Cour de cassation, civile, Chambre civile 3, 28 novembre 2019, 18-22.105, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :



Sur le moyen unique :

Vu l'article 4 du code de procédure civile ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 10 juillet 2018), que
Mme D... a donné à bail à la caisse régionale de Crédit agricole mutuel du Midi, aux droits de laquelle vient la caisse régionale de Crédit agricole mutuel du Languedoc (la banque), un local commercial moyennant un loyer indexé sur l'indice du coût de la construction ; que, le loyer en renouvellement ayant été fixé judiciairement à la somme annuelle de 29 300 euros HT à compter du 23 mai 2005, la banque s'est acquittée de l'arriéré de loyer depuis cette date sur la base du nouveau prix fixé par le juge ; que, le 5 février 2014, Mme D... a assigné la banque en paiement du solde restant dû sur les loyers après application de la clause d'indexation ;

Attendu que, pour rejeter la demande, l'arrêt retient que les conditions d'une demande de révision du loyer indexé n'étaient pas réunies, Mme D... ne justifiant pas d'une variation de loyer de plus du quart par rapport au prix précédemment fixé par décision judiciaire ;

Qu'en statuant ainsi, alors que Mme D... n'avait pas formé une demande en révision du loyer indexé, mais une demande en paiement d'un arriéré de loyer automatiquement réactualisé suivant la clause d'indexation mobile stipulée au bail, la cour d'appel, qui a modifié l'objet du litige, a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 10 juillet 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier, autrement composée ;

Condamne la caisse régionale de Crédit agricole mutuel du Languedoc aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la caisse régionale de Crédit agricole mutuel du Languedoc et la condamne à payer à Mme D... la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit novembre deux mille dix-neuf. MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par Me Haas, avocat aux Conseils, pour Mme D....

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué D'AVOIR débouté Mme D... de sa demande en paiement d'une somme de 63.066,28 euros au titre de la réactualisation des loyers ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE "Sur le bien fondé de la demande en révision du loyer indexé : L'article L.145-39 du code de commerce pose les conditions ouvrant droit à la révision du loyer indexé, et en particulier que la demande est subordonnée à une augmentation ou à une diminution du loyer de plus d'un quart par rapport au prix précédemment fixé contradictoirement ou par décision judiciaire. Cependant comme observé à juste titre par le premier juge la bailleresse ne justifie pas que cette condition essentielle est remplie. Elle ne produit en appel aucun élément sur ce point qui pourrait conduire à infirmer la décision du premier juge." ;

AUX MOTIFS, A LES SUPPOSER ADOPTES, QUE, "Sur le fond : Faute de justifier de la régularité de la prétendue révision, contestée par le Crédit Agricole en ce qu'aucune demande en révision ne lui aurait été notifiée, la demande en paiement de l'arriéré de loyers prétendument révisés sera rejetée" ;

1°) ALORS QUE les juges ne doivent pas dénaturer l'objet du litige ; qu'en cause d'appel, Mme D... sollicitait, au visa de "la clause d'indexation figurant au bail du 23 octobre 1995", une somme correspondant à l'arriéré du loyer réactualisé suivant ladite clause (production n°2 : conclusions d'appel de Mme D..., p.4) ; que pour écarter cette demande, la cour d'appel a relevé que les conditions d'une demande en révision du loyer indexé n'étaient pas réunies, Mme D... ne justifiant pas d'une variation de loyer de plus d'un quart par rapport au dernier prix fixé contradictoirement ou par décision judiciaire ; qu'en statuant ainsi, quand Mme D... ne formait pas une demande en révision du loyer indexé, mais une demande en paiement d'un arriéré de loyer automatiquement réactualisé suivant la clause d'échelle mobile stipulée dans le bail, la cour d'appel a dénaturé l'objet du litige, et violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile ;

2°) ALORS QUE la variation de loyer résultant du jeu de la clause d'échelle mobile s'applique de plein droit ; que pour écarter la demande de Mme D... tendant au paiement de l'arriéré de loyer réactualisé suivant la clause d'échelle mobile, la cour d'appel a retenu, par motifs propres, que la bailleresse n'établissait pas que l'application de la clause entraînait une variation de loyer de plus du quart par rapport à la dernière fixation conventionnelle ou judiciaire du loyer ; qu'en statuant ainsi, quand l'application de la clause d'échelle mobile prévue au bail n'était pas subordonnée à la preuve d'une variation de loyer de plus du quart par rapport à sa dernière fixation, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil, en sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, ainsi que, par fausse application, l'article L.145-39 du code de commerce ;

3°) ALORS QUE la variation de loyer résultant du jeu de la clause d'échelle mobile s'applique de plein droit ; que pour écarter la demande de Mme D... tendant au paiement de l'arriéré de loyer réactualisé suivant la clause d'échelle mobile, la cour d'appel a retenu, par motifs éventuellement adoptés du premier jugement, que la bailleresse ne justifiait pas avoir adressé une demande en révision à la locataire ; qu'en statuant ainsi, quand l'application de la clause d'échelle mobile prévue au bail était automatique et n'était donc pas subordonnée à une demande de la bailleresse, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil, en sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, ainsi que, par fausse application, l'article L.145-39 du code de commerce ;

4°) ALORS en tout état de cause QUE les juges ne peuvent se prononcer sur un moyen relevé d'office sans susciter les observations contradictoires des parties ; que pour rejeter la demande en paiement présentée par Mme D..., la cour d'appel a relevé que les conditions d'une demande en révision du loyer indexé n'étaient pas réunies, Mme D... ne justifiant pas d'une variation de loyer de plus d'un quart par rapport au dernier prix fixé contradictoirement ou par décision judiciaire ; qu'en statuant ainsi, quand l'absence de variation de plus d'un quart du loyer indexé n'était pas soulevée en défense, la cour d'appel, qui a relevé d'office un moyen sans inviter les parties à s'en expliquer, a violé l'article 16 du code de procédure civile.ECLI:FR:CCASS:2019:C300999
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