Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 26 février 2020, 18-21.117, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


COMM.

MY1



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 26 février 2020




Pourvoi sans objet


Mme MOUILLARD, président



Arrêt n° 139 F-D

Pourvoi n° A 18-21.117








R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 26 FÉVRIER 2020

La société XPO distribution France, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° A 18-21.117 contre l'arrêt rendu le 5 avril 2018 par la cour d'appel de Lyon (3e chambre A), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société Loire Offset Titoulet, dont le siège est [...] ,

2°/ à la société AJ UP, en la personne de M. L... J..., dont le siège est [...] , prise en qualité d'administrateur judiciaire et de commissaire à l'exécution du plan de redressement de la société Loire Offset Titoulet ,

3°/ à la société MJ Synergie, en la personne de M. S... X..., société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [...] , prise en qualité de mandataire judiciaire de la société Loire Offset Titoulet,

4°/ à l'UNEDIC délégation AGS-CGEA de Chalon-sur-Saône, dont le siège est [...] ,

défenderesses à la cassation.

La société Loire Offset Titoulet et la société AJ UP, ès qualités, ont formé un pourvoi incident ;

La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

Les demanderesses au pourvoi incident invoquent, à l'appui de leur recours, trois moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Barbot, conseiller référendaire, les observations de la SCP Gaschignard, avocat de la société XPO distribution France, de la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat de la société MJ Synergie, ès qualités, de la SCP Delamarre et Jehannin, avocat de la société Loire Offset Titoulet et de la société AJ UP, ès qualités, après débats en l'audience publique du 7 janvier 2020 où étaient présents Mme Mouillard, président, Mme Barbot, conseiller référendaire rapporteur, M. Rémery, conseiller doyen, et Mme Labat, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Statuant tant sur le pourvoi principal formé par la société XPO distribution France que sur le pourvoi incident relevé par la société Loire Offset Titoulet et la société AJ UP, en qualité d'administrateur judiciaire de la société Loire Offset Titoulet ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 5 avril 2018), que le 17 février 2016, la société Loire Offset Titoulet a été mise en redressement judiciaire, la société AJ Partenaires, devenue la société AJ UP, étant désignée en qualité d'administrateur judiciaire et la société MJ Synergie, en qualité de mandataire judiciaire ; que la société XPO distribution France (la société XPO) a déclaré une créance à concurrence de la somme de 222 358,71 euros correspondant à des prestations de transport effectuées au profit de la société débitrice ; que l'administrateur judiciaire a présenté au juge-commissaire une requête, en application de l'article L. 622-7 II du code de commerce, afin d'être autorisé à signer une transaction prévoyant le paiement, en cinq mensualités égales, de la créance déclarée par la société XPO, représentant 95 % du montant des créances antérieures au jugement d'ouverture, contre la renonciation, par la société XPO, à se prévaloir des dispositions de l'article L. 132-8 du code de commerce, qui ouvre au transporteur une action directe en paiement contre le destinataire ; que le juge-commissaire ayant accueilli cette demande, un recours a été formé contre son ordonnance ; que le tribunal de commerce a dit que la société AJ Partenaires, en tant d'administrateur judiciaire, n'avait pas qualité pour agir seule, en lieu et place de la société débitrice, a annulé l'ordonnance du juge-commissaire, a dit n'y avoir lieu de se prononcer sur les conditions d'application de l'article L. 622-7 II précité et sur l'absence de concessions réciproques, et a rejeté les demandes de l'administrateur judiciaire et de la société débitrice ; que ces derniers, ainsi que la société XPO, ont formé appel du jugement du tribunal de commerce ; que les instances d'appel ont été jointes ; que la société AJ UP, nommée en qualité de commissaire à l'exécution du plan arrêté au profit de la société Loire Offset Titoulet, est intervenue volontairement à l'instance d'appel en cette qualité et en qualité d'administrateur judiciaire ;

Sur le pourvoi principal, après avertissement délivré aux parties :

Attendu que la société XPO fait grief à l'arrêt de refuser l'autorisation de transiger, un temps envisagée ;

Mais attendu que, postérieurement à la déclaration de pourvoi, un jugement du 9 janvier 2019 a mis la société débitrice Loire Offset Titoulet en liquidation judiciaire, après résolution de son plan, la société MJ Synergie étant nommée liquidateur ; qu'en vertu de l'article R. 661-1, alinéa 1er, du code de commerce, le jugement de liquidation judiciaire est revêtu de l'exécution provisoire de droit ; qu'en application de l'article L. 642-24 de ce code, seul le liquidateur peut transiger, avec l'autorisation du juge-commissaire ; qu'en l'espèce, la société MJ Synergie, liquidateur, s'oppose à la transaction envisagée avec la société XPO ; que le pourvoi principal de celle-ci est donc devenu sans objet ;

Et sur le pourvoi incident, après avertissement délivré aux parties :

Attendu que la société Loire Offset Tiboulet et l'administrateur judiciaire font le même grief à l'arrêt ;

Mais attendu que par un jugement du 9 janvier 2019, la société débitrice a été mise en liquidation judiciaire, après résolution de son plan, la société MJ Synergie étant nommée liquidateur ; que, d'abord, le jugement de liquidation judiciaire, revêtu de l'exécution provisoire de droit en vertu de l'article R. 661-1, alinéa 1er, du code de commerce, a pour conséquence de faire perdre à l'administrateur judiciaire sa qualité pour demander l'autorisation de transiger, conjointement avec le débiteur, en application de l'article L. 622-7 II du code de commerce ; qu'ensuite, en application de l'article L. 641-9 de ce code, la liquidation judiciaire entraîne le dessaisissement de la société débitrice Loire Offset Titoulet, laquelle ne peut se prévaloir d'un droit propre à demander l'autorisation de transiger, à plus forte raison seule ; que le pourvoi incident est donc devenu sans objet ;

PAR CES MOTIFS, la Cour :

DIT n'y avoir lieu de statuer sur les pourvois principal et incident ;

Condamne la société XPO distribution France, la société Loire Offset Titoulet et la société AJ UP, en qualité d'administrateur judiciaire de la société Loire Offset Titoulet, aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six février deux mille vingt.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Gaschignard, avocat aux Conseils, pour la société XPO distribution France, demanderesse au pourvoi principal.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir, après avoir annulé l'ordonnance du juge-commissaire et déclaré irrecevable la demande d'autorisation présentée au juge-commissaire, statué au fond sur celle-ci et débouté tant la société AJ UP es qualité que la société Loire Offset Titoulet de leur demande tendant à l'autorisation de la transaction projetée,

AUX MOTIFS QUE sur la recevabilité de la requête, cette question de la recevabilité de la requête présentée au juge commissaire par le seul administrateur oblige à préciser préalablement le cadre juridique dans lequel cette requête a été présentée, et donc le fondement juridique de celle-ci ; que la requête présentée au juge commissaire par l'administrateur est fondée sur les dispositions de l'article L. 622-7 II, visant à l'autorisation d'une transaction avec le transporteur XPO qui dispose d'une créance antérieure, acte devant aboutir au paiement de 95% de cette créance (211 240 euros) sur 5 mois en contrepartie du renoncement de ce créancier à diligenter des actions fondées sur l'article L. 132-8 du code de commerce – action directe notamment à l'encontre des clients – ainsi qu'au paiement des 5% restants ; que le juge commissaire qui a autorisé cet acte par son ordonnance du 10 mai 2016 a fait une mauvaise application de la loi ; qu'en effet, une telle opération priverait la procédure collective d'un actif de plus de 211 000 euros, échappant ainsi au gage commun des créanciers, n'entre pas dans la « transaction » visée à L. 622-7-II, ce qui au demeurant, écarte la nécessité d'un avis du ministère public ; que le texte du premier alinéa du § II de l'article L. 622-7, visant les actes que peut autoriser le juge commissaire, ne comprend pas la transaction sur une créance antérieure qui est soumise au seule principe visé au § I du texte légal à savoir l'interdiction de paiement préférentiel de tout créancier antérieur, principe fondamental du droit des procédures collectives ; que cette interdiction de toute transaction relative à une créance antérieure est aussi confirmée in fine par le texte légal, visant l'impossibilité de tout pacte commissoire (« le jugement ouvrant la procédure
fait enfin obstacle à la conclusion et à la réalisation d'un acte commissoire ») ; que les seules dérogations au principe de l'interdiction de paiement des créance antérieure sont visées, expressément et sans possibilité d'interprétation extensive, par l'alinéa 2 du §II à savoir retrait ou retour de gage ou de biens, option d'achat d'un contrat de crédit-bail, et parfois encore, sous condition que ces actes soient justifiés par la poursuite de l'activité ; que la transaction litigieuse visée par la requête déposée par l'administrateur, à laquelle Loire Offset Titoulet croit pouvoir s'associer en vertu de l'effet dévolutif de l'opposition déposée devant le tribunal puis en appel soumis à la présente cour, est étrangère aux actes visés à l'article L. 622-7-II portant dérogation à la règle d'interdiction des paiements des créances antérieures ; qu'AJ Partenaires devenue AJ Up et Loire Offset Titoulet ne peuvent pas dans leurs écritures prétendre que « la requête sollicitait l'autorisation de transiger avec un transporteur et non de payer une quelconque créance antérieure » ce qui n'est pas sérieux, dès lors que le but affiché de la transaction était d'assurer en 5 mensualités consécutives le paiement de 95% de la créance de XPO ; que les appelants sont encore moins sérieux lorsqu'ils évoquent « l'opposition systématique d'un mandataire judiciaire à l'égard des ordonnances autorisant la conclusions de transactions » ce qui porterait « gravement atteinte » à l'exploitation », alors que ce mandataire en la personne de MJ Synergie soutient une action visant au respect de la règle de droit par l'administrateur judiciaire ; qu'il ne peut non plus être soutenu que ladite transaction comportait des concessions réciproques, dès lors que XPO bénéficiait d'un paiement préférentiel à hauteur de la quasi-totalité de sa créance soit 95 %, au lieu de voir sa créance faire partie d'un plan de continuation potentiel, de sorte que sa concession ne portait, même au visa d'une courte marge pour l'activité de transporteur, que sur une faible portion (5%) de sa créance (11 118,71 euros) et que l'étalement du paiement sur 5 mois n'est nullement significatif ; que surtout, il manque la preuve de l'existence de contestations nées ou à naître, fondement même de toute transaction, puisqu'en l'espèce, la créance du transporteur est liée à l'ouverture de la procédure collective et qu'ensuite, l'action directe qui lui est accordée par la loi repose sur un mécanisme légal justement créé pour faire face à de telles situations d'impayés, qu'il y ait ouverture ou non de procédure collective pour la société bénéficiaire des prestations de transport ; qu' ainsi, la volonté de l'administrateur d'éviter l'application de l'action de l'article L. 132-8, au motif prétendu de permettre la sauvegarde du fonds de commerce premier actif du gage commun des créanciers, n'a pu justifier la requête, ne pouvant pas éluder un principe directeur du droit des procédures collectives (interdiction du paiement préférentiel), sans compter qu'un tel renoncement avait pour objet une action hypothétique ; que quant à l'opportunité de la transaction au regard de la poursuite d'activité, elle n'est pas avérée en terme de nécessité pour assurer la poursuite de l'activité de Loire Offset Titoulet, ce qui est confirmé par le fait que, en l'absence même de transaction, justement refusée par le tribunal, Loire Offset Titoulet a été en mesure de présenter un plan de redressement ; qu'en tout cas, la transaction litigieuse ne pouvait pas être autorisée par le juge commissaire, étant exclue des actes dérogatoires pouvant lui être soumis et étant soumise au régime de plein droit des créances antérieures ; qu'en conséquence, la requête de l'administrateur judiciaire du 6 avril 2016, tout comme celle présentée conjointement par Loire Offset Titoulet d'abord devant le tribunal puis en cause d'appel est non fondée, eu égard au cadre juridique dans lequel elle était et est présentée ; qu'elle était en tout cas irrecevable devant le juge commissaire eu égard à l'absence de qualité à agir de celui qui l'a présentée ;

1° - ALORS QUE le juge qui constate que la demande dont il est saisi est irrecevable excède ses pouvoirs en statuant au fond ; qu'en statuant au fond sur les demandes tendant à ce que soit autorisée la transaction projetée, après avoir jugé que la requête tendant à cette autorisation était irrecevable, la cour d'appel a excédé ses pouvoirs et violé l'article 122 du code de procédure civile ;

2° - ALORS en tout état de cause QUE le juge commissaire peut autoriser une transaction portant règlement partiel d'une créance antérieure ; qu'en retenant, pour annuler l'ordonnance du juge commissaire du 10 mai 2016, qu'une transaction portant sur des créances antérieures ne fait pas partie des actes que peut autoriser le juge commissaire, qu'une telle transaction est exclue des actes dérogatoires pouvant lui être soumis, cependant que l'article L. 622-7–II du code de commerce prévoit expressément la possibilité pour le juge commissaire d'autoriser le débiteur à compromettre ou à transiger, sans distinguer entre les créances nées antérieurement ou postérieurement au jugement d'ouverture, la cour d'appel la violé le texte susvisé,

3° - ALORS QUE pour annuler l'ordonnance du juge commissaire du 10 mai 2016, l'arrêt retient que la transaction envisagée n'avait pas pour objet de mettre un terme à une contestation née ou à naître et ne comportait pas de concessions réciproques puisqu'elle emportait paiement de la 95 % de la créance de la société Loire Offset Titoulet et un étalement sur cinq mois du paiement, non significatif ; qu'en statuant ainsi après avoir constaté que la société XPO Distribution avait déclaré sa créance et était en mesure de mettre en oeuvre une procédure de paiement direct à l'égard des clients de la société Loire Offset Titoulet, à laquelle elle se disposait à renoncer, en même temps qu'elle renonçait à une fraction de sa créance et consentait à un paiement échelonné sur cinq mois, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article 2044 du Code civil,

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir annulé l'ordonnance du juge-commissaire et déclaré irrecevable la demande d'autorisation présentée au juge-commissaire,

AUX MOTIFS QUE (p. 3) par conclusions du 5 janvier 2018, la société Loire Offset Titoulet et la société AJ UP es qualité d'administrateur judiciaire de cette dernière ont sollicité
d'infirmer le jugement déféré et, statuant à nouveau, de confirmer l'ordonnance déférée en toutes ses dispositions ; que (p. 7 en bas), sur la qualité à agir de l'administrateur, il est constant que seule AJ Partenaires devenue AJ UP a présenté la requête au juge commissaire en vue d'autorisation de la transaction à conclure avec XPO ; qu' il est également constant que AJ Partenaires devenue AJ UP a été chargée d'une mission d'assistance de Loire Offset Titoulet , ce qui ne correspond ni à une mission de surveillance, ni à une mission de représentation ; qu'eu égard à cette mission d'assistance, en respect des dispositions de l'article L. 631-14 alinéa 3 in fine du code de commerce, applicable à la cause en combinaison avec l'article L. 622-7 précité, l'administrateur exerce les prérogatives conférées au débiteur « concurremment » avec ce dernier ; que ce terme « concurremment » ne revêt qu'une acception unique, insusceptible d'interprétation, exigeant le concours de l'administrateur et du débiteur, ne permettant pas un acte présenté par le seul administrateur ; que les appelants sont mal fondés à soutenir que la requête pouvait être présentée par le débiteur seul ou bien par l'administrateur seul, ce qui correspond à une acception juridiquement erronées du terme « concurremment » ; que l'article R. 631-19 du code de commerce, qui permet à l'administrateur seul de présenter une requête est inapplicable en l'espèce car cette disposition ne joue que dans l'hypothèse de l'autorisation des actes dérogatoires de l'article L. 622-7-II, dont la transaction litigieuse ne fait pas partie ainsi qu'il a été précédemment jugé ; qu'il importe peu que le débiteur, certes présent devant le juge commissaire, ait pu oralement donner un accord présumé à l'acte envisagé (la transaction), ce qui est d'ailleurs contesté par MJ Synergie et ce qui ne résulte pas des pièces du dossier, dès lors que la requête a été déposée par l'administrateur seul ; qu'il importe peu que la doctrine, telle que présentée inexactement par AJ UP et Loire Offset Titoulet, ait pu accepter un exercice par l'administrateur de certaines prérogatives du débiteur, ce qui n'est pas démontré s'agissant d'une transaction qui avait l'effet de contourner la règle de l'interdiction des paiement préférentiels à des créanciers antérieurs ; qu'il importe peu également que la transaction portée par l'administrateur ait été présentée comme favorisant la poursuite de l'activité de Loire Offset Titoulet, l'objet d'une requête ne pouvant pas la valider si elle fait échec à un principe d'ordre public ; que de ces éléments conjugués, est tirée la conclusion que l'administrateur judiciaire s'est érigé en représentant du débiteur, qualité quoi ne lui avait pas été conférée ; que par voie de conséquence eu égard au défaut de qualité de AJ Partenaires devenue AJ UP, la requête présentée au juge commissaire était irrecevable, enlevant à ce dernier tout pouvoir pour statuer sur la requête ;

1°- ALORS QUE l'administrateur judiciaire a le pouvoir de présenter, seul, une requête au juge commissaire, l'autorisant à transiger sur le paiement d'une créance antérieure ; que pour annuler l'ordonnance du juge commissaire, l'arrêt se borne à retenir que dans le cadre de sa mission d'assistance, l'administrateur exerce les prérogatives conférées au débiteur concurremment avec ce dernier, de sorte qu'il ne peut pas présenter un acte seul ; que l'arrêt relève encore que l'article R. 631-19 du code de commerce, qui permet à l'administrateur seul de présenter une requête n'est applicable qu'aux actes dérogatoires mentionnés à l'article L. 622-7-II du même code ; qu'en statuant ainsi, cependant que l'article L. 622-7-II du même code prévoit expressément la possibilité pour le juge commissaire d'autoriser une transaction, la cour d'appel a violé les articles L. 622-7-II, R. 631-19 et R. 622-6 du code de commerce,

2° - ALORS en tout état de cause QUE l'irrecevabilité pour défaut de qualité doit être écartée lorsque, avant toute forclusion, la personne ayant qualité pour agir devient partie à l'instance ; qu'en statuant comme ci-dessus tout en constatant que la société Loire Offset Titoulet, réputée avoir seule qualité pour présenter la demande d'autorisation, était partie à la procédure et concluait à la confirmation de l'ordonnance l'ayant autorisée à transiger avec la société XPO Distribution, la cour d'appel a violé l'article 122-6, al. 2 du code de procédure civile.
Moyens produits, par la SCP Delamarre et Jehannin, avocat aux Conseils, pour la sociétés Loire Offset Titoulet et la société AJ UP, ès qualités, demanderesses au pourvoi incident.

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement déféré en ce qu'il avait annulé l'ordonnance du juge-commissaire du 10 mai 2016 en toutes ses dispositions eu égard au défaut de qualité de AJ Partenaires, devenue AJ UP, pour agir ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE : « sur la qualité à agir de l'administrateur, il est constant que seule AJ Partenaires devenue AJ UP a présenté la requête au juge commissaire en vue d'autorisation de la transaction à conclure avec XPO ; qu' il est également constant que AJ Partenaires devenue AJ UP 7 a été chargée d'une mission d'assistance de Loire Offset Titoulet , ce qui ne correspond ni à une mission de surveillance, ni à une mission de représentation ; qu'eu égard à cette mission d'assistance, en respect des dispositions de l'article L. 631-14 alinéa 3 in fine du code de commerce, applicable à la cause en combinaison avec l'article L. 622-7 précité, l'administrateur exerce les prérogatives conférées au débiteur « concurremment » avec ce dernier ; que ce terme « concurremment » ne revêt qu'une acception unique, insusceptible d'interprétation, exigeant le concours de l'administrateur et du débiteur, ne permettant pas un acte présenté par le seul administrateur ; que les appelants sont mal fondés à soutenir que la requête pouvait être présentée par le débiteur seul ou bien par l'administrateur seul, ce qui correspond à une acception juridiquement erronées du terme « concurremment » ; que l'article R. 631-19 du code de commerce, qui permet à l'administrateur seul de présenter une requête est inapplicable en l'espèce car cette disposition ne joue que dans l'hypothèse de l'autorisation des actes dérogatoires de l'article L. 622-7-II, dont la transaction litigieuse ne fait pas partie ainsi qu'il a été précédemment jugé ; qu'il importe peu que le débiteur, certes présent devant le juge commissaire, ait pu oralement donner un accord présumé à l'acte envisagé (la transaction), ce qui est d'ailleurs contesté par MJ Synergie et ce qui ne résulte pas des pièces du dossier, dès lors que la requête a été déposée par l'administrateur seul ; qu'il importe peu que la doctrine, telle que présentée inexactement par AJ UP et Loire Offset Titoulet, ait pu accepter un exercice par l'administrateur de certaines prérogatives du débiteur, ce qui n'est pas démontré s'agissant d'une transaction qui avait l'effet de contourner la règle de l'interdiction des paiement préférentiels à des créanciers antérieurs ; qu'il importe peu également que la transaction portée par l'administrateur ait été présentée comme favorisant la poursuite de l'activité de Loire Offset Titoulet, l'objet d'une requête ne pouvant pas la valider si elle fait échec à un principe d'ordre public ; que de ces éléments conjugués, est tirée la conclusion que l'administrateur judiciaire s'est érigé en représentant du débiteur, qualité qui ne lui avait pas été conférée ; que par voie de conséquence eu égard au défaut de qualité de AJ Partenaires devenue AJ UP, la requête présentée au juge commissaire était irrecevable, enlevant à ce dernier tout pouvoir pour statuer sur la requête » ;

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE : « sur l'irrecevabilité de la requête présentée à M. le juge-commissaire par la Selarl AJ Partenaires représentée par Me J..., ès qualités d'administrateur judiciaire au redressement judiciaire de la société Loire Offset Titoulet : que dans un premier temps, la Selarl MJ Synergie, représentée par Me X..., ès qualités de mandataire judiciaire au redressement judiciaire de la société Loire Offset Titoulet, soutient que la Selarl AJ Partenaires, représentée par Me J..., ès qualités d'administrateur judiciaire au redressement judiciaire de la société Loire Offset Titoulet, n'avait pas la qualité pour agir seule dans le cadre d'une requête auprès de M. le juge-commissaire, sollicitant l'autorisation d'une transaction ; que la Selarl AJ Partenaires, représentée par Me J..., ès qualités d'administrateur judiciaire au redressement judiciaire de la société Loire Offset Titoulet et la société Loire Offset Titoulet répondent que la Selarl AJ Partenaires disposait de la qualité à saisir seule M. le juge-commissaire au double motif que : - d'une part, la Selarl AJ Partenaires exerce une mission d'assistance de sorte qu'elle exerce les droits conférés au débiteur concurremment avec ce dernier, - d'autre part, la demande a été faite dans l'intérêt du débiteur, celui-ci s'étant associé à la demande de la Selalr AJ Partenaires, de sorte que sa volonté ne saurait s'en dissocier ; que la société Xpo Distribution France soutient également que cette requête a été faite dans l'intérêt de la société Loire Offset Titoulet ; que cependant, il y a lieu de constater que : - l'art. L. 631-14 du code de commerce pose le principe selon lequel, dans l'hypothèse d'une mission d'assistance, l'administrateur exerce ses pouvoirs concurremment avec le débiteur, c'est-à-dire « de concert » et qu'en cas de représentation, ce même article prévoit que l'administrateur les exerce seul, - l'art. R. 622-6 du code de commerce, alinéa 2, dispose que « la demande d'autorisation portant sur un acte susceptible d'avoir une incidence déterminante sur l'issue de la procédure est formée par requête du débiteur et, s'il en a été nommé, de l'administrateur judiciaire sauf s'il n'a qu'une mission de surveillance » ; que pour déclarer recevable la requête contestée, nonobstant les art. L. 631-14 et R. 622-6 du code de commerce, M. le juge-commissaire dans son ordonnance n° 2016M1232 du 10.05.2016, motive cette recevabilité ainsi : « attendu cependant que la requête est présentée dans l'intérêt de la société débitrice de sorte qu'elle manifeste sa volonté de s'associer conjointement ou concurremment à la demande de l'administrateur judiciaire investi d'une mission d'assistance » ; qu'il n'apparaît nullement que la société Loire Offset Titoulet ait manifesté d'une manière ou d'une autre sa volonté de s'associer à la requête déposée par l'administrateur judiciaire seul ; que la motivation de M. le juge-commissaire paraît relever d'une interprétation extensive et non objective des art. L. 631-14 et R. 622-6 du code de commerce ; que ces textes sont d'application stricte et ne laissent pas place à interprétation ; que le tribunal dira que : - les demandes de la Selarl MJ Synergie, représentée par Me X..., ès qualités de mandataire judiciaire au redressement judiciaire de la société Loire Offset Titoulet, sont recevables et fondées, - que la Selarl AJ Partenaires, représentée par Me J..., ès qualités d'administrateur judiciaire au redressement judiciaire de la société Loire Offset Titoulet, ne disposait pas de la qualité pour agir seul aux lieu et place de la société Loire Offset Titoulet pour soutenir une telle requête et annulera pour ce motif l'ordonnance rendue par M. le juge-commissaire le 10. 5.2016 » ;

1/ ALORS QUE lorsque l'administrateur a une mission d'assistance, il peut, concurremment avec le débiteur, solliciter du juge-commissaire l'autorisation de transiger ; qu'il en résulte qu'il peut, soit seul, soit conjointement avec le débiteur, présenter une requête aux fins d'autorisation ; qu'en retenant au contraire que le terme « concurremment » impliquerait que soit exigé « le concours de l'administrateur et du débiteur, ne permettant pas un acte présenté par le seul administrateur » (arrêt, p. 8, alinéa 4), la cour d'appel a violé les articles L. 631-14 et L. 622-7 du code de commerce ;

2/ ALORS QUE lorsque la requête sollicitant l'autorisation de transiger est présentée par l'administrateur, le greffier convoque le débiteur, le mandataire judiciaire, et les créanciers privilégiés, et, sur demande du juge-commissaire, recueille l'avis du ministère public lorsque l'acte est susceptible d'avoir une incidente déterminante sur l'issue de la procédure ; qu'il en résulte nécessairement que l'administrateur est autorisé à former seul une requête aux fins d'autorisation, le débiteur devant uniquement être convoqué par le greffier ; qu'en retenant pourtant que « l'article R. 631-19 du code de commerce, qui permet à l'administrateur seul de présenter une requête est inapplicable car cette disposition ne joue que dans l'hypothèse de l'autorisation des actes dérogatoires de l'article L. 622-7, II, dont la transaction litigieuse ne fait pas partie ainsi qu'il a été précédemment jugé » (arrêt, p. 8, alinéa 6), la cour d'appel a violé, par refus d'application, les articles L. 622-7, R. 622-6 et R. 631-9 du code de commerce ;

3/ ALORS QUE la qualité à agir n'est pas subordonnée à la démonstration du bien-fondé de l'action ; qu'en retenant que l'administrateur n'aurait pas eu qualité à solliciter l'autorisation de conclure la transaction litigieuse au prétexte que celle-ci aurait eu « pour effet de contourner la règle de l'interdiction des paiements préférentiels à des créanciers antérieurs » et que « l'objet d'une requête ne pouvait la valider si elle fait échec à un principe d'ordre public » (arrêt, p. 8, alinéas 8 et 9), la cour d'appel a violé les articles 31 et 122 du code de procédure civile ;

4/ ALORS ET EN TOUT ETAT DE CAUSE QUE l'irrecevabilité est écartée lorsque, avant toute forclusion, la personne ayant qualité pour agir devient partie à l'instance ; qu'en l'espèce, et à supposer même que l'administrateur n'ait pu seul présenter une requête, les exposantes soulignaient justement que la société Loire Offset Titoulet, débitrice, avait été convoquée et été présente à l'audience, de sorte qu'elle était devenue partie avant toute forclusion ; qu'en retenant pourtant que cette circonstance « importe peu » dans la mesure où « la requête a été déposée par l'administrateur seul » (arrêt, p. 8, alinéa 7), la cour d'appel a violé, par refus d'application, l'article 126 du code de procédure civile.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement déféré en ce qu'il avait annulé l'ordonnance du juge-commissaire du 10 mai 2016 en toutes ses dispositions eu égard au défaut de qualité de AJ Partenaires, devenue AJ UP, pour agir et d'avoir débouté la société AJ Partenaires, devenue AJ UP, ès qualités d'administrateur judiciaire de la société Loire Offset Titoulet, ainsi que la société Loire Offset Titoulet, de toutes leurs demandes ;

AUX MOTIFS QUE : « sur la recevabilité de la requête, cette question de la recevabilité de la requête présentée au juge commissaire par le seul administrateur oblige à préciser préalablement le cadre juridique dans lequel cette requête a été présentée, et donc le fondement juridique de celle-ci ; que la requête présentée au juge commissaire par l'administrateur est fondée sur les dispositions de l'article L. 622- 7 II, visant à l'autorisation d'une transaction avec le transporteur XPO qui dispose d'une créance antérieure, acte devant aboutir au paiement de 95% de cette créance (211 240 euros) sur 5 mois en contrepartie du renoncement de ce créancier à diligenter des actions fondées sur l'article L. 132-8 du code de commerce – action directe notamment à l'encontre des clients – ainsi qu'au paiement des 5% restants ; que le juge commissaire qui a autorisé cet acte par son ordonnance du 10 mai 2016 a fait une mauvaise application de la loi ; qu'en effet, une telle opération priverait la procédure collective d'un actif de plus de 211 000 euros, échappant ainsi au gage commun des créanciers, n'entre pas dans la « transaction » visée à L. 622-7-II, ce qui au demeurant, écarte la nécessité d'un avis du ministère public ; que le texte du premier alinéa du § II de l'article L. 622-7, visant les actes que peut autoriser le juge commissaire, ne comprend pas la transaction sur une créance antérieure qui est soumise au seule principe visé au § I du texte légal à savoir l'interdiction de paiement préférentiel de tout créancier antérieur, principe fondamental du droit des procédures collectives ; que cette interdiction de toute transaction relative à une créance antérieure est aussi confirmée in fine par le texte légal, visant l'impossibilité de tout pacte commissoire (« le jugement ouvrant la procédure
fait enfin obstacle à la conclusion et à la réalisation d'un acte commissoire ») ; que les seules dérogations au principe de l'interdiction de paiement des créance antérieure sont visées, expressément et sans possibilité d'interprétation extensive, par l'alinéa 2 du §II à savoir retrait ou retour de gage ou de biens, option d'achat d'un contrat de crédit-bail, et parfois encore, sous condition que ces actes soient justifiés par la poursuite de l'activité ; que la transaction litigieuse visée par la requête déposée par l'administrateur, à laquelle Loire Offset Titoulet croit pouvoir s'associer en vertu de l'effet dévolutif de l'opposition déposée devant le tribunal puis en appel soumis à la présente cour, est étrangère aux actes visés à l'article L. 622-7-II portant dérogation à la règle d'interdiction des paiements des créances antérieures ; qu'AJ Partenaires devenue AJ Up et Loire Offset Titoulet ne peuvent pas dans leurs écritures prétendre que « la requête sollicitait l'autorisation de transiger avec un transporteur et non de payer une quelconque créance antérieure » ce qui n'est pas sérieux, dès lors que le but affiché de la transaction était d'assurer en 5 mensualités consécutives le paiement de 95% de la créance de XPO ; que les appelants sont encore moins sérieux lorsqu'ils évoquent « l'opposition systématique d'un mandataire judiciaire à l'égard des ordonnances autorisant la conclusions de transactions » ce qui porterait « gravement atteinte » à l'exploitation », alors que ce mandataire en la personne de MJ Synergie soutient une action visant au respect de la règle de droit par l'administrateur judiciaire ; qu'il ne peut non plus être soutenu que ladite transaction comportait des concessions réciproques, dès lors que XPO bénéficiait d'un paiement préférentiel à hauteur de la quasi-totalité de sa créance soit 95 %, au lieu de voir sa créance faire partie d'un plan de continuation potentiel, de sorte que sa concession ne portait, même au visa d'une courte marge pour l'activité de transporteur, que sur une faible portion (5%) de sa créance (11 118,71 euros) et que l'étalement du paiement sur 5 mois n'est nullement significatif ; que surtout, il manque la preuve de l'existence de contestations nées ou à naître, fondement même de toute transaction, puisqu'en l'espèce, la créance du transporteur est liée à l'ouverture de la procédure collective et qu'ensuite, l'action directe qui lui est accordée par la loi repose sur un mécanisme légal justement créé pour faire face à de telles situations d'impayés, qu'il y ait ouverture ou non de procédure collective pour la société bénéficiaire des prestations de transport ; qu' ainsi, la volonté de l'administrateur d'éviter l'application de l'action de l'article L. 132-8, au motif prétendu de permettre la sauvegarde du fonds de commerce premier actif du gage commun des créanciers, n'a pu justifier la requête, ne pouvant pas éluder un principe directeur du droit des procédures collectives (interdiction du paiement préférentiel), sans compter qu'un tel renoncement avait pour objet une action hypothétique ; que quant à l'opportunité de la transaction au regard de la poursuite d'activité, elle n'est pas avérée en terme de nécessité pour assurer la poursuite de l'activité de Loire Offset Titoulet, ce qui est confirmé par le fait que, en l'absence même de transaction, justement refusée par le tribunal, Loire Offset Titoulet a été en mesure de présenter un plan de redressement ; qu'en tout cas, la transaction litigieuse ne pouvait pas être autorisée par le juge commissaire, étant exclue des actes dérogatoires pouvant lui être soumis et étant soumise au régime de plein droit des créances antérieures ; qu'en conséquence, la requête de l'administrateur judiciaire du 6 avril 2016, tout comme celle présentée conjointement par Loire Offset Titoulet d'abord devant le tribunal puis en cause d'appel est non fondée, eu égard au cadre juridique dans lequel elle était et est présentée ; qu'elle était en tout cas irrecevable devant le juge commissaire eu égard à l'absence de qualité à agir de celui qui l'a présentée ; Sur la qualité à agir de l'administrateur, il est constant que seule AJ Partenaires devenue AJ UP a présenté la requête au juge commissaire en vue d'autorisation de la transaction à conclure avec XPO ; qu' il est également constant que AJ Partenaires devenue AJ UP a été chargée d'une mission d'assistance de Loire Offset Titoulet , ce qui ne correspond ni à une mission de surveillance, ni à une mission de représentation ; qu'eu égard à cette mission d'assistance, en respect des dispositions de l'article L. 631-14 alinéa 3 in fine du code de commerce, applicable à la cause en combinaison avec l'article L. 622-7 précité, l'administrateur exerce les prérogatives conférées au débiteur « concurremment » avec ce dernier ; que ce terme « concurremment » ne revêt qu'une acception unique, insusceptible d'interprétation, exigeant le concours de l'administrateur et du débiteur, ne permettant pas un acte présenté par le seul administrateur ; que les appelants sont mal fondés à soutenir que la requête pouvait être présentée par le débiteur seul ou bien par l'administrateur seul, ce qui correspond à une acception juridiquement erronées du terme « concurremment » ; que l'article R. 631-19 du code de commerce, qui permet à l'administrateur seul de présenter une requête est inapplicable en l'espèce car cette disposition ne joue que dans l'hypothèse de l'autorisation des actes dérogatoires de l'article L. 622-7-II, dont la transaction litigieuse ne fait pas partie ainsi qu'il a été précédemment jugé ; qu'il importe peu que le débiteur, certes présent devant le juge commissaire, ait pu oralement donner un accord présumé à l'acte envisagé (la transaction), ce qui est d'ailleurs contesté par MJ Synergie et ce qui ne résulte pas des pièces du dossier, dès lors que la requête a été déposée par l'administrateur seul ; qu'il importe peu que la doctrine, telle que présentée inexactement par AJ UP et Loire Offset Titoulet, ait pu accepter un exercice par l'administrateur de certaines prérogatives du débiteur, ce qui n'est pas démontré s'agissant d'une transaction qui avait l'effet de contourner la règle de l'interdiction des paiement préférentiels à des créanciers antérieurs ; qu'il importe peu également que la transaction portée par l'administrateur ait été présentée comme favorisant la poursuite de l'activité de Loire Offset Titoulet, l'objet d'une requête ne pouvant pas la valider si elle fait échec à un principe d'ordre public ; que de ces éléments conjugués, est tirée la conclusion que l'administrateur judiciaire s'est érigé en représentant du débiteur, qualité qui ne lui avait pas été conférée ; que par voie de conséquence eu égard au défaut de qualité de AJ Partenaires devenue AJ UP, la requête présentée au juge commissaire était irrecevable, enlevant à ce dernier tout pouvoir pour statuer sur la requête » ;

ALORS QU'excède ses pouvoirs, le juge qui, après avoir déclaré irrecevable la demande dont il est saisi, statue sur le fond ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a retenu que la requête de l'administrateur tendant à ce qu'il soit autorisé à conclure la transaction serait irrecevable ; qu'elle a toutefois considéré que ladite requête serait également non-fondée, excédant ainsi ses pouvoirs, en violation de l'article 122 du code de procédure civile.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté la société AJ Partenaires, devenue AJ UP, ès qualités d'administrateur judiciaire de la société Loire Offset Titoulet, ainsi que la société Loire Offset Titoulet, de toutes leurs demandes ;

AUX MOTIFS QUE : « sur la recevabilité de la requête, cette question de la recevabilité de la requête présentée au juge commissaire par le seul administrateur oblige à préciser préalablement le cadre juridique dans lequel cette requête a été présentée, et donc le fondement juridique de celle-ci ; que la requête présentée au juge commissaire par l'administrateur est fondée sur les dispositions de l'article L. 622- 7 II, visant à l'autorisation d'une transaction avec le transporteur XPO qui dispose d'une créance antérieure, acte devant aboutir au paiement de 95% de cette créance (211 240 euros) sur 5 mois en contrepartie du renoncement de ce créancier à diligenter des actions fondées sur l'article L. 132-8 du code de commerce – action directe notamment à l'encontre des clients – ainsi qu'au paiement des 5% restants ; que le juge commissaire qui a autorisé cet acte par son ordonnance du 10 mai 2016 a fait une mauvaise application de la loi ; qu'en effet, une telle opération priverait la procédure collective d'un actif de plus de 211 000 euros, échappant ainsi au gage commun des créanciers, n'entre pas dans la « transaction » visée à L. 622-7-II, ce qui au demeurant, écarte la nécessité d'un avis du ministère public ; que le texte du premier alinéa du § II de l'article L. 622-7, visant les actes que peut autoriser le juge commissaire, ne comprend pas la transaction sur une créance antérieure qui est soumise au seule principe visé au § I du texte légal à savoir l'interdiction de paiement préférentiel de tout créancier antérieur, principe fondamental du droit des procédures collectives ; que cette interdiction de toute transaction relative à une créance antérieure est aussi confirmée in fine par le texte légal, visant l'impossibilité de tout pacte commissoire (« le jugement ouvrant la procédure
fait enfin obstacle à la conclusion et à la réalisation d'un acte commissoire ») ; que les seules dérogations au principe de l'interdiction de paiement des créance antérieure sont visées, expressément et sans possibilité d'interprétation extensive, par l'alinéa 2 du §II à savoir retrait ou retour de gage ou de biens, option d'achat d'un contrat de crédit-bail, et parfois encore, sous condition que ces actes soient justifiés par la poursuite de l'activité ; que la transaction litigieuse visée par la requête déposée par l'administrateur, à laquelle Loire Offset Titoulet croit pouvoir s'associer en vertu de l'effet dévolutif de l'opposition déposée devant le tribunal puis en appel soumis à la présente cour, est étrangère aux actes visés à l'article L. 622-7-II portant dérogation à la règle d'interdiction des paiements des créances antérieures ; qu'AJ Partenaires devenue AJ Up et Loire Offset Titoulet ne peuvent pas dans leurs écritures prétendre que « la requête sollicitait l'autorisation de transiger avec un transporteur et non de payer une quelconque créance antérieure » ce qui n'est pas sérieux, dès lors que le but affiché de la transaction était d'assurer en 5 mensualités consécutives le paiement de 95% de la créance de XPO ; que les appelants sont encore moins sérieux lorsqu'ils évoquent « l'opposition systématique d'un mandataire judiciaire à l'égard des ordonnances autorisant la conclusions de transactions » ce qui porterait « gravement atteinte » à l'exploitation », alors que ce mandataire en la personne de MJ Synergie soutient une action visant au respect de la règle de droit par l'administrateur judiciaire ; qu'il ne peut non plus être soutenu que ladite transaction comportait des concessions réciproques, dès lors que XPO bénéficiait d'un paiement préférentiel à hauteur de la quasi-totalité de sa créance soit 95 %, au lieu de voir sa créance faire partie d'un plan de continuation potentiel, de sorte que sa concession ne portait, même au visa d'une courte marge pour l'activité de transporteur, que sur une faible portion (5%) de sa créance (11 118,71 euros) et que l'étalement du paiement sur 5 mois n'est nullement significatif ; que surtout, il manque la preuve de l'existence de contestations nées ou à naître, fondement même de toute transaction, puisqu'en l'espèce, la créance du transporteur est liée à l'ouverture de la procédure collective et qu'ensuite, l'action directe qui lui est accordée par la loi repose sur un mécanisme légal justement créé pour faire face à de telles situations d'impayés, qu'il y ait ouverture ou non de procédure collective pour la société bénéficiaire des prestations de transport ; qu' ainsi, la volonté de l'administrateur d'éviter l'application de l'action de l'article L. 132-8, au motif prétendu de permettre la sauvegarde du fonds de commerce premier actif du gage commun des créanciers, n'a pu justifier la requête, ne pouvant pas éluder un principe directeur du droit des procédures collectives (interdiction du paiement préférentiel), sans compter qu'un tel renoncement avait pour objet une action hypothétique ; que quant à l'opportunité de la transaction au regard de la poursuite d'activité, elle n'est pas avérée en terme de nécessité pour assurer la poursuite de l'activité de Loire Offset Titoulet, ce qui est confirmé par le fait que, en l'absence même de transaction, justement refusée par le tribunal, Loire Offset Titoulet a été en mesure de présenter un plan de redressement ; qu'en tout cas, la transaction litigieuse ne pouvait pas être autorisée par le juge commissaire, étant exclue des actes dérogatoires pouvant lui être soumis et étant soumise au régime de plein droit des créances antérieures ; qu'en conséquence, la requête de l'administrateur judiciaire du 6 avril 2016, tout comme celle présentée conjointement par Loire Offset Titoulet d'abord devant le tribunal puis en cause d'appel est non fondée, eu égard au cadre juridique dans lequel elle était et est présentée ; qu'elle était en tout cas irrecevable devant le juge commissaire eu égard à l'absence de qualité à agir de celui qui l'a présentée » ;

1/ ALORS QUE le juge-commissaire peut autoriser la conclusion d'une transaction portant règlement partiel d'une créance antérieure dès lors qu'elle favorise la poursuite de l'exploitation ; qu'en retenant pourtant que le juge-commissaire ne pourrait autoriser une transaction sur une créance antérieure qui serait soumise à « l'interdiction de paiement préférentiel de tout créancier antérieur, principe fondamental du droit des procédures collectives » (arrêt, p. 6, pénultième alinéa), la cour d'appel a violé l'article L. 622-7 du code de commerce ;

2/ ALORS QUE le juge-commissaire peut autoriser la conclusion d'une transaction portant règlement partiel d'une créance antérieure dès lors qu'elle favorise la poursuite de l'exploitation ; qu'en revanche, il n'est nullement requis que la conclusion de la transaction soit une condition sine qua non de la poursuite de l'activité ; que pour juger non-fondée la décision d'autorisation du juge-commissaire, la cour d'appel a retenu que « quant à l'opportunité de la transaction au regard de la poursuite d'activité, elle n'est pas avérée en termes de nécessité pour assurer la poursuite de l'activité de Loire Offset Titoulet, ce qui est confirmé par le fait que, en l'absence même de transaction, justement refusée par le tribunal, Loire Offset Titoulet a été en mesure de présenter un plan de redressement » (arrêt, p. 7, alinéa 8) ; qu'en subordonnant ainsi la conclusion de la transaction à son caractère nécessaire à la poursuite de l'activité, quand son utilité est suffisante, la cour d'appel a violé l'article L. 622-7 du code de commerce ;

3/ ALORS QUE constitue une transaction l'accord conclu en vue de mettre un terme à une contestation née ou à naître et par lequel les parties se consentent des concessions réciproques, quelle que soit leur importance relative ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que la transaction litigieuse emportait paiement de 95 % seulement de la créance de la société Xpo Distribution, avec un étalement de cinq mois, et renonciation du transporteur au bénéfice de l'action directe en paiement contre les clients ;

qu'en retenant pourtant qu'il ne pourrait être soutenu que la transaction litigieuse « comportait des concessions réciproques » (arrêt, p. 5, alinéa 7), la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, en violation de l'article 2044 du code civil ;

4/ ALORS QUE constitue une transaction l'accord par lequel les parties préviennent une contestation à naître, l'une des parties renonçant à une action dont elle est titulaire mais qu'elle n'a pas encore exercée ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que la transaction litigieuse emportait renonciation du transporteur au bénéfice de l'action directe en paiement contre les clients ; qu'en retenant pourtant qu'il « manque la preuve de l'existence de contestation nées ou à naître » (arrêt, p. 5, alinéa 6), la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, en violation de l'article 2044 du code civil ;ECLI:FR:CCASS:2020:CO00139
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