Cour de cassation, civile, Chambre civile 3, 10 septembre 2020, 19-20.856, Publié au bulletin
Cour de cassation, civile, Chambre civile 3, 10 septembre 2020, 19-20.856, Publié au bulletin
Cour de cassation - Chambre civile 3
- N° de pourvoi : 19-20.856
- ECLI:FR:CCASS:2020:C300471
- Publié au bulletin
- Solution : Rejet
Audience publique du jeudi 10 septembre 2020
Décision attaquée : Cour d'appel de Bourges, du 06 juin 2019- Président
- M. Chauvin
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 3
CH.B
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 10 septembre 2020
Rejet
M. CHAUVIN, président
Arrêt n° 471 FS-P+B+I
Pourvoi n° N 19-20.856
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 10 SEPTEMBRE 2020
M. C... H..., domicilié [...] , a formé le pourvoi n° N 19-20.856 contre l'arrêt rendu le 6 juin 2019 par la cour d'appel de Bourges (chambre civile, baux ruraux), dans le litige l'opposant à la société Tournavaux, société civile d'exploitation agricole, dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Dagneaux, conseiller, les observations de la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat de M. H..., de la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat de la société Tournavaux, et l'avis de M. Sturlèse, avocat général, après débats en l'audience publique du 3 juin 2020 où étaient présents M. Chauvin, président, Mme Dagneaux, conseiller rapporteur, M. Echappé, conseiller doyen, M. Parneix, Mme Provost-Lopin, conseillers, M. Sturlèse, avocat général, et Mme Berdeaux, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Bourges, 6 juin 2019), M. H... et Mme E... ont constitué la société civile d'exploitation agricole Tournavaux (la SCEA), dont ils étaient tous deux associés exploitants.
2. Par convention du 3 juin 2010, M. H... a mis à disposition de cette société, pour une durée de dix ans, des parcelles de terre dont il est propriétaire.
3. M. H..., qui a pris sa retraite et démissionné de la gérance de la société, est devenu associé non exploitant à compter du 1er janvier 2011.
4. Par requête du 18 mai 2017, la SCEA a sollicité la reconnaissance d'un bail rural verbal. M. H... a demandé reconventionnellement le paiement des taxes foncières.
Examen des moyens
Sur le premier moyen et le second moyen, réunis
Enoncé du moyen
5. M. H... fait grief à l'arrêt d'accueillir la demande, alors :
« 1°/ que l'action en reconnaissance d'un bail rural verbal se prescrit par cinq ans à compter du jour où il a été prétendument conclu ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que la Scea Tournavaux demandait la reconnaissance d'un bail rural verbal sur la propriété de M. H... à compter du jour où ce dernier avait cessé de participer à l'exploitation, soit au 1er janvier 2011 et que cette demande avait été formée auprès du tribunal paritaire des baux ruraux par requête du 18 mai 2017 ; qu'en déclarant néanmoins recevable l'action de la Scea de Tournavaux, qui était prescrite dès le 1er janvier 2016, soit cinq ans après le jour de la prétendue conclusion du bail, la cour d'appel a violé les articles L. 411-1 et L. 411-2 du code rural et de la pêche maritime, ensemble l'article 2224 du code civil et 122 du code de procédure civile ;
2°/ que l'action en reconnaissance d'un bail rural verbal se prescrit par cinq ans à compter du jour de sa conclusion ; que la circonstance que le bail litigieux est toujours en cours à la date de la présentation de l'action en reconnaissance n'a pas pour effet de reporter le point de départ du délai de prescription ; qu'en déclarant recevable l'action de la Scea Tournavaux au motif en réalité inopérant que le bail rural était toujours en cours au jour où elle a introduit son action, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard des articles L. 411-1 et L. 411-2 du code rural et de la pêche maritime, ensemble l'article 2224 du code civil et 122 du code de procédure civile ;
3°/ que le statut du fermage n'est pas applicable à la mise à disposition de biens agricoles au profit d'une société d'exploitation ; que lorsque la mise à disposition a été conclue pour une durée déterminée, elle perdure jusqu'au terme convenu initialement par les parties, même en cas de cessation anticipée par le propriétaire de toute participation effective à l'exploitation au sein de la société ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que l'article 3 de la convention de mise à disposition conclue le 3 juin 2010 prévoyait que celle-ci était consentie et acceptée pour une durée de dix années entières et consécutives qui prendrait effet le 1er juin 2010 pour finir le 31 mai 2020 ; qu'en affirmant, pour dire qu'un bail avait succédé à la convention de mise à disposition à compter du 1er janvier 2011, que la cessation de la participation personnelle de M. H... à l'exploitation au sein de la société bénéficiaire de la mise à disposition ne lui permettait plus à compter de la date de cet événement, de se prévaloir de l'exclusion du statut du fermage, à moins qu'il n'ait manifesté concomitamment son intention de mettre fin à cette mise à disposition, la cour d'appel a violé les articles L. 411-1 et L. 411-2 du code rural et de la pêche maritime, ensemble l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016. »
Réponse de la Cour
6. La cour d'appel a retenu, à bon droit, que l'article L. 411-2 du code rural et de la pêche maritime doit être interprété en ce sens que la cessation de la participation personnelle à l'exploitation au sein de la société bénéficiaire de la mise à disposition ne permet plus à l'auteur de celle-ci, à compter de la date de cet événement, de se prévaloir de l'exclusion du statut du fermage, à moins qu'il n'ait manifesté concomitamment son intention de mettre fin à cette mise à disposition.
7. Ayant relevé que M. H... était devenu associé non exploitant à compter du 1er janvier 2011, ne s'était pas retiré de la SCEA, n'avait pas mis fin à la mise à disposition, au profit de cette société, des terres dont il était propriétaire, et avait continué à percevoir le prix convenu dans la convention du 3 juin 2010, et que l'action intentée par la SCEA tendait à voir constater que les conditions justifiant l'exclusion du statut du fermage n'étaient plus remplies le 1er janvier 2011, la cour d'appel en a exactement déduit que les relations entre les parties étaient régies à compter de cette date par un bail rural verbal, qui était toujours en cours, de sorte que la demande de la SCEA n'était pas prescrite.
8. Le moyen n'est donc pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. H... aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, signé par M. Echappé, conseiller doyen, conformément aux dispositions des articles 456 et 1021 du code de procédure civile, en remplacement du conseiller empêché, et signé et prononcé par le président en son audience publique du dix septembre deux mille vingt.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils, pour M. H....
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR déclaré recevable la demande de la Scea Tournavaux ;
AUX MOTIFS QU'avant de se prononcer sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription, il est nécessaire de s'interroger sur la portée des textes applicables aux faits de la cause ; que selon l'article L. 411-1 du code rural et de la pêche maritime, toute mise à disposition à titre onéreux d'un immeuble à usage agricole en vue de l'exploiter pour y exercer une activité agricole est régie par le statut du fermage, sous les réserves énumérées à l'article L. 411-2 ; que ce dernier texte stipule, en son dernier alinéa, que les dispositions de l'article L. 411-1 ne sont pas applicables aux biens mis à la disposition d'une société par une personne qui participe effectivement à leur exploitation au sein de celle-ci ; que M. H... soutient que ce texte doit être interprété en ce sens que l'exclusion du statut du fermage est subordonnée à la participation effective à l'exploitation des biens mis à disposition de la société au moment de cette mise à disposition et qu'elle perdure jusqu'au terme de la convention. Au contraire, la Scea Tournavaux, qui ne conteste pas que M. H... participait bien à l'exploitation au moment de la mise à disposition, prétend que l'exclusion du statut du fermage a cessé lorsque cette condition de participation à l'exploitation n'a plus été remplie, soit au 1er janvier 2011 ; qu'il importe de relever, en premier lieu, que la dérogation prévue à l'article L. 411-2 dernier alinéa ne s'applique pas à une convention, comme il est précisé pour les cas énumérés aux autres alinéas de ce texte, mais à une situation de fait, ce qui laisse présumer que l'application du statut du fermage n'est écartée qu'autant que dure cette situation de fait ; qu'en second lieu, à défaut de toute autre jurisprudence véritablement pertinente, il n'est pas sans intérêt d'analyser l'arrêt de la 3e chambre civile de la cour de cassation du 5 décembre 2001, cité par M. H... lui-même à l'appui de sa thèse ; que le 30 décembre 1990, trois propriétaires indivis avaient mis à la disposition d'un groupement agricole d'exploitation en commun, devenu ensuite une exploitation agricole à responsabilité limitée, une propriété agricole, puis deux d'entre eux avaient décidé de se retirer de la société et de ne plus participer aux travaux courant 1994 et 1995. Le 18 février 1997, l'Earl, représentée par le troisième, a saisi le tribunal paritaire des baux ruraux pour faire juger que la convention du 30 décembre 1990 était soumise au statut du fermage. La cour d'appel l'ayant débouté de cette demande, l'Earl s'est pourvue en cassation en soutenant que l'exception apportée par l'article L. 411-2 du code rural cesse lorsque l'auteur de la mise à disposition abandonne volontairement sa participation aux travaux.
La Cour de cassation a rejeté son pourvoi au motif qu'ayant constaté que les deux propriétaires indivis avaient manifesté leur intention de se retirer de la société bénéficiaire de la mise à disposition et de reprendre en conséquence la libre disposition des terres, en même temps qu'ils cessaient leur participation personnelle à l'exploitation, la cour d'appel avait pu en déduire que le statut du fermage n'était pas applicable à la convention de mise à disposition du 30 décembre 1990 ; qu'il ne saurait être déduit des termes de cet arrêt que l'exclusion du statut du fermage est subordonnée à la seule participation effective à l'exploitation des biens mis à disposition au moment où elle a été consentie, ni que cette exclusion perdure jusqu'au terme convenu initialement par les parties, même en cas de cessation anticipée de la participation effective à l'exploitation au sein de la société. Au contraire, pour répondre au moyen soulevé à l'appui du pourvoi et justifier l'exclusion du statut du fermage, la Cour de cassation a pris soin de préciser que les deux propriétaires indivis, en même temps qu'ils avaient cessé leur participation personnelle à l'exploitation, avaient manifesté leur intention de se retirer de la société et de reprendre la libre disposition des terres ; qu'ainsi, l'article L. 411-2 du code rural et de la pêche maritime doit être interprété en ce sens que la cessation de la participation personnelle à l'exploitation au sein de la société bénéficiaire de la mise à disposition ne permet plus à l'auteur de celle-ci, à compter de la date de cet événement, de se prévaloir de l'exclusion du statut du fermage, à moins qu'il n'ait manifesté concomitamment son intention de mettre fin à cette mise à disposition ; qu'en l'espèce, il est constant que M. H..., qui a cessé, le 31 décembre 2010, de participer personnellement à l'exploitation des biens mis à disposition et s'est vu reconnaître, lors de l'assemblée générale extraordinaire du 18 janvier 2011, le statut d'associé non exploitant de l'Earl Tournavaux avec effet le 1er janvier 2011, ne s'est retiré de la société et surtout n'a pas mis fin à la mise à disposition, considérant au contraire que cette mise à disposition devait se poursuivre jusqu'à son terme le 31 mai 2010 et continuant à percevoir le prix convenu dans la convention ; que dès lors, aucune prescription ne pouvait être opposée à la demande de la Scea Tournavaux, formée auprès du tribunal paritaire des baux ruraux par requête du 18 mai 2017, et tendant à voir constater que la situation de fait justifiant l'exclusion du statut du fermage avait pris fin le 1er janvier 2011 et que les relations entre les partes étaient régies, à compter de cette date, par un « bail rural verbal », lequel était toujours en cours à la date de présentation de la demande ;
1) ALORS QUE l'action en reconnaissance d'un bail rural verbal se prescrit par cinq ans à compter du jour où il a été prétendument conclu ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que la Scea Tournavaux demandait la reconnaissance d'un bail rural verbal sur la propriété de M. H... à compter du jour où ce dernier avait cessé de participer à l'exploitation, soit au 1er janvier 2011 et que cette demande avait été formée auprès du tribunal paritaire des baux ruraux par requête du 18 mai 2017 (cf. arrêt, p. 10) ; qu'en déclarant néanmoins recevable l'action de la Scea de Tournavaux, qui était prescrite dès le 1er janvier 2016, soit cinq ans après le jour de la prétendue conclusion du bail, la cour d'appel a violé les articles L. 411-1 et L. 411-2 du code rural et de la pêche maritime, ensemble l'article 2224 du code civil et 122 du code de procédure civile ;
2) ALORS, en toute hypothèse, QUE l'action en reconnaissance d'un bail rural verbal se prescrit par cinq ans à compter du jour de sa conclusion ; que la circonstance que le bail litigieux est toujours en cours à la date de la présentation de l'action en reconnaissance n'a pas pour effet de reporter le point de départ du délai de prescription ; qu'en déclarant recevable l'action de la Scea Tournavaux au motif en réalité inopérant que le bail rural était toujours en cours au jour où elle a introduit son action, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard des articles L. 411-1 et L. 411-2 du code rural et de la pêche maritime, ensemble l'article 2224 du code civil et 122 du code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION (subsidiaire)
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que la Scea Tournavaux bénéficie, depuis le 1er janvier 2011, d'un bail rural verbal de la part de M. C... H..., portant sur les parcelles et bâtiments énumérés dans la convention de mise à disposition du 3 juin 2010, d'AVOIR condamné la Scea Tournavaux à payer à M. C... H... uniquement la somme de 2 852,14 euros au titre de sa part sur les taxes foncières des années 2013 à 2018 incluses et d'AVOIR débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;
AUX MOTIFS QUE sur le fond, dès lors que M. H... a cessé de participer effectivement à l'exploitation des parcelles mises à disposition au sein de l'Earl Tournavaux à compter du 1er janvier 2011, la poursuite par les parties, postérieurement à cette date, de cette mise à disposition des parcelles et des bâtiments en vue de les exploiter à un usage agricole, moyennant la contrepartie onéreuse prévue dans la convention initiale, est soumise au statut du fermage et peut s'analyser en un bail rural verbal ayant pris effet à cette date ; que la Scea Tournavaux prétend inclure dans l'assiette de ce bail, outre les parcelles comprises dans l convention initiale de mise à disposition, la parcelle [...] ainsi que la partie de la parcelle [...] non comprise dans cette convention, sur lesquelles se trouvent les bâtiments d'habitation ; qu'ainsi, elle fait valoir que le loyer de 5 000 euros prévu pour les bâtiments d'exploitation est manifestement trop élevé pour ces seuls derniers bâtiments ; cependant, aucun élément n'est produit par la Scea Tournavaux pour démontrer que le loyer de 5.000 euros applicable aux bâtiments d'exploitation serait trop élevé pour ces seuls bâtiments et correspondrait donc pour partie aux bâtiments d'habitation ; que la seule photographie aérienne des lieux est insuffisante à établir, comme elle le prétend également, que la location porterait nécessairement sur l'ensemble des bâtiments d'exploitation et d'habitation, fussent-ils situés à proximité les uns des autres ; que par ailleurs, les factures d'eau et d'électricité produites par la Scea Tournavaux et réglées par elle ne sont pas de nature à démontrer, ainsi qu'elle le soutient encore, qu'il n'existerait qu'un seul compteur pour l'ensemble des bâtiments d'exploitation et d'habitation ; que l'attestation du salarié de la Scea Tournavaux ; selon laquelle il payait un loyer à M. H... pour la maison d'habitation, ne peut bien évidemment pas établir l'existence d'une location de cette maison au profit de la Scea Tournavaux ; que les avis de taxes foncières produits par M. H..., dont il réclame le paiement à la Scea Tournavaux, ne comportent que la première page, sur laquelle ne figure pas la description des biens concernés, et sont donc insuffisants à démontrer qu'ils concerneraient également la maison d'habitation ;
Qu'enfin, il sera relevé, d'une part, que Mme W... S... divorcée H... affirme, dans une attestation, avoir constaté que Mme E... avait quitté son domicile de Tournavaux au mois de mai 2013, emmenant avec elle une partie des meubles, notamment ceux qui se trouvaient dans le bureau, et, d'autre part, qu'il n'est justifié par celle-ci ou la Scea Tournavaux d'aucun avis de taxe d'habitation à leur nom portant sur cette maison ; qu'en conséquence, l'assiette du bail reconnu à la Scea Tournavaux sera limité aux seules parcelles et bâtiments d'exploitation énumérés dans la convention initiale de mise à disposition ; que M. H... soutient, à juste titre, que sa demande en paiement des taxes foncières ne peut être considérée comme nouvelle, et donc irrecevable, en cause d'appel, dès lors qu'elle s'analyse comme l'accessoire de la demande formée par lui en première instance et tendant à voir dire que la convention de mise à disposition devra produire ses effets jusqu'au 1er juin 2020 ; que cependant, la cour ayant considéré que la convention de mise à disposition avait cessé de produire ses effets au 1er janvier 2011 et que les relations entre les parties sont gouvernées par un bail soumis au statut du fermage, cette demande en paiement ne saurait porter sur la totalité des taxes foncières, mais seulement sur la part mise à la charge du preneur, laquelle doit être fixée à un cinquième en l'absence d'accord sur ce point, comme il est dit à l'article L. 415-3 du code rural et de la pêche maritime ; au regard des pièces communiquées, la part mise à la charge du preneur pour les années 2013 à 2018 incluses doit être fixé à 2 852,14 euros (14 260,68/5) ;
ALORS QUE le statut du fermage n'est pas applicable à la mise à disposition de biens agricoles au profit d'une société d'exploitation ; que lorsque la mise à disposition a été conclue pour une durée déterminée, elle perdure jusqu'au terme convenu initialement par les parties, même en cas de cessation anticipée par le propriétaire de toute participation effective à l'exploitation au sein de la société ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que l'article 3 de la convention de mise à disposition conclue le 3 juin 2010 prévoyait que celle-ci était consentie et acceptée pour une durée de dix années entières et consécutives qui prendrait effet le 1er juin 2010 pour finir le 31 mai 2020 ; qu'en affirmant, pour dire qu'un bail avait succédé à la convention de mise à disposition à compter du 1er janvier 2011, que la cessation de la participation personnelle de M. H... à l'exploitation au sein de la société bénéficiaire de la mise à disposition ne lui permettait plus à compter de la date de cet évènement, de se prévaloir de l'exclusion du statut du fermage, à moins qu'il n'ait manifesté concomitamment son intention de mettre fin à cette mise à disposition, la cour d'appel a violé les articles L. 411-1 et L. 411-2 du code rural et de la pêche maritime, ensemble l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016.ECLI:FR:CCASS:2020:C300471
CIV. 3
CH.B
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 10 septembre 2020
Rejet
M. CHAUVIN, président
Arrêt n° 471 FS-P+B+I
Pourvoi n° N 19-20.856
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 10 SEPTEMBRE 2020
M. C... H..., domicilié [...] , a formé le pourvoi n° N 19-20.856 contre l'arrêt rendu le 6 juin 2019 par la cour d'appel de Bourges (chambre civile, baux ruraux), dans le litige l'opposant à la société Tournavaux, société civile d'exploitation agricole, dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Dagneaux, conseiller, les observations de la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat de M. H..., de la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat de la société Tournavaux, et l'avis de M. Sturlèse, avocat général, après débats en l'audience publique du 3 juin 2020 où étaient présents M. Chauvin, président, Mme Dagneaux, conseiller rapporteur, M. Echappé, conseiller doyen, M. Parneix, Mme Provost-Lopin, conseillers, M. Sturlèse, avocat général, et Mme Berdeaux, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Bourges, 6 juin 2019), M. H... et Mme E... ont constitué la société civile d'exploitation agricole Tournavaux (la SCEA), dont ils étaient tous deux associés exploitants.
2. Par convention du 3 juin 2010, M. H... a mis à disposition de cette société, pour une durée de dix ans, des parcelles de terre dont il est propriétaire.
3. M. H..., qui a pris sa retraite et démissionné de la gérance de la société, est devenu associé non exploitant à compter du 1er janvier 2011.
4. Par requête du 18 mai 2017, la SCEA a sollicité la reconnaissance d'un bail rural verbal. M. H... a demandé reconventionnellement le paiement des taxes foncières.
Examen des moyens
Sur le premier moyen et le second moyen, réunis
Enoncé du moyen
5. M. H... fait grief à l'arrêt d'accueillir la demande, alors :
« 1°/ que l'action en reconnaissance d'un bail rural verbal se prescrit par cinq ans à compter du jour où il a été prétendument conclu ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que la Scea Tournavaux demandait la reconnaissance d'un bail rural verbal sur la propriété de M. H... à compter du jour où ce dernier avait cessé de participer à l'exploitation, soit au 1er janvier 2011 et que cette demande avait été formée auprès du tribunal paritaire des baux ruraux par requête du 18 mai 2017 ; qu'en déclarant néanmoins recevable l'action de la Scea de Tournavaux, qui était prescrite dès le 1er janvier 2016, soit cinq ans après le jour de la prétendue conclusion du bail, la cour d'appel a violé les articles L. 411-1 et L. 411-2 du code rural et de la pêche maritime, ensemble l'article 2224 du code civil et 122 du code de procédure civile ;
2°/ que l'action en reconnaissance d'un bail rural verbal se prescrit par cinq ans à compter du jour de sa conclusion ; que la circonstance que le bail litigieux est toujours en cours à la date de la présentation de l'action en reconnaissance n'a pas pour effet de reporter le point de départ du délai de prescription ; qu'en déclarant recevable l'action de la Scea Tournavaux au motif en réalité inopérant que le bail rural était toujours en cours au jour où elle a introduit son action, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard des articles L. 411-1 et L. 411-2 du code rural et de la pêche maritime, ensemble l'article 2224 du code civil et 122 du code de procédure civile ;
3°/ que le statut du fermage n'est pas applicable à la mise à disposition de biens agricoles au profit d'une société d'exploitation ; que lorsque la mise à disposition a été conclue pour une durée déterminée, elle perdure jusqu'au terme convenu initialement par les parties, même en cas de cessation anticipée par le propriétaire de toute participation effective à l'exploitation au sein de la société ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que l'article 3 de la convention de mise à disposition conclue le 3 juin 2010 prévoyait que celle-ci était consentie et acceptée pour une durée de dix années entières et consécutives qui prendrait effet le 1er juin 2010 pour finir le 31 mai 2020 ; qu'en affirmant, pour dire qu'un bail avait succédé à la convention de mise à disposition à compter du 1er janvier 2011, que la cessation de la participation personnelle de M. H... à l'exploitation au sein de la société bénéficiaire de la mise à disposition ne lui permettait plus à compter de la date de cet événement, de se prévaloir de l'exclusion du statut du fermage, à moins qu'il n'ait manifesté concomitamment son intention de mettre fin à cette mise à disposition, la cour d'appel a violé les articles L. 411-1 et L. 411-2 du code rural et de la pêche maritime, ensemble l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016. »
Réponse de la Cour
6. La cour d'appel a retenu, à bon droit, que l'article L. 411-2 du code rural et de la pêche maritime doit être interprété en ce sens que la cessation de la participation personnelle à l'exploitation au sein de la société bénéficiaire de la mise à disposition ne permet plus à l'auteur de celle-ci, à compter de la date de cet événement, de se prévaloir de l'exclusion du statut du fermage, à moins qu'il n'ait manifesté concomitamment son intention de mettre fin à cette mise à disposition.
7. Ayant relevé que M. H... était devenu associé non exploitant à compter du 1er janvier 2011, ne s'était pas retiré de la SCEA, n'avait pas mis fin à la mise à disposition, au profit de cette société, des terres dont il était propriétaire, et avait continué à percevoir le prix convenu dans la convention du 3 juin 2010, et que l'action intentée par la SCEA tendait à voir constater que les conditions justifiant l'exclusion du statut du fermage n'étaient plus remplies le 1er janvier 2011, la cour d'appel en a exactement déduit que les relations entre les parties étaient régies à compter de cette date par un bail rural verbal, qui était toujours en cours, de sorte que la demande de la SCEA n'était pas prescrite.
8. Le moyen n'est donc pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. H... aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, signé par M. Echappé, conseiller doyen, conformément aux dispositions des articles 456 et 1021 du code de procédure civile, en remplacement du conseiller empêché, et signé et prononcé par le président en son audience publique du dix septembre deux mille vingt.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils, pour M. H....
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR déclaré recevable la demande de la Scea Tournavaux ;
AUX MOTIFS QU'avant de se prononcer sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription, il est nécessaire de s'interroger sur la portée des textes applicables aux faits de la cause ; que selon l'article L. 411-1 du code rural et de la pêche maritime, toute mise à disposition à titre onéreux d'un immeuble à usage agricole en vue de l'exploiter pour y exercer une activité agricole est régie par le statut du fermage, sous les réserves énumérées à l'article L. 411-2 ; que ce dernier texte stipule, en son dernier alinéa, que les dispositions de l'article L. 411-1 ne sont pas applicables aux biens mis à la disposition d'une société par une personne qui participe effectivement à leur exploitation au sein de celle-ci ; que M. H... soutient que ce texte doit être interprété en ce sens que l'exclusion du statut du fermage est subordonnée à la participation effective à l'exploitation des biens mis à disposition de la société au moment de cette mise à disposition et qu'elle perdure jusqu'au terme de la convention. Au contraire, la Scea Tournavaux, qui ne conteste pas que M. H... participait bien à l'exploitation au moment de la mise à disposition, prétend que l'exclusion du statut du fermage a cessé lorsque cette condition de participation à l'exploitation n'a plus été remplie, soit au 1er janvier 2011 ; qu'il importe de relever, en premier lieu, que la dérogation prévue à l'article L. 411-2 dernier alinéa ne s'applique pas à une convention, comme il est précisé pour les cas énumérés aux autres alinéas de ce texte, mais à une situation de fait, ce qui laisse présumer que l'application du statut du fermage n'est écartée qu'autant que dure cette situation de fait ; qu'en second lieu, à défaut de toute autre jurisprudence véritablement pertinente, il n'est pas sans intérêt d'analyser l'arrêt de la 3e chambre civile de la cour de cassation du 5 décembre 2001, cité par M. H... lui-même à l'appui de sa thèse ; que le 30 décembre 1990, trois propriétaires indivis avaient mis à la disposition d'un groupement agricole d'exploitation en commun, devenu ensuite une exploitation agricole à responsabilité limitée, une propriété agricole, puis deux d'entre eux avaient décidé de se retirer de la société et de ne plus participer aux travaux courant 1994 et 1995. Le 18 février 1997, l'Earl, représentée par le troisième, a saisi le tribunal paritaire des baux ruraux pour faire juger que la convention du 30 décembre 1990 était soumise au statut du fermage. La cour d'appel l'ayant débouté de cette demande, l'Earl s'est pourvue en cassation en soutenant que l'exception apportée par l'article L. 411-2 du code rural cesse lorsque l'auteur de la mise à disposition abandonne volontairement sa participation aux travaux.
La Cour de cassation a rejeté son pourvoi au motif qu'ayant constaté que les deux propriétaires indivis avaient manifesté leur intention de se retirer de la société bénéficiaire de la mise à disposition et de reprendre en conséquence la libre disposition des terres, en même temps qu'ils cessaient leur participation personnelle à l'exploitation, la cour d'appel avait pu en déduire que le statut du fermage n'était pas applicable à la convention de mise à disposition du 30 décembre 1990 ; qu'il ne saurait être déduit des termes de cet arrêt que l'exclusion du statut du fermage est subordonnée à la seule participation effective à l'exploitation des biens mis à disposition au moment où elle a été consentie, ni que cette exclusion perdure jusqu'au terme convenu initialement par les parties, même en cas de cessation anticipée de la participation effective à l'exploitation au sein de la société. Au contraire, pour répondre au moyen soulevé à l'appui du pourvoi et justifier l'exclusion du statut du fermage, la Cour de cassation a pris soin de préciser que les deux propriétaires indivis, en même temps qu'ils avaient cessé leur participation personnelle à l'exploitation, avaient manifesté leur intention de se retirer de la société et de reprendre la libre disposition des terres ; qu'ainsi, l'article L. 411-2 du code rural et de la pêche maritime doit être interprété en ce sens que la cessation de la participation personnelle à l'exploitation au sein de la société bénéficiaire de la mise à disposition ne permet plus à l'auteur de celle-ci, à compter de la date de cet événement, de se prévaloir de l'exclusion du statut du fermage, à moins qu'il n'ait manifesté concomitamment son intention de mettre fin à cette mise à disposition ; qu'en l'espèce, il est constant que M. H..., qui a cessé, le 31 décembre 2010, de participer personnellement à l'exploitation des biens mis à disposition et s'est vu reconnaître, lors de l'assemblée générale extraordinaire du 18 janvier 2011, le statut d'associé non exploitant de l'Earl Tournavaux avec effet le 1er janvier 2011, ne s'est retiré de la société et surtout n'a pas mis fin à la mise à disposition, considérant au contraire que cette mise à disposition devait se poursuivre jusqu'à son terme le 31 mai 2010 et continuant à percevoir le prix convenu dans la convention ; que dès lors, aucune prescription ne pouvait être opposée à la demande de la Scea Tournavaux, formée auprès du tribunal paritaire des baux ruraux par requête du 18 mai 2017, et tendant à voir constater que la situation de fait justifiant l'exclusion du statut du fermage avait pris fin le 1er janvier 2011 et que les relations entre les partes étaient régies, à compter de cette date, par un « bail rural verbal », lequel était toujours en cours à la date de présentation de la demande ;
1) ALORS QUE l'action en reconnaissance d'un bail rural verbal se prescrit par cinq ans à compter du jour où il a été prétendument conclu ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que la Scea Tournavaux demandait la reconnaissance d'un bail rural verbal sur la propriété de M. H... à compter du jour où ce dernier avait cessé de participer à l'exploitation, soit au 1er janvier 2011 et que cette demande avait été formée auprès du tribunal paritaire des baux ruraux par requête du 18 mai 2017 (cf. arrêt, p. 10) ; qu'en déclarant néanmoins recevable l'action de la Scea de Tournavaux, qui était prescrite dès le 1er janvier 2016, soit cinq ans après le jour de la prétendue conclusion du bail, la cour d'appel a violé les articles L. 411-1 et L. 411-2 du code rural et de la pêche maritime, ensemble l'article 2224 du code civil et 122 du code de procédure civile ;
2) ALORS, en toute hypothèse, QUE l'action en reconnaissance d'un bail rural verbal se prescrit par cinq ans à compter du jour de sa conclusion ; que la circonstance que le bail litigieux est toujours en cours à la date de la présentation de l'action en reconnaissance n'a pas pour effet de reporter le point de départ du délai de prescription ; qu'en déclarant recevable l'action de la Scea Tournavaux au motif en réalité inopérant que le bail rural était toujours en cours au jour où elle a introduit son action, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard des articles L. 411-1 et L. 411-2 du code rural et de la pêche maritime, ensemble l'article 2224 du code civil et 122 du code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION (subsidiaire)
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que la Scea Tournavaux bénéficie, depuis le 1er janvier 2011, d'un bail rural verbal de la part de M. C... H..., portant sur les parcelles et bâtiments énumérés dans la convention de mise à disposition du 3 juin 2010, d'AVOIR condamné la Scea Tournavaux à payer à M. C... H... uniquement la somme de 2 852,14 euros au titre de sa part sur les taxes foncières des années 2013 à 2018 incluses et d'AVOIR débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;
AUX MOTIFS QUE sur le fond, dès lors que M. H... a cessé de participer effectivement à l'exploitation des parcelles mises à disposition au sein de l'Earl Tournavaux à compter du 1er janvier 2011, la poursuite par les parties, postérieurement à cette date, de cette mise à disposition des parcelles et des bâtiments en vue de les exploiter à un usage agricole, moyennant la contrepartie onéreuse prévue dans la convention initiale, est soumise au statut du fermage et peut s'analyser en un bail rural verbal ayant pris effet à cette date ; que la Scea Tournavaux prétend inclure dans l'assiette de ce bail, outre les parcelles comprises dans l convention initiale de mise à disposition, la parcelle [...] ainsi que la partie de la parcelle [...] non comprise dans cette convention, sur lesquelles se trouvent les bâtiments d'habitation ; qu'ainsi, elle fait valoir que le loyer de 5 000 euros prévu pour les bâtiments d'exploitation est manifestement trop élevé pour ces seuls derniers bâtiments ; cependant, aucun élément n'est produit par la Scea Tournavaux pour démontrer que le loyer de 5.000 euros applicable aux bâtiments d'exploitation serait trop élevé pour ces seuls bâtiments et correspondrait donc pour partie aux bâtiments d'habitation ; que la seule photographie aérienne des lieux est insuffisante à établir, comme elle le prétend également, que la location porterait nécessairement sur l'ensemble des bâtiments d'exploitation et d'habitation, fussent-ils situés à proximité les uns des autres ; que par ailleurs, les factures d'eau et d'électricité produites par la Scea Tournavaux et réglées par elle ne sont pas de nature à démontrer, ainsi qu'elle le soutient encore, qu'il n'existerait qu'un seul compteur pour l'ensemble des bâtiments d'exploitation et d'habitation ; que l'attestation du salarié de la Scea Tournavaux ; selon laquelle il payait un loyer à M. H... pour la maison d'habitation, ne peut bien évidemment pas établir l'existence d'une location de cette maison au profit de la Scea Tournavaux ; que les avis de taxes foncières produits par M. H..., dont il réclame le paiement à la Scea Tournavaux, ne comportent que la première page, sur laquelle ne figure pas la description des biens concernés, et sont donc insuffisants à démontrer qu'ils concerneraient également la maison d'habitation ;
Qu'enfin, il sera relevé, d'une part, que Mme W... S... divorcée H... affirme, dans une attestation, avoir constaté que Mme E... avait quitté son domicile de Tournavaux au mois de mai 2013, emmenant avec elle une partie des meubles, notamment ceux qui se trouvaient dans le bureau, et, d'autre part, qu'il n'est justifié par celle-ci ou la Scea Tournavaux d'aucun avis de taxe d'habitation à leur nom portant sur cette maison ; qu'en conséquence, l'assiette du bail reconnu à la Scea Tournavaux sera limité aux seules parcelles et bâtiments d'exploitation énumérés dans la convention initiale de mise à disposition ; que M. H... soutient, à juste titre, que sa demande en paiement des taxes foncières ne peut être considérée comme nouvelle, et donc irrecevable, en cause d'appel, dès lors qu'elle s'analyse comme l'accessoire de la demande formée par lui en première instance et tendant à voir dire que la convention de mise à disposition devra produire ses effets jusqu'au 1er juin 2020 ; que cependant, la cour ayant considéré que la convention de mise à disposition avait cessé de produire ses effets au 1er janvier 2011 et que les relations entre les parties sont gouvernées par un bail soumis au statut du fermage, cette demande en paiement ne saurait porter sur la totalité des taxes foncières, mais seulement sur la part mise à la charge du preneur, laquelle doit être fixée à un cinquième en l'absence d'accord sur ce point, comme il est dit à l'article L. 415-3 du code rural et de la pêche maritime ; au regard des pièces communiquées, la part mise à la charge du preneur pour les années 2013 à 2018 incluses doit être fixé à 2 852,14 euros (14 260,68/5) ;
ALORS QUE le statut du fermage n'est pas applicable à la mise à disposition de biens agricoles au profit d'une société d'exploitation ; que lorsque la mise à disposition a été conclue pour une durée déterminée, elle perdure jusqu'au terme convenu initialement par les parties, même en cas de cessation anticipée par le propriétaire de toute participation effective à l'exploitation au sein de la société ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que l'article 3 de la convention de mise à disposition conclue le 3 juin 2010 prévoyait que celle-ci était consentie et acceptée pour une durée de dix années entières et consécutives qui prendrait effet le 1er juin 2010 pour finir le 31 mai 2020 ; qu'en affirmant, pour dire qu'un bail avait succédé à la convention de mise à disposition à compter du 1er janvier 2011, que la cessation de la participation personnelle de M. H... à l'exploitation au sein de la société bénéficiaire de la mise à disposition ne lui permettait plus à compter de la date de cet évènement, de se prévaloir de l'exclusion du statut du fermage, à moins qu'il n'ait manifesté concomitamment son intention de mettre fin à cette mise à disposition, la cour d'appel a violé les articles L. 411-1 et L. 411-2 du code rural et de la pêche maritime, ensemble l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016.