Cour de cassation, civile, Chambre civile 2, 26 novembre 2020, 18-22.563, Publié au bulletin

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

CM



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 26 novembre 2020




Rejet


M. PIREYRE, président



Arrêt n° 1278 F-P+B+I

Pourvoi n° X 18-22.563




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 26 NOVEMBRE 2020

1°/ M. S... Y..., domicilié [...] ,

2°/ Mme F... Y..., épouse K..., domiciliée [...] ,

ont formé le pourvoi n° X 18-22.563 contre l'arrêt rendu le 22 mai 2018 par la cour d'appel de Nancy (1re chambre civile), dans le litige les opposant :

1°/ à Mme D... Y..., domiciliée [...] , (Italie),

2°/ à Mme G... Y..., domiciliée [...] , (Italie),

3°/ à Mme C... Y..., domiciliée [...] , (Italie),

4°/ à Mme O... Y..., domiciliée [...] , (Italie),

défenderesses à la cassation.

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Guého, conseiller référendaire, les observations de la SCP Buk Lament-Robillot, avocat de M. S... Y... et Mme F... Y..., de la SCP Ortscheidt, avocat de Mmes D..., G..., C... et O... Y..., et l'avis de M. Grignon Dumoulin, avocat général, après débats en l'audience publique du 14 octobre 2020 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Guého, conseiller référendaire rapporteur, Mme Gelbard-Le Dauphin, conseiller doyen, et M. Carrasco, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Nancy, 22 mai 2018), par avenant du 27 novembre 2008, A... Y..., qui avait souscrit auprès de la banque CIC Est trois contrats d'assurance-vie, a désigné comme bénéficiaires ses quatre soeurs, Mmes D..., G..., C... et O... Y....

2. Il est décédé le 30 janvier 2011.

3. Le 29 avril 2011, un notaire a établi un procès-verbal de description et de dépôt d'un testament olographe de A... Y..., daté du 30 novembre 2010, dans lequel il était stipulé que son auteur instituait légataires universels ses deux enfants, M. S... Y... et Mme F... K... née Y..., et qu'il leur léguait tous ses biens, notamment le produit de ses contrats d'assurance-vie.

4. Après le dépôt d'un rapport d'expertise médicale se prononçant, tel qu'ordonné par le juge des référés, sur l'état de santé mentale du testateur à l'époque de la rédaction du document, Mmes D..., G..., C... et O... Y... ont assigné M. S... Y... et Mme F... Y..., aux fins de voir prononcer l'annulation du testament et de les voir condamner solidairement à leur payer une somme correspondant à celle perçue par eux en vertu de ce testament.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa seconde branche, ci-après annexé

5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

6. M. S... Y... et Mme F... Y... font grief à l'arrêt de les condamner à payer à Mmes D..., G..., C... et O... Y... la somme de 305 561,84 euros, chacun à concurrence du capital perçu en vertu du testament annulé, avec intérêts au taux légal, alors « que le changement dé bénéficiaire d'un contrat d'assurance-vie n'est subordonné à aucune condition de forme ; qu'en retenant, pour juger que A... Y... n'avait pas manifesté la volonté de désigner comme bénéficiaires des contrats d'assurance sur la vie ses deux enfants au lieu et place de ses quatre soeurs et condamner en conséquence les premiers à payer aux secondes la somme de 305 561,84 euros perçue en vertu du testament annulé, que les lettres adressées aux différents établissements bancaires le 21 janvier 2011 pour modifier la clause bénéficiaire desdits contrats en faveur de M. S... Y... et Mme F... Y..., épouse K... étaient des lettres-types et n'étaient pas revêtues de la signature de l'intéressé, la cour d'appel a ajouté une condition à la loi et a violé l'article L. 132-8 du code des assurances. »

Réponse de la Cour

7. Après avoir retenu que le testament olographe du 30 novembre 2010 devait être annulé faute d'avoir été écrit en entier de la main du testateur, et relevé que M. S... Y... et Mme F... Y... faisaient également valoir qu'en tout état de cause, leur père avait écrit aux assureurs, le 21 janvier 2011, pour modifier en leur faveur la clause bénéficiaire de ses contrats d'assurance-vie, c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation des éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis que la cour d'appel a estimé, sans ajouter à la loi une condition qu'elle ne prévoit pas, que les six courriers à en-tête de A... Y... adressés à différents établissements bancaires étaient des lettres-types non revêtues de la signature de l'intéressé et ne pouvaient être considérés comme la manifestation de la volonté du souscripteur de désigner comme bénéficiaires ses deux enfants aux lieu et place de ses quatre soeurs.

8. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme F... Y... et M. S... Y... aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par Mme F... Y... et M. S... Y... et les condamne à payer à Mmes D..., G..., C... et O... Y... la somme globale de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé par le président en son audience publique du vingt-six novembre deux mille vingt et signé par lui et Mme Gelbard-Le Dauphin, conseiller doyen, en remplacement du conseiller référendaire rapporteur empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile. MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Buk Lament-Robillot, avocat aux Conseils, pour M. S... Y..., Mme F... Y...

M. S... Y... et Mme F... Y... épouse K... font grief à l'arrêt attaqué de les avoir condamnés à payer à Mme D... Y..., Mme G... Y..., Mme C... Y... et Mme O... Y... la somme de 305.561,84 euros, chacun à concurrence du capital perçu en vertu du testament annulé, avec intérêts au taux légal ;

AUX MOTIFS QUE les appelants font encore valoir qu'en tout état de cause, leur père a écrit aux assureurs, le 21 janvier 2011, pour modifier en leur faveur la clause bénéficiaire de ses contrats d'assurance-vie ; que toutefois, les six courriers à en-tête de M. A... Y..., et adressés à cette date, à différents établissements bancaires, sont des lettres-types non revêtues de la signature de l'intéressé ; qu'ils ne peuvent donc être considérés comme la manifestation de la volonté du souscripteur des contrats de désigner comme bénéficiaires ses deux enfants aux lieu et place de ses quatre soeurs ; que le jugement sera encore confirmé en ce qu'il a condamné M. S... Y... et Mme F... K..., née Y..., à payer à Mme D... Y..., Mme G... Y..., Mme C... Y... et Mme O... Y... la somme de 305.561,84€, chacun à concurrence du capital perçu en vertu du testament annulé, ainsi que les intérêts au taux légal à compter de sa date, soit le 2 mars 2017 ;

1°) ALORS QUE le changement de bénéficiaire d'un contrat d'assurancevie n'est subordonné à aucune condition de forme ; qu'en retenant, pour juger que A... Y... n'avait pas manifesté la volonté de désigner comme bénéficiaires des contrats d'assurance sur la vie ses deux enfants au lieu et place de ses quatre soeurs et condamner en conséquence les premiers à payer aux secondes la somme de 305.561,84 euros perçue en vertu du testament annulé, que les lettres adressées aux différents établissements bancaires le 21 janvier 2011 pour modifier la clause bénéficiaire desdits contrats en faveur de M. S... Y... et Mme F... Y... épouse K... étaient des lettres-types et n'étaient pas revêtues de la signature de l'intéressé, la cour d'appel a ajouté une condition à la loi et a violé l'article L. 132-8 du code des assurances ;

2°) ALORS QUE les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner, fût-ce sommairement, les éléments de preuve produits par les parties au soutien de leurs prétentions ;
que dès lors, en énonçant, pour juger que A... Y... n'avait pas manifesté la volonté de désigner comme bénéficiaires des contrats d'assurance sur la vie ses deux enfants au lieu et place de ses quatre soeurs et condamner en conséquence les premiers à payer aux secondes la somme de 305.561,84 euros perçue en vertu du testament annulé, que les lettres adressées aux différents établissements bancaires le 21 janvier 2011 pour modifier la clause bénéficiaire desdits contrats en faveur de M. S... Y... et Mme F... Y... épouse K... étaient des lettres-types et n'étaient pas revêtues de la signature de l'intéressé, sans même examiner, fût-ce sommairement, les différentes attestations versées aux débats par ces derniers et de nature à établir la volonté de leur père de les rendre bénéficiaires des contrats d'assurance vie qu'il avait souscrits, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. ECLI:FR:CCASS:2020:C201278
Retourner en haut de la page