il négocie des tarifs aux termes de démarches longues, complexes et coûteuses et que ces avantages concurrentiels devraient rester confidentiels au risque d'être exploités par les autres sociétés d'assistance ; Il résulte des éléments du GIE que l'interdiction de collaborer avec une autre société d'assistance imposée au salarié, est indispensable à la protection de ses intérêts légitimes justifiée par la nature de son activité et des tâches confiées aux médecins, et proportionnée au but recherché. Il en résulte que la clause critiquée n'est pas nulle ; la demande d'indemnisation à ce titre doit être rejetée. L'appelant fait valoir qu'en n'attribuant pas les heures en fonction des besoins, mais en fonction du bon vouloir de la direction, qui ferait appel à des prestataires extérieurs et non à ses salariés, l'employeur n'aurait pas exécuté de bonne foi les contrats de travail. Le GIE intimé fait valoir qu'il aurait toujours tenu ses engagements quant au volume d'heures de missions contractuellement prévu et qu'il peut arriver que des missions soient affectées à d'autres prestataires en raison des lieux d'exécution, parfois à l'étranger, et de certaines spécialités médicales spécifiques comme la psychiatrie ou la pédiatrie néonatale. Les éléments fournis par le GIE pour expliquer que des prestataires externes interviennent parfois pour prendre en charge des missions sont pertinents ; aucun manquement à l'exécution de bonne foi du contrat de travail n'est caractérisé. La demande de dommages et intérêts de ce chef sera rejetée » ;

1°) ALORS QU'une clause d'exclusivité, qui porte atteinte à la liberté de travailler, n'est licite que pour autant qu'elle soit indispensable à la protection des intérêts légitimes de l'employeur, justifiée par la nature de la tâche à accomplir et proportionnée au but poursuivi ; qu'en l'espèce, alléguer comme le faisait le GIE IMA qu'il « aurait développé un réseau international de correspondants médicaux et d'établissements de soins avec lesquels il négocie des tarifs aux termes de démarches longues, complexes et couteuses et que ces avantages concurrentiels devraient rester confidentiels au risque d'être exploités par les autres sociétés d'assistance » ne suffisait pas à démontrer que, au regard des fonctions purement techniques du docteur S..., lesquelles étaient limitées au déroulement technique des opérations d'assistance et de transport de personnes à évacuer, au regard du fait qu'il ait été soumis au secret professionnel et du fait que le GIE n'hésitait pas à faire appel à des sociétés tierces pour exécuter ses missions, était concerné d'une quelconque manière par les négociations tarifaires internes au réseau du GIE IMA et qu'il devrait dès lors être partiellement privé de sa liberté de travailler ; qu'en statuant ainsi sans démontrer que la clause litigieuse était réellement indispensable et proportionnée à la situation de l'exposant, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1121-1 du Code du travail, ensemble le principe de la liberté du travail ;

2°) ALORS QUE les parties doivent exécuter de bonne foi les engagements qu'elles tiennent du contrat de travail ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a considéré que le GIE IMA avait exécuté de bonne foi ses obligations, même s'il faisait appel à des prestataires extérieurs en raison des lieux d'exécution et des spécialités médicales spécifiques requises ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher si, au vu de la disproportion entre les heures de disponibilité requises de l'exposant, soit 3.528 heures par an pour le contrat de 2001 et 1.776 heures par an pour le contrat de 2007, qu'il refusait de rémunérer, et l'activité effective garantie de 600 heures par an pour le premier contrat, puis de 345 heures par an pour le second, le comportement du GIE IMA ne constituait pas, en l'état des missions effectivement confiées au docteur S... et de celles de même nature confiées à des tiers, une exécution de mauvaise foi des contrats de travail, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134, devenu 1104 du Code civil ;

3°) ALORS QUE les juges du fond doivent préciser les pièces sur lesquelles ils se fondent ; qu'en se contentant, pour rejeter la demande de l'exposant fondée sur l'illicéité des clauses de nullité et celle fondée sur l'absence d'exécution de bonne foi des contrats de travail par l'employeur, de viser « des éléments du GIE » et « les éléments fournis par le GIE », sans plus de précision, la cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile. ECLI:FR:CCASS:2021:SO00104
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