Cour d'appel d'Orléans, 14 novembre 2019, 18/034991
Cour d'appel d'Orléans, 14 novembre 2019, 18/034991
Cour d'appel d'Orléans - C1
- N° de RG : 18/034991
- Solution : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Audience publique du jeudi 14 novembre 2019
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL D'ORLÉANS
CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE
GROSSES + EXPÉDITIONS : le 14/11/2019
Me Alexis DEVAUCHELLE
la SCP CALENGE-GUETTARD-MICOU
ARRÊT du : 14 NOVEMBRE 2019
No : 369 - 19
No RG 18/03499
No Portalis DBVN-V-B7C-F2NW
DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal de Commerce de TOURS en date du 07 Septembre 2018
PARTIES EN CAUSE
APPELANT :- Timbre fiscal dématérialisé No: 1265227835322715
Monsieur G... K...
[...]
Ayant pour avocat postulant Me Alexis DEVAUCHELLE, avocat au barreau d'ORLEANS et pour avocat plaidant Me Alexis BAUDOUIN, membre de la TEN FRANCE SCP D'AVOCATS, avocat au barreau de POITIERS
D'UNE PART
INTIMÉ : - Timbre fiscal dématérialisé No: 1265234014407403
Monsieur M... A...
né le [...] à Paris(15éme) [...]
[...]
ayant pour avocat Me Hervé GUETTARD, membre de la SCP CALENGE-GUETTARD-MICOU, avocat au barreau de BLOIS
D'AUTRE PART
DÉCLARATION D'APPEL en date du : 04 Décembre 2018
ORDONNANCE DE CLÔTURE du : 20 juin 2019
COMPOSITION DE LA COUR
Lors des débats à l'audience publique du 26 SEPTEMBRE 2019, à 14 heures, Madame Carole CAILLARD, Président de la chambre commerciale à la Cour d'Appel d'ORLEANS, en son rapport, et Madame Fanny CHENOT, Conseiller, ont entendu les avocats des parties en leurs plaidoiries, avec leur accord, par application de l'article 786 et 907 du code de procédure civile.
Après délibéré au cours duquel Madame Carole CAILLARD, Président de la chambre commerciale à la Cour d'Appel D'ORLEANS, et Madame Fanny CHENOT, Conseiller, ont rendu compte à la collégialité des débats à la Cour composée de :
Madame Carole CAILLARD, Président de la chambre commerciale à la Cour d'Appel d'ORLEANS,
Madame Fanny CHENOT, Conseiller,
Madame Nathalie MICHEL, Conseiller,
Greffier :
Madame Marie-Claude DONNAT, Greffier lors des débats et du prononcé,
ARRÊT :
Prononcé publiquement par arrêt contradictoire le 14 NOVEMBRE 2019 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
EXPOSE DU LITIGE ET DE LA PROCÉDURE :
M. M... A... , expert comptable inscrit au tableau de l'ordre de la région d'Orléans, a assuré une mission de tenue de la comptabilité jusqu'en 2013 pour le compte de M. G... K... qui exerçait à titre individuel une activité d'achat et de vente de véhicules.
Se prévalant du non paiement par M. K... de ses honoraires à hauteur de 5501,80€, M. A... a saisi le président du tribunal de commerce de Tours d'une requête en injonction de payer le 16 février 2017. Par ordonnance du 27 février 2017, M. K... a été condamné à payer à M. A... la somme de 5.501,60 € en principal avec intérêts au taux légal à compter du 21 décembre 2016, outre une indemnité forfaitaire de 40€ et les dépens à hauteur de 37,07 €. Cette ordonnance a été signifiée par acte d'huissier du 29 mars 2017 à M.Tougard qui a formé opposition par lettre recommandée du 4 avril 2017.
Par jugement du 7 septembre 2018, le tribunal de commerce de Tours a statué comme suit:
Reçoit M. G... K... en son opposition ;
Et statuant à nouveau, le présent jugement se substituant à l'ordonnance portant injonction de payer rendue par M. le président du tribunal de commerce de Tours en date du 27 février
2017, conformément à Particle 1420 du code de procédure civile,
Condamne M. G... K... à payer à M. M... A... la somme de cinq mille cinq cent un euros et soixante centimes (5.50l,60 €) en règlement du solde de ses honoraires au titre de l'exercice 2013 ;
Déboute M. G... K... de sa demande de dommages intérêts à l'encontre de M. M... A... pour fautes contractuelles ;
Déboute les parties de leurs autres demandes ;
Condamne M. G... K... à payer à M. M... A... la somme de mille cinq cents euros (1.500 €) à titre d'indemnité sur le fondement de Particle 700 du code de procédure civile ;
Condamne M. G... K... aux entiers dépens, qui comprendront tant ceux de la procédure d'injonction de payer que ceux consécutifs à la présente instance, et le coût de la signification, lesquels dépens liquides et taxés en jugeant à la somme de deux cent vingt cinq euros et six centimes (225,06 €)
M. K... a formé appel de la décision par déclaration du 4 décembre 2018 en intimant la M. A... , et en critiquant tous les chefs du jugement. Dans ses dernières conclusions du 13 juin 2019, il demande à la cour, au visa des articles 1104, 1217, 1231-1 et 1353 du Code civil et 700 du Code de procédure civile, de :
Réformer intégralement le jugement rendu par le Tribunal de commerce de Tours
le 7 septembre 2018 en ce qu'il a :
- Condamné M. G... K... à payer à M. M... A... la somme de 5 501,60 € en règlement du solde des honoraires au titre de l'exercice 2013,
- Débouté M. G... K... de sa demande de dommages et intérêts à l'encontre de M. M... A... pour faute contractuelle,
- Débouté M. G... K... de ses autres demandes,
- Condamné M. G... K... à payer à M. M... A... la somme de 1500 € à titre d'indemnité sur le fondement l'article 700 du Code de procédure civile,
- Condamné M. G... K... aux entiers dépens, qui comprendront tant ceux de la procédure d'injonction de payer que ceux consécutifs à la présente instance, et le coût de la signification, lesquelles dépens liquidés et taxés en jugeant à la somme de 225,06 €,
Statuant à nouveau :
Recevoir M. G... K... en ses demandes, les déclarer bien fondées,
Dire et juger que M. M... A... est défaillant à rapporter la preuve de ses prétentions,
Dire et juger que M. M... A... a commis des fautes contractuelles au préjudice de M. G... K...,
Par conséquent :
A titre principal
Débouter intégralement M. M... A... de ses demandes, les déclarer infondées,
Condamner M. M... A... à régler à M. G... K... la somme de 16644 euros,
A titre subsidiaire :
Ordonner la compensation entre les créances réciproques de M. M... A... et de M. G... K...,
Condamner M. M... A... à régler à M. G... K... la somme de 10642,40 euros,
En tout état de cause :
Condamner M. M... A... à régler à M. G... K... la somme de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens d'instance.
Il fait valoir :
- que M. A... ne rapporte pas la preuve de sa créance car il ne produit aucune lettre de mission permettant d'établir la réalité des missions confiées et l'accord de M. K... sur le montant des prestations, alors que :
.il est obligatoire d'établir une lettre de mission avant le commencement des travaux par l'expert-comptable, en vertu de l'article 151 du décret du 30 mars 2012,
. si M. A... peut librement prouver qu'une lettre de mission, quelle que soit sa forme a été convenue entre les parties, il doit prouver son existence et son contenu et en l'espèce, il ne prouve pas que les honoraires qu'il réclame ont été convenus entre les parties,
. la facture complémentaire intitulée "solde de l'exercice" est très supérieure à ce qui était habituellement facturé et ne correspond à rien,
. M. K... n'a jamais reconnu être débiteur des sommes réclamés et c'est seulement parce que M. A... lui a indiqué qu'il allait se rapprocher de son assurance pour l'indemniser du préjudice subi du fait des erreurs commises qu'il a indiqué accepter de régler cette facture, dans un cadre strictement transactionnel,
- qu'en réalité, M. A... n'a pas fait de déclaration à son assureur alors qu'il a commis des fautes dans l'exécution de ses missions car :
.il a refusé de fournir son assistance ainsi que les documents comptables de M. K... et le tribunal a retenu à tort l'argumentation de l'administration fiscale qui est contestée et fait l'objet d'un contentieux en cours,
. il a commis des erreurs de comptabilisation de TVA, a omis de provisionner une dette RSI et a commis des erreurs qui ont impacté l'impôt sur le revenu des années 2011 et 2012,
.que M. A... ne peut prétendre que les prétendues malversations de M. K... auraient été masquées dans une double comptabilité, alors qu'il a lui-même admis être informé de la totalité des échanges commerciaux de M. K... dans le cadre de son activité individuelle,
- que la cour doit ordonner la compensation entre le préjudice subi par M. K... à hauteur de 16644 €, montant du redressement, résultant directement de la faute de M. A... .
M. A... demande à la cour, par dernières conclusions du 28 mai 2019 de:
Déclarer irrecevable et en tout cas mal fondé l'appel interjeté par M. K... contre le jugement du 7 septembre 2018 rendu par le tribunal de commerce de Tours,
En conséquence,
Confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions et débouter M. K... de l'ensemble de ses demandes,
Très subsidiairement,
Juger que les dommages et intérêts mis à sa charge dans l'hypothèse où sa responsabilité serait retenue ne saurait excéder la somme de 5337€,
En tout état de cause,
Condamner M. K... à lui régler une indemnité de 3000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Il fait valoir :
- que la lettre d'intention est une obligation déontologique ayant pour objet de formaliser la collaboration entre l'expert comptable et son client mais n'est pas une obligation civile conditionnant le droit aux honoraires,
- qu'en l'espèce, il est clairement établi que M. K... a mandaté M. A... , et celui-ci n'a d'ailleurs pas véritablement contesté le montant des honoraires demandés,
- que selon la jurisprudence, le paiement d'un impôt légalement dû ne constitue pas un préjudice indemnisable et seules les majorations peuvent être mises à la charge de l'expert comptable à condition d'établir sa faute,
- qu'il ressort du procès verbal établi par les services des impôtsque les calculs de TVA faits par M. A... au coup par coup étaient exacts, mais qu'un redressement fiscal a été décidé pour des sommes dues au titre de la TVA en raison d'anomalies qui ne lui sont pas imputables.
Il est expressément référé aux écritures des parties pour plus ample exposé des faits ainsi que de leurs moyens et prétentions.
La clôture de la procédure a été prononcée par ordonnance du 20 juin 2019.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Sur la demande en paiement d'honoraires formée par M. A...
Le contrat entre un expert comptable et son client est un contrat d'entreprise et sa validité n'est soumise à aucune formalité spéciale, les exigences de l'article 151 du décret du 30 mars 2012, dit "code de déontologie des expert comptables", qui prescrit un contrat écrit définissant la mission du professionnel et précisant les droits et obligations des parties, ne relevant que des règles déontologiques, dont la violation serait susceptible d'être sanctionnée disciplinairement sans que puisse être remis en cause la validité de la convention.
L'absence de production d'une lettre de mission et plus largement d'un contrat écrit formalisant la collaboration entre M. A... , expert comptable et M K... ne fait donc pas obstacle au principe suivant lequel les contrats se forment par simple accord de volonté.
Il appartient toutefois à M. A... qui réclame le paiement de ses honoraires pour 2013 d'établir la réalité des prestations accomplies et des sommes réclamées à ce titre, étant rappelé qu'à l'égard d'un commerçant la preuve du contrat se fait par tout moyen mais que pour autant, la seule production d'une facture ou d'une note d'honoraire est à elle-seule insuffisante.
En l'espèce, M. K... admet lui-même en page 3 et 6 de ses écritures que M. A... a effectué pour lui des prestations de comptabilité jusqu'en 2013 mais nie que le montant des honoraires réclamés par ce dernier ait été convenu entre eux. M K... ne conteste d'ailleurs pas avoir réglé les honoraires facturés par M. A... au titre des exercices 2011 et 2012, ainsi que deux acomptes de 800€ au titre de l'exercice 2013. L'existence d'un mandat confié par M. K... à M. A... en sa qualité d'expert comptable au moins entre 2011 et 2013 est donc établie.
S'agissant du montant des honoraires facturés par M. A... , M. K... prétend qu'il était globalement de 3200€HT soit 800 € par trimestre et que le montant de la facture du 31 décembre 2013 qu'il conteste n'a jamais été convenu entre les parties.
M. A... produit en pièce 3 le montant des honoraires qu'ils a facturés à M. K... pour les exercices 2011 et 2012, pour un total de 4800€ HT pour l'exercice 2011 et de 5592€ HT pour l'exercice 2012. M. K... a réglé ces sommes, qui sont nettement supérieures au montant de 3200€ HT qu'il invoque, et a manifesté par là même son acceptation de la facturation à laquelle M. A... a procédé.
L'initmé a facturé à M. K... pour l'exercice 2013 un montant total d'honoraires de 6200€ HT, comprenant 4 acomptes trimestriels de 800€ dont les deux premiers ont été réglés, et un solde de 3000€. Ce montant d'honoraire pour 2013 est cohérent et proportionné avec celui des deux exercices précédents, tant globalement que s'agissant du montant des acomptes versés (800€ par trimestre en 2013 contre 750€ en 2011 et 773€ en 2012).
En outre, M. K... a fait l'objet le 9 juillet 2013 de la part de l'administration fiscale d'une vérification de sa comptabilité professionnelle et de sa situation fiscale au titre des années 2011 et 2012, qui a nécessairement généré pour M A... un travail supplémentaire.
M. K... prétend que ce dernier ne lui a fourni aucune aide dans le cadre de cette vérification fiscale. Il invoque l'exception d'inexécution pour justifier le non paiement ou au moins la réduction du montant réclamé le 31 décembre 2013.
Il ressort toutefois de la proposition de rectification des services fiscaux en date du 16 juin 2014 adressé à M. K... que ce dernier était assisté de M. A... expert comptable lors du premier entretien du 23 juillet 2013. Ce dernier justifie aussi d'un échange de couriels avec M. K... le 3 février 2014 concernant la valeur du stock au 30 novembre 2013 et produit une note détaillée de ses diligences dans le cadre de la vérification de la comptabilité de M. K.... M. A... a donc effectué la comptabilité de M. K... pour l'exercice 2013, et a en outre effectué au moins pour partie une mission d'assistance de M. K... dans le cadre de la vérification de comptabilité dont il a fait l'objet, M. K... ayant ensuite changé de comptable ainsi qu'il ressort de l'échange de courriels en février 2014 produit par ce dernier en pièce 4.
Ces éléments établissent de manière suffisante que M. K... a bien mandaté M. A... pour des prestations de comptabilité au titre de l'exercice 2013 et que la facture d'honoraires établie le 31 décembre 2013 à hauteur de 4600€ HT soit 5501,60€ TTC, restant dû au titre des honoraires pour 2013 est due en sa totalité. M. K... ne conteste pas ne pas l'avoir réglée et le jugement sera confirmé en ce qu'il l'a condamné de ce chef.
M. K... reproche à M. A... d'avoir commis des erreurs dans la tenue de sa comptabilité, en appliquant une méthode "au coup par coup" au lieu d'appliquer la méthode de la TVA sur la marge globale de l'année en imputant la valorisation du stock de l'exercice sur l'exercice suivant. M. K... ne démontre pas que cette méthode "du coup par coup" que M. A... ne conteste pas avoir appliquée serait proscrite et il ne ressort pas non plus des pièces produites que les calculs de TVA effectués par M. A... seraient erronés.
Il invoque aussi des erreurs au titre d'une dette RSI non provisionnée, et d'erreurs ayant impacté l'impôt sur le revenu mais ne les explicite pas ni ne les démontre.
Il ressort de la proposition de rectification du 16 juin 2014 produite en pièce 7 par l'intimé que M. K... a fait l'objet d'un redressement au titre de la TVA en raison d'erreurs dans le calcul des stocks, de véhicules non comptabilisés dans les ventes, de véhicules comptabilisés dans les ventes à un prix minoré du fait de règlements en espèces, de véhicules échangés avec erreur sur le prix de report, de véhicules non comptabilisés dont la vente a été encaissée sur un compte personnel, de commissions encaissées sur le compte personnel et non comptablisés.
Il n'est pas démontré que ces erreurs seraient imputables à M. A... . M. K... ne rapportant pas la preuve des fautes qu'il allègue à l'encontre de ce dernier, il doit être débouté de toutes ses demandes, par confirmation du jugement en toutes ses dispositions.
M. K... succombant en son appel, les dépens exposés devant la cour seront mis à sa charge et il versera à M. A... la somme de 2000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
- Confirme le jugement déféré en toute ses dispositions ;
Y ajoutant,
- Condamne M. G... K... à verser à M. M... A... à verser une indemnité de 2000 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- Condamne M. G... K... aux dépens.
Arrêt signé par Madame Carole CAILLARD, Président de la chambre commerciale à la Cour d'Appel d'ORLEANS, présidant la collégialité et Madame Marie-Claude DONNAT , Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT