Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 7 octobre 2020, 19-14.291, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


COMM.

CF



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 7 octobre 2020




Cassation partielle


Mme MOUILLARD, président



Arrêt n° 511 F-D

Pourvoi n° B 19-14.291




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 7 OCTOBRE 2020

M. X... J..., domicilié [...] , a formé le pourvoi n° B 19-14.291 contre l'arrêt rendu le 13 février 2019 par la cour d'appel de Bastia (chambre civile, section 2), dans le litige l'opposant :

1°/ à M. T... A..., domicilié [...] , pris en qualité de mandataire liquidateur de la société Promoco,

2°/ au procureur général près la cour d'appel de Bastia, domicilié en son parquet, [...],

défendeurs à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Brahic-Lambrey, conseiller référendaire, les observations de la SCP Foussard et Froger, avocat de M. J..., et l'avis de Mme Henry, avocat général, après débats en l'audience publique du 30 juin 2020 où étaient présents Mme Mouillard, président, Mme Brahic-Lambrey, conseiller référendaire rapporteur, M. Rémery, conseiller doyen, et Mme Labat, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Désistement partiel

1. Il y a lieu de donner acte à M. J... du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre le procureur général près la cour d'appel de Bastia.

Faits et procédure

2. Selon l'arrêt attaqué (Bastia, 13 février 2019) et les productions, la SARL Promoco, dont M. J... était le gérant, a été mise en redressement puis liquidation judiciaires les 16 janvier 2012 et 21 janvier 2013, M. A... étant désigné liquidateur. Celui-ci a assigné M. J... en responsabilité pour insuffisance d'actif.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

3. M. J... fait grief à l'arrêt de le condamner à supporter l'insuffisance d'actif, alors « que l'inopposabilité aux tiers des actes sujets à mention au registre de commerce et non publiés ne peut être invoquée s'agissant des faits et actes mettant en jeu la responsabilité personnelle du dirigeant ; qu'en retenant que la démission de M. J..., faute d'avoir été publiée, n'était pas opposable au mandataire social, pour condamner M. J... à supporter partiellement l'insuffisance d'actifs de la société Promoco, la cour d'appel a violé l'article L. 123-9 et L. 210-9 du code de commerce. »

Réponse de la Cour

4. L'arrêt relève que M. A..., ès qualités, a contesté la démission alléguée. Il ajoute que postérieurement à celle-ci, réalisée le 6 août 2009 sur papier libre et non publiée, M. J... a représenté, en qualité de représentant légal, la société aux audiences des 20 février et 14 mai 2012, comparaissant assisté d'un conseil à la seconde, que le rapport du juge-commissaire du 27 janvier 2012 indique qu'il s'est présenté « avec Maître E... », ce qui implique qu'il était là en personne, et que l'ordonnance du 11 avril 2014 du président du tribunal de commerce ne parle de son absence que pour les audiences des 12 septembre, 17 octobre et 19 décembre 2011, sans viser les audiences ultérieures. Il constate que le procès-verbal d'inventaire invoqué par M. J... n'indiquait pas à quel titre M. B... intervenait, qu'il n'est pas démontré que le rapport de synthèse produit par M. J..., destiné au juge-commissaire, ait été effectivement communiqué à ce magistrat, faute de date, signature et de tout élément permettant d'établir un dépôt effectif à la juridiction, et que ce n'est que le 11 avril 2014 que l'intéressé a déclaré ne plus être gérant de la société, le jugement du 2 juin 2014 faisant apparaître que, dans la citation à comparaître du 11 mars 2014, M. J... avait déclaré être le représentant légal de la société. De ces constatations et appréciations et abstraction faite des motifs critiqués par le moyen, la cour d'appel a pu déduire que M. J... était toujours dirigeant de droit à la date à laquelle le tribunal statuait, ce qui permettait de le rechercher, en cette qualité, sa responsabilité pour insuffisance d'actif.

5. Le moyen est donc inopérant.

Sur le deuxième moyen

Enoncé du moyen

6. M. J... fait le même grief à l'arrêt, alors que :

« 1°/ tenus de caractériser les fautes du dirigeant, les juges du fond ne pouvaient se borner à énoncer que lors d'une confrontation du 3 février 2014, M. J... "a reconnu avoir fait ce qu'on lui demandait : quelques actes de gestion, non décrits, et signé des chèques, sans plus de précision, caractérisant ainsi des fautes de gestion alors qu'il ne pouvait ignorer la situation", pour ajouter que "l'ensemble de ces fautes de gestion a contribué à l'insuffisance d'actif qui a conduit à la liquidation judiciaire de la société" ; qu'en l'état de ces énonciations vagues et imprécises, et faute d'avoir caractérisé les fautes de gestion, les juges du fond ont entaché leur décision d'un défaut de base légale au regard de l'article L. 651-2 du code de commerce ;

2°/ quand bien même l'arrêt aurait confirmé pour partie le jugement, de toute façon, les énonciations du jugement ne peuvent donner une base légale à l'arrêt attaqué dès lors que les juges du second degré, pour se déterminer comme ils l'ont fait, ont retenu des manquements, non caractérisés, ce qui suffit à justifier la censure de l'arrêt, nonobstant les énoncés du jugement, pour défaut de base légale au regard de l'article L. 651-2 du code de commerce. »

Réponse de la Cour

7. L'arrêt retient que M. J..., gérant de droit, s'est désintéressé des affaires de la société, ainsi que cela résulte du fait qu'il a laissé M. B... gérer celle-ci et qu'il s'est abstenu de diligences pertinentes pour la publication de l'assemblée générale et du changement de gérance dont il se prévaut, reconnaissant, lors de la confrontation du 3 février 2014, avoir fait ce qu'on lui demandait, bien qu'il n'ait pu ignorer la situation pour ne pas avoir contesté les déclaration de M. B... lors de cette confrontation faisant état d' « une petite équipe travaillant en famille » « sans avoir cet aspect juridique [...] à l'esprit ». Ayant ainsi caractérisé, dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation, la faute de gestion qu'elle retenait, la cour d'appel a légalement justifié sa décision.

8. Le moyen n'est donc pas fondé.

Mais sur le troisième moyen

Enoncé du moyen

9. M. J... fait encore le même grief à l'arrêt, alors « que dans ses conclusions d'appel, M. J... faisait valoir que la somme mise en avant par le liquidateur, à savoir la somme de 728 371,30 euros correspondait à un passif né pour partie postérieurement au jugement d'ouverture de la procédure collective du 16 janvier 2012 ; que seule l'insuffisance d'actif antérieure au jugement ouvrant la procédure collective peut être prise en compte dans le cadre de l'action engagée contre le dirigeant ; qu'en s'abstenant de dire quelle était l'insuffisance d'actif afférente à la période antérieure à l'intervention de ce jugement, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard de l'article L. 651-2 du code de commerce. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 651-2 du code de commerce :

10. Seules des dettes nées avant le jugement d'ouverture peuvent être prises en compte pour la détermination de l'insuffisance d'actif.

11. Pour fixer à 72 837,13 euros la part de l'insuffisance d'actif mise à la charge de M. J..., l'arrêt retient que ce montant est fixé à dix pour cent de celui de l'insuffisance d'actif, lequel s'établit à la somme de 728 371,30 euros, résultant, selon motifs adoptés, du passif arrêté à la date du jugement d'ouverture, le 16 janvier 2012, puis généré jusqu'au prononcé de la liquidation judiciaire au cours de la période d'observation, le 21 janvier 2013.

12. En se déterminant par de tels motifs, ne permettant pas de savoir si l'insuffisance d'actif avait été déterminée en ne tenant compte que du passif né avant le jugement d'ouverture de la procédure collective, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il déclare recevable l'action en responsabilité pour insuffisance d'actif engagée par M. A..., en qualité de liquidateur de la société Promoco, à l'encontre de M. J..., l'arrêt rendu le 13 février 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Bastia ;

Remet, sur les autres points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

Condamne M. A..., en qualité de liquidateur de la société Promoco, aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. J... ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du sept octobre deux mille vingt. MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Foussard et Froger, avocat aux Conseils, pour M. J...

PREMIER MOYEN DE CASSATION

L'arrêt attaqué encourt la censure ;

EN CE QU'il a confirmé « le jugement en date du 24 juillet 2017 du Tribunal de commerce d'AJACCIO sauf en ce qu'il a décidé que le montant de l'insuffisance d'actif de la société supporté par X... J... serait fixé à hauteur de 145.674 euros » ; puis statuant de nouveau de ce chef et y ajoutant, condamné X... J... à supporter le montant de l'insuffisance d'actif que laisse apparaître la liquidation judiciaire de la Sarl PROMOCO à hauteur de 72.837,13 euros ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE « ainsi que l'a exactement retenu le tribunal de commerce, si M. J... excipe d'un procès verbal d'assemblée générale du 6 aout 2009 actant sa démission en qualité de gérant pour raisons de santé et la nomination de M. B... en qualité de nouveau gérant, ce procès-verbal établis sur papier libre, n'a pas fait l'objet des publications légales prévues à l'article L. 123-9 du code de commerce et n'est donc pas opposable au mandataire liquidateur ; qu'il sera ajouté qu'il appartenait à M. J... de vérifier si la publicité avait été faite, et dans la négative d'engager toutes actions utiles pour ce faire or, il ne conteste pas sa parfaite inaction à ce titre, y compris après l'initiation de la procédure de liquidation judiciaire » ;

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE « que cette juridiction, qui constate que monsieur J... figure toujours, au jour où elle statue, au registre du commerce et des sociétés d'Ajaccio, comme gérant de la société PROMOCO, appréciera souverainement qu'elle n'est pas tenue, par les conclusions rendues au plan pénal par un juge d'instruction, lequel n'est pas une juridiction de jugement et estimera que le fait pour monsieur J... de ne pas s'être préoccupa de la manière de communiquer aux tiers le fait qu'il n'aurait plus été le gérant de l'entité à l'examen constitue, au contraire la faute majeure de gestion le rendant éligible au prononcé d'une sanction en comblement de passif ; Attendu en effet que le procès-verbal d'assemblée générale dont excipe le défendeur n'a fait l'objet d'aucune des publicités; prévues par la loi, à savoir une publication dans un journal d'annonces légales et un dépôt en annexe du dossier de la société PROMOCO au registre du commerce et des sociétés. d'Ajaccio, lesquelles ne dépendaient aucunement du bon vouloir de monsieur I... B..., monsieur J... étant libre d'y procéder par lui-même afin, précisément, de rendre opposable au*;fiers de manière certaine: le fait qu'il aurait démissionné de ses fonctions, ce dont il aurait dû s'assurer si tel était le-ças ; que ce procès-verbal n'est pas non plus mentionné au registre des assemblées, caractérisant l'Inopposabilité générale et qui sera, actée parce tribunal, de ce document ; Attendu que ce tribunal retiendra donc que monsieur X... J... était bel et bien le gérant de droit de la société PROMOCO au moment des faits et que toutes conséquences seront tirées de ce constat» ;

ALORS QUE l'inopposabilité aux tiers des actes sujets à mention au registre de commerce et non publiés ne peut être invoquée s'agissant des faits et actes mettant en jeu la responsabilité personnelle du dirigeant ; qu'en retenant que la démission de M. J..., faute d'avoir été publiée, n'était pas opposable au mandataire social, pour condamner M. J... à supporter partiellement l'insuffisance d'actifs de la société PROMOCO, la cour d'appel a violé l'article L. 123-9 et L. 210-9 du code de commerce.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION

L'arrêt attaqué encourt la censure ;

EN CE QU'il a confirmé « le jugement en date du 24 juillet 2017 du Tribunal de commerce d'AJACCIO sauf en ce qu'il a décidé que le montant de l'insuffisance d'actif de la société supporté par X... J... serait fixé à hauteur de 145.674 euros » ; puis statuant de nouveau de ce chef et y ajoutant, condamné X... J... à supporter le montant de l'insuffisance d'actif que laisse apparaître la liquidation judiciaire de la Sarl PROMOCO à hauteur de 72.837,13 euros ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE « le dirigeant de droit ou de fait qui a cessé ses fonctions entre la date de cessation des paiements et l'ouverture de la procédure peut être condamné à combler le passif, si ce passif existait déjà lors de la cessation des fonctions du dirigeant car le défaut de publication de la démission d'un dirigeant ne saurait permettre de poursuivre celui-ci sur le fondement de l'article L. 651.2 du code de commerce dès lors qu'il a effectivement cessé d'exercer ses fonctions avant l'apparition de la situation ayant abouti à l'insuffisance d'actif » ; que dès lors, la qualité de gérant de droit suffit à rechercher M. J... dans le cadre d'une instance en sanction sans nécessité de caractériser à son endroit une gestion de fait, contrairement à ce qu'il soutient, mais une sanction financière ne peut s'appliquer au gérant de droit que sous la condition d'une démonstration de fautes personnelles qui ont contribué à l'insuffisance d'actif, en totalité oupour partie; dans ce cadre, le désintérêt de M. J... pour les affaires de la société est démontré dans la mesure où il a laissé M. B... gérer celle-ci et qu'il s'est abstenu de diligences pertinentes quant à la publication de l'assemblée générale et du changement de gérance dont il se prévaut désormais; en outre, il ne démontre pas qu'il n'avait plus la signature sur les comptes bancaires de la société ; de même, il résulte du jugement du tribunal de commerce du 4 juin 2012 qu'il a comparu, assisté de son avocat et a déclaré que la société disposait de la trésorerie pour aller jusqu'à la fin de la promotion immobilière, la vente des appartements devant permettre de régler les dettes, manifestant ainsi clairement qu'il suivait la gestion sociale ; s'il soutient que le siège social de la société avait été transféré à l'adresse personnelle de M. B..., cela ne résulte d'aucune de ses pièces, la n°10 citée à l'appui correspondant à une demande de règlement de facture adressée par le mandataire judiciaire à une autre société, alors que l'extrait K-bis du janvier 2012 ne porte aucune mention d'un tel transfert; s'agissant de la procédure pénale dont M. J... excipe, la cour observe que, devant le juge d'instruction, il a déclaré que M. B... avait toujours géré la société, y compris pendant le temps de sa gérance de droit, sans qu'il s'y oppose et, lors de la confrontation du 3 février 2014, il a reconnu avoir fait ce qu'on lui demandait : quelques actes de gestion, non décrits, et signé des chèques, sans plus de précision, caractérisant ainsi des fautes de gestion, alors qu'il ne pouvait ignorer la situation, n'ayant pas contesté les déclarations de M. B... au cours de cette confrontation, lequel évoque une petite équipe, travaillant "en famille sur des dossiers colossaux", sans avoir "cet aspect juridique [...] à l'esprit". C'est donc vainement que M. J... soutient l'absence d'actes de gestion de sa part et l'ensemble de ces fautes de gestion a contribué à l'insuffisance d'actif qui a conduit à la liquidation judiciaire de la société ; que toutefois, c'est à juste titre que le tribunal de commerce a retenu le contexte entourant la gestion de la société et la personnalité de M. B..., gérant de fait, pour estimer que l'insuffisance d'actif ne doit être que partiellement supportée par M. J... ; en revanche, cette part sera plus exactement fixée à la somme de 10% de la somme retenue au titre de l'insuffisance d'actif qui s'élève à 728 371,30 euros ; M. J... sera en conséquence condamné au paiement de la somme de 72 837,13 euros, le jugement étant ainsi réformé quant au quantum de la condamnation » ;

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE « aucune comptabilité n'a été communiquée au titre des exercices 2011, 2012 et 2013 ; que ce tribunal qualifiera cette carence du gérant comme une faute de gestion ayant contribué à l'Insuffisance d'actif par l'impossibilité qu'elle a provoquée, pour les organes de la procédure et le tribunal, de disposer, au moment où des décisions importantes devaient être arrêtées pour l'entreprise, de données économiques et financières fiables ; que monsieur X... J... n'a pas déclaré la cessation des paiements de la société PROMOCO dans les quarante-cinq jours de sa survenance et ce, en violation des articles L. 631-4, L 640-4 et L 653-8 du code de commerce, la date de cessation des paiements ayant été fixée au 17 juillet 2010 par ce tribunal alors que la procédure a été ouverte sur assignation d'un créancier : l'URSSAF de la Corse ; Attendu que ce tribunal jugera que ce faisant, le gérant a permis à la société de poursuivre une exploitation déficitaire, aggravant d'autant l'insuffisance d'actif aujourd'hui à l'examen ; que ce tribunal qualifiera cèt agissement comme faute de gestion ayant contribué à l'insuffisance d'actif ; qu'eu égard au contexte dans lequel a été placé le défendeur, qui dirigeait la société PROMOCO, et qui devait évoluer, dans ce cadre, aux côtés de monsieur I... B..., qu'il avait premièrement mis en cause dans le cadre de la présente Instance avant de se désister, lequel a fait l'objet de multiples poursuites pénales et de condamnations définitives pour des chefs d'accusation voisins de ceux qui ont conduit le liquidateur à entamer fa présente action, tous constats conduisant cette juridiction à estimer que l'insuffisance d'actif rie devra être supportée qu'en partie par le défendeur ; que la globalité des opérations impliquant PROMOCO, notamment la déconfiture de la promotion dite « AGULA MARINA », a fait que le passif généré postérieurement au jugement d'ouverture ne sera pas reconnu comme Incombant totalement aux fautes du dirigeant telles qu'elles ont été relevées plus avant, qu'elles aient consisté en un retard dans la déclaration de cessation des paiements ou dans l'absence de production d'une comptabilité utile, amenant ce tribunal à déterminer que la responsabilité de monsieur J... ne sera retenue qu'à hauteur de 20% de la somme retenue plus haut » ;

ALORS QUE, premièrement, tenu de caractérisé les fautes du dirigeant, les juges du fond ne pouvaient se borner à énoncer que lors d'une confrontation du 3 février 2014, Monsieur J... « a reconnu avoir fait ce qu'on lui demandait : quelques actes de gestion, non décrits, et signé des chèques, sans plus de précision, caractérisant ainsi des fautes de gestion alors qu'il ne pouvait ignorer la situation », pour ajouter que « l'ensemble de ces fautes de gestion a contribué à l'insuffisance d'actif qui a conduit à la liquidation judiciaire de la société » ; qu'en l'état de ces énonciations vagues et imprécises, et faute d'avoir caractérisé les fautes de gestion, les juges du fond ont entaché leur décision d'un défaut de base légale au regard de l'article L.651-2 du Code de commerce ;

ALORS QUE, deuxièmement, quand bien même l'arrêt aurait confirmé pour partie le jugement, de toute façon, les énonciations du jugement ne peuvent donner une base légale à l'arrêt attaqué dès lors que les juges du second degré, pour se déterminer comme ils l'ont fait, ont retenu des manquements, non caractérisés, ce qui suffit à justifier la censure de l'arrêt, nonobstant les énoncés du jugement, pour défaut de base légale au regard de l'article L.651-2 du Code de commerce.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION

L'arrêt attaqué encourt la censure ;

EN CE QU'il a confirmé « le jugement en date du 24 juillet 2017 du Tribunal de commerce d'AJACCIO sauf en ce qu'il a décidé que le montant de l'insuffisance d'actif de la société supporté par X... J... serait fixé à hauteur de 145.674 euros » ; puis statuant de nouveau de ce chef et y ajoutant, condamné X... J... à supporter le montant de l'insuffisance d'actif que laisse apparaître la liquidation judiciaire de la Sarl PROMOCO à hauteur de 72.837,13 euros ;

AUX MOTIFS QUE « le dirigeant de droit ou de fait qui a cessé ses fonctions entre la date de cessation des paiements et l'ouverture de la procédure peut être condamné à combler le passif, si ce passif existait déjà lors de la cessation des fonctions du dirigeant car le défaut de publication de la démission d'un dirigeant ne saurait permettre de poursuivre celui-ci sur le fondement de l'article L. 651.2 du code de commerce dès lors qu'il a effectivement cessé d'exercer ses fonctions avant l'apparition de la situation ayant abouti à l'insuffisance d'actif » ; que dès lors, la qualité de gérant de droit suffit à rechercher M. J... dans le cadre d'une instance en sanction sans nécessité de caractériser à son endroit une gestion de fait, contrairement à ce qu'il soutient, mais une sanction financière ne peut s'appliquer au gérant de droit que sous la condition d'une démonstration de fautes personnelles qui ont contribué à l'insuffisance d'actif, en totalité oupour partie; dans ce cadre, le désintérêt de M. J... pour les affaires de la société est démontré dans la mesure où il a laissé M. B... gérer celle-ci et qu'il s'est abstenu de diligences pertinentes quant à la publication de l'assemblée générale et du changement de gérance dont il se prévaut désormais; en outre, il ne démontre pas qu'il n'avait plus la signature sur les comptes bancaires de la société ; de même, il résulte du jugement du tribunal de commerce du 4 juin 2012 qu'il a comparu, assisté de son avocat et a déclaré que la société disposait de la trésorerie pour aller jusqu'à la fin de la promotion immobilière, la vente des appartements devant permettre de régler les dettes, manifestant ainsi clairement qu'il suivait la gestion sociale ; s'il soutient que le siège social de la société avait été transféré à l'adresse personnelle de M. B..., cela ne résulte d'aucune de ses pièces, la n°10 citée à l'appui correspondant à une demande de règlement de facture adressée par le mandataire judiciaire à une autre société, alors que l'extrait K-bis du janvier 2012 ne porte aucune mention d'un tel transfert; s'agissant de la procédure pénale dont M. J... excipe, la cour observe que, devant le juge d'instruction, il a déclaré que M. B... avait toujours géré la société, y compris pendant le temps de sa gérance de droit, sans qu'il s'y oppose et, lors de la confrontation du 3 février 2014, il a reconnu avoir fait ce qu'on lui demandait : quelques actes de gestion, non décrits, et signé des chèques, sans plus de précision, caractérisant ainsi des fautes de gestion, alors qu'il ne pouvait ignorer la situation, n'ayant pas contesté les déclarations de M. B... au cours de cette confrontation, lequel évoque une petite équipe, travaillant "en famille sur des dossiers colossaux", sans avoir "cet aspect juridique [...] à l'esprit". C'est donc vainement que M. J... soutient l'absence d'actes de gestion de sa part et l'ensemble de ces fautes de gestion a contribué à l'insuffisance d'actif qui a conduit à la liquidation judiciaire de la société ; que toutefois, c'est à juste titre que le tribunal de commerce a retenu le contexte entourant la gestion de la société et la personnalité de M. B..., gérant de fait, pour estimer que l'insuffisance d'actif ne doit être que partiellement supportée par M. J... ; en revanche, cette part sera plus exactement fixée à la somme de 10% de la somme retenue au titre de l'insuffisance d'actif qui s'élève à 728 371,30 euros ; M. J... sera en conséquence condamné au paiement de la somme de 72 837,13 euros, le jugement étant ainsi réformé quant au quantum de la condamnation » ;

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE « aucune comptabilité n'a été communiquée au titre des exercices 2011, 2012 et 2013 ; que ce tribunal qualifiera cette carence du gérant comme une faute de gestion ayant contribué à l'Insuffisance d'actif par l'impossibilité qu'elle a provoquée, pour les organes de la procédure et le tribunal, de disposer, au moment où des décisions importantes devaient être arrêtées pour l'entreprise, de données économiques et financières fiables ; que monsieur X... J... n'a pas déclaré la cessation des paiements de la société PROMOCO dans les quarante-cinq jours de sa survenance et ce, en violation des articles L. 631-4, L 640-4 et L 653-8 du code de commerce, la date de cessation des paiements ayant été fixée au 17 juillet 2010 par ce tribunal alors que la procédure a été ouverte sur assignation d'un créancier : l'URSSAF de la Corse ; Attendu que ce tribunal jugera que ce faisant, le gérant a permis à la société de poursuivre une exploitation déficitaire, aggravant d'autant l'insuffisance d'actif aujourd'hui à l'examen ; que ce tribunal qualifiera cèt agissement comme faute de gestion ayant contribué à l'insuffisance d'actif ; qu'eu égard au contexte dans lequel a été placé le défendeur, qui dirigeait la société PROMOCO, et qui devait évoluer, dans ce cadre, aux côtés de monsieur I... B..., qu'il avait premièrement mis en cause dans le cadre de la présente Instance avant de se désister, lequel a fait l'objet de multiples poursuites pénales et de condamnations définitives pour des chefs d'accusation voisins de ceux qui ont conduit le liquidateur à entamer fa présente action, tous constats conduisant cette juridiction à estimer que l'insuffisance d'actif rie devra être supportée qu'en partie par le défendeur ; que la globalité des opérations impliquant PROMOCO, notamment la déconfiture de la promotion dite « AGULA MARINA », a fait que le passif généré postérieurement au jugement d'ouverture ne sera pas reconnu comme Incombant totalement aux fautes du dirigeant telles qu'elles ont été relevées plus avant, qu'elles aient consisté en un retard dans la déclaration de cessation des paiements ou dans l'absence de production d'une comptabilité utile, amenant ce tribunal à déterminer que la responsabilité de monsieur J... ne sera retenue qu'à hauteur de 20% de la somme retenue plus haut » ;

ALORS QUE, dans ses conclusions d'appel, Monsieur J... faisait valoir (conclusions d'appel p. 20) que la somme mise en avant par le liquidateur, à savoir la somme de 728.371,30 euros correspondait à un passif né pour partie postérieurement au jugement d'ouverture de la procédure collective du 16 janvier 2012 ; que seule l'insuffisance d'actif antérieure au jugement ouvrant la procédure collective peut être prise en compte dans le cadre de l'action engagée contre le dirigeant ; qu'en s'abstenant de dire quelle était l'insuffisance d'actif afférente à la période antérieure à l'intervention de ce jugement, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard de l'article L.651-2 du Code de commerce.ECLI:FR:CCASS:2020:CO00511
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