Cour de cassation, civile, Chambre civile 2, 5 mars 2020, 19-10.371, Inédit
Cour de cassation, civile, Chambre civile 2, 5 mars 2020, 19-10.371, Inédit
Cour de cassation - Chambre civile 2
- N° de pourvoi : 19-10.371
- ECLI:FR:CCASS:2020:C200272
- Non publié au bulletin
- Solution : Cassation
Audience publique du jeudi 05 mars 2020
Décision attaquée : Cour d'appel de Besançon, du 06 novembre 2018- Président
- M. Pireyre (président)
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 2
MF
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 5 mars 2020
Cassation
M. PIREYRE, président
Arrêt n° 272 F-D
Pourvoi n° R 19-10.371
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 5 MARS 2020
La société Axa France IARD, société anonyme, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° R 19-10.371 contre l'arrêt (n° RG : 17/01694) rendu le 6 novembre 2018 par la cour d'appel de Besançon (1re chambre civile et commerciale), dans le litige l'opposant à Mme C... D..., domiciliée [...] , défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Guého, conseiller référendaire, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Axa France IARD, de Me Balat, avocat de Mme D..., et l'avis de Mme Nicolétis, avocat général, après débats en l'audience publique du 29 janvier 2020 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Guého, conseiller référendaire rapporteur, Mme Gelbard-Le Dauphin, conseiller doyen, et Mme Cos, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Besançon, 6 novembre 2018), Mme D... et son compagnon, G... A..., étaient propriétaires indivis d'une maison d'habitation, d'un bâtiment affecté à l'exploitation d'un garage et d'un véhicule automobile, assurés auprès de la société Axa France IARD (l'assureur).
2. Ces biens ont été détruits par des incendies le 28 octobre 2012.
3. L'assureur ayant opposé le 12 juin 2013 à Mme D... un refus de garantie en invoquant la faute intentionnelle de G... A..., disparu dans l'incendie de la maison et déclaré judiciairement décédé le 28 octobre 2012, celle-ci l'a assigné le 24 mars 2014 en exécution des contrats.
Examen du moyen
Sur le moyen unique, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
4. L'assureur fait grief à l'arrêt de le condamner à garantir Mme D... des dommages résultant pour elle du sinistre intervenu le 28 octobre 2012 et ayant atteint une maison à usage d'habitation à Bonnetage, [...] , un bâtiment d'exploitation d'activité de garage situé à Le Russey, un véhicule de marque Subaru immatriculé BL 209 XZ, et d'ordonner une expertise afin d'évaluer les préjudices subis par Mme D..., alors « que la renonciation à un droit ne se présume pas, et ne peut résulter que d'actes manifestant de façon claire et non équivoque la volonté de renoncer ; que le fait pour l'assureur d'avoir laissé se poursuivre les opérations d'expertise amiable, engagées avant qu'il ait eu connaissance de la cause de non garantie, destinées à déterminer les causes du sinistre et à évaluer les biens endommagés, ne peut à lui seul caractériser la volonté non équivoque de l'assureur de renoncer à se prévaloir de l'exclusion légale de garantie résultant du caractère intentionnel du sinistre ; que pour dire que la garantie de la société Axa France IARD était due, la cour d'appel a retenu qu'alors que l'agent général de cette compagnie avait eu connaissance dès le 30 octobre 2012 des lettres dans lesquelles M. A... déclarait être l'auteur du sinistre, la société Axa France IARD n'avait opposé l'exclusion de garantie qu'aux termes d'une lettre du 12 juin 2013, sans avoir émis de réserve sur sa garantie ni donné instruction au cabinet [...], qu'elle avait missionné, d'interrompre ses opérations d'expertise ; qu'elle a également énoncé que le 10 avril 2013, le cabinet [...] avait adressé l'étude de valeur vénale des bâtiments sinistrés et invitait son confrère à confirmer son accord avant une transmission de l'étude à la compagnie Axa France IARD, et que cette dernière ne pouvait soutenir que la poursuite de l'enquête pénale ne lui permettait pas de s'opposer à la prise en charge du sinistre, dès lors qu'elle n'avait pas attendu l'issue de celle-ci pour le faire et qu'elle disposait en tout état de cause d'éléments suffisants pour émettre à tout le moins les réserves expresses d'usage en la matière ; qu'en statuant par ces motifs, impropres à caractériser la volonté non équivoque de la compagnie Axa France IARD de renoncer à se prévaloir de l'exclusion de garantie résultant du caractère intentionnel du sinistre litigieux, la cour d'appel a violé l'article L. 113-1 du code des assurances, ensemble l'article 1134 (devenu 1103) du code civil.»
Réponse de la Cour
Vu l'article L. 113-1 du code des assurances et l'article 1103 du code civil :
5. La renonciation à un droit ne se présume pas et ne peut résulter que d'actes de son titulaire manifestant sans équivoque la volonté de renoncer.
6. Pour condamner l'assureur à garantir Mme D... de ses dommages résultant des incendies survenus le 28 octobre 2012, l' arrêt relève, par motifs propres et adoptés, qu'alors qu'au cours de son audition par la Gendarmerie, le 30 octobre 2012, avait été remise à l'agent général de l'assureur une lettre de G... A..., écrite à son attention et dont l'authenticité lui avait été confirmée sans délai, par laquelle celui-ci reconnaissait être l'auteur des trois incendies, l'assureur n'a opposé à Mme D... l'exclusion de garantie que le 12 juin 2013, sans avoir auparavant émis la moindre réserve sur sa garantie, ni donné instruction au cabinet d'expertise qu'il avait missionné afin, notamment, d'évaluer les biens sinistrés, d'interrompre ses opérations. Il constate encore que cet expert a communiqué à son confrère l'étude de valeur vénale des bâtiments sinistrés en l'invitant à confirmer son accord avant la transmission de cette étude à l'assureur, et énonce que ce dernier ne peut sérieusement soutenir que la poursuite de l'enquête pénale ne lui permettait pas de s'opposer à la prise en charge du sinistre alors même qu'il n'a pas attendu l'issue de celle-ci pour le faire et qu'il disposait d'éléments suffisants pour émettre à tout le moins les réserves expresses d'usage en la matière.
7. L'arrêt retient qu'il en ressort qu'en poursuivant les opérations d'expertise qu'il avait diligentées pour évaluer les biens sinistrés de son assuré, en parfaite connaissance de l'imputabilité des trois sinistres à ce dernier, l'assureur a renoncé implicitement mais sans équivoque à se prévaloir de l'exclusion légale de garantie prévue par l'article L. 113-1, alinéa 2, du code des assurances.
8. En statuant ainsi, par des motifs impropres à caractériser la renonciation non équivoque de l'assureur à se prévaloir de l'exclusion légale de garantie résultant de la faute intentionnelle de G... A..., dès lors que le fait de poursuivre les opérations d'une expertise amiable afin de déterminer l'étendue des dommages résultant d'un sinistre n'implique pas, à lui seul, la volonté de renoncer à invoquer une telle exclusion, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du moyen, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 6 novembre 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Besançon ;
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Dijon ;
Condamne Mme D... aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du cinq mars deux mille vingt.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat aux Conseils, pour la société Axa France IARD
Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR condamné la société AXA FRANCE IARD à garantir Madame C... D... des dommages résultant pour elle du sinistre intervenu le 28 octobre 2012 et ayant atteint une maison à usage d'habitation à BONNETAGE, [...] , un bâtiment d'exploitation d'activité de garage situé à [...], un véhicule de marque SUBARU immatriculé [...], et D'AVOIR ordonné une expertise afin d'évaluer les préjudices subis par Madame C... D... ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE « Sur l'exclusion de garantie, Attendu qu'en vertu de l'article L.113-1 alinéa 2 du code des assurances, l'assureur ne répond pas des dommages provenant d'une faute intentionnelle ou dolosive de son assuré et ce, à l'égard de tous ; Attendu qu'en l'espèce il ressort des pièces communiquées que M. G... A... avait assuré à titre personnel la maison d'habitation, constituant la résidence du couple qu'il formait avec Mme C... D..., sise à [...], contre le risque incendie auprès de la SA AXA par un contrat souscrit le 1er septembre 2007 ; qu'il avait en outre, ès qualités de gérant de l'EURL MECATECH, assuré auprès de la même compagnie un bâtiment affecté à l'exploitation d'un garage situé au Russey ainsi qu'un véhicule automobile professionnel, suivant contrat en date du 28 juin 2012 ; Attendu qu'il résulte à suffisance de l'enquête de gendarmerie, versée aux débats, que M. G... A... est l'auteur de l'incendie survenu à Bonnétage et au Russey le 28 octobre 2012 ; que l'intéressé a en effet laissé à dessein des lettres manuscrites adressées tant à sa compagne, qu'à des proches, qui ont identifié son écriture, et même à son assureur afin de se désigner comme l'auteur des mises à feu, lesdites missives établissant le caractère conscient et réfléchi de l'acte commis par l'intéressé, dont il a été jugé par décision du tribunal de grande instance de Montbéliard du 28 avril 2014 qu'il avait lui-même péri dans le sinistre ; Qu'il résulte de ce qui précède que l'exclusion légale de garantie a vocation à s'appliquer en l'espèce ; Attendu que Mme C... D... soutient que la SA AXA a, implicitement mais incontestablement, renoncé à se prévaloir de cette cause d'exclusion de garantie, dans la mesure où son agent général a eu connaissance le 30 octobre 2012 de la lettre émanant de M. G... A... se déclarant auteur de l'incendie, soit deux jours seulement après les sinistres, et que l'assureur n'a pas pour autant émis la moindre réserve ni opposé la déchéance de la garantie avant le 12 juin 2013, après avoir pris en charge en février 2013 le coût d'un déblaiement, constituant une indemnisation partielle, et désigné son expert, le cabinet [...], qui lui a proposé le 10 avril 2013 une indemnisation sur la base de la valeur vénale des biens sinistrés ; Que la SA AXA objecte, pour contester toute renonciation de sa part par un acte non équivoque, que la désignation d'un expert immédiatement après un sinistre, alors que les circonstances étaient encore inconnues, est un acte conservatoire habituel qui ne peut s'assimiler à une quelconque intention de renoncer à une déchéance de garantie ; qu'elle poursuit en expliquant que, de la même manière, l'accord de principe au lendemain du sinistre consistant à prendre en charge le coût d'un déblaiement des gravats, requis par la gendarmerie pour tenter de retrouver le corps de M. G... A... dans les décombres, ne peut davantage s'analyser en un acte de renonciation non équivoque, compte tenu de l'urgence et de l'ignorance à cette date de l'existence des lettres laissées par son assuré ; Attendu que l'enquête de Gendarmerie permet de relever que M. K... I..., assureur des biens sinistrés a été auditionné le 30 octobre 2012 de 9 heures 05 à 9 heures 55, soit deux jours seulement après le sinistre et qu'il lui a été remis à cette occasion une lettre que M. G... A... avait laissée à son attention se dénonçant comme étant l'auteur des trois sinistres et demandant à ne pas être dédommagé ; que si la personne entendue n'a pas été en mesure, le jour même, d'identifier l'écriture de M. G... A... faute de la connaître, il précise en revanche aux enquêteurs que sa compagnie d'assurance a fait appel à la SARL du Lomont afin de procéder au dégagement des décombres sur les lieux de sinistre de Bonnétage et du Russey et que ces fiais sont pris en charge par l'assurance (facture n° 8128 du 10 décembre 2012) ; Attendu qu'en premier lieu, il doit être considéré à la suite du premier juge que le recours à cette SARL du Lomont étant antérieur au 30 octobre 2012 et à la connaissance portée à l'agent de la SA AXA de la vraisemblable faute intentionnelle de l'assuré, il ne saurait être tiré de ce premier acte positif la preuve d'une renonciation à se prévaloir de la déchéance de garantie ; Qu'en revanche, alors que l'agent d'assurance a eu connaissance dès le 30 octobre 2012 de cette information particulièrement précise, et dont il a pu sans délai se voir confirmer par les enquêteurs ou les proches de l'assuré l'authenticité de la lettre qui lui avait été adressée par l'assuré, la SA AXA n'a opposé l'exclusion de garantie à Mme C... D... qu'aux termes d'une lettre recommandée avec avis de réception du 12 juin 2013 sans avoir émis entre le 30 octobre 2012 et cette date la moindre réserve sur sa garantie ni donné instruction au cabinet [...], qu'elle avait missionné, d'interrompre ses opérations d'expertise ; qu'à la date du 10 avril 2013, M. R... Q... du cabinet d'expertise L... adressait encore, dans le prolongement de récents entretiens, l'étude de valeur vénale des bâtiments sinistrés et invitait son confrère à confirmer son accord avant une transmission de l'étude à la compagnie d'assurance AXA ; qu'enfin, celle-ci ne peut sérieusement soutenir que la poursuite de l'enquête pénale ne lui permettait pas de s'opposer à la prise en charge alors même qu'elle n'a pas attendu l'issue de celle-ci pour le faire et qu'elle disposait en tout état de cause d'éléments suffisants pour émettre à tout le moins les réserves expresses d'usage en la matière ; Attendu qu'il résulte des développements qui précèdent qu'en poursuivant les opérations d'expertise qu'elle avait diligentés pour évaluer les biens sinistrés de son assuré, en connaissance de l'imputabilité des trois sinistres à ce dernier, la SA AXA a renoncé implicitement mais sans équivoque à se prévaloir de la déchéance légale de garantie prévue par le texte susvisé ; Que le jugement déféré, qui a ainsi statué et a condamné l'assureur à garantir Mme C... D... et à l'indemniser de son préjudice, avant d'ordonner une mesure d'expertise, sera confirmé de ces chefs » ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES DES PREMIERS JUGES QUE « Sur la renonciation à déchéance : Conformément aux dispositions de l'article L. 113-1 du code des assurances alinéa 2, que l'assureur ne répond pas des pertes et dommages provenant d'une faute intentionnelle ou dolosive de l'assuré. Toutefois, l'assureur peut renoncer, expressément ou implicitement, à se prévaloir de l'exception de non-garantie résultant de la faute intentionnelle ou dolosive de l'assuré. La renonciation implicite doit, afin d'être établie, résulter d'actes non équivoques de l'assureur. En l'espèce, Madame D... soutient que la compagnie AXA aurait implicitement renoncé à se prévaloir de la déchéance de garantie, dès lors qu'elle aurait désigné un expert afin de réaliser une étude des valeurs vénales des biens sinistrés et d'autre part, qu'elle aurait pris en charge des frais de déblaiement des lieux pour un montant de 8 372,00 euros TTC, ce qui constituerait une avance sur les droits de l'assuré. Madame D... soutient que ces actes constitueraient des actes non équivoques de renonciation à déchéance. Toutefois, aucun élément ne permet d'établir que lors de la prise en charge des frais de déblaiement, la compagnie AXA FRANCE IARD était informée des causes du sinistre. En effet, l'audition de Monsieur I..., agent d'assurance de Monsieur A..., réalisée le 30 octobre 2012 par les gendarmes de F... démontre que ces frais ont immédiatement été engagés alors que ce n'est qu'au jour de cette audition que Monsieur I... s'est vu remettre un courrier établi par Monsieur A... dans lequel il indiquait être l'auteur des incendies suite à sa séparation. Toutefois, dès le 30 octobre 2012, et compte tenu de la remise de ce courrier à Monsieur I..., la compagnie AXA FRANCE IARD était informée de l'origine du sinistre ou à tout le moins en mesure d'émettre des réserves. Or, la compagnie d'assurance a, sans jamais émettre la moindre réserve sur sa garantie, réalisé des mesures d'expertise afin notamment de faire évaluer les biens et donc les droits de Madame D.... Par ailleurs, si la compagnie d'assurance soutient que l'enquête pénale a duré plusieurs mois, l'empêchant ainsi de s'opposer à la prise en charge, il résulte des débats, d'une part, que contrairement à ce qu'elle affirme elle n'a pas attendu le résultat de cette enquête pour opposer son refus de garantie, mais qu'au surplus, elle n'a durant, près de huit mois et alors qu'elle avait eu connaissance des causes probables du sinistre, jamais émis la moindre réserve sur sa garantie tout en poursuivant ses opérations d'expertise. Dès lors, il doit être considérer que la compagnie AXA FRANCE IARD a implicitement renoncé à se prévaloir de sa déchéance de garantie et qu'il y a lieu de la condamner à garantir Madame D... » ;
1°) ALORS QUE la renonciation à un droit ne se présume pas, et ne peut résulter que d'actes manifestant de façon claire et non équivoque la volonté de renoncer ; que le fait pour l'assureur d'avoir laissé se poursuivre les opérations d'expertise amiable, engagées avant qu'il ait eu connaissance de la cause de non-garantie, destinées à déterminer les causes du sinistre et à évaluer les biens endommagés, ne peut à lui seul caractériser la volonté non équivoque de l'assureur de renoncer à se prévaloir de l'exclusion légale de garantie résultant du caractère intentionnel du sinistre ; que pour dire que la garantie de la société AXA FRANCE IARD était due, la cour d'appel a retenu qu'alors que l'agent général de cette compagnie avait eu connaissance dès le 30 octobre 2012 des lettres dans lesquelles Monsieur A... déclarait être l'auteur du sinistre, la société AXA FRANCE IARD n'avait opposé l'exclusion de garantie qu'aux termes d'une lettre du 12 juin 2013, sans avoir émis de réserve sur sa garantie ni donné instruction au cabinet [...], qu'elle avait missionné, d'interrompre ses opérations d'expertise ; qu'elle a également énoncé que le 10 avril 2013, le cabinet [...] avait adressé l'étude de valeur vénale des bâtiments sinistrés et invitait son confrère à confirmer son accord avant une transmission de l'étude à la compagnie AXA FRANCE IARD, et que cette dernière ne pouvait soutenir que la poursuite de l'enquête pénale ne lui permettait pas de s'opposer à la prise en charge du sinistre, dès lors qu'elle n'avait pas attendu l'issue de celle-ci pour le faire et qu'elle disposait en tout état de cause d'éléments suffisants pour émettre à tout le moins les réserves expresses d'usage en la matière ; qu'en statuant par ces motifs, impropres à caractériser la volonté non équivoque de la compagnie AXA FRANCE IARD de renoncer à se prévaloir de l'exclusion de garantie résultant du caractère intentionnel du sinistre litigieux, la cour d'appel a violé l'article L. 113-1 du code des assurances, ensemble l'article 1134 (devenu 1103) du code civil ;
2°) ALORS QUE la renonciation de l'assureur à invoquer une cause de non-garantie ne peut résulter que d'un acte accompli alors qu'il avait connaissance des éléments de fait qui lui permettaient d'opposer un refus de garantie ; que pour déduire la renonciation de la compagnie AXA FRANCE IARD à se prévaloir de l'exclusion de garantie résultant du caractère intentionnel du sinistre litigieux, la cour d'appel a retenu que cet assureur n'avait pas émis de réserve, ni donné instruction de cesser ses investigations au cabinet [...] qu'il avait missionné pour estimer la valeur vénale des biens détruits, alors qu'il avait eu communication des lettres écrites par Monsieur A... aux termes desquelles celui-ci indiquait être à l'origine des incendies litigieux ; qu'en statuant de la sorte, quand la seule existence des lettres attribuées à Monsieur A... dans lesquelles il indiquait être l'auteur des incendies ayant détruit les biens assurés, alors même que l'enquête de gendarmerie était encore en cours, ne permettait pas de caractériser la connaissance certaine que l'assureur avait de ce que l'incendie litigieux avait effectivement été causé par Monsieur A..., la cour d'appel a statué par des motifs impropres à établir la renonciation sans équivoque de l'assureur à se prévaloir de l'exclusion de garantie résultant du caractère intentionnel du sinistre litigieux, violant encore l'article L. 113-1 du code des assurances, ensemble l'article 1134 (devenu 1103) du code civil.ECLI:FR:CCASS:2020:C200272
CIV. 2
MF
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 5 mars 2020
Cassation
M. PIREYRE, président
Arrêt n° 272 F-D
Pourvoi n° R 19-10.371
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 5 MARS 2020
La société Axa France IARD, société anonyme, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° R 19-10.371 contre l'arrêt (n° RG : 17/01694) rendu le 6 novembre 2018 par la cour d'appel de Besançon (1re chambre civile et commerciale), dans le litige l'opposant à Mme C... D..., domiciliée [...] , défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Guého, conseiller référendaire, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Axa France IARD, de Me Balat, avocat de Mme D..., et l'avis de Mme Nicolétis, avocat général, après débats en l'audience publique du 29 janvier 2020 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Guého, conseiller référendaire rapporteur, Mme Gelbard-Le Dauphin, conseiller doyen, et Mme Cos, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Besançon, 6 novembre 2018), Mme D... et son compagnon, G... A..., étaient propriétaires indivis d'une maison d'habitation, d'un bâtiment affecté à l'exploitation d'un garage et d'un véhicule automobile, assurés auprès de la société Axa France IARD (l'assureur).
2. Ces biens ont été détruits par des incendies le 28 octobre 2012.
3. L'assureur ayant opposé le 12 juin 2013 à Mme D... un refus de garantie en invoquant la faute intentionnelle de G... A..., disparu dans l'incendie de la maison et déclaré judiciairement décédé le 28 octobre 2012, celle-ci l'a assigné le 24 mars 2014 en exécution des contrats.
Examen du moyen
Sur le moyen unique, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
4. L'assureur fait grief à l'arrêt de le condamner à garantir Mme D... des dommages résultant pour elle du sinistre intervenu le 28 octobre 2012 et ayant atteint une maison à usage d'habitation à Bonnetage, [...] , un bâtiment d'exploitation d'activité de garage situé à Le Russey, un véhicule de marque Subaru immatriculé BL 209 XZ, et d'ordonner une expertise afin d'évaluer les préjudices subis par Mme D..., alors « que la renonciation à un droit ne se présume pas, et ne peut résulter que d'actes manifestant de façon claire et non équivoque la volonté de renoncer ; que le fait pour l'assureur d'avoir laissé se poursuivre les opérations d'expertise amiable, engagées avant qu'il ait eu connaissance de la cause de non garantie, destinées à déterminer les causes du sinistre et à évaluer les biens endommagés, ne peut à lui seul caractériser la volonté non équivoque de l'assureur de renoncer à se prévaloir de l'exclusion légale de garantie résultant du caractère intentionnel du sinistre ; que pour dire que la garantie de la société Axa France IARD était due, la cour d'appel a retenu qu'alors que l'agent général de cette compagnie avait eu connaissance dès le 30 octobre 2012 des lettres dans lesquelles M. A... déclarait être l'auteur du sinistre, la société Axa France IARD n'avait opposé l'exclusion de garantie qu'aux termes d'une lettre du 12 juin 2013, sans avoir émis de réserve sur sa garantie ni donné instruction au cabinet [...], qu'elle avait missionné, d'interrompre ses opérations d'expertise ; qu'elle a également énoncé que le 10 avril 2013, le cabinet [...] avait adressé l'étude de valeur vénale des bâtiments sinistrés et invitait son confrère à confirmer son accord avant une transmission de l'étude à la compagnie Axa France IARD, et que cette dernière ne pouvait soutenir que la poursuite de l'enquête pénale ne lui permettait pas de s'opposer à la prise en charge du sinistre, dès lors qu'elle n'avait pas attendu l'issue de celle-ci pour le faire et qu'elle disposait en tout état de cause d'éléments suffisants pour émettre à tout le moins les réserves expresses d'usage en la matière ; qu'en statuant par ces motifs, impropres à caractériser la volonté non équivoque de la compagnie Axa France IARD de renoncer à se prévaloir de l'exclusion de garantie résultant du caractère intentionnel du sinistre litigieux, la cour d'appel a violé l'article L. 113-1 du code des assurances, ensemble l'article 1134 (devenu 1103) du code civil.»
Réponse de la Cour
Vu l'article L. 113-1 du code des assurances et l'article 1103 du code civil :
5. La renonciation à un droit ne se présume pas et ne peut résulter que d'actes de son titulaire manifestant sans équivoque la volonté de renoncer.
6. Pour condamner l'assureur à garantir Mme D... de ses dommages résultant des incendies survenus le 28 octobre 2012, l' arrêt relève, par motifs propres et adoptés, qu'alors qu'au cours de son audition par la Gendarmerie, le 30 octobre 2012, avait été remise à l'agent général de l'assureur une lettre de G... A..., écrite à son attention et dont l'authenticité lui avait été confirmée sans délai, par laquelle celui-ci reconnaissait être l'auteur des trois incendies, l'assureur n'a opposé à Mme D... l'exclusion de garantie que le 12 juin 2013, sans avoir auparavant émis la moindre réserve sur sa garantie, ni donné instruction au cabinet d'expertise qu'il avait missionné afin, notamment, d'évaluer les biens sinistrés, d'interrompre ses opérations. Il constate encore que cet expert a communiqué à son confrère l'étude de valeur vénale des bâtiments sinistrés en l'invitant à confirmer son accord avant la transmission de cette étude à l'assureur, et énonce que ce dernier ne peut sérieusement soutenir que la poursuite de l'enquête pénale ne lui permettait pas de s'opposer à la prise en charge du sinistre alors même qu'il n'a pas attendu l'issue de celle-ci pour le faire et qu'il disposait d'éléments suffisants pour émettre à tout le moins les réserves expresses d'usage en la matière.
7. L'arrêt retient qu'il en ressort qu'en poursuivant les opérations d'expertise qu'il avait diligentées pour évaluer les biens sinistrés de son assuré, en parfaite connaissance de l'imputabilité des trois sinistres à ce dernier, l'assureur a renoncé implicitement mais sans équivoque à se prévaloir de l'exclusion légale de garantie prévue par l'article L. 113-1, alinéa 2, du code des assurances.
8. En statuant ainsi, par des motifs impropres à caractériser la renonciation non équivoque de l'assureur à se prévaloir de l'exclusion légale de garantie résultant de la faute intentionnelle de G... A..., dès lors que le fait de poursuivre les opérations d'une expertise amiable afin de déterminer l'étendue des dommages résultant d'un sinistre n'implique pas, à lui seul, la volonté de renoncer à invoquer une telle exclusion, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du moyen, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 6 novembre 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Besançon ;
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Dijon ;
Condamne Mme D... aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du cinq mars deux mille vingt.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat aux Conseils, pour la société Axa France IARD
Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR condamné la société AXA FRANCE IARD à garantir Madame C... D... des dommages résultant pour elle du sinistre intervenu le 28 octobre 2012 et ayant atteint une maison à usage d'habitation à BONNETAGE, [...] , un bâtiment d'exploitation d'activité de garage situé à [...], un véhicule de marque SUBARU immatriculé [...], et D'AVOIR ordonné une expertise afin d'évaluer les préjudices subis par Madame C... D... ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE « Sur l'exclusion de garantie, Attendu qu'en vertu de l'article L.113-1 alinéa 2 du code des assurances, l'assureur ne répond pas des dommages provenant d'une faute intentionnelle ou dolosive de son assuré et ce, à l'égard de tous ; Attendu qu'en l'espèce il ressort des pièces communiquées que M. G... A... avait assuré à titre personnel la maison d'habitation, constituant la résidence du couple qu'il formait avec Mme C... D..., sise à [...], contre le risque incendie auprès de la SA AXA par un contrat souscrit le 1er septembre 2007 ; qu'il avait en outre, ès qualités de gérant de l'EURL MECATECH, assuré auprès de la même compagnie un bâtiment affecté à l'exploitation d'un garage situé au Russey ainsi qu'un véhicule automobile professionnel, suivant contrat en date du 28 juin 2012 ; Attendu qu'il résulte à suffisance de l'enquête de gendarmerie, versée aux débats, que M. G... A... est l'auteur de l'incendie survenu à Bonnétage et au Russey le 28 octobre 2012 ; que l'intéressé a en effet laissé à dessein des lettres manuscrites adressées tant à sa compagne, qu'à des proches, qui ont identifié son écriture, et même à son assureur afin de se désigner comme l'auteur des mises à feu, lesdites missives établissant le caractère conscient et réfléchi de l'acte commis par l'intéressé, dont il a été jugé par décision du tribunal de grande instance de Montbéliard du 28 avril 2014 qu'il avait lui-même péri dans le sinistre ; Qu'il résulte de ce qui précède que l'exclusion légale de garantie a vocation à s'appliquer en l'espèce ; Attendu que Mme C... D... soutient que la SA AXA a, implicitement mais incontestablement, renoncé à se prévaloir de cette cause d'exclusion de garantie, dans la mesure où son agent général a eu connaissance le 30 octobre 2012 de la lettre émanant de M. G... A... se déclarant auteur de l'incendie, soit deux jours seulement après les sinistres, et que l'assureur n'a pas pour autant émis la moindre réserve ni opposé la déchéance de la garantie avant le 12 juin 2013, après avoir pris en charge en février 2013 le coût d'un déblaiement, constituant une indemnisation partielle, et désigné son expert, le cabinet [...], qui lui a proposé le 10 avril 2013 une indemnisation sur la base de la valeur vénale des biens sinistrés ; Que la SA AXA objecte, pour contester toute renonciation de sa part par un acte non équivoque, que la désignation d'un expert immédiatement après un sinistre, alors que les circonstances étaient encore inconnues, est un acte conservatoire habituel qui ne peut s'assimiler à une quelconque intention de renoncer à une déchéance de garantie ; qu'elle poursuit en expliquant que, de la même manière, l'accord de principe au lendemain du sinistre consistant à prendre en charge le coût d'un déblaiement des gravats, requis par la gendarmerie pour tenter de retrouver le corps de M. G... A... dans les décombres, ne peut davantage s'analyser en un acte de renonciation non équivoque, compte tenu de l'urgence et de l'ignorance à cette date de l'existence des lettres laissées par son assuré ; Attendu que l'enquête de Gendarmerie permet de relever que M. K... I..., assureur des biens sinistrés a été auditionné le 30 octobre 2012 de 9 heures 05 à 9 heures 55, soit deux jours seulement après le sinistre et qu'il lui a été remis à cette occasion une lettre que M. G... A... avait laissée à son attention se dénonçant comme étant l'auteur des trois sinistres et demandant à ne pas être dédommagé ; que si la personne entendue n'a pas été en mesure, le jour même, d'identifier l'écriture de M. G... A... faute de la connaître, il précise en revanche aux enquêteurs que sa compagnie d'assurance a fait appel à la SARL du Lomont afin de procéder au dégagement des décombres sur les lieux de sinistre de Bonnétage et du Russey et que ces fiais sont pris en charge par l'assurance (facture n° 8128 du 10 décembre 2012) ; Attendu qu'en premier lieu, il doit être considéré à la suite du premier juge que le recours à cette SARL du Lomont étant antérieur au 30 octobre 2012 et à la connaissance portée à l'agent de la SA AXA de la vraisemblable faute intentionnelle de l'assuré, il ne saurait être tiré de ce premier acte positif la preuve d'une renonciation à se prévaloir de la déchéance de garantie ; Qu'en revanche, alors que l'agent d'assurance a eu connaissance dès le 30 octobre 2012 de cette information particulièrement précise, et dont il a pu sans délai se voir confirmer par les enquêteurs ou les proches de l'assuré l'authenticité de la lettre qui lui avait été adressée par l'assuré, la SA AXA n'a opposé l'exclusion de garantie à Mme C... D... qu'aux termes d'une lettre recommandée avec avis de réception du 12 juin 2013 sans avoir émis entre le 30 octobre 2012 et cette date la moindre réserve sur sa garantie ni donné instruction au cabinet [...], qu'elle avait missionné, d'interrompre ses opérations d'expertise ; qu'à la date du 10 avril 2013, M. R... Q... du cabinet d'expertise L... adressait encore, dans le prolongement de récents entretiens, l'étude de valeur vénale des bâtiments sinistrés et invitait son confrère à confirmer son accord avant une transmission de l'étude à la compagnie d'assurance AXA ; qu'enfin, celle-ci ne peut sérieusement soutenir que la poursuite de l'enquête pénale ne lui permettait pas de s'opposer à la prise en charge alors même qu'elle n'a pas attendu l'issue de celle-ci pour le faire et qu'elle disposait en tout état de cause d'éléments suffisants pour émettre à tout le moins les réserves expresses d'usage en la matière ; Attendu qu'il résulte des développements qui précèdent qu'en poursuivant les opérations d'expertise qu'elle avait diligentés pour évaluer les biens sinistrés de son assuré, en connaissance de l'imputabilité des trois sinistres à ce dernier, la SA AXA a renoncé implicitement mais sans équivoque à se prévaloir de la déchéance légale de garantie prévue par le texte susvisé ; Que le jugement déféré, qui a ainsi statué et a condamné l'assureur à garantir Mme C... D... et à l'indemniser de son préjudice, avant d'ordonner une mesure d'expertise, sera confirmé de ces chefs » ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES DES PREMIERS JUGES QUE « Sur la renonciation à déchéance : Conformément aux dispositions de l'article L. 113-1 du code des assurances alinéa 2, que l'assureur ne répond pas des pertes et dommages provenant d'une faute intentionnelle ou dolosive de l'assuré. Toutefois, l'assureur peut renoncer, expressément ou implicitement, à se prévaloir de l'exception de non-garantie résultant de la faute intentionnelle ou dolosive de l'assuré. La renonciation implicite doit, afin d'être établie, résulter d'actes non équivoques de l'assureur. En l'espèce, Madame D... soutient que la compagnie AXA aurait implicitement renoncé à se prévaloir de la déchéance de garantie, dès lors qu'elle aurait désigné un expert afin de réaliser une étude des valeurs vénales des biens sinistrés et d'autre part, qu'elle aurait pris en charge des frais de déblaiement des lieux pour un montant de 8 372,00 euros TTC, ce qui constituerait une avance sur les droits de l'assuré. Madame D... soutient que ces actes constitueraient des actes non équivoques de renonciation à déchéance. Toutefois, aucun élément ne permet d'établir que lors de la prise en charge des frais de déblaiement, la compagnie AXA FRANCE IARD était informée des causes du sinistre. En effet, l'audition de Monsieur I..., agent d'assurance de Monsieur A..., réalisée le 30 octobre 2012 par les gendarmes de F... démontre que ces frais ont immédiatement été engagés alors que ce n'est qu'au jour de cette audition que Monsieur I... s'est vu remettre un courrier établi par Monsieur A... dans lequel il indiquait être l'auteur des incendies suite à sa séparation. Toutefois, dès le 30 octobre 2012, et compte tenu de la remise de ce courrier à Monsieur I..., la compagnie AXA FRANCE IARD était informée de l'origine du sinistre ou à tout le moins en mesure d'émettre des réserves. Or, la compagnie d'assurance a, sans jamais émettre la moindre réserve sur sa garantie, réalisé des mesures d'expertise afin notamment de faire évaluer les biens et donc les droits de Madame D.... Par ailleurs, si la compagnie d'assurance soutient que l'enquête pénale a duré plusieurs mois, l'empêchant ainsi de s'opposer à la prise en charge, il résulte des débats, d'une part, que contrairement à ce qu'elle affirme elle n'a pas attendu le résultat de cette enquête pour opposer son refus de garantie, mais qu'au surplus, elle n'a durant, près de huit mois et alors qu'elle avait eu connaissance des causes probables du sinistre, jamais émis la moindre réserve sur sa garantie tout en poursuivant ses opérations d'expertise. Dès lors, il doit être considérer que la compagnie AXA FRANCE IARD a implicitement renoncé à se prévaloir de sa déchéance de garantie et qu'il y a lieu de la condamner à garantir Madame D... » ;
1°) ALORS QUE la renonciation à un droit ne se présume pas, et ne peut résulter que d'actes manifestant de façon claire et non équivoque la volonté de renoncer ; que le fait pour l'assureur d'avoir laissé se poursuivre les opérations d'expertise amiable, engagées avant qu'il ait eu connaissance de la cause de non-garantie, destinées à déterminer les causes du sinistre et à évaluer les biens endommagés, ne peut à lui seul caractériser la volonté non équivoque de l'assureur de renoncer à se prévaloir de l'exclusion légale de garantie résultant du caractère intentionnel du sinistre ; que pour dire que la garantie de la société AXA FRANCE IARD était due, la cour d'appel a retenu qu'alors que l'agent général de cette compagnie avait eu connaissance dès le 30 octobre 2012 des lettres dans lesquelles Monsieur A... déclarait être l'auteur du sinistre, la société AXA FRANCE IARD n'avait opposé l'exclusion de garantie qu'aux termes d'une lettre du 12 juin 2013, sans avoir émis de réserve sur sa garantie ni donné instruction au cabinet [...], qu'elle avait missionné, d'interrompre ses opérations d'expertise ; qu'elle a également énoncé que le 10 avril 2013, le cabinet [...] avait adressé l'étude de valeur vénale des bâtiments sinistrés et invitait son confrère à confirmer son accord avant une transmission de l'étude à la compagnie AXA FRANCE IARD, et que cette dernière ne pouvait soutenir que la poursuite de l'enquête pénale ne lui permettait pas de s'opposer à la prise en charge du sinistre, dès lors qu'elle n'avait pas attendu l'issue de celle-ci pour le faire et qu'elle disposait en tout état de cause d'éléments suffisants pour émettre à tout le moins les réserves expresses d'usage en la matière ; qu'en statuant par ces motifs, impropres à caractériser la volonté non équivoque de la compagnie AXA FRANCE IARD de renoncer à se prévaloir de l'exclusion de garantie résultant du caractère intentionnel du sinistre litigieux, la cour d'appel a violé l'article L. 113-1 du code des assurances, ensemble l'article 1134 (devenu 1103) du code civil ;
2°) ALORS QUE la renonciation de l'assureur à invoquer une cause de non-garantie ne peut résulter que d'un acte accompli alors qu'il avait connaissance des éléments de fait qui lui permettaient d'opposer un refus de garantie ; que pour déduire la renonciation de la compagnie AXA FRANCE IARD à se prévaloir de l'exclusion de garantie résultant du caractère intentionnel du sinistre litigieux, la cour d'appel a retenu que cet assureur n'avait pas émis de réserve, ni donné instruction de cesser ses investigations au cabinet [...] qu'il avait missionné pour estimer la valeur vénale des biens détruits, alors qu'il avait eu communication des lettres écrites par Monsieur A... aux termes desquelles celui-ci indiquait être à l'origine des incendies litigieux ; qu'en statuant de la sorte, quand la seule existence des lettres attribuées à Monsieur A... dans lesquelles il indiquait être l'auteur des incendies ayant détruit les biens assurés, alors même que l'enquête de gendarmerie était encore en cours, ne permettait pas de caractériser la connaissance certaine que l'assureur avait de ce que l'incendie litigieux avait effectivement été causé par Monsieur A..., la cour d'appel a statué par des motifs impropres à établir la renonciation sans équivoque de l'assureur à se prévaloir de l'exclusion de garantie résultant du caractère intentionnel du sinistre litigieux, violant encore l'article L. 113-1 du code des assurances, ensemble l'article 1134 (devenu 1103) du code civil.