Cour de cassation, criminelle, Chambre criminelle, 20 octobre 2020, 19-86.869, Inédit
Cour de cassation, criminelle, Chambre criminelle, 20 octobre 2020, 19-86.869, Inédit
Cour de cassation - Chambre criminelle
- N° de pourvoi : 19-86.869
- ECLI:FR:CCASS:2020:CR01834
- Non publié au bulletin
- Solution : Cassation sans renvoi
Audience publique du mardi 20 octobre 2020
Décision attaquée : Cour d'appel de Caen, du 14 janvier 2019- Président
- M. Soulard (président)
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° R 19-86.869 F-D
N° 1834
SM12
20 OCTOBRE 2020
CASSATION SANS RENVOI
M. SOULARD président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 20 OCTOBRE 2020
M. P... S... a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Caen, chambre correctionnelle, en date du 14 janvier 2019, qui pour conduite malgré injonction de restituer le permis de conduire, l'a condamné à trente jours-amende de cent euros, ainsi que deux amendes à cent cinquante euros pour des contraventions ;
Un mémoire et des observations complémentaires ont été produits.
Sur le rapport de Mme Méano, conseiller référendaire, les observations de la SCP Foussard et Froger, avocat de M. P... S..., et les conclusions de M. Croizier, avocat général, après débats en l'audience publique du 8 septembre 2020 où étaient présents M. Soulard, président, Mme Méano, conseiller rapporteur, M. Pers, conseiller de la chambre, et M. Maréville, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée, en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Par jugement correctionnel du 7 février 2018, M. P... S... a été déclaré coupable et condamné à trente jours-amende de cent euros pour avoir, les 9 juin et 23 août 2017, conduit un véhicule à moteur en violation de l'arrêté du préfet du Calvados, en date du 2 octobre 2015, lui enjoignant de restituer son permis de conduire en raison de la perte de la totalité des points dont il était affecté. M. S... a également été déclaré coupable d'avoir effectué un changement important dans la direction de son véhicule sans avertir les autres usagers.
2. M. S... et le ministère public ont relevé appel de cette décision.
Examen des moyens
Sur le premier moyen
Enoncé du moyen
3. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a confirmé le jugement déclarant M. S... coupable d'avoir, les 9 juin et 23 août 2017, conduit un véhicule après avoir reçu l'injonction de l'autorité administrative du 2 octobre 2015 de remettre son permis de conduire au préfet en conséquence d'un retrait de point et de l'avoir condamné à une amende de trois mille euros (trente fois cent euros) en jours-amendes, alors :
« 1°/ que l'annulation par la juridiction administrative d'un acte administratif implique que cet acte est réputé n'avoir jamais existé et prive en conséquence de base légale la poursuite ainsi que la condamnation prononcée sur le fondement de la violation de cet acte ; qu'en l'espèce, M. S... était poursuivi pour avoir conduit un véhicule après avoir reçu l'injonction de l'autorité administrative du 2 octobre 2015 de remettre son permis de conduire au préfet en conséquence d'un retrait de point ; que l'annulation le 20 décembre 2018 par le juge administratif de la décision du préfet fondée sur l'injonction irrégulière du 2 octobre 2015 et le rétablissement de 4 points sur le permis de M. S... ont privé les poursuites de tout fondement , qu'en déclarant M. S... coupable et en le condamnant de ce chef, de sorte que la cour d'appel a violé l'article 6, § 1, de la Convention européenne des droits de l'homme, les articles L. 223-5 et L. 224-12 du code de la route, les articles 111-5, 112-1 du code pénal, les articles préliminaire, 591 et 593 du code de procédure pénale, ensemble le principe de l'autorité de la chose jugée ;
2°/ qu'il n'y a point de délit sans intention de le commettre ; qu'en relevant que « S... P... circule au volant d'un véhicule automobile alors que l'injonction de restituer son permis de conduire, lequel a perdu tous ses points, lui a été faite par lettre recommandée SI 48 notifiée le 2 octobre 2015 » quand, du fait de l'annulation le 20 décembre 2018 par le juge administratif de la décision du préfet fondée sur l'injonction irrégulière du 2 octobre 2015, le rétablissement rétroactif de 4 points sur le permis de M. S... excluait toute conscience de ce qu'au moment des contrôles, il commettait une infraction, de sorte que la cour d'appel a méconnu l'article 6, § 1, de la Convention européenne des droits de l'homme, les articles 111-5, 112-1, 121-3 du code pénal, les articles préliminaire, 591 et 593 du code de procédure pénale. »
Réponse de la Cour
Vu l'article L. 223-5 du code de la route et le principe de légalité des délits et des peines :
4. L'annulation par la juridiction administrative d'un acte administratif implique que cet acte est réputé n'avoir jamais existé et prive de base légale la poursuite engagée pour violation de cet acte.
5. M. S... produit un jugement du 20 décembre 2018, par lequel le tribunal administratif, considérant que la décision 48 SI du 25 septembre 2015 constatant la perte de validité du permis de conduire de M. S..., pour solde de points nul, avait fait l'objet d'une notification irrégulière le 2 octobre 2015, de sorte qu'en avril 2017 M. S..., resté titulaire d'un permis de conduire, pouvait effectuer un stage de sensibilisation à la sécurité routière, annule la décision du 25 juillet 2017 par laquelle le Préfet du Calvados a rejeté la demande formulée par M. S... tendant à la prise en compte de ce stage et enjoint au ministre de l'intérieur d' accorder à celui-ci le bénéfice de quatre points au titre du stage et d'en tirer toutes les conséquences à la date de sa nouvelle décision sur le capital de points et son droit de conduire.
6. Il en résulte que la poursuite et la condamnation sont dépourvues de base légale.
7. La cassation est par conséquent encourue de ce chef.
Portée et conséquences de l'annulation
8. En application de l'article L. 411-3, alinéa 1, du code de l'organisation judiciaire, la cassation n'implique pas qu'il soit à nouveau statué sur le fond, de sorte qu'il n'y a pas lieu à renvoi.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu d'examiner le second moyen proposé, la Cour :
CASSE et ANNULE, par voie de retranchement, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Caen, en date du 14 janvier 2019, mais en ses seules dispositions relatives à la déclaration de culpabilité du chef de conduite malgré injonction de restituer le permis de conduire résultant du retrait de la totalité des points et à la peine prononcée à ce titre, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Caen, et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt octobre deux mille vingt.ECLI:FR:CCASS:2020:CR01834
N° R 19-86.869 F-D
N° 1834
SM12
20 OCTOBRE 2020
CASSATION SANS RENVOI
M. SOULARD président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 20 OCTOBRE 2020
M. P... S... a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Caen, chambre correctionnelle, en date du 14 janvier 2019, qui pour conduite malgré injonction de restituer le permis de conduire, l'a condamné à trente jours-amende de cent euros, ainsi que deux amendes à cent cinquante euros pour des contraventions ;
Un mémoire et des observations complémentaires ont été produits.
Sur le rapport de Mme Méano, conseiller référendaire, les observations de la SCP Foussard et Froger, avocat de M. P... S..., et les conclusions de M. Croizier, avocat général, après débats en l'audience publique du 8 septembre 2020 où étaient présents M. Soulard, président, Mme Méano, conseiller rapporteur, M. Pers, conseiller de la chambre, et M. Maréville, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée, en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Par jugement correctionnel du 7 février 2018, M. P... S... a été déclaré coupable et condamné à trente jours-amende de cent euros pour avoir, les 9 juin et 23 août 2017, conduit un véhicule à moteur en violation de l'arrêté du préfet du Calvados, en date du 2 octobre 2015, lui enjoignant de restituer son permis de conduire en raison de la perte de la totalité des points dont il était affecté. M. S... a également été déclaré coupable d'avoir effectué un changement important dans la direction de son véhicule sans avertir les autres usagers.
2. M. S... et le ministère public ont relevé appel de cette décision.
Examen des moyens
Sur le premier moyen
Enoncé du moyen
3. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a confirmé le jugement déclarant M. S... coupable d'avoir, les 9 juin et 23 août 2017, conduit un véhicule après avoir reçu l'injonction de l'autorité administrative du 2 octobre 2015 de remettre son permis de conduire au préfet en conséquence d'un retrait de point et de l'avoir condamné à une amende de trois mille euros (trente fois cent euros) en jours-amendes, alors :
« 1°/ que l'annulation par la juridiction administrative d'un acte administratif implique que cet acte est réputé n'avoir jamais existé et prive en conséquence de base légale la poursuite ainsi que la condamnation prononcée sur le fondement de la violation de cet acte ; qu'en l'espèce, M. S... était poursuivi pour avoir conduit un véhicule après avoir reçu l'injonction de l'autorité administrative du 2 octobre 2015 de remettre son permis de conduire au préfet en conséquence d'un retrait de point ; que l'annulation le 20 décembre 2018 par le juge administratif de la décision du préfet fondée sur l'injonction irrégulière du 2 octobre 2015 et le rétablissement de 4 points sur le permis de M. S... ont privé les poursuites de tout fondement , qu'en déclarant M. S... coupable et en le condamnant de ce chef, de sorte que la cour d'appel a violé l'article 6, § 1, de la Convention européenne des droits de l'homme, les articles L. 223-5 et L. 224-12 du code de la route, les articles 111-5, 112-1 du code pénal, les articles préliminaire, 591 et 593 du code de procédure pénale, ensemble le principe de l'autorité de la chose jugée ;
2°/ qu'il n'y a point de délit sans intention de le commettre ; qu'en relevant que « S... P... circule au volant d'un véhicule automobile alors que l'injonction de restituer son permis de conduire, lequel a perdu tous ses points, lui a été faite par lettre recommandée SI 48 notifiée le 2 octobre 2015 » quand, du fait de l'annulation le 20 décembre 2018 par le juge administratif de la décision du préfet fondée sur l'injonction irrégulière du 2 octobre 2015, le rétablissement rétroactif de 4 points sur le permis de M. S... excluait toute conscience de ce qu'au moment des contrôles, il commettait une infraction, de sorte que la cour d'appel a méconnu l'article 6, § 1, de la Convention européenne des droits de l'homme, les articles 111-5, 112-1, 121-3 du code pénal, les articles préliminaire, 591 et 593 du code de procédure pénale. »
Réponse de la Cour
Vu l'article L. 223-5 du code de la route et le principe de légalité des délits et des peines :
4. L'annulation par la juridiction administrative d'un acte administratif implique que cet acte est réputé n'avoir jamais existé et prive de base légale la poursuite engagée pour violation de cet acte.
5. M. S... produit un jugement du 20 décembre 2018, par lequel le tribunal administratif, considérant que la décision 48 SI du 25 septembre 2015 constatant la perte de validité du permis de conduire de M. S..., pour solde de points nul, avait fait l'objet d'une notification irrégulière le 2 octobre 2015, de sorte qu'en avril 2017 M. S..., resté titulaire d'un permis de conduire, pouvait effectuer un stage de sensibilisation à la sécurité routière, annule la décision du 25 juillet 2017 par laquelle le Préfet du Calvados a rejeté la demande formulée par M. S... tendant à la prise en compte de ce stage et enjoint au ministre de l'intérieur d' accorder à celui-ci le bénéfice de quatre points au titre du stage et d'en tirer toutes les conséquences à la date de sa nouvelle décision sur le capital de points et son droit de conduire.
6. Il en résulte que la poursuite et la condamnation sont dépourvues de base légale.
7. La cassation est par conséquent encourue de ce chef.
Portée et conséquences de l'annulation
8. En application de l'article L. 411-3, alinéa 1, du code de l'organisation judiciaire, la cassation n'implique pas qu'il soit à nouveau statué sur le fond, de sorte qu'il n'y a pas lieu à renvoi.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu d'examiner le second moyen proposé, la Cour :
CASSE et ANNULE, par voie de retranchement, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Caen, en date du 14 janvier 2019, mais en ses seules dispositions relatives à la déclaration de culpabilité du chef de conduite malgré injonction de restituer le permis de conduire résultant du retrait de la totalité des points et à la peine prononcée à ce titre, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Caen, et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt octobre deux mille vingt.