Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 12 novembre 2020, 19-11.402, Publié au bulletin
Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 12 novembre 2020, 19-11.402, Publié au bulletin
Cour de cassation - Chambre sociale
- N° de pourvoi : 19-11.402
- ECLI:FR:CCASS:2020:SO01028
- Publié au bulletin
- Solution : Rejet
Audience publique du jeudi 12 novembre 2020
Décision attaquée : Cour d'appel de Douai, du 30 novembre 2018- Président
- M. Cathala
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
SOC.
LG
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 12 novembre 2020
Rejet
M. CATHALA, président
Arrêt n° 1028 FS-P+B+I
Pourvoi n° M 19-11.402
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 12 NOVEMBRE 2020
La société Terminal des Flandres, société par actions simplifiée, dont le siège est Port Dunkerque Ouest, quai de Flandre, BP 53, 59279 Loon-Plage, a formé le pourvoi n° M 19-11.402 contre l'arrêt rendu le 30 novembre 2018 par la cour d'appel de Douai (chambre sociale), dans le litige l'opposant :
1°/ à M. V... D..., domicilié [...] ,
2°/ à Pôle emploi Ile-de-France, dont le siège est 1 avenue du docteur Gley, 75020 Paris,
défendeurs à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Ala, conseiller référendaire, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de la société Terminal des Flandres, de la SARL Meier-Bourdeau, Lécuyer et associés, avocat de M. D..., et l'avis de Mme Rémery, avocat général, après débats en l'audience publique du 23 septembre 2020 où étaient présents M. Cathala, président, Mme Ala, conseiller référendaire rapporteur, M. Schamber, conseiller doyen, Mmes Cavrois, Monge, MM. Sornay, Rouchayrole, conseillers, Mmes Prieur, Thomas-Davost, conseillers référendaires, Mme Rémery, avocat général, et Mme Lavigne, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué ( Douai, 30 novembre 2018), M. D... a été engagé à compter du mois de février 2006, en qualité d'ouvrier docker occasionnel, par plusieurs entreprises de travail temporaire qui l'ont mis à disposition de la société Terminal des Flandres, l'une des sociétés de manutention portuaire sur le port de Dunkerque, au moyen de deux cent un contrats de mission.
2. A compter du 1er janvier 2013, il a été recruté directement par la société Terminal des Flandres dans le cadre de contrats à durée déterminée d'usage.
3. La relation de travail ayant pris fin le 16 juillet 2014, le salarié a saisi la juridiction prud'homale de demandes tendant à obtenir la requalification en contrat à durée indéterminée des contrats de mission temporaire ainsi que des contrats à durée déterminée, avec toutes les conséquences attachées à la rupture injustifiée d'un contrat à durée indéterminée.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa première branche, ci-après annexé
4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le moyen, pris en ses autres branches
Enoncé du moyen
5. L'employeur fait grief à l'arrêt de dire que la relation de travail doit être requalifiée en contrat à durée indéterminée à compter du 16 février 2006, de dire que la rupture s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse et de le condamner au paiement de sommes en conséquence, alors :
« 2° / que constituent des éléments objectifs établissant la nature temporaire de l'emploi, au sens des articles L. 12421 et L. 12422 du code du travail, interprétés à la lumière de la clause 5, point 1, a) de l'accord cadre européen sur le travail à durée déterminée du 18 mars 1999 mis en oeuvre par la Directive 1999/70/CE du 28 juin 2000, le caractère fluctuant du trafic maritime et la variation continue de la charge d'activité de chargement et déchargement des navires, de sorte que la conclusion de contrats à durée déterminée successifs est justifiée par des raisons objectives ; qu'en l'espèce, pour dire que la relation de travail du salarié devait être requalifiée en contrat à durée indéterminée à compter du 16 février 2006 et que la rupture du dernier contrat devait s'analyser en un licenciement sans cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a considéré que, par principe, les contrats de missions et à durée déterminée étaient liés à l'activité normale et permanente de la société, fût-elle fluctuante ; que pourtant, le caractère fluctuant du trafic maritime et la variation continue de la charge d'activité de chargement et déchargement des navires peuvent constituer des raisons objectives justifiant la conclusion de contrats à durée déterminée successifs ; qu'en considérant le contraire, la cour d'appel a violé l'ensemble des textes susvisés ;
3°/ qu'en affirmant que les contrats de missions et à durée déterminée étaient liés à l'activité normale et permanente de la société, fût elle fluctuante et que les pièces produites par la société ne permettait pas d'établir l'existence de raisons objectives justifiant le recours à des contrats à durée déterminée successifs, quand elle constatait elle-même que le trafic maritime avait un caractère par essence fluctuant et que l'activité continue de la société était variable en fonction de la charge d'activité de chargement et déchargement des navires, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations, a violé l'ensemble des articles L. 12421 et L.12422 du code du travail, interprétés à la lumière de la clause 5, point 1, a) de l'accord cadre européen sur le travail à durée déterminée du 18 mars 1999 mis en oeuvre par la Directive 1999/70/CE du 28 juin 2000 ;
4°/ qu'en affirmant que le caractère par essence fluctuant de l'activité de manutention portuaire ne saurait constituer concrètement une raison objective établissant le caractère par nature temporaire de l'emploi concerné car à suivre la société c'est du même coup l'existence des dockers mensualisés embauchés à durée indéterminée qui serait une anomalie, et que la société avait la possibilité d'adapter le travail des salariés à l'activité par essence fluctuante de l'entreprise en agissant sur la durée du travail (modulation, temps partiel), la cour d'appel a statué par des motifs inopérants qui n'étaient en rien de nature à exclure l'existence d'une raison objective justifiant le recours à des contrats à durée déterminée successifs, privant ainsi sa décision de toute base légale au regard des articles L. 12421 et L. 12422 du code du travail, interprétés à la lumière de la clause 5, point 1, a) de l'accord cadre européen sur le travail à durée déterminée du 18 mars 1999 mis en oeuvre par la Directive 1999/70/CE du 28 juin 2000. »
Réponse de la Cour
6. Aux termes de l'article L. 124-2, alinéa 1, devenu l'article L. 1251-5 du code du travail, le contrat de mission, quel que soit son motif, ne peut avoir ni pour objet, ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise utilisatrice.
7. Selon les articles L. 124-2, alinéa 2, L. 124-2-1 et D. 124-2 devenus les articles L. 1251-6 et D. 1251-1 du même code, dans les secteurs d'activité définis par décret ou par voie de convention ou d'accord collectif étendu, il peut être fait appel à un salarié temporaire pour l'exécution d'une tâche précise et temporaire dénommée « mission » pour certains des emplois en relevant lorsqu'il est d'usage constant de ne pas recourir à un contrat à durée indéterminée en raison de la nature de l'activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois, et que des contrats de mission successifs peuvent, en ce cas, être conclus avec le même salarié.
8. Il résulte de l'application combinée de ces textes, que le recours à l'utilisation de contrats de missions successifs impose de vérifier qu'il est justifié par des raisons objectives qui s'entendent de l'existence d'éléments concrets établissant le caractère par nature temporaire de l'emploi.
9. Ayant relevé que les contrats de mission conclus en 2006 et 2007 mentionnaient comme motif de recours « emploi pour lequel il n'est pas d'usage de recourir au contrat à durée indéterminée » et que l'entreprise utilisatrice, avec laquelle la relation de travail s'était poursuivie de manière continue au moyen de contrats à durée déterminée d'usage, se contentait d'affirmer que, compte tenu du caractère fluctuant et imprévisible de l'activité de la manutention portuaire, le recours aux ouvriers dockers occasionnels se justifiait nécessairement par une tâche précise et temporaire indissociablement liée au secteur d'activité de la manutention portuaire sans qu'elle ne verse, aucun élément permettant au juge, de vérifier concrètement l'existence de raisons objectives établissant le caractère par nature temporaire de l'emploi occupé par le salarié, la cour d'appel a pu, par ces seuls motifs, en déduire que la relation de travail devait être requalifiée en contrat à durée indéterminée à compter du premier contrat de mission irrégulier.
10. Le moyen, n'est donc pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Terminal des Flandres aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Terminal des Flandres et la condamne à payer à M. D... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du douze novembre deux mille vingt.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour la société Terminal des Flandres
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que la relation de travail du salarié devait être requalifiée contrat à durée indéterminée à compter du 16 février 2006 et que la rupture du dernier contrat devait s'analyser en un licenciement sans cause réelle et sérieuse et d'AVOIR en conséquence condamné la société à verser au salarié les sommes de 1 480,65 euros à titre d'indemnité de requalification, de 2 961,30 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, de 296,13 à titre de congés payés afférents, de 2 541,03 euros à titre d'indemnité légale de licenciement, de 10 000 euros de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens et au remboursement des indemnités éventuellement versées par Pôle Emploi dans la limite de six mois ;
AUX MOTIFS QUE, aux termes de l'arrêt attaqué, « Sur la demande de requalification des contrats de mission et des contrats à durée déterminée d'usage en un contrat à durée indéterminée : M. D... soutient qu'il a conclu 201 contrats de mission temporaire entre 2006 et 2012 avec des motifs et des précisions différentes selon la période (2006 et 2007, d'une part, et 2008 à 2012, d'autre part) et que l'emploi qu'il a occupé pendant 7 ans était lié durablement à l'activité normale et permanente de l'entreprise puisqu'il a toujours été affecté aux mêmes tâches (chargement, déchargement de bateaux et manutentions diverses). Si la société Terminal des Flandres produit aux débats les 201 contrats de mise à disposition, en revanche, elle n'apporte pas la preuve pour chacune de ces mises à disposition qu'elle se trouvait confrontée à un accroissement temporaire d'activité. Les contrats de mission étant illégaux, M. D... est fondé à obtenir la requalification en contrat à durée indéterminée de toute la relation de travail auprès de l'entreprise utilisatrice, ainsi qu'une indemnité de requalification. M. D... fait valoir que cette requalification s'impose également pour les contrats à durée déterminée d'usage qu'il a conclus directement avec la société Terminal des Flandres de janvier 2013 à juillet 2014, dès lors que l'écrit n'est pas régulier et que M. D... a occupé un emploi lié durablement à l'activité normale et permanente de l'entreprise, l'existence d'une convention collective permettant de conclure de tels contrats d'usage n'étant pas suffisante. La société Terminal des Flandres soutient au contraire que les dispositions du code du travail, notamment relatives au contrat à durée déterminée, ne sont pas applicables au statut des dockers, celui-ci relevant uniquement et exclusivement des dispositions du code des transports, dérogatoires au droit commun, et que les dockers occasionnels occupent un emploi par nature temporaire. La société Terminal des Flandres montre qu'elle a respecté les conditions inhérentes au statut d'ouvrier docker occasionnel et les conditions permettant le recours à cette force d'appoint, telles qu'elles sont précisées dans les textes légaux et conventionnels applicables. La société ajoute que l'usage des contrats à durée déterminée est en l'espèce nécessairement justifié par des conditions objectives matérielles, à savoir le caractère fluctuant du trafic maritime et la variation continue de la charge d'activité de chargement et déchargement des navires. L'article L. 511-2 du code des ports maritimes, tel qu'il résulte de la loi n° 492-96 du 9 juin 1992 dispose que « -Dans les ports désignés par l'arrêté ministériel mentionné à l'article L. 511-1, les ouvriers dockers sont rangés en: - ouvriers dockers professionnels ; - ouvriers dockers occasionnels. Les ouvriers dockers professionnels sont soit mensualisés, soit intermittents. Il. - Relèvent de la catégorie des dockers professionnels mensualisés les ouvriers qui concluent avec un employeur un contrat de travail à durée indéterminée. Les entreprises de manutention portuaire ou leurs groupements ont l'obligation de recruter les ouvriers dockers professionnels mensualisés en priorité et dans l'ordre parmi les ouvriers dockers professionnels intermittents puis parmi les ouvriers dockers occasionnels qui ont régulièrement travaillé sur le port au cours des douze mois précédents( ...). « Une convention collective nationale de la manutention devra être négociée et signée par les partenaires sociaux au plus tard au 31 décembre 1993, qui concernera toutes les catégories de dockers mentionnées au présent article». III. -(...)Pour les travaux de manutention définis par décret, les employeurs, lorsqu'ils n'utilisent pas uniquement des dockers professionnels mensualisés, ont recours en priorité aux dockers professionnels intermittents puis, à défaut, aux dockers occasionnels ». Ces dispositions du code des ports maritimes ont été abrogées par l'ordonnance n° 2010- 1307 du 28 octobre 2010 et ont été intégrées dans le code des transports aux articles L. 5343-2 jusqu'à L. 5343-7. Ainsi, l'article L. 5343-6 précise que« Les ouvriers dockers occasionnels constituent une main-d'oeuvre d'appoint à laquelle il n'estfait appel qu'en cas d'insuffisance du nombre des dockers professionnels intermittents. Les ouvriers dockers occasionnels ne sont pas tenus de se présenter à l'embauche et peuvent travailler ailleurs que sur le port sans autorisation spéciale». Enfin, l'article L. 5343-7 dispose que « Pour les travaux de manutention définis par voie réglementaire, les employeurs, lorsqu'ils n'utilisent pas uniquement des dockers professionnels mensualisés, ont recours en priorité aux dockers professionnels intermittents puis, à défaut, aux dockers occasionnels». Conformément à la loi, une Convention collective nationale de la manutention portuaire a été conclue en date du 31 décembre 1993 et étendue par arrêté du 29 septembre 1994. Cette convention collective comprend à son article 9 un B intitulé « emplois à caractère occasionnels » qui dispose que « Conformément à l'article L. 122-1 du code de travail, le contrat de travail à durée déterminée ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise. Sous réserve de l'alinéa précédent, les signataires de la présente convention collective conviennent que l'activité de manutention portuaire, telle que définie à l'article 1er relatif au champ d'application, constitue un secteur d'activité ou il est d'usage constant, au sens de l'article L. 122-1-1, 3e du code du travail de recourir au contrat de travail à durée déterminée en raison de la nature de l'activité exercée et du caractère par nature temporaire de certains emplois. Les emplois pour lesquels des contrats à durée déterminée correspondant à ce cas de recours pourront être conclus, sont ceux relevant de la filière "exploitation portuaire" telle que définie par la présente convention collective. La notification par l'employeur à l'ANPE, en application de l'article L. 312-2 du code du travail, des emplois vacants dans l'entreprise devra faire ressortir ceux de dockers occasionnels. Dans le cadre des dispositions législatives en vigueur, le chef d'entreprise devra informer le comité d'entreprise ou, à défaut, les délégués du personnel du nombre de salariés sous contrat à durée déterminée en faisant ressortir le nombre de dockers occasionnels ». En outre, un avenant à cette convention nationale a été conclu en date du 18 avril 2006 qui est relatif aux conditions d'emploi et de rémunération particulières des personnels dockers des entreprises de manutention dans les ports maritimes du nord. Cet avenant a pour objet « d'intégrer dans le cadre de la convention collective nationale de la manutention portuaire les différents accords et avenants conclus depuis 1992 entre les organisations syndicales des personnels dockers et les entreprises de manutention du port de Dunkerque, ainsi que les accords conclus entre les entreprises de manutention qui ont une incidence sur l'emploi ». Cet avenant comprend un Titre VIII intitulé « Sauvegarde de l'emploi » et qui précise en un 8.1.1. que « En cas de nécessité, les entreprises de manutention s 'efforcent de sous-traiter entre elles la réalisation de tout ou partie de chantiers pour lesquels la main-d'oeuvre dont elles disposent est ponctuellement insuffisante, en effectifs et/ou en compétences. Ce dispositif de sous-traitance de chantiers, qui a pour effet de réguler la charge de travail entre les entreprises, a également pour finalité de stabiliser l'emploi de la main-d'oeuvre mensualisée ». Un 8.1.2. ajoute que « Lorsque la sous-traitance ne permet pas à une entreprise d'assurer la réalisation de tout ou partie d'un chantier, elle est autorisée à avoir recours à du personnel intérimaire, aux conditions fixées au titre IX ci-après ». Le titre IX intitulé « conditions du recours à l'intérim » dispose que « (...) Depuis 1992, la main-d'oeuvre indispensable au bon fonctionnement des entreprises de manutention (maîtrise, spécialistes, dockers historiques détenteurs du savoir-faire propre au port de Dunkerque) a été mensualisée au sein des entreprises de manutention. Afin de se donner les moyens de mieux répondre à la demande, les entreprises de manutention ont passé un accord qui leur permet, en cas de nécessité, de sous-traiter entre elles la réalisation de tout ou parties de chantiers pour lesquels la main-d'oeuvre dont elles disposent est ponctuellement insuffisante, en effectifs et/ou en compétences. .../... Cet accord de sous-traitance de chantiers (cf titre VIII ci-dessus), qui a pour effet de réguler la charge de travail entre les entreprises, a également pour effet de stabiliser l'emploi de la main-d'oeuvre mensualisée. Cet accord prévoit également que, lorsque la sous-traitance ne permet pas à une entreprise d'assurer la réalisation de tout ou partie d'un chantier, elle peut avoir recours à du personnel intérimaire. Considérant les risques inhérents au métier d'ouvrier docker, il a toutefois été convenu que les entreprises ne peuvent avoir recours qu 'à des intérimaires habilités, ayant reçu un minimum de formation au métier d'ouvrier docker et en particulier une formation spécifique à la sécurité. Ainsi, il a été convenu de constituer un pool d'ouvriers dockers intérimaires au sein des effectifs d'une ou plusieurs entreprises de travail temporaire, et que les entreprises de manutention, en cas de besoin, et lorsque les possibilités de sous-traitance ont été épuisées, feraient appel aux services des seuls membres de ce pool d'ouvriers dockers intérimaires ». Ensuite, une Convention collective nationale unifiée ports et manutention du 15 avril 2011 a été conclue qui a repris ces dispositions précitées de la convention collective nationale de 1993 à son B « Emplois à caractère occasionnel » de son article 6 « Contrat de travail », lequel dispose donc pareillement que : « Conformément à l'article L. 1242-1 du code du travail, le contrat de travail à durée déterminée ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise. Le recours à des CDD d'usage constant est toutefois rendu nécessaire dans certaines entreprises relevant du champ d'application de la présente convention collective compte tenu : - du caractère irrégulier de leur activité lié aux fluctuations du trafic portuaire et des débarquements de produits de la pêche ; -de la nécessité de disposer d'une main-d'oeuvre d'appoint, au sens des articles L. 511-2 et L. 511-5 du code des ports maritimes, disposant des formations requises, et de la fidéliser. Sous réserve des alinéas précédents, les signataires de la présente convention collective conviennent que l'activité de manutention portuaire et celle de débarquement des produits de la pêche au sein des ports de pêche, telles que définies à l'article 1er relatif au champ d'application, constituent un secteur d'activité où il est d'usage constant, au sens de l'article L. 1242-7 du code du travail, de recourir au contrat de travail à durée déterminée en raison de la nature de l'activité exercée et du caractère par nature temporaire de certains emplois. Les emplois concernés sont ceux correspondant aux ouvriers dockers occasionnels tels que définis au point 2 du champ d'application et au point 1 des bénéficiaires de la présente convention collective (...) ». Cet article 6 B comprend aussi des « Dispositions particulières applicables dans les ports comportant des dockers professionnels intermittents » et dispose notamment que « Dans les ports comportant des dockers professionnels intermittents, il ne pourra être procédé à l'embauchage par contrat à durée déterminée de dockers occasionnels pour effectuer les travaux réservés à la maind'oeuvre des dockers telle que définie par le code des ports maritimes qu'à défaut de dockers professionnels intermittents disponibles remplissant les conditions d'aptitude requises correspondant aux postes à pourvoir (...) ». Enfin, un Accord du 16 novembre 2012 relatif au recours à l'emploi d'ouvriers dockers occasionnels spécifique au port de Dunkerque a été conclu qui reprend, en substance, les dispositions de l'accord du 18 avril 2006 sur le recours à la sous-traitance et à la possibilité, en cas d'insuffisance, de recourir non plus à l'intérim, mais directement à des ouvriers dockers occasionnels, en l'occurrence par le recours à des contrats déterminée d'usage. De l'articulation de l'ensemble de ces textes, il ressort d'abord que contrairement à ce que soutient la société Terminal des Flandres, ni le code des ports maritimes, ni ensuite celui des transports n'ont entendu prévoir un régime spécifique de contrat à durée déterminée ou d'intérim des Ouvriers Dockers occasionnels dérogatoire à celui prévu par le code du travail puisque les dispositions légales renvoient elles-mêmes à des textes conventionnels qui précisent bien, au sujet des « emplois à caractère occasionnels », que «Conformément à l'article L. 1242-1 du code du travail, le contrat de travail à durée déterminée ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise» et même que les contrats à durée déterminée d'usage qui ont vocation à être conclus avec les ouvriers dockers occasionnels sont conclus « sous réserve » du respect de ces dispositions du code du travail. Il ressort aussi de l'ensemble de ces dispositions et de leur combinaison temporelle que les avenants spécifiques aux ports de Dunkerque, en particulier celui de 2006 précité, relatif à la possibilité de recourir à l'intérim pour pallier l'insuffisance de sous-traitance n'ont en rien soustrait les contrats de mission qui ont été conclus avec les dockers occasionnels des exigences du code du travail dès lors qu'ils ne constituent que des avenants à des accords nationaux qui s'inscrivent eux-mêmes dans le respect du code du travail et qu'ils concernent des contrats de mission dont le régime est aligné, à de très rares exceptions près qui ne sont pas concernées en l'espèce, sur celui des contrats à durée déterminée. Cela est d'autant plus flagrant que ce recours à l'intérim a été supprimé en 2012 pour laisser précisément la place, en cas d'insuffisance de sous-traitance, à des contrats à durée déterminée d'usage directement conclus avec les entreprises de manutention, donc à des contrats qui sont incontestablement soumis, en application de ce qui précède, aux exigences du code du travail. Ainsi, s'il ressort de l'ensemble de ces textes qu'ils distinguent nettement les dockers professionnels (mensualisés ou intermittents) des dockers occasionnels, notamment en ce sens que les dockers professionnels mensualisés sont embauchés par contrat à durée indéterminée et les dockers occasionnels par contrats précaires (contrats à durée déterminée ou d'intérim selon un usage constant), ils invitent à distinguer ce qui relève du statut de ce qui relève du contrat. Autrement dit, les dispositions spécifiques du code des ports maritimes, ensuite celui des transports, précisent les différences statutaires entre un docker professionnel et un docker occasionnel et, en substance, les conditions auxquelles un docker occasionnel doit satisfaire pour relever de cette qualification statutaire. Moyennant quoi, dès lors que ces conditions sont respectées, un docker occasionnel employé en contrat à durée déterminée ne peut prétendre être requalifié en un docker professionnel employé en contrat à durée indéterminée. Pour autant, un docker occasionnel au sens statutaire, et qui est donc engagé par contrat à durée déterminée, peut faire valoir que les conditions légales de recours aux contrats à durée déterminée (le plus souvent d'usage) et/ou de leur succession n'ont pas été respectées, soit pour obtenir une indemnité de précarité dans le cadre de son contrat à durée déterminée (qui reste alors à durée déterminée, sans pouvoir relever de l'usage constant), soit même pour obtenir la requalification de son contrat de travail à durée déterminée en un contrat à durée indéterminée (avec les conséquences qui en résultent). Mais retenir alors que le contrat à durée déterminée du docker occasionnel n'est pas valable, qu'il doit être requalifié (requalification sanction) en contrat à durée indéterminée ne signifie pas pour autant que le docker aurait dû être embauché comme docker professionnel (mensualisé) au sens statutaire. Les dispositions spécifiques du code des transports sur les dockers, qui doivent être respectées, ne font donc pas obstacle à ce qu'un docker occasionnel du point de vue statutaire, et engagé par contrats à durée déterminée successifs (en particulier d'usage), puisse solliciter la requalification de ses contrats précaires en un contrat à durée indéterminée
sur le fondement du code du travail. Cela s'impose d'autant plus que toute disposition nationale qui autorise le recours au contrat à durée déterminée doit être lue à la lumière de la directive 1999/70 sur les contrats à durée déterminée, laquelle exige en particulier du juge national qu'il opère un contrôle de l'abus en cas de succession de contrats précaires avec le même salarié. Ainsi, si dans les secteurs d'activité définis par décret ou par voie de convention ou d'accord collectif étendu, - comme c'est le cas dans la manutention portuaire-, certains des emplois en relevant peuvent être pourvus par des contrats à durée déterminée lorsqu'il est d'usage constant de ne pas recourir à un contrat à durée indéterminée en raison de la nature de l'activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois, -comme c'est le cas pour les contrats des dockers occasionnels - , et que des contrats à durée déterminée successifs peuvent, en ce cas, être conclus avec le même salarié, l'accord-cadre sur le travail à durée déterminée du 18 mars 1999, mis en oeuvre par la directive 1999/70/CE du 28 juin 1999, en ses clauses 1 et 5, qui a pour objet de prévenir les abus résultant de l'utilisation de contrats à durée déterminée successifs, impose de vérifier que le recours à l'utilisation de contrats à durée déterminée successifs est justifié par des raisons objectives qui s'entendent de l'existence d'éléments concrets établissant le caractère par nature temporaire de l'emploi. En outre, la détermination par accord collectif de la liste précise des emplois pour lesquels il peut être recouru au contrat de travail à durée déterminée d'usage -comme pour le docker occasionnel- ne dispense pas le juge, en cas de litige, de vérifier concrètement l'existence de raisons objectives établissant le caractère par nature temporaire de l'emploi concerné. Et ce qui vaut pour les contrats à durée déterminée d'usage vaut pour les contrats de mission d'usage conclus dans le cadre du travail temporaire puisque les articles L. 1251-5 et L. 1251-6 du code du travail applicables aux contrats de travail temporaire sont rédigés dans les mêmes termes que les articles relatifs aux contrats à durée déterminée d'usage. En l'espèce, la société Terminal des Flandres se contente dans un premier temps de soutenir que les dispositions légales particulières, en l'occurrence du code des ports maritimes et du code des transports, applicables au statut des dockers occasionnels ont été respectées pour M. D.... En effet, selon la société Terminal des Flandres, M. D... n'était pas titulaire de la carte professionnelle, ne bénéficiait d'aucune priorité d'embauche, il pouvait travailler ailleurs que sur le port de Dunkerque, de telle sorte que M. D... faisait bien partie des dockers occasionnels. La cour relève d'abord que la société Terminal des Flandres n'apporte aucun élément à l'appui de ses dires, mais se contente de procéder par simple affirmation. La société ajoute également, par rapport à une autre condition posée par le code des transports, qu'elle ne faisait appel à M. D... ainsi qu'à d'autres dockers occasionnels que dans les situations dans lesquelles l'ensemble des dockers professionnels étaient occupés et qu'une charge supplémentaire et ponctuelle se présentait. .../... Sur ce point, la société intimée verse aux débats de nombreux tableaux destinés à montrer qu'elle ne fait appel à des ODO que lorsque l'ensemble des dockers mensualisés étaient soit occupés sur les différents chantiers, soit en congés, soit en RTT. La cour relève toutefois que ces tableaux et plannings portent sur la période de mai et juin 2015, c'est à dire une période qui n'est pas concernée par la demande de M. D..., puisque la relation de travail a été rompue en 2014. Ensuite et en tout état de cause,
la cour relève qu'à supposer même que les conditions spécifiques posées par le code des ports maritimes et du code des transports aient été respectées dans le cas de M. D..., ce qui n'est pas établi, cela montrerait seulement qu'il ne peut pas revendiquer le statut de docker professionnel mensualisé, mais nullement que ses contrats de mission ou ses contrats de travail à durée déterminée successifs soient nécessairement valables au sens du code du travail, lequel reste applicable, contrairement à ce que soutient la société. Il convient donc de vérifier si les dispositions du code du travail ont été respectées. *Sur les contrats de mission conclus par M. D... de février 2006 à décembre 2012 : M. D... a été mis à disposition de la société NTFI, ancien nom de la société Terminal des Flandres par la société de travail temporaire Manpower entre 2006 et 2007 et par la société Adecco de 2008 à 2012 dans le cadre de 201 contrats de mission d'une durée d'un seul jour le plus souvent. Les contrats de mission et les contrats de mise à disposition correspondant qui ont été conclus avec la société Manpower en 2006 et 2007 mentionnent pour motif « emploi pour lequel il n'est pas d'usage de recourir au CDI » ainsi que, au titre de la « justification précise du recours » : « ATA lié à une intervention Quai Flandre », « ATA lié à une intervention sur le navire Flensburg Quai de Flandre » et, encore et surtout pour la plupart des contrats,« ATA lié au site de NFTI ». La cour relève que la société Terminal des Flandres ne produit aucune autre pièce que les contrats de mise à disposition et se contente d'affirmer que compte tenu du caractère fluctuant et imprévisible de l'activité même de la manutention portuaire, le recours aux ouvriers dockers occasionnels se justifie nécessairement par une tâche précise et temporaire indissociablement liée au secteur d'activité de la manutention portuaire, à savoir les escales des navires. Ce faisant, la cour constate que la société intimée ne verse aucun éléments permettant au juge de vérifier concrètement, comme cela lui incombe, l'existence de raisons objectives établissant le caractère par nature temporaire de l'emploi concerné de M. D.... Au contraire, la cour déduit des seules mentions de la plupart des contrats de mission et de mise à disposition de M. D..., à savoir « ATA lié au site NFTI », que M. D... occupait un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise, peu important que cette activité soit elle-même fluctuante. La cour en conclut que, faute pour la société Terminal des Flandres d'apporter, conformément au demeurant à son postulat de base excluant, mais à tort, l'application du code du travail, des éléments concrets autres que les contrats, ces contrats de missions que M. D... a conclus avec la société Manpower doivent être requalifiés en un contrat à durée indéterminée, en l'occurrence avec la société Terminal des Flandres, entreprise utilisatrice, comme le demande le salarié. La cour précise que ces seuls motifs suffisent alors à faire droit à la demande de M. D... sur toute la période qu'il vise puisque sous couvert d'autres contrats de mission qu'il a conclus ensuite avec la société Adecco et, à partir du 2012, de contrats à durée déterminée d'usage qu'il a conclus directement avec la société Terminal de Flandes, il n'a en fait cessé de travailler pour le compte de celle-ci dans le cadre de ce seul contrat à durée indéterminée. De façon surabondante, la cour ajoute toutefois que les contrats de mission que M. D... a conclus de juillet 2008 à décembre 2012 avec la société Adecco, avec toujours une mise à disposition pour la société Terminal des Flandres, l'ont tous été au motif non pas d'un usage constant, mais d'un « accroissement temporaire d'activité ». Il ressorts des contrats versés aux débats qu'ils comportent aussi, au titre des justifications précises » la mention, pour les premiers d'entre-eux, de « déchargement du bateau fort St Louis à honorer dans les délais » et pour la très grande majorité d'entre-eux ensuite « lié au déchargement de bateaux à honorer dans les délais ». Or, si un contrat de mission peut être conclu en cas d'accroissement temporaire de l'activité de l'entreprise, le recours à des salariés intérimaires ne peut être autorisé que pour les besoins d'une ou plusieurs tâches résultant du seul accroissement temporaire de l'activité de l'entreprise, notamment en cas de variations cycliques de production, sans qu'il soit nécessaire ni que cet accroissement présente un caractère exceptionnel, ni que le salarié recruté soit affecté à la réalisation même de ces tâches. Et il appartient à l'entreprise utilisatrice de rapporter la preuve de l'accroissement d'activité justifiant le recours à l'intérim. En l'espèce, en se contentant de justifier les contrats de mission par le fait qu'il soit lié « au déchargement de bateaux à honorer dans les délais », ce qui correspond à l'activité normale et permanente de la société, fût-elle fluctuante, la société n'apporte ni la preuve de l'existence de pics dans cette activité et encore moins la corrélation entre le volume de l'activité et celui de l'emploi de travailleurs temporaires. La cour en conclut que les contrats de mission qui ont été conclus par la société Adecco avec M. D... pour le mettre à disposition de la société Terminal des Flandres de 2008 à 2012 ont eu pour effet de pourvoir durablement des emplois liés à l'activité normale et permanente de cette entreprise utilisatrice, ce qui justifie la requalification de la relation de travail en contrat à durée indéterminée. La cour précise que ces seuls motifs suffisent alors à faire droit à la demande de M. D... sur toute la période qu'il invoque, puisque sous couvert de contrats à durée déterminée d'usage qu'il a conclus directement avec celle-ci à partir de 2012, il a en fait continué à travailler pour le compte de la société Terminal des Flandres dans le cadre de son contrat à durée indéterminée. *Sur les contrats à durée déterminée successifs d'usage que M. D... a conclus de 2012 à 2014 directement avec la société Terminal des Flandres : De façon à nouveau surabondante, il ressort des contrats à durée déterminée dits « d'usage constant » qui sont versés aux débats qu'ils précisent à l'article 1er intitulé « Engagement-Emploi » que « le salarié est engagé en qualité d'Ouvrier Docker Occasionnel (ODO), emploi temporaire par nature(...) » et à l'article 2 intitulé « Objet du contrat » qu'il est conclu« en raison de l'insuffisance d'ouvriers dockers professionnel mensualisé disponibles, et de l'absence d'ouvriers dockers professionnels intermittents sur le Port de Dunkerque, pour le chantier suivant : l'opération Navire du (...) au (....) », en sachant que ces contrats étaient tous conclus pour la durée d'un jour. Pour expliquer et justifier le recours aux dockers occasionnels, dont M. D..., et donc au contrat à durée déterminée à usage constant, la société Terminal des Flandres invoque les importantes variations d'activité au cours d'une même semaine et verse aux débats plusieurs tableaux destinés à illustrer cette variation d'activité pour la semaine du 18 au 24 mars 2013 et à montrer que l'embauche de M. D... était liée à une surcharge temporaire de travail. La cour relève d'abord que seuls les contrats qui sont versés aux débats par les parties doivent en l'espèce être pris en compte, à l'exclusion d'autres contrats qui correspondraient à des périodes auxquelles M. D... aurait également travaillé, sans que cela soit toutefois établi. La cour relève ensuite que les tableaux versés aux débats, en plus des contrats, par la société Terminal des Flandres prouvent que celle-ci n'a eu recours, pour la semaine du 18 au 24 mars 2013, au travail de M. D... par contrat à durée déterminée d'usage que pour les périodes pendant lesquelles les dockers professionnels mensualisés étaient en nombre insuffisants, soit en raison de l'activité importante sur le port, soit en raison de leur absence pour différents motifs. Ces éléments prouvent que M. D... ne peut revendiquer le statut de docker professionnel mensualisé. En outre, si les éléments produits par la société Terminal des Flandres permettent à la rigueur de justifier la conclusion avec M. D... de plusieurs contrats à durée déterminée successifs d'une journée sur la semaine du 18 au 24 mars 2013, le fait que la conclusion de tels contrats à durée déterminée successifs d'une journée ait été, comme l'attestent les contrats produits, répétée en 2013 et 2014, et en fait depuis 2006, à intervalle aussi réguliers pendant de nombreuses semaines de chaque mois, montre que ce recours aux contrats à durée déterminée successifs d'un jour a eu pour effet de pourvoir un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise. La cour ajoute en effet que le caractère par essence fluctuant de l'activité de manutention portuaire que la société Terminal des Flandres invoque ne saurait, dans de telles conditions, constituer concrètement une raison objective établissant le caractère par nature temporaire de l'emploi concerné de M. D..., car à suivre la société c'est du même coup l'existence de dockers mensualisés embauchés à durée indéterminée qui serait une anomalie. Au-delà même de l'ancienneté de M. D..., qui n'est pas en soi déterminante, c'est donc la régularité avec laquelle il a été recouru, de très nombreuses semaines de chaque mois, à son travail dans le cadre de contrats à durée déterminée successifs d'une seule journée qui révèle que M. D... venait pallier le déficit non pas seulement conjoncturel (lié aux congés, au respect du temps de travail), mais bien structurel de main d'oeuvre de dockers professionnels. La cour ajoute que la société Terminal des Frandres avait la possibilité d'adapter le travail de M. D... à l'activité par essence fluctuante de l'entreprise en agissant sur sa durée du travail (modulation, temps partiel) plutôt que sur la durée de son contrat. La cour en conclut que, du fait des conditions de recours au contrats à durée déterminés successifs, M. D... a occupé un emploi lié à l'activité normale et permanente , -fut-elle fluctuante-, de la société Terminal des Flandres, de telle sorte que ses contrats à durée déterminée doivent être requalifiés en un contrat à durée indéterminée, sans que M. D... puisse pour autant prétendre au statut de docker professionnel mensualisé. Le jugement sera donc infirmé. Sur les conséquences de la requalification en contrat à durée indéterminée La cour considère d'abord que la relation de travail de M. D... pour le compte de la société Terminal des Flandres doit être requalifiée en un contrat à durée indéterminée depuis 2006 et que sa rupture en 2014 n'étant pas contestée par les parties, elle équivaut à un licenciement sans cause réelle et sérieuse. Il y a d'abord lieu de condamner la société Terminal des Flandres à verser à M. D... une indemnité de requalification du montant qu'il réclame, dont le montant est exact et non contesté, de 1 480,65 euros, une indemnité compensatrice de préavis du montant qu'il réclame de 2 961,30 euros, dont le quantum est exact et non contesté, et 296,12 euros de congés payés afférents, ainsi qu'une indemnité légale de licenciement du montant qu'il réclame de 2 541,03 euros, dont le quantum n'est pas davantage surévalué, ni contesté. S'agissant de l'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse Il convient d'abord de préciser que M. D..., par l'effet de la requalification des contrats à durée déterminée, est réputé avoir occupé un emploi à durée indéterminée depuis le jour de son engagement par un contrat à durée déterminée ou de mission irrégulier, de telle sorte que son ancienneté remonte au contrat de mission du 16 février 2006, le fait qu'il ait pu ne pas se tenir à la disposition de la société Terminal des Flandres entre les différents contrats précaires requalifiés est donc indifférent pour le décompte de son ancienneté et est seulement déterminant pour des rappels de salaire pour les périodes interstitielles entre les contrats, rappels de salaires dont M. D... ne fait de toute façon pas la demande. Ainsi, compte tenu du salaire moyen des six derniers mois de M. D... (1 390 euros), de son ancienneté (8 ans) et des circonstances de la rupture, mais compte tenu également de l'absence de justificatifs produits par M. D... sur sa situation depuis la rupture du contrat de travail, il est justifié de condamner la Société Terminal des Flandres à lui payer la somme de 10 000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse sur le fondement de l'article L. l235-3 du code du travail, dans sa version alors en vigueur. En application de l'article L. 1235-4 du code du travail, il y a lieu, en outre, d'ordonner le remboursement par la société Terminal des Flanddres des indemnités chômage éventuellement versées par Pôle Emploi à M. D... postérieurement à son licenciement, dans la limite de six mois ; Sur les documents sociaux Il y a lieu d'ordonner à la société Terminal des Flandres de délivrer à M. D... un bulletin de paie pour les indemnités diverses, ainsi qu'une nouvelle attestation destinée à Pôle emploi conforme au présent arrêt. En revanche, il n'y a pas lieu d'assortir cet ordre d'une astreinte. Sur les intérêts Il y a lieu de rappeler que les créances de nature salariale allouées porteront intérêts à compter de la date de réception par l'employeur de la convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes et les créances indemnitaires à partir de la décision qui les prononce, en l'occurrence donc du présent arrêt. Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens : Le jugement sera infirmé de ces deux chefs et compte tenu de l'issue du litige, la société Terminal des Flandres sera en outre condamnée à payer à M. D... la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles qu'il a engagés en première instance et en cause d'appel, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel » ;
ALORS, en premier lieu, QUE constituent des éléments objectifs établissant la nature temporaire de l'emploi, au sens des articles L. 12421 et L. 12422 du code du travail, interprétés à la lumière de la clause 5, point 1, a) de l'accord-cadre européen sur le travail à durée déterminée du 18 mars 1999 mis en oeuvre par la Directive 1999/70/CE du 28 juin 2000, le caractère fluctuant du trafic maritime et la variation continue de la charge d'activité de chargement et déchargement des navires, de sorte que la conclusion de contrats à durée déterminée successifs est justifiée par des raisons objectives ; qu'en l'espèce, la société faisait valoir, non seulement que les dispositions du code des transports, des ports maritimes et les stipulations conventionnelles étaient dérogatoires aux dispositions du code du travail, mais également qu'en tout état de cause le caractère fluctuant de l'activité de transport maritime constituait une raison objective établissant le caractère par nature temporaire des emplois ; que pour dire que la relation de travail du salarié devait être requalifiée en contrat à durée indéterminée à compter du 16 février 2006 et que la rupture du dernier contrat devait s'analyser en un licenciement sans cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a considéré que, même à considérer que les dispositions du code des transports, des ports maritimes et les stipulations conventionnelles avaient été respectées,
cela démontrait seulement que le salarié ne pouvait revendiquer le statut de docker professionnel mensualisé mais nullement que les contrats de missions ou à durée déterminée étaient nécessairement valables au sens du code du travail ; qu'en statuant par de tels motifs, qui n'étaient en rien de nature à exclure l'existence d'une raison objective justifiant le recours à des CDD successifs, la Cour d'appel a priveì sa décision de toute base légale au regard de l'ensemble des articles L. 5343-2 à -7 du code des transports, ensemble de la Convention collective nationale de la manutention portuaire du 31 décembre 1993, étendue par arrêté du 29 septembre 1994, ensemble
de l'ensemble des articles L. 5343-2 à -7 du code des transports, ensemble de la Convention collective nationale de la manutention portuaire du 31 décembre 1993, étendue par arrêté du 29 septembre 1994, ensemble de l'avenant à la Convention collective nationale de la manutention portuaire du 18 avril 2006 relatif aux conditions d'emploi et de rémunérations particulières des personnels dockers des entreprises de manutention dans les ports maritimes du nord, ensemble de la Convention collective nationale unifiée ports et manutention du 15 avril 2011, ensemble de l'accord collectif du 16 novembre 2012 relatif au recours aÌ l'emploi d'ouvrier dockers occasionnels spécifique au port de Dunkerque, ainsi que les articles L. 12421 et L. 12422 du code du travail, interprétés à la lumière de la clause 5, point 1, a) de l'accord-cadre européen sur le travail à durée déterminée du 18 mars 1999 mis en oeuvre par la Directive 1999/70/CE du 28 juin 2000 ;
ALORS, en deuxième lieu, et en tout état de cause, QUE constituent des éléments objectifs établissant la nature temporaire de l'emploi, au sens des articles L. 1242-1 et L. 1242-2 du code du travail, interprétés à la lumière de la clause 5, point 1, a) de l'accord-cadre européen sur le travail à durée déterminée du 18 mars 1999 mis en oeuvre par la Directive 1999/70/CE du 28 juin 2000, le caractère fluctuant du trafic maritime et la variation continue de la charge d'activité de chargement et déchargement des navires, de sorte que la conclusion de contrats à durée déterminée successifs est justifiée par des raisons objectives ; qu'en l'espèce, pour dire que la relation de travail du salarié devait être requalifiée en contrat à durée indéterminée à compter du 16 février 2006 et que la rupture du dernier contrat devait s'analyser en un licenciement sans cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a considéré que, par principe, les contrats de missions et à durée déterminée étaient liés à l'activité normale et permanente de la société, fût-elle fluctuante ; que pourtant, le caractère fluctuant du trafic maritime et la variation continue de la charge d'activité de chargement et déchargement des navires peuvent constituer des raisons objectives justifiant la conclusion de contrats à durée déterminée successifs ; Qu'en considérant le contraire, la cour d'appel a violé l'ensemble des textes susvisés ;
ALORS, en troisième lieu, QU'en affirmant que les contrats de missions et à durée déterminée étaient liés à l'activité normale et permanente de la société, fût-elle fluctuante et que les pièces produites par la société ne permettait pas d'établir l'existence de raisons objectives justifiant le recours à de CDD successifs, quand elle constatait elle-même que le trafic maritime avait un caractère par essence fluctuant et que l'activité continue de la société était variable en fonction de la charge d'activité de chargement et déchargement des navires (arrêt p. 11 § 5 et 6), la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations, a violé l'ensemble des articles L. 12421 et L. 12422 du code du travail, interprétés à la lumière de la clause 5, point 1, a) de l'accord-cadre européen sur le travail à durée déterminée du 18 mars 1999 mis en oeuvre par la Directive 1999/70/CE du 28 juin 2000 ;
ALORS, en quatrième lieu, QU'en affirmant que le caractère par essence fluctuant de l'activité de manutention portuaire ne saurait constituer concrètement une raison objective établissant le caractère par nature temporaire de l'emploi concerné car à suivre la société c'est du même coup l'existence des dockers mensualisés embauchés à durée indéterminée qui serait une anomalie, et que la société avait la possibilité d'adapter le travail des salariés à l'activité par essence fluctuante de l'entreprise en agissant sur la durée du travail (modulation, temps partiel), la cour d'appel a statué par des motifs inopérants qui n'étaient en rien de nature à exclure l'existence d'une raison objective justifiant le recours à des CDD successifs, privant ainsi sa décision de toute base légale au regard des articles L. 12421 et L. 12422 du code du travail, interprétés à la lumière de la clause 5, point 1, a) de l'accord-cadre européen sur le travail à durée déterminée du 18 mars 1999 mis en oeuvre par la Directive 1999/70/CE du 28 juin 2000.ECLI:FR:CCASS:2020:SO01028
SOC.
LG
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 12 novembre 2020
Rejet
M. CATHALA, président
Arrêt n° 1028 FS-P+B+I
Pourvoi n° M 19-11.402
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 12 NOVEMBRE 2020
La société Terminal des Flandres, société par actions simplifiée, dont le siège est Port Dunkerque Ouest, quai de Flandre, BP 53, 59279 Loon-Plage, a formé le pourvoi n° M 19-11.402 contre l'arrêt rendu le 30 novembre 2018 par la cour d'appel de Douai (chambre sociale), dans le litige l'opposant :
1°/ à M. V... D..., domicilié [...] ,
2°/ à Pôle emploi Ile-de-France, dont le siège est 1 avenue du docteur Gley, 75020 Paris,
défendeurs à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Ala, conseiller référendaire, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de la société Terminal des Flandres, de la SARL Meier-Bourdeau, Lécuyer et associés, avocat de M. D..., et l'avis de Mme Rémery, avocat général, après débats en l'audience publique du 23 septembre 2020 où étaient présents M. Cathala, président, Mme Ala, conseiller référendaire rapporteur, M. Schamber, conseiller doyen, Mmes Cavrois, Monge, MM. Sornay, Rouchayrole, conseillers, Mmes Prieur, Thomas-Davost, conseillers référendaires, Mme Rémery, avocat général, et Mme Lavigne, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué ( Douai, 30 novembre 2018), M. D... a été engagé à compter du mois de février 2006, en qualité d'ouvrier docker occasionnel, par plusieurs entreprises de travail temporaire qui l'ont mis à disposition de la société Terminal des Flandres, l'une des sociétés de manutention portuaire sur le port de Dunkerque, au moyen de deux cent un contrats de mission.
2. A compter du 1er janvier 2013, il a été recruté directement par la société Terminal des Flandres dans le cadre de contrats à durée déterminée d'usage.
3. La relation de travail ayant pris fin le 16 juillet 2014, le salarié a saisi la juridiction prud'homale de demandes tendant à obtenir la requalification en contrat à durée indéterminée des contrats de mission temporaire ainsi que des contrats à durée déterminée, avec toutes les conséquences attachées à la rupture injustifiée d'un contrat à durée indéterminée.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa première branche, ci-après annexé
4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le moyen, pris en ses autres branches
Enoncé du moyen
5. L'employeur fait grief à l'arrêt de dire que la relation de travail doit être requalifiée en contrat à durée indéterminée à compter du 16 février 2006, de dire que la rupture s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse et de le condamner au paiement de sommes en conséquence, alors :
« 2° / que constituent des éléments objectifs établissant la nature temporaire de l'emploi, au sens des articles L. 12421 et L. 12422 du code du travail, interprétés à la lumière de la clause 5, point 1, a) de l'accord cadre européen sur le travail à durée déterminée du 18 mars 1999 mis en oeuvre par la Directive 1999/70/CE du 28 juin 2000, le caractère fluctuant du trafic maritime et la variation continue de la charge d'activité de chargement et déchargement des navires, de sorte que la conclusion de contrats à durée déterminée successifs est justifiée par des raisons objectives ; qu'en l'espèce, pour dire que la relation de travail du salarié devait être requalifiée en contrat à durée indéterminée à compter du 16 février 2006 et que la rupture du dernier contrat devait s'analyser en un licenciement sans cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a considéré que, par principe, les contrats de missions et à durée déterminée étaient liés à l'activité normale et permanente de la société, fût-elle fluctuante ; que pourtant, le caractère fluctuant du trafic maritime et la variation continue de la charge d'activité de chargement et déchargement des navires peuvent constituer des raisons objectives justifiant la conclusion de contrats à durée déterminée successifs ; qu'en considérant le contraire, la cour d'appel a violé l'ensemble des textes susvisés ;
3°/ qu'en affirmant que les contrats de missions et à durée déterminée étaient liés à l'activité normale et permanente de la société, fût elle fluctuante et que les pièces produites par la société ne permettait pas d'établir l'existence de raisons objectives justifiant le recours à des contrats à durée déterminée successifs, quand elle constatait elle-même que le trafic maritime avait un caractère par essence fluctuant et que l'activité continue de la société était variable en fonction de la charge d'activité de chargement et déchargement des navires, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations, a violé l'ensemble des articles L. 12421 et L.12422 du code du travail, interprétés à la lumière de la clause 5, point 1, a) de l'accord cadre européen sur le travail à durée déterminée du 18 mars 1999 mis en oeuvre par la Directive 1999/70/CE du 28 juin 2000 ;
4°/ qu'en affirmant que le caractère par essence fluctuant de l'activité de manutention portuaire ne saurait constituer concrètement une raison objective établissant le caractère par nature temporaire de l'emploi concerné car à suivre la société c'est du même coup l'existence des dockers mensualisés embauchés à durée indéterminée qui serait une anomalie, et que la société avait la possibilité d'adapter le travail des salariés à l'activité par essence fluctuante de l'entreprise en agissant sur la durée du travail (modulation, temps partiel), la cour d'appel a statué par des motifs inopérants qui n'étaient en rien de nature à exclure l'existence d'une raison objective justifiant le recours à des contrats à durée déterminée successifs, privant ainsi sa décision de toute base légale au regard des articles L. 12421 et L. 12422 du code du travail, interprétés à la lumière de la clause 5, point 1, a) de l'accord cadre européen sur le travail à durée déterminée du 18 mars 1999 mis en oeuvre par la Directive 1999/70/CE du 28 juin 2000. »
Réponse de la Cour
6. Aux termes de l'article L. 124-2, alinéa 1, devenu l'article L. 1251-5 du code du travail, le contrat de mission, quel que soit son motif, ne peut avoir ni pour objet, ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise utilisatrice.
7. Selon les articles L. 124-2, alinéa 2, L. 124-2-1 et D. 124-2 devenus les articles L. 1251-6 et D. 1251-1 du même code, dans les secteurs d'activité définis par décret ou par voie de convention ou d'accord collectif étendu, il peut être fait appel à un salarié temporaire pour l'exécution d'une tâche précise et temporaire dénommée « mission » pour certains des emplois en relevant lorsqu'il est d'usage constant de ne pas recourir à un contrat à durée indéterminée en raison de la nature de l'activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois, et que des contrats de mission successifs peuvent, en ce cas, être conclus avec le même salarié.
8. Il résulte de l'application combinée de ces textes, que le recours à l'utilisation de contrats de missions successifs impose de vérifier qu'il est justifié par des raisons objectives qui s'entendent de l'existence d'éléments concrets établissant le caractère par nature temporaire de l'emploi.
9. Ayant relevé que les contrats de mission conclus en 2006 et 2007 mentionnaient comme motif de recours « emploi pour lequel il n'est pas d'usage de recourir au contrat à durée indéterminée » et que l'entreprise utilisatrice, avec laquelle la relation de travail s'était poursuivie de manière continue au moyen de contrats à durée déterminée d'usage, se contentait d'affirmer que, compte tenu du caractère fluctuant et imprévisible de l'activité de la manutention portuaire, le recours aux ouvriers dockers occasionnels se justifiait nécessairement par une tâche précise et temporaire indissociablement liée au secteur d'activité de la manutention portuaire sans qu'elle ne verse, aucun élément permettant au juge, de vérifier concrètement l'existence de raisons objectives établissant le caractère par nature temporaire de l'emploi occupé par le salarié, la cour d'appel a pu, par ces seuls motifs, en déduire que la relation de travail devait être requalifiée en contrat à durée indéterminée à compter du premier contrat de mission irrégulier.
10. Le moyen, n'est donc pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Terminal des Flandres aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Terminal des Flandres et la condamne à payer à M. D... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du douze novembre deux mille vingt.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour la société Terminal des Flandres
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que la relation de travail du salarié devait être requalifiée contrat à durée indéterminée à compter du 16 février 2006 et que la rupture du dernier contrat devait s'analyser en un licenciement sans cause réelle et sérieuse et d'AVOIR en conséquence condamné la société à verser au salarié les sommes de 1 480,65 euros à titre d'indemnité de requalification, de 2 961,30 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, de 296,13 à titre de congés payés afférents, de 2 541,03 euros à titre d'indemnité légale de licenciement, de 10 000 euros de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens et au remboursement des indemnités éventuellement versées par Pôle Emploi dans la limite de six mois ;
AUX MOTIFS QUE, aux termes de l'arrêt attaqué, « Sur la demande de requalification des contrats de mission et des contrats à durée déterminée d'usage en un contrat à durée indéterminée : M. D... soutient qu'il a conclu 201 contrats de mission temporaire entre 2006 et 2012 avec des motifs et des précisions différentes selon la période (2006 et 2007, d'une part, et 2008 à 2012, d'autre part) et que l'emploi qu'il a occupé pendant 7 ans était lié durablement à l'activité normale et permanente de l'entreprise puisqu'il a toujours été affecté aux mêmes tâches (chargement, déchargement de bateaux et manutentions diverses). Si la société Terminal des Flandres produit aux débats les 201 contrats de mise à disposition, en revanche, elle n'apporte pas la preuve pour chacune de ces mises à disposition qu'elle se trouvait confrontée à un accroissement temporaire d'activité. Les contrats de mission étant illégaux, M. D... est fondé à obtenir la requalification en contrat à durée indéterminée de toute la relation de travail auprès de l'entreprise utilisatrice, ainsi qu'une indemnité de requalification. M. D... fait valoir que cette requalification s'impose également pour les contrats à durée déterminée d'usage qu'il a conclus directement avec la société Terminal des Flandres de janvier 2013 à juillet 2014, dès lors que l'écrit n'est pas régulier et que M. D... a occupé un emploi lié durablement à l'activité normale et permanente de l'entreprise, l'existence d'une convention collective permettant de conclure de tels contrats d'usage n'étant pas suffisante. La société Terminal des Flandres soutient au contraire que les dispositions du code du travail, notamment relatives au contrat à durée déterminée, ne sont pas applicables au statut des dockers, celui-ci relevant uniquement et exclusivement des dispositions du code des transports, dérogatoires au droit commun, et que les dockers occasionnels occupent un emploi par nature temporaire. La société Terminal des Flandres montre qu'elle a respecté les conditions inhérentes au statut d'ouvrier docker occasionnel et les conditions permettant le recours à cette force d'appoint, telles qu'elles sont précisées dans les textes légaux et conventionnels applicables. La société ajoute que l'usage des contrats à durée déterminée est en l'espèce nécessairement justifié par des conditions objectives matérielles, à savoir le caractère fluctuant du trafic maritime et la variation continue de la charge d'activité de chargement et déchargement des navires. L'article L. 511-2 du code des ports maritimes, tel qu'il résulte de la loi n° 492-96 du 9 juin 1992 dispose que « -Dans les ports désignés par l'arrêté ministériel mentionné à l'article L. 511-1, les ouvriers dockers sont rangés en: - ouvriers dockers professionnels ; - ouvriers dockers occasionnels. Les ouvriers dockers professionnels sont soit mensualisés, soit intermittents. Il. - Relèvent de la catégorie des dockers professionnels mensualisés les ouvriers qui concluent avec un employeur un contrat de travail à durée indéterminée. Les entreprises de manutention portuaire ou leurs groupements ont l'obligation de recruter les ouvriers dockers professionnels mensualisés en priorité et dans l'ordre parmi les ouvriers dockers professionnels intermittents puis parmi les ouvriers dockers occasionnels qui ont régulièrement travaillé sur le port au cours des douze mois précédents( ...). « Une convention collective nationale de la manutention devra être négociée et signée par les partenaires sociaux au plus tard au 31 décembre 1993, qui concernera toutes les catégories de dockers mentionnées au présent article». III. -(...)Pour les travaux de manutention définis par décret, les employeurs, lorsqu'ils n'utilisent pas uniquement des dockers professionnels mensualisés, ont recours en priorité aux dockers professionnels intermittents puis, à défaut, aux dockers occasionnels ». Ces dispositions du code des ports maritimes ont été abrogées par l'ordonnance n° 2010- 1307 du 28 octobre 2010 et ont été intégrées dans le code des transports aux articles L. 5343-2 jusqu'à L. 5343-7. Ainsi, l'article L. 5343-6 précise que« Les ouvriers dockers occasionnels constituent une main-d'oeuvre d'appoint à laquelle il n'estfait appel qu'en cas d'insuffisance du nombre des dockers professionnels intermittents. Les ouvriers dockers occasionnels ne sont pas tenus de se présenter à l'embauche et peuvent travailler ailleurs que sur le port sans autorisation spéciale». Enfin, l'article L. 5343-7 dispose que « Pour les travaux de manutention définis par voie réglementaire, les employeurs, lorsqu'ils n'utilisent pas uniquement des dockers professionnels mensualisés, ont recours en priorité aux dockers professionnels intermittents puis, à défaut, aux dockers occasionnels». Conformément à la loi, une Convention collective nationale de la manutention portuaire a été conclue en date du 31 décembre 1993 et étendue par arrêté du 29 septembre 1994. Cette convention collective comprend à son article 9 un B intitulé « emplois à caractère occasionnels » qui dispose que « Conformément à l'article L. 122-1 du code de travail, le contrat de travail à durée déterminée ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise. Sous réserve de l'alinéa précédent, les signataires de la présente convention collective conviennent que l'activité de manutention portuaire, telle que définie à l'article 1er relatif au champ d'application, constitue un secteur d'activité ou il est d'usage constant, au sens de l'article L. 122-1-1, 3e du code du travail de recourir au contrat de travail à durée déterminée en raison de la nature de l'activité exercée et du caractère par nature temporaire de certains emplois. Les emplois pour lesquels des contrats à durée déterminée correspondant à ce cas de recours pourront être conclus, sont ceux relevant de la filière "exploitation portuaire" telle que définie par la présente convention collective. La notification par l'employeur à l'ANPE, en application de l'article L. 312-2 du code du travail, des emplois vacants dans l'entreprise devra faire ressortir ceux de dockers occasionnels. Dans le cadre des dispositions législatives en vigueur, le chef d'entreprise devra informer le comité d'entreprise ou, à défaut, les délégués du personnel du nombre de salariés sous contrat à durée déterminée en faisant ressortir le nombre de dockers occasionnels ». En outre, un avenant à cette convention nationale a été conclu en date du 18 avril 2006 qui est relatif aux conditions d'emploi et de rémunération particulières des personnels dockers des entreprises de manutention dans les ports maritimes du nord. Cet avenant a pour objet « d'intégrer dans le cadre de la convention collective nationale de la manutention portuaire les différents accords et avenants conclus depuis 1992 entre les organisations syndicales des personnels dockers et les entreprises de manutention du port de Dunkerque, ainsi que les accords conclus entre les entreprises de manutention qui ont une incidence sur l'emploi ». Cet avenant comprend un Titre VIII intitulé « Sauvegarde de l'emploi » et qui précise en un 8.1.1. que « En cas de nécessité, les entreprises de manutention s 'efforcent de sous-traiter entre elles la réalisation de tout ou partie de chantiers pour lesquels la main-d'oeuvre dont elles disposent est ponctuellement insuffisante, en effectifs et/ou en compétences. Ce dispositif de sous-traitance de chantiers, qui a pour effet de réguler la charge de travail entre les entreprises, a également pour finalité de stabiliser l'emploi de la main-d'oeuvre mensualisée ». Un 8.1.2. ajoute que « Lorsque la sous-traitance ne permet pas à une entreprise d'assurer la réalisation de tout ou partie d'un chantier, elle est autorisée à avoir recours à du personnel intérimaire, aux conditions fixées au titre IX ci-après ». Le titre IX intitulé « conditions du recours à l'intérim » dispose que « (...) Depuis 1992, la main-d'oeuvre indispensable au bon fonctionnement des entreprises de manutention (maîtrise, spécialistes, dockers historiques détenteurs du savoir-faire propre au port de Dunkerque) a été mensualisée au sein des entreprises de manutention. Afin de se donner les moyens de mieux répondre à la demande, les entreprises de manutention ont passé un accord qui leur permet, en cas de nécessité, de sous-traiter entre elles la réalisation de tout ou parties de chantiers pour lesquels la main-d'oeuvre dont elles disposent est ponctuellement insuffisante, en effectifs et/ou en compétences. .../... Cet accord de sous-traitance de chantiers (cf titre VIII ci-dessus), qui a pour effet de réguler la charge de travail entre les entreprises, a également pour effet de stabiliser l'emploi de la main-d'oeuvre mensualisée. Cet accord prévoit également que, lorsque la sous-traitance ne permet pas à une entreprise d'assurer la réalisation de tout ou partie d'un chantier, elle peut avoir recours à du personnel intérimaire. Considérant les risques inhérents au métier d'ouvrier docker, il a toutefois été convenu que les entreprises ne peuvent avoir recours qu 'à des intérimaires habilités, ayant reçu un minimum de formation au métier d'ouvrier docker et en particulier une formation spécifique à la sécurité. Ainsi, il a été convenu de constituer un pool d'ouvriers dockers intérimaires au sein des effectifs d'une ou plusieurs entreprises de travail temporaire, et que les entreprises de manutention, en cas de besoin, et lorsque les possibilités de sous-traitance ont été épuisées, feraient appel aux services des seuls membres de ce pool d'ouvriers dockers intérimaires ». Ensuite, une Convention collective nationale unifiée ports et manutention du 15 avril 2011 a été conclue qui a repris ces dispositions précitées de la convention collective nationale de 1993 à son B « Emplois à caractère occasionnel » de son article 6 « Contrat de travail », lequel dispose donc pareillement que : « Conformément à l'article L. 1242-1 du code du travail, le contrat de travail à durée déterminée ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise. Le recours à des CDD d'usage constant est toutefois rendu nécessaire dans certaines entreprises relevant du champ d'application de la présente convention collective compte tenu : - du caractère irrégulier de leur activité lié aux fluctuations du trafic portuaire et des débarquements de produits de la pêche ; -de la nécessité de disposer d'une main-d'oeuvre d'appoint, au sens des articles L. 511-2 et L. 511-5 du code des ports maritimes, disposant des formations requises, et de la fidéliser. Sous réserve des alinéas précédents, les signataires de la présente convention collective conviennent que l'activité de manutention portuaire et celle de débarquement des produits de la pêche au sein des ports de pêche, telles que définies à l'article 1er relatif au champ d'application, constituent un secteur d'activité où il est d'usage constant, au sens de l'article L. 1242-7 du code du travail, de recourir au contrat de travail à durée déterminée en raison de la nature de l'activité exercée et du caractère par nature temporaire de certains emplois. Les emplois concernés sont ceux correspondant aux ouvriers dockers occasionnels tels que définis au point 2 du champ d'application et au point 1 des bénéficiaires de la présente convention collective (...) ». Cet article 6 B comprend aussi des « Dispositions particulières applicables dans les ports comportant des dockers professionnels intermittents » et dispose notamment que « Dans les ports comportant des dockers professionnels intermittents, il ne pourra être procédé à l'embauchage par contrat à durée déterminée de dockers occasionnels pour effectuer les travaux réservés à la maind'oeuvre des dockers telle que définie par le code des ports maritimes qu'à défaut de dockers professionnels intermittents disponibles remplissant les conditions d'aptitude requises correspondant aux postes à pourvoir (...) ». Enfin, un Accord du 16 novembre 2012 relatif au recours à l'emploi d'ouvriers dockers occasionnels spécifique au port de Dunkerque a été conclu qui reprend, en substance, les dispositions de l'accord du 18 avril 2006 sur le recours à la sous-traitance et à la possibilité, en cas d'insuffisance, de recourir non plus à l'intérim, mais directement à des ouvriers dockers occasionnels, en l'occurrence par le recours à des contrats déterminée d'usage. De l'articulation de l'ensemble de ces textes, il ressort d'abord que contrairement à ce que soutient la société Terminal des Flandres, ni le code des ports maritimes, ni ensuite celui des transports n'ont entendu prévoir un régime spécifique de contrat à durée déterminée ou d'intérim des Ouvriers Dockers occasionnels dérogatoire à celui prévu par le code du travail puisque les dispositions légales renvoient elles-mêmes à des textes conventionnels qui précisent bien, au sujet des « emplois à caractère occasionnels », que «Conformément à l'article L. 1242-1 du code du travail, le contrat de travail à durée déterminée ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise» et même que les contrats à durée déterminée d'usage qui ont vocation à être conclus avec les ouvriers dockers occasionnels sont conclus « sous réserve » du respect de ces dispositions du code du travail. Il ressort aussi de l'ensemble de ces dispositions et de leur combinaison temporelle que les avenants spécifiques aux ports de Dunkerque, en particulier celui de 2006 précité, relatif à la possibilité de recourir à l'intérim pour pallier l'insuffisance de sous-traitance n'ont en rien soustrait les contrats de mission qui ont été conclus avec les dockers occasionnels des exigences du code du travail dès lors qu'ils ne constituent que des avenants à des accords nationaux qui s'inscrivent eux-mêmes dans le respect du code du travail et qu'ils concernent des contrats de mission dont le régime est aligné, à de très rares exceptions près qui ne sont pas concernées en l'espèce, sur celui des contrats à durée déterminée. Cela est d'autant plus flagrant que ce recours à l'intérim a été supprimé en 2012 pour laisser précisément la place, en cas d'insuffisance de sous-traitance, à des contrats à durée déterminée d'usage directement conclus avec les entreprises de manutention, donc à des contrats qui sont incontestablement soumis, en application de ce qui précède, aux exigences du code du travail. Ainsi, s'il ressort de l'ensemble de ces textes qu'ils distinguent nettement les dockers professionnels (mensualisés ou intermittents) des dockers occasionnels, notamment en ce sens que les dockers professionnels mensualisés sont embauchés par contrat à durée indéterminée et les dockers occasionnels par contrats précaires (contrats à durée déterminée ou d'intérim selon un usage constant), ils invitent à distinguer ce qui relève du statut de ce qui relève du contrat. Autrement dit, les dispositions spécifiques du code des ports maritimes, ensuite celui des transports, précisent les différences statutaires entre un docker professionnel et un docker occasionnel et, en substance, les conditions auxquelles un docker occasionnel doit satisfaire pour relever de cette qualification statutaire. Moyennant quoi, dès lors que ces conditions sont respectées, un docker occasionnel employé en contrat à durée déterminée ne peut prétendre être requalifié en un docker professionnel employé en contrat à durée indéterminée. Pour autant, un docker occasionnel au sens statutaire, et qui est donc engagé par contrat à durée déterminée, peut faire valoir que les conditions légales de recours aux contrats à durée déterminée (le plus souvent d'usage) et/ou de leur succession n'ont pas été respectées, soit pour obtenir une indemnité de précarité dans le cadre de son contrat à durée déterminée (qui reste alors à durée déterminée, sans pouvoir relever de l'usage constant), soit même pour obtenir la requalification de son contrat de travail à durée déterminée en un contrat à durée indéterminée (avec les conséquences qui en résultent). Mais retenir alors que le contrat à durée déterminée du docker occasionnel n'est pas valable, qu'il doit être requalifié (requalification sanction) en contrat à durée indéterminée ne signifie pas pour autant que le docker aurait dû être embauché comme docker professionnel (mensualisé) au sens statutaire. Les dispositions spécifiques du code des transports sur les dockers, qui doivent être respectées, ne font donc pas obstacle à ce qu'un docker occasionnel du point de vue statutaire, et engagé par contrats à durée déterminée successifs (en particulier d'usage), puisse solliciter la requalification de ses contrats précaires en un contrat à durée indéterminée
sur le fondement du code du travail. Cela s'impose d'autant plus que toute disposition nationale qui autorise le recours au contrat à durée déterminée doit être lue à la lumière de la directive 1999/70 sur les contrats à durée déterminée, laquelle exige en particulier du juge national qu'il opère un contrôle de l'abus en cas de succession de contrats précaires avec le même salarié. Ainsi, si dans les secteurs d'activité définis par décret ou par voie de convention ou d'accord collectif étendu, - comme c'est le cas dans la manutention portuaire-, certains des emplois en relevant peuvent être pourvus par des contrats à durée déterminée lorsqu'il est d'usage constant de ne pas recourir à un contrat à durée indéterminée en raison de la nature de l'activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois, -comme c'est le cas pour les contrats des dockers occasionnels - , et que des contrats à durée déterminée successifs peuvent, en ce cas, être conclus avec le même salarié, l'accord-cadre sur le travail à durée déterminée du 18 mars 1999, mis en oeuvre par la directive 1999/70/CE du 28 juin 1999, en ses clauses 1 et 5, qui a pour objet de prévenir les abus résultant de l'utilisation de contrats à durée déterminée successifs, impose de vérifier que le recours à l'utilisation de contrats à durée déterminée successifs est justifié par des raisons objectives qui s'entendent de l'existence d'éléments concrets établissant le caractère par nature temporaire de l'emploi. En outre, la détermination par accord collectif de la liste précise des emplois pour lesquels il peut être recouru au contrat de travail à durée déterminée d'usage -comme pour le docker occasionnel- ne dispense pas le juge, en cas de litige, de vérifier concrètement l'existence de raisons objectives établissant le caractère par nature temporaire de l'emploi concerné. Et ce qui vaut pour les contrats à durée déterminée d'usage vaut pour les contrats de mission d'usage conclus dans le cadre du travail temporaire puisque les articles L. 1251-5 et L. 1251-6 du code du travail applicables aux contrats de travail temporaire sont rédigés dans les mêmes termes que les articles relatifs aux contrats à durée déterminée d'usage. En l'espèce, la société Terminal des Flandres se contente dans un premier temps de soutenir que les dispositions légales particulières, en l'occurrence du code des ports maritimes et du code des transports, applicables au statut des dockers occasionnels ont été respectées pour M. D.... En effet, selon la société Terminal des Flandres, M. D... n'était pas titulaire de la carte professionnelle, ne bénéficiait d'aucune priorité d'embauche, il pouvait travailler ailleurs que sur le port de Dunkerque, de telle sorte que M. D... faisait bien partie des dockers occasionnels. La cour relève d'abord que la société Terminal des Flandres n'apporte aucun élément à l'appui de ses dires, mais se contente de procéder par simple affirmation. La société ajoute également, par rapport à une autre condition posée par le code des transports, qu'elle ne faisait appel à M. D... ainsi qu'à d'autres dockers occasionnels que dans les situations dans lesquelles l'ensemble des dockers professionnels étaient occupés et qu'une charge supplémentaire et ponctuelle se présentait. .../... Sur ce point, la société intimée verse aux débats de nombreux tableaux destinés à montrer qu'elle ne fait appel à des ODO que lorsque l'ensemble des dockers mensualisés étaient soit occupés sur les différents chantiers, soit en congés, soit en RTT. La cour relève toutefois que ces tableaux et plannings portent sur la période de mai et juin 2015, c'est à dire une période qui n'est pas concernée par la demande de M. D..., puisque la relation de travail a été rompue en 2014. Ensuite et en tout état de cause,
la cour relève qu'à supposer même que les conditions spécifiques posées par le code des ports maritimes et du code des transports aient été respectées dans le cas de M. D..., ce qui n'est pas établi, cela montrerait seulement qu'il ne peut pas revendiquer le statut de docker professionnel mensualisé, mais nullement que ses contrats de mission ou ses contrats de travail à durée déterminée successifs soient nécessairement valables au sens du code du travail, lequel reste applicable, contrairement à ce que soutient la société. Il convient donc de vérifier si les dispositions du code du travail ont été respectées. *Sur les contrats de mission conclus par M. D... de février 2006 à décembre 2012 : M. D... a été mis à disposition de la société NTFI, ancien nom de la société Terminal des Flandres par la société de travail temporaire Manpower entre 2006 et 2007 et par la société Adecco de 2008 à 2012 dans le cadre de 201 contrats de mission d'une durée d'un seul jour le plus souvent. Les contrats de mission et les contrats de mise à disposition correspondant qui ont été conclus avec la société Manpower en 2006 et 2007 mentionnent pour motif « emploi pour lequel il n'est pas d'usage de recourir au CDI » ainsi que, au titre de la « justification précise du recours » : « ATA lié à une intervention Quai Flandre », « ATA lié à une intervention sur le navire Flensburg Quai de Flandre » et, encore et surtout pour la plupart des contrats,« ATA lié au site de NFTI ». La cour relève que la société Terminal des Flandres ne produit aucune autre pièce que les contrats de mise à disposition et se contente d'affirmer que compte tenu du caractère fluctuant et imprévisible de l'activité même de la manutention portuaire, le recours aux ouvriers dockers occasionnels se justifie nécessairement par une tâche précise et temporaire indissociablement liée au secteur d'activité de la manutention portuaire, à savoir les escales des navires. Ce faisant, la cour constate que la société intimée ne verse aucun éléments permettant au juge de vérifier concrètement, comme cela lui incombe, l'existence de raisons objectives établissant le caractère par nature temporaire de l'emploi concerné de M. D.... Au contraire, la cour déduit des seules mentions de la plupart des contrats de mission et de mise à disposition de M. D..., à savoir « ATA lié au site NFTI », que M. D... occupait un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise, peu important que cette activité soit elle-même fluctuante. La cour en conclut que, faute pour la société Terminal des Flandres d'apporter, conformément au demeurant à son postulat de base excluant, mais à tort, l'application du code du travail, des éléments concrets autres que les contrats, ces contrats de missions que M. D... a conclus avec la société Manpower doivent être requalifiés en un contrat à durée indéterminée, en l'occurrence avec la société Terminal des Flandres, entreprise utilisatrice, comme le demande le salarié. La cour précise que ces seuls motifs suffisent alors à faire droit à la demande de M. D... sur toute la période qu'il vise puisque sous couvert d'autres contrats de mission qu'il a conclus ensuite avec la société Adecco et, à partir du 2012, de contrats à durée déterminée d'usage qu'il a conclus directement avec la société Terminal de Flandes, il n'a en fait cessé de travailler pour le compte de celle-ci dans le cadre de ce seul contrat à durée indéterminée. De façon surabondante, la cour ajoute toutefois que les contrats de mission que M. D... a conclus de juillet 2008 à décembre 2012 avec la société Adecco, avec toujours une mise à disposition pour la société Terminal des Flandres, l'ont tous été au motif non pas d'un usage constant, mais d'un « accroissement temporaire d'activité ». Il ressorts des contrats versés aux débats qu'ils comportent aussi, au titre des justifications précises » la mention, pour les premiers d'entre-eux, de « déchargement du bateau fort St Louis à honorer dans les délais » et pour la très grande majorité d'entre-eux ensuite « lié au déchargement de bateaux à honorer dans les délais ». Or, si un contrat de mission peut être conclu en cas d'accroissement temporaire de l'activité de l'entreprise, le recours à des salariés intérimaires ne peut être autorisé que pour les besoins d'une ou plusieurs tâches résultant du seul accroissement temporaire de l'activité de l'entreprise, notamment en cas de variations cycliques de production, sans qu'il soit nécessaire ni que cet accroissement présente un caractère exceptionnel, ni que le salarié recruté soit affecté à la réalisation même de ces tâches. Et il appartient à l'entreprise utilisatrice de rapporter la preuve de l'accroissement d'activité justifiant le recours à l'intérim. En l'espèce, en se contentant de justifier les contrats de mission par le fait qu'il soit lié « au déchargement de bateaux à honorer dans les délais », ce qui correspond à l'activité normale et permanente de la société, fût-elle fluctuante, la société n'apporte ni la preuve de l'existence de pics dans cette activité et encore moins la corrélation entre le volume de l'activité et celui de l'emploi de travailleurs temporaires. La cour en conclut que les contrats de mission qui ont été conclus par la société Adecco avec M. D... pour le mettre à disposition de la société Terminal des Flandres de 2008 à 2012 ont eu pour effet de pourvoir durablement des emplois liés à l'activité normale et permanente de cette entreprise utilisatrice, ce qui justifie la requalification de la relation de travail en contrat à durée indéterminée. La cour précise que ces seuls motifs suffisent alors à faire droit à la demande de M. D... sur toute la période qu'il invoque, puisque sous couvert de contrats à durée déterminée d'usage qu'il a conclus directement avec celle-ci à partir de 2012, il a en fait continué à travailler pour le compte de la société Terminal des Flandres dans le cadre de son contrat à durée indéterminée. *Sur les contrats à durée déterminée successifs d'usage que M. D... a conclus de 2012 à 2014 directement avec la société Terminal des Flandres : De façon à nouveau surabondante, il ressort des contrats à durée déterminée dits « d'usage constant » qui sont versés aux débats qu'ils précisent à l'article 1er intitulé « Engagement-Emploi » que « le salarié est engagé en qualité d'Ouvrier Docker Occasionnel (ODO), emploi temporaire par nature(...) » et à l'article 2 intitulé « Objet du contrat » qu'il est conclu« en raison de l'insuffisance d'ouvriers dockers professionnel mensualisé disponibles, et de l'absence d'ouvriers dockers professionnels intermittents sur le Port de Dunkerque, pour le chantier suivant : l'opération Navire du (...) au (....) », en sachant que ces contrats étaient tous conclus pour la durée d'un jour. Pour expliquer et justifier le recours aux dockers occasionnels, dont M. D..., et donc au contrat à durée déterminée à usage constant, la société Terminal des Flandres invoque les importantes variations d'activité au cours d'une même semaine et verse aux débats plusieurs tableaux destinés à illustrer cette variation d'activité pour la semaine du 18 au 24 mars 2013 et à montrer que l'embauche de M. D... était liée à une surcharge temporaire de travail. La cour relève d'abord que seuls les contrats qui sont versés aux débats par les parties doivent en l'espèce être pris en compte, à l'exclusion d'autres contrats qui correspondraient à des périodes auxquelles M. D... aurait également travaillé, sans que cela soit toutefois établi. La cour relève ensuite que les tableaux versés aux débats, en plus des contrats, par la société Terminal des Flandres prouvent que celle-ci n'a eu recours, pour la semaine du 18 au 24 mars 2013, au travail de M. D... par contrat à durée déterminée d'usage que pour les périodes pendant lesquelles les dockers professionnels mensualisés étaient en nombre insuffisants, soit en raison de l'activité importante sur le port, soit en raison de leur absence pour différents motifs. Ces éléments prouvent que M. D... ne peut revendiquer le statut de docker professionnel mensualisé. En outre, si les éléments produits par la société Terminal des Flandres permettent à la rigueur de justifier la conclusion avec M. D... de plusieurs contrats à durée déterminée successifs d'une journée sur la semaine du 18 au 24 mars 2013, le fait que la conclusion de tels contrats à durée déterminée successifs d'une journée ait été, comme l'attestent les contrats produits, répétée en 2013 et 2014, et en fait depuis 2006, à intervalle aussi réguliers pendant de nombreuses semaines de chaque mois, montre que ce recours aux contrats à durée déterminée successifs d'un jour a eu pour effet de pourvoir un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise. La cour ajoute en effet que le caractère par essence fluctuant de l'activité de manutention portuaire que la société Terminal des Flandres invoque ne saurait, dans de telles conditions, constituer concrètement une raison objective établissant le caractère par nature temporaire de l'emploi concerné de M. D..., car à suivre la société c'est du même coup l'existence de dockers mensualisés embauchés à durée indéterminée qui serait une anomalie. Au-delà même de l'ancienneté de M. D..., qui n'est pas en soi déterminante, c'est donc la régularité avec laquelle il a été recouru, de très nombreuses semaines de chaque mois, à son travail dans le cadre de contrats à durée déterminée successifs d'une seule journée qui révèle que M. D... venait pallier le déficit non pas seulement conjoncturel (lié aux congés, au respect du temps de travail), mais bien structurel de main d'oeuvre de dockers professionnels. La cour ajoute que la société Terminal des Frandres avait la possibilité d'adapter le travail de M. D... à l'activité par essence fluctuante de l'entreprise en agissant sur sa durée du travail (modulation, temps partiel) plutôt que sur la durée de son contrat. La cour en conclut que, du fait des conditions de recours au contrats à durée déterminés successifs, M. D... a occupé un emploi lié à l'activité normale et permanente , -fut-elle fluctuante-, de la société Terminal des Flandres, de telle sorte que ses contrats à durée déterminée doivent être requalifiés en un contrat à durée indéterminée, sans que M. D... puisse pour autant prétendre au statut de docker professionnel mensualisé. Le jugement sera donc infirmé. Sur les conséquences de la requalification en contrat à durée indéterminée La cour considère d'abord que la relation de travail de M. D... pour le compte de la société Terminal des Flandres doit être requalifiée en un contrat à durée indéterminée depuis 2006 et que sa rupture en 2014 n'étant pas contestée par les parties, elle équivaut à un licenciement sans cause réelle et sérieuse. Il y a d'abord lieu de condamner la société Terminal des Flandres à verser à M. D... une indemnité de requalification du montant qu'il réclame, dont le montant est exact et non contesté, de 1 480,65 euros, une indemnité compensatrice de préavis du montant qu'il réclame de 2 961,30 euros, dont le quantum est exact et non contesté, et 296,12 euros de congés payés afférents, ainsi qu'une indemnité légale de licenciement du montant qu'il réclame de 2 541,03 euros, dont le quantum n'est pas davantage surévalué, ni contesté. S'agissant de l'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse Il convient d'abord de préciser que M. D..., par l'effet de la requalification des contrats à durée déterminée, est réputé avoir occupé un emploi à durée indéterminée depuis le jour de son engagement par un contrat à durée déterminée ou de mission irrégulier, de telle sorte que son ancienneté remonte au contrat de mission du 16 février 2006, le fait qu'il ait pu ne pas se tenir à la disposition de la société Terminal des Flandres entre les différents contrats précaires requalifiés est donc indifférent pour le décompte de son ancienneté et est seulement déterminant pour des rappels de salaire pour les périodes interstitielles entre les contrats, rappels de salaires dont M. D... ne fait de toute façon pas la demande. Ainsi, compte tenu du salaire moyen des six derniers mois de M. D... (1 390 euros), de son ancienneté (8 ans) et des circonstances de la rupture, mais compte tenu également de l'absence de justificatifs produits par M. D... sur sa situation depuis la rupture du contrat de travail, il est justifié de condamner la Société Terminal des Flandres à lui payer la somme de 10 000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse sur le fondement de l'article L. l235-3 du code du travail, dans sa version alors en vigueur. En application de l'article L. 1235-4 du code du travail, il y a lieu, en outre, d'ordonner le remboursement par la société Terminal des Flanddres des indemnités chômage éventuellement versées par Pôle Emploi à M. D... postérieurement à son licenciement, dans la limite de six mois ; Sur les documents sociaux Il y a lieu d'ordonner à la société Terminal des Flandres de délivrer à M. D... un bulletin de paie pour les indemnités diverses, ainsi qu'une nouvelle attestation destinée à Pôle emploi conforme au présent arrêt. En revanche, il n'y a pas lieu d'assortir cet ordre d'une astreinte. Sur les intérêts Il y a lieu de rappeler que les créances de nature salariale allouées porteront intérêts à compter de la date de réception par l'employeur de la convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes et les créances indemnitaires à partir de la décision qui les prononce, en l'occurrence donc du présent arrêt. Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens : Le jugement sera infirmé de ces deux chefs et compte tenu de l'issue du litige, la société Terminal des Flandres sera en outre condamnée à payer à M. D... la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles qu'il a engagés en première instance et en cause d'appel, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel » ;
ALORS, en premier lieu, QUE constituent des éléments objectifs établissant la nature temporaire de l'emploi, au sens des articles L. 12421 et L. 12422 du code du travail, interprétés à la lumière de la clause 5, point 1, a) de l'accord-cadre européen sur le travail à durée déterminée du 18 mars 1999 mis en oeuvre par la Directive 1999/70/CE du 28 juin 2000, le caractère fluctuant du trafic maritime et la variation continue de la charge d'activité de chargement et déchargement des navires, de sorte que la conclusion de contrats à durée déterminée successifs est justifiée par des raisons objectives ; qu'en l'espèce, la société faisait valoir, non seulement que les dispositions du code des transports, des ports maritimes et les stipulations conventionnelles étaient dérogatoires aux dispositions du code du travail, mais également qu'en tout état de cause le caractère fluctuant de l'activité de transport maritime constituait une raison objective établissant le caractère par nature temporaire des emplois ; que pour dire que la relation de travail du salarié devait être requalifiée en contrat à durée indéterminée à compter du 16 février 2006 et que la rupture du dernier contrat devait s'analyser en un licenciement sans cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a considéré que, même à considérer que les dispositions du code des transports, des ports maritimes et les stipulations conventionnelles avaient été respectées,
cela démontrait seulement que le salarié ne pouvait revendiquer le statut de docker professionnel mensualisé mais nullement que les contrats de missions ou à durée déterminée étaient nécessairement valables au sens du code du travail ; qu'en statuant par de tels motifs, qui n'étaient en rien de nature à exclure l'existence d'une raison objective justifiant le recours à des CDD successifs, la Cour d'appel a priveì sa décision de toute base légale au regard de l'ensemble des articles L. 5343-2 à -7 du code des transports, ensemble de la Convention collective nationale de la manutention portuaire du 31 décembre 1993, étendue par arrêté du 29 septembre 1994, ensemble
de l'ensemble des articles L. 5343-2 à -7 du code des transports, ensemble de la Convention collective nationale de la manutention portuaire du 31 décembre 1993, étendue par arrêté du 29 septembre 1994, ensemble de l'avenant à la Convention collective nationale de la manutention portuaire du 18 avril 2006 relatif aux conditions d'emploi et de rémunérations particulières des personnels dockers des entreprises de manutention dans les ports maritimes du nord, ensemble de la Convention collective nationale unifiée ports et manutention du 15 avril 2011, ensemble de l'accord collectif du 16 novembre 2012 relatif au recours aÌ l'emploi d'ouvrier dockers occasionnels spécifique au port de Dunkerque, ainsi que les articles L. 12421 et L. 12422 du code du travail, interprétés à la lumière de la clause 5, point 1, a) de l'accord-cadre européen sur le travail à durée déterminée du 18 mars 1999 mis en oeuvre par la Directive 1999/70/CE du 28 juin 2000 ;
ALORS, en deuxième lieu, et en tout état de cause, QUE constituent des éléments objectifs établissant la nature temporaire de l'emploi, au sens des articles L. 1242-1 et L. 1242-2 du code du travail, interprétés à la lumière de la clause 5, point 1, a) de l'accord-cadre européen sur le travail à durée déterminée du 18 mars 1999 mis en oeuvre par la Directive 1999/70/CE du 28 juin 2000, le caractère fluctuant du trafic maritime et la variation continue de la charge d'activité de chargement et déchargement des navires, de sorte que la conclusion de contrats à durée déterminée successifs est justifiée par des raisons objectives ; qu'en l'espèce, pour dire que la relation de travail du salarié devait être requalifiée en contrat à durée indéterminée à compter du 16 février 2006 et que la rupture du dernier contrat devait s'analyser en un licenciement sans cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a considéré que, par principe, les contrats de missions et à durée déterminée étaient liés à l'activité normale et permanente de la société, fût-elle fluctuante ; que pourtant, le caractère fluctuant du trafic maritime et la variation continue de la charge d'activité de chargement et déchargement des navires peuvent constituer des raisons objectives justifiant la conclusion de contrats à durée déterminée successifs ; Qu'en considérant le contraire, la cour d'appel a violé l'ensemble des textes susvisés ;
ALORS, en troisième lieu, QU'en affirmant que les contrats de missions et à durée déterminée étaient liés à l'activité normale et permanente de la société, fût-elle fluctuante et que les pièces produites par la société ne permettait pas d'établir l'existence de raisons objectives justifiant le recours à de CDD successifs, quand elle constatait elle-même que le trafic maritime avait un caractère par essence fluctuant et que l'activité continue de la société était variable en fonction de la charge d'activité de chargement et déchargement des navires (arrêt p. 11 § 5 et 6), la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations, a violé l'ensemble des articles L. 12421 et L. 12422 du code du travail, interprétés à la lumière de la clause 5, point 1, a) de l'accord-cadre européen sur le travail à durée déterminée du 18 mars 1999 mis en oeuvre par la Directive 1999/70/CE du 28 juin 2000 ;
ALORS, en quatrième lieu, QU'en affirmant que le caractère par essence fluctuant de l'activité de manutention portuaire ne saurait constituer concrètement une raison objective établissant le caractère par nature temporaire de l'emploi concerné car à suivre la société c'est du même coup l'existence des dockers mensualisés embauchés à durée indéterminée qui serait une anomalie, et que la société avait la possibilité d'adapter le travail des salariés à l'activité par essence fluctuante de l'entreprise en agissant sur la durée du travail (modulation, temps partiel), la cour d'appel a statué par des motifs inopérants qui n'étaient en rien de nature à exclure l'existence d'une raison objective justifiant le recours à des CDD successifs, privant ainsi sa décision de toute base légale au regard des articles L. 12421 et L. 12422 du code du travail, interprétés à la lumière de la clause 5, point 1, a) de l'accord-cadre européen sur le travail à durée déterminée du 18 mars 1999 mis en oeuvre par la Directive 1999/70/CE du 28 juin 2000.