Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 18 décembre 2019, 18-12.447, Publié au bulletin

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :



Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 20 décembre 2017), rendu sur renvoi après cassation (Soc., 19 octobre 2016, pourvoi n° 15-13.696), que M. B... a été engagé par la société Adrexo en qualité de distributeur de journaux et de documents publicitaires, dans le cadre d'un contrat à temps partiel modulé à compter du 2 janvier 2008 ; que le salarié, qui a démissionné le 8 avril 2010, a saisi la juridiction prud'homale afin d'obtenir la requalification de son contrat de travail en contrat à temps complet et le paiement de diverses sommes au titre de l'exécution et de la rupture du contrat de travail ;

Sur le premier moyen :

Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de ses demandes de requalification de son contrat de travail en contrat à temps complet et de rappel de salaire, alors, selon le moyen :

1°/ que la durée du travail pour les salariés à temps partiel peut varier au-delà ou en deçà de la durée stipulée au contrat, à condition que, sur un an, la durée hebdomadaire ou mensuelle n'excède pas en moyenne cette durée contractuelle ; qu'en relevant toutefois, pour décider que la société Adrexo établissait que M. B... pouvait prévoir son rythme de travail, que la durée de travail effectif avait respecté les seuils de modulation dès lors qu'elle s'établissait à 346,25 heures annuelles pour une durée de référence de 312,01 heures, ce dont il se déduisait pourtant que sur un an, la durée hebdomadaire ou mensuelle excédait en moyenne la durée contractuellement prévue, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, violé l'article 1er du chapitre IV de la convention collective des entreprises de la distribution directe (IDCC2372) du 9 février 2004 ;

2°/ que la durée du travail pour les salariés à temps partiel peut varier au-delà ou en deçà de la durée stipulée au contrat, à condition que, sur un an, la durée hebdomadaire ou mensuelle n'excède pas en moyenne cette durée contractuelle et que la durée hebdomadaire ou mensuelle du travail peut varier au-dessous ou au-dessus de la durée hebdomadaire ou mensuelle prévue au contrat dans la limite du tiers de cette durée ; que la méconnaissance par l'employeur de son obligation de respecter la fourchette de variation mensuelle des heures de travail du salarié empêche ce dernier de prévoir son rythme de travail, le plaçant ainsi à la disposition permanente de son employeur ; qu'en relevant, pour décider que la société Adrexo établissait que M. B... pouvait prévoir son rythme de travail, que la durée de travail effectif avait respecté les seuils de modulation dès lors qu'elle s'établissait à 346,25 heures annuelles pour une durée de référence de 312,01 heures, sans rechercher, ainsi que le faisait pourtant valoir le salarié, si la durée hebdomadaire ou mensuelle du travail avait varié au-dessous ou au-dessus de la durée hebdomadaire ou mensuelle prévue au contrat en deçà ou au-delà de la limite du tiers de cette durée, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard des articles 1er du chapitre IV de la convention collective des entreprises de la distribution directe (IDCC2372) du 9 février 2004 et 2.1 de l'accord d'entreprise du 11 mai 2005 ;

Mais attendu que ni le dépassement de la durée contractuelle de travail sur l'année ni le non-respect de la limite du tiers de la durée du travail fixée par la convention collective et l'accord d'entreprise ne justifient en eux-mêmes la requalification du contrat à temps partiel modulé en contrat à temps complet, dès lors que la durée du travail du salarié n'a pas été portée à un niveau égal ou supérieur à la durée légale hebdomadaire ou à la durée fixée conventionnellement ; que le moyen, inopérant, n'est pas fondé ;

Et attendu que le rejet du premier moyen rend sans portée le second moyen qui invoque une cassation par voie de conséquence ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. B... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit décembre deux mille dix-neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par Me Le Prado, avocat aux Conseils, pour M. B...

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué,

D'AVOIR débouté le salarié de ses demandes de requalification de son contrat de travail en contrat à temps plein et de rappel de salaire ;

AUX MOTIFS QUE « l'article L.3123-25 du Code du travail dans sa rédaction antérieure à la loi du 20 août 2008 dispose que la convention ou l'accord collectif ou d'entreprise prévoit, en matière de contrat de travail modulé, notamment les modalités selon lesquelles le programme indicatif de la répartition de la durée du travail est communiqué par écrit au salarié, et, si ces dispositions ont été abrogées, les accords collectifs conclus en son application restent en vigueur, par ailleurs l'accord d'entreprise signé au sein d'Adrexo le 11 mai 2005 prévoit que pour lui permettre de planifier l'exercice de son activité le distributeur bénéficie d'un planning indicatif individuel annuel établi par l'employeur qui lui est notifié par écrit 15 jours avant le début de sa période de modulation sauf à l'embauche où le planning est présenté par écrit avec le contrat de travail ; qu'en l'espèce, l'employeur justifie de la notification du planning indicatif individuel sur toute la période effectivement travaillée, à compter de février 2008, sauf sur la période du mois de janvier 2008, c'est à dire à l'embauche, il s'ensuit qu'il existe donc une présomption de travail à temps complet, cependant l'employeur combat utilement cette présomption, en effet il établit la durée du travail convenue, par le contrat de travail précisant la durée annuelle et mensuelle de référence et l'avenant du 16 février 2009 par lequel M. B... a indiqué qu'il ne souhaitait pas réévaluer la durée convenue et il produit des documents relatifs aux distributions effectuées qui établissent que les 46 jours travaillés en 2008 et les 40 jours travaillés en 2009 par M. B... ont été effectués exclusivement les lundis et mardis en 2008, sauf le jour de l'embauche (mercredi) et les lundis et mardis en 2009, sauf 2 jours en août, étant précisé aux termes du contrat de travail que les distributions sont réalisées à des jours fixés par le responsable du dépôt en accord avec le salarié parmi les jours de disponibilité communiqués à la discrétion de ce dernier à son embauche et pouvant être modifiés ultérieurement d'un commun accord, sans formes contractuellement imposées, par ailleurs il ressort du document récapitulatif de modulation que la durée de travail effectif a respecté les seuils de modulation puisqu'elle s'établit à 346,25 heures annuelles pour une durée de référence de 312,01 heures, le salarié pouvait donc prévoir son rythme de travail, très régulier, et n'était donc pas à la disposition constante de l'employeur, il s'ensuit qu'il y a lieu de débouter M. B... de sa demande de requalification de son contrat de travail en contrat à temps complet ; que le jugement qui y a fait droit, ainsi qu'aux demandes subséquentes, doit par conséquent être infirmé sur ce point » ;

ALORS, D'UNE PART, QUE la durée du travail pour les salariés à temps partiel peut varier au-delà ou en-deçà de la durée stipulée au contrat, à condition que, sur un an, la durée hebdomadaire ou mensuelle n'excède pas en moyenne cette durée contractuelle ; qu'en relevant toutefois, pour décider que la société Adrexo établissait que M. B... pouvait prévoir son rythme de travail, que la durée de travail effectif avait respecté les seuils de modulation dès lors qu'elle s'établissait à 346,25 heures annuelles pour une durée de référence de 312,01 heures, ce dont il se déduisait pourtant que sur un an, la durée hebdomadaire ou mensuelle excédait en moyenne la durée contractuellement prévue, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, violé l'article 1er du chapitre IV de la convention collective des entreprises de la distribution directe (IDCC2372) du 9 février 2004 ;

ALORS, D'AUTRE PART, QUE la durée du travail pour les salariés à temps partiel peut varier au-delà ou en-deçà de la durée stipulée au contrat, à condition que, sur un an, la durée hebdomadaire ou mensuelle n'excède pas en moyenne cette durée contractuelle et que la durée hebdomadaire ou mensuelle du travail peut varier au-dessous ou au-dessus de la durée hebdomadaire ou mensuelle prévue au contrat dans la limite du tiers de cette durée ; que la méconnaissance par l'employeur de son obligation de respecter la fourchette de variation mensuelle des heures de travail du salarié empêche ce dernier de prévoir son rythme de travail, le plaçant ainsi à la disposition permanente de son employeur ; qu'en relevant, pour décider que la société Adrexo établissait que M. B... pouvait prévoir son rythme de travail, que la durée de travail effectif avait respecté les seuils de modulation dès lors qu'elle s'établissait à 346,25 heures annuelles pour une durée de référence de 312,01 heures, sans rechercher, ainsi que le faisait pourtant valoir le salarié, si la durée hebdomadaire ou mensuelle du travail avait varié au-dessous ou au-dessus de la durée hebdomadaire ou mensuelle prévue au contrat en-deçà ou au-delà de la limite du tiers de cette durée, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard des articles 1er du chapitre IV de la convention collective des entreprises de la distribution directe (IDCC2372) du 9 février 2004 et 2.1 de l'accord d'entreprise du 11 mai 2005.

SECOND MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué,

D'AVOIR limité l'indemnité allouée au salarié pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à la somme de 4 000 euros ;

AUX MOTIFS QUE « la lettre de M. B... ne reprend pas les termes de la conversation téléphonique à laquelle il fait référence et sa lettre ne contient pas le mot démission, c'est par conséquent à tort que l'employeur a délivré les documents de fin de contrat en qualifiant de démission la rupture qui doit donc être qualifiée de licenciement sans cause réelle et sérieuse ; que le jugement sera donc confirmé sur ce point, par contre, compte tenu de l'ancienneté de 2 ans de M. B... et des justificatifs produits à l'appui de sa demande de dommages et intérêts pour le préjudice né de la rupture, il y a lieu de lui allouer en réparation la somme de 4000 €, le jugement doit ainsi être infirmé sur le quantum retenu » ;

ALORS QUE la cassation à intervenir sur le premier moyen de cassation entraînera par voie de conséquence, sur le fondement de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation de l'arrêt attaqué en ce qu'il a limité à la somme de 4 000 euros l'indemnité allouée à M. B... au titre de son licenciement sans cause réelle et sérieuse. ECLI:FR:CCASS:2019:SO01745
Retourner en haut de la page