Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 23 octobre 2019, 18-19.952, Publié au bulletin
Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 23 octobre 2019, 18-19.952, Publié au bulletin
Cour de cassation - Chambre commerciale
- N° de pourvoi : 18-19.952
- ECLI:FR:CCASS:2019:CO00775
- Publié au bulletin
- Solution : Rejet
Audience publique du mercredi 23 octobre 2019
Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon, du 26 avril 2018Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur la recevabilité du pourvoi, en ce qu'il est formé par la "société" EIRL T... [...], examinée d'office, après avertissement délivré aux parties :
Vu l'article 117 du code de procédure civile, ensemble l'article L. 526-6 du code de commerce ;
Attendu que M. T..., qui a adopté le statut d'entrepreneur individuel à responsabilité limitée, n'ayant pas créé une personne morale, le pourvoi de la "société" EIRL T... [...], qui n'a aucune existence légale, doit être déclaré irrecevable ;
Sur le premier moyen du pourvoi, en ce qu'il est formé par M. T..., qui est recevable :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 26 avril 2018), que M. T... a, par une déclaration déposée le 30 octobre 2012 au registre de l'agriculture, affecté une partie de son patrimoine à son activité d'éleveur de chevaux pour l'exercice de laquelle il a utilisé une dénomination comprenant les termes "EIRL T... [...]" ; que par acte notarié du 25 avril 2013, il a affecté un bâtiment à usage agricole à son activité professionnelle sans le faire publier ; que, par jugements des 26 février et 29 juin 2015, M. T... a été mis en redressement puis liquidation judiciaires, la société MJ Synergie étant désignée liquidateur ; que le liquidateur a assigné M. T... en inopposabilité à la procédure de l'affectation du bâtiment agricole et en réunion de ses patrimoines ;
Attendu que M. T... fait grief à l'arrêt de rejeter l'exception de nullité de l'assignation du liquidateur alors, selon le moyen :
1°/ que constitue une nullité de fond le défaut de capacité d'ester en justice en demande; que constitue ainsi une irrégularité de fond le fait pour le liquidateur judiciaire demandeur désigné dans le cadre d'une procédure de redressement et liquidation judiciaires concernant le demandeur en son ancienne qualité de commerçant dès lors qu'il avait été radié du RCS plusieurs années avant le jugement d'ouverture, de notifier à celui-ci en sa qualité actuelle d'entrepreneur individuel à responsabilité limitée une assignation en inopposabilité de l'affectation prévue par l'article L. 526 du code de commerce ; qu'il résulte des constatations de l'arrêt que l'assignation du 11 janvier 2016 a été délivrée à M. H... T... à la requête de « MJ Synergie es qualités de liquidateur de l'EIRL H... T..., inscrite au RCS de Bourg-en-Bresse sous le n° 350 384 081 » mais que la procédure de redressement judiciaire convertie en liquidation judiciaire avait été ouverte non pas à l'égard de M. H... T... exerçant en qualité d'entrepreneur individuel à responsabilité limitée sous le n° de SIRET 350 834 081 0019 mais à l'égard de M. H... T... qui, jusqu'à sa radiation à la date du 25 février 2005, avait exercé en qualité de commerçant sous le n° de RCS 350 834 081 ; que ces constatations opérées, dont résultait le défaut de capacité d'ester en justice en demande, en écartant la qualification de vice de fond pour rejeter l'exception de nullité de l'assignation, la cour d'appel a violé l'article 117 du code de procédure civile ;
2°/ que constitue une nullité de fond le défaut de capacité d'ester en justice en défense ; que constitue une irrégularité de fond le fait pour le liquidateur judiciaire demandeur désigné dans le cadre d'une procédure de redressement et liquidation judiciaires concernant le demandeur en son ancienne qualité de commerçant dès lors qu'il avait été radié du RCS plusieurs années avant le jugement d'ouverture, de notifier à celui-ci en sa qualité actuelle d'entrepreneur individuel à responsabilité limitée une assignation en inopposabilité de l'affectation prévue par l'article L. 526 du code de commerce ; qu'il résulte des constatations de l'arrêt que l'assignation du 11 janvier 2016 a été délivrée à M. H... T... à la requête de « MJ Synergie es qualités de liquidateur de l'EIRL H... T..., inscrite au RCS de Bourg-en-Bresse sous le n° 350 384 081 » mais que la procédure de redressement judiciaire convertie en liquidation judiciaire avait été ouverte non pas à l'égard de M. H... T... exerçant en qualité d'entrepreneur individuel à responsabilité limitée sous le n° de SIRET 350 834 081 0019 mais à l'égard de M. H... T... qui jusqu'à sa radiation à la date du 25 février 2005 avait exercé en qualité de commerçant sous le n° de RCS 350 834 081 ; que ces constatations opérées, dont résultait le défaut de capacité d'ester en justice en défense, en écartant la qualification de vice de fond pour rejeter l'exception de nullité de l'assignation, la cour d'appel a violé l'article 117 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'en application de l'article L. 680-2 du code de commerce, lorsqu'un entrepreneur individuel à responsabilité limitée est soumis à une procédure collective à raison de son activité professionnelle, les dispositions des titres I à VI du livre VI de ce code doivent être comprises comme visant les éléments du seul patrimoine affecté à l'activité en difficulté ; que ces règles s'appliquent quand bien même le jugement d'ouverture et sa mention au BODACC ne précisent pas qu'ils ne visent que les éléments du seul patrimoine affecté en difficulté ; que l'arrêt constate que la société MJ Synergie a été désignée liquidateur de M. T... et que ce dernier était personnellement immatriculé au registre agricole sous le même numéro que l'établissement auquel il avait affecté une partie de son patrimoine ; que la cour d'appel en a exactement déduit que l'erreur commise sur la désignation du débiteur dans les jugements de redressement et de liquidation judiciaire, résultant de la particularité du statut d'EIRL n'affectait pas la capacité à agir du liquidateur de M. T... à raison de son activité professionnelle ; que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le second moyen, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
PAR CES MOTIFS :
DECLARE IRRECEVABLE le pourvoi en ce qu'il est formé au nom de la "société" EIRL T... [...] ;
REJETTE le pourvoi, en ce qu'il est formé par M. T... ;
Condamne M. T... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette ses demandes et le condamne à payer sur son patrimoine non affecté la somme de 3 000 euros à la société MJ Synergie, en qualité de liquidateur de M. T... à raison de son activité d'élevage et de pension de chevaux sous la dénomination EIRL T... [...] ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois octobre deux mille dix-neuf et signé par lui et Mme Labat, greffier de chambre, qui a assisté au prononcé de l'arrêt ;
MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par la SCP Ghestin, avocat aux Conseils, pour M. T... et la société EIRL T... [...]
Il est fait grief à la cour d'appel de Lyon d'AVOIR rejeté l'exception de nullité de l'assignation délivrée à M. T... à la requête de « MJ Synergie, liquidateur judiciaire de l'EIRL H... T..., inscrite au RCS de Bourg-en-Bresse sous le n° 350 384 081, exerçant sous le nom « [...] » sise [...] » (sic) et par voie de conséquence, d'AVOIR rejeté la demande en nullité du jugement du Tribunal de grande instance de Bourg-En-Bresse du 5 janvier 2017;
AUX MOTIFS QUE M. T... soutient sur le fondement de l'article 117 du code de procédure civile que l'assignation délivrée le 11 janvier 2016par la société MJ Synergie se prétendant liquidateur de l'EIRL H... T..., est entachée d'une nullité de fond dès lors qu'il n'existe aucune décision de justice qui désigne cette société en qualité de liquidateur de cette EIRL ; qu'il prétend que la société MJ Synergie a ainsi usé d'une fausse qualité et n'avait aucun droit ni titre pour agir en justice pour le compte de cette EIRL ; qu'il fait valoir qu'il a fait l'objet d'une procédure collective à titre personnel, alors que l'EIRL qu'il a constituée pour son exercice professionnel devait être assignée pour l'ouverture d'une telle procédure; qu'il ajoute que l'absence de précision de la forme juridique de cette société MJ Synergie comme des personnes physiques qui la représentent en justice entache également de nullité cette assignation ; que la SELARL MJ Synergie répond que cette absence de précision sur sa forme juridique et ses représentants légaux n'a pas vicié la compréhension de M. T... sur la personne du mandataire, cette irrégularité formelle nécessitant en application de l'article 114 du code de procédure civile qu'il justifie d'un grief ; qu'elle conteste avoir usé d'une fausse qualité en faisant délivrer l'assignation et souligne que M. T... a affirmé dans ses conclusions par ailleurs déposées pour obtenir le changement de liquidateur qu'elle avait été nommée liquidateur de l'EIRL H... T... ; que la SELARL MJ Synergie est bien fondée à soutenir que la création d'une EIRL ne fait pas naître une personne juridique nouvelle et distincte de la personne physique de l'entrepreneur et ne permet que la distinction du patrimoine affecté à l'activité de ce dernier et de protéger son patrimoine personnel ; que l'article L. 526-6 du code de commerce définit en effet dans son article 2 l'EIRL comme un patrimoine affecté, l'acte notarié du 25 avril 2013 invoqué par M. T... lui ayant également rappelé en page 6 « La déclaration d'affectation ne crée pas une personnalité morale distincte de l'entrepreneur individuel »; que l'assignation a été délivrée le 11 janvier à la demande de « MJ Synergie, liquidateur judiciaire de l'EIRL H... T..., inscrite au RCS de Bourg-en-Bresse sous le n° 350 384 081, exerçant sous le nom [...], sise [...] » ; que le numéro du Registre du commerce et des sociétés visé dans cette assignation correspond : - à l'inscription de M. T... en qualité de commerçant qui a fait l'objet d'une cessation d'activité à compter du 25 février 2005, l'extrait Kbis produit mentionnant « Radiation du RCS d'une entreprise équestre individuelle devenue agricole », - à l'identifiant SIRENE de l'entreprise exploitée par l'appelant, ainsi qu'il ressort de l'extrait INSEE du 8 octobre 2012, - aux neuf premiers chiffres du n° SIRET affecté à l'EIRL créé par M. T...; que contrairement à l'affirmation de M. T..., l'EIRL qu'il a créée ne pouvait pas faire l'objet d'une procédure collective et la liquidation de son entreprise individuelle agricole nécessitait que l'affectation à son activité d'une partie de son patrimoine dans le cadre de cette EIRL soit prise en compte pour déterminer la portée des opérations liquidatives; que la SELARL MJ Synergie n'a pas fait usage d'une fausse qualité et disposait de la qualité et des pouvoirs pour agir en qualité de liquidateur judiciaire de l'entreprise individuelle de M. T... ; que l'erreur commise dans la désignation de son administré, provenant d'ailleurs de cette limite imposée par le statut d'EIRL, n'affecte pas sa capacité à agir et ne constitue pas une cause de nullité au sens de l'article 117 du code de procédure civile mais une irrégularité formelle sanctionnée par l'article 114 du même code ; que dans ses conclusions déposées pour obtenir le changement de liquidateur (pièce 20 de l'intimé) M. T... mentionne qu'il agit contre « la SA MJ Synergie (liquidateur de l'EIRL H... T...) SA inscrite au RCS de Bourg-en-Bresse sous le n° 538 422 056 00043 dont le siège social se trouve au [...] agissant dans la présente procédure par le biais de MM. I... R... et K... J... » comme dans sa requête en récusation perpétuelle déposée au greffe du tribunal de grande instance de Bourg-en-Bresse le 20 mars 2017 ; que M. T... était pleinement informé de l'intervention de ce liquidateur judiciaire pour liquider son entreprise individuelle ; qu'il n'invoque et ne justifie ainsi d'aucun grief au sens de l'article 114 précité ;
1/ ALORS QUE constitue une nullité de fond le défaut de capacité d'ester en justice en demande; que constitue ainsi une irrégularité de fond le fait pour le liquidateur judiciaire demandeur désigné dans le cadre d'une procédure de redressement et liquidation judiciaires concernant le demandeur en son ancienne qualité de commerçant dès lors qu'il avait été radié du RCS plusieurs années avant le jugement d'ouverture, de notifier à celui-ci en sa qualité actuelle d' entrepreneur individuel à responsabilité limitée une assignation en inopposabilité de l'affectation prévue par l'article L. 526 du code de commerce; qu'il résulte des constatations de l'arrêt que l'assignation du 11 janvier 2016 a été délivrée à M. H... T... à la requête de « MJ Synergie es qualités de liquidateur de l'EIRL H... T..., inscrite au RCS de Bourg-en-Bresse sous le n° 350 384 081 » mais que la procédure de redressement judiciaire convertie en liquidation judiciaire avait été ouverte non pas à l'égard de M. H... T... exerçant en qualité d'entrepreneur individuel à responsabilité limitée sous le n° de SIRET 350 834 081 0019 mais à l'égard de M. H... T... qui, jusqu'à sa radiation à la date du 25 février 2005, avait exercé en qualité de commerçant sous le n° de RCS 350 834 081; que ces constatations opérées, dont résultait le défaut de capacité d'ester en justice en demande, en écartant la qualification de vice de fond pour rejeter l'exception de nullité de l'assignation, la cour d'appel a violé l'article 117 du code de procédure civile ;
2/ ALORS QUE constitue une nullité de fond le défaut de capacité d'ester en justice en défense; que constitue une irrégularité de fond le fait pour le liquidateur judiciaire demandeur désigné dans le cadre d'une procédure de redressement et liquidation judiciaires concernant le demandeur en son ancienne qualité de commerçant dès lors qu'il avait été radié du RCS plusieurs années avant le jugement d'ouverture, de notifier à celui-ci en sa qualité actuelle d'entrepreneur individuel à responsabilité limitée une assignation en inopposabilité de l'affectation prévue par l'article L. 526 du code de commerce ; qu'il résulte des constatations de l'arrêt que l'assignation du 11 janvier 2016 a été délivrée à M. H... T... à la requête de « MJ Synergie es qualités de liquidateur de l'EIRL H... T..., inscrite au RCS de Bourg-en-Bresse sous le n° 350 384 081 » mais que la procédure de redressement judiciaire convertie en liquidation judiciaire avait été ouverte non pas à l'égard de M. H... T... exerçant en qualité d'entrepreneur individuel à responsabilité limitée sous le n° de SIRET 350.834.081.0019 mais à l'égard de M. H... T... qui jusqu'à sa radiation à la date du 25 février 2005 avait exercé en qualité de commerçant sous le n° de RCS 350.834.081; que ces constatations opérées, dont résultait le défaut de capacité d'ester en justice en défense, en écartant la qualification de vice de fond pour rejeter l'exception de nullité de l'assignation, la cour d'appel a violé l'article 117 du code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION (SUBSIDIAIRE)
Il est fait grief à la cour d'appel de Lyon d'AVOIR dit n'y avoir lieu de se prononcer sur les faux opposés aux jugements rendus par le tribunal de grande instance de Bourg-en-Bresse les 26 février et 29 juin 2015, argués de faux dans l'inscription de faux à titre incident déposée par M. T... le 22 août 2017 ;
AUX MOTIFS QUE si la SELARL MJ Synergie a déclaré vouloir se servir de ces jugements à l'appui de ces moyens et prétentions au visa de l'article 314 du code de procédure civile, l'article 307 de ce code conduit la cour à retenir qu'elle est en mesure de statuer sur le litige sans tenir compte de ces pièces arguées de faux; que l'inscription de faux présentée par M. T... ne tend pas à leur remise en cause mais uniquement à ce que soient retenues fausses plusieurs de leurs mentions ; que le litige entre les parties porte en effet sur des évènements postérieurs à l'intervention de ces décisions ; que les parties ne contestent pas que ces deux décisions de procédure collective sont intervenues et ne discutent pas de la désignation par jugement du 29 juin 2015 de la SELARL MJ Synergie en qualité de liquidateur judiciaire, qualité qui est confirmée par sa publication au BODACC produite par M. T... ;
1/ ALORS QUE le juge se prononce sur le faux à moins qu'il ne puisse statuer sans tenir compte de la pièce arguée de faux ; qu'appelée à statuer sur la nullité de l'assignation délivrée à la demande de « MJ Synergie, liquidateur judiciaire de l'Eirl H... T... », en raison du défaut de capacité d'ester en justice en demande et en défense, la cour d'appel devait nécessairement se prononcer sur le faux incident qui visait les jugements des 26 février et 29 juin 2015 ayant prononcé, respectivement, le redressement judiciaire puis la liquidation judiciaire de M. H... T... et désigné la Selarl MJ Synergie comme mandataire puis comme liquidateur judiciaire ; qu'en jugeant au contraire, pour dire n'y avoir lieu de se prononcer sur les faux opposés, que le litige ne portait que sur des évènements postérieurs à l'intervention de ces décisions, la Cour d'appel a violé l'article 307 du code de procédure civile ;
2/ ALORS QU'à l'appui du faux incident, M. H... T... avait fait valoir dans ses conclusions que les jugements du Tribunal de grande instance de Bourg-En-Bresse des 26 février 2015 et 29 juin 2015 comportaient des mentions inexactes, constatées par les juges, et qu'il en était particulièrement ainsi des constatations de fait suivantes : « Attendu qu'il résulte des indications données à l'audience et des pièces produites que M. H... T... se trouve dans l'impossibilité de faire face à son passif avec son actif disponible
» lesquelles figuraient dans le jugement d'ouverture du redressement judiciaire du 26 février 2015 ; que la cessation des paiements conditionnait l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire et du même coup la désignation de la Selarl MJ Synergie comme mandataire puis comme liquidateur judiciaire, l'une et l'autre litigieuses eu égard à la capacité d'ester en justice en demande et en défense des parties;
qu'en considérant pour dire n'y avoir lieu de se prononcer sur les faux opposés, que « les parties ne constest(aient) pas qu'il est constant que ces deux décisions de procédure collective sont intervenues et ne discutent pas de la désignation par jugement du 29 juin 2015 de la SELARL MJ Synergie en qualité de liquidateur judiciaire », la cour d'appel a violé l'article 4 du code de procédure civile.ECLI:FR:CCASS:2019:CO00775
Sur la recevabilité du pourvoi, en ce qu'il est formé par la "société" EIRL T... [...], examinée d'office, après avertissement délivré aux parties :
Vu l'article 117 du code de procédure civile, ensemble l'article L. 526-6 du code de commerce ;
Attendu que M. T..., qui a adopté le statut d'entrepreneur individuel à responsabilité limitée, n'ayant pas créé une personne morale, le pourvoi de la "société" EIRL T... [...], qui n'a aucune existence légale, doit être déclaré irrecevable ;
Sur le premier moyen du pourvoi, en ce qu'il est formé par M. T..., qui est recevable :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 26 avril 2018), que M. T... a, par une déclaration déposée le 30 octobre 2012 au registre de l'agriculture, affecté une partie de son patrimoine à son activité d'éleveur de chevaux pour l'exercice de laquelle il a utilisé une dénomination comprenant les termes "EIRL T... [...]" ; que par acte notarié du 25 avril 2013, il a affecté un bâtiment à usage agricole à son activité professionnelle sans le faire publier ; que, par jugements des 26 février et 29 juin 2015, M. T... a été mis en redressement puis liquidation judiciaires, la société MJ Synergie étant désignée liquidateur ; que le liquidateur a assigné M. T... en inopposabilité à la procédure de l'affectation du bâtiment agricole et en réunion de ses patrimoines ;
Attendu que M. T... fait grief à l'arrêt de rejeter l'exception de nullité de l'assignation du liquidateur alors, selon le moyen :
1°/ que constitue une nullité de fond le défaut de capacité d'ester en justice en demande; que constitue ainsi une irrégularité de fond le fait pour le liquidateur judiciaire demandeur désigné dans le cadre d'une procédure de redressement et liquidation judiciaires concernant le demandeur en son ancienne qualité de commerçant dès lors qu'il avait été radié du RCS plusieurs années avant le jugement d'ouverture, de notifier à celui-ci en sa qualité actuelle d'entrepreneur individuel à responsabilité limitée une assignation en inopposabilité de l'affectation prévue par l'article L. 526 du code de commerce ; qu'il résulte des constatations de l'arrêt que l'assignation du 11 janvier 2016 a été délivrée à M. H... T... à la requête de « MJ Synergie es qualités de liquidateur de l'EIRL H... T..., inscrite au RCS de Bourg-en-Bresse sous le n° 350 384 081 » mais que la procédure de redressement judiciaire convertie en liquidation judiciaire avait été ouverte non pas à l'égard de M. H... T... exerçant en qualité d'entrepreneur individuel à responsabilité limitée sous le n° de SIRET 350 834 081 0019 mais à l'égard de M. H... T... qui, jusqu'à sa radiation à la date du 25 février 2005, avait exercé en qualité de commerçant sous le n° de RCS 350 834 081 ; que ces constatations opérées, dont résultait le défaut de capacité d'ester en justice en demande, en écartant la qualification de vice de fond pour rejeter l'exception de nullité de l'assignation, la cour d'appel a violé l'article 117 du code de procédure civile ;
2°/ que constitue une nullité de fond le défaut de capacité d'ester en justice en défense ; que constitue une irrégularité de fond le fait pour le liquidateur judiciaire demandeur désigné dans le cadre d'une procédure de redressement et liquidation judiciaires concernant le demandeur en son ancienne qualité de commerçant dès lors qu'il avait été radié du RCS plusieurs années avant le jugement d'ouverture, de notifier à celui-ci en sa qualité actuelle d'entrepreneur individuel à responsabilité limitée une assignation en inopposabilité de l'affectation prévue par l'article L. 526 du code de commerce ; qu'il résulte des constatations de l'arrêt que l'assignation du 11 janvier 2016 a été délivrée à M. H... T... à la requête de « MJ Synergie es qualités de liquidateur de l'EIRL H... T..., inscrite au RCS de Bourg-en-Bresse sous le n° 350 384 081 » mais que la procédure de redressement judiciaire convertie en liquidation judiciaire avait été ouverte non pas à l'égard de M. H... T... exerçant en qualité d'entrepreneur individuel à responsabilité limitée sous le n° de SIRET 350 834 081 0019 mais à l'égard de M. H... T... qui jusqu'à sa radiation à la date du 25 février 2005 avait exercé en qualité de commerçant sous le n° de RCS 350 834 081 ; que ces constatations opérées, dont résultait le défaut de capacité d'ester en justice en défense, en écartant la qualification de vice de fond pour rejeter l'exception de nullité de l'assignation, la cour d'appel a violé l'article 117 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'en application de l'article L. 680-2 du code de commerce, lorsqu'un entrepreneur individuel à responsabilité limitée est soumis à une procédure collective à raison de son activité professionnelle, les dispositions des titres I à VI du livre VI de ce code doivent être comprises comme visant les éléments du seul patrimoine affecté à l'activité en difficulté ; que ces règles s'appliquent quand bien même le jugement d'ouverture et sa mention au BODACC ne précisent pas qu'ils ne visent que les éléments du seul patrimoine affecté en difficulté ; que l'arrêt constate que la société MJ Synergie a été désignée liquidateur de M. T... et que ce dernier était personnellement immatriculé au registre agricole sous le même numéro que l'établissement auquel il avait affecté une partie de son patrimoine ; que la cour d'appel en a exactement déduit que l'erreur commise sur la désignation du débiteur dans les jugements de redressement et de liquidation judiciaire, résultant de la particularité du statut d'EIRL n'affectait pas la capacité à agir du liquidateur de M. T... à raison de son activité professionnelle ; que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le second moyen, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
PAR CES MOTIFS :
DECLARE IRRECEVABLE le pourvoi en ce qu'il est formé au nom de la "société" EIRL T... [...] ;
REJETTE le pourvoi, en ce qu'il est formé par M. T... ;
Condamne M. T... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette ses demandes et le condamne à payer sur son patrimoine non affecté la somme de 3 000 euros à la société MJ Synergie, en qualité de liquidateur de M. T... à raison de son activité d'élevage et de pension de chevaux sous la dénomination EIRL T... [...] ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois octobre deux mille dix-neuf et signé par lui et Mme Labat, greffier de chambre, qui a assisté au prononcé de l'arrêt ;
MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par la SCP Ghestin, avocat aux Conseils, pour M. T... et la société EIRL T... [...]
Il est fait grief à la cour d'appel de Lyon d'AVOIR rejeté l'exception de nullité de l'assignation délivrée à M. T... à la requête de « MJ Synergie, liquidateur judiciaire de l'EIRL H... T..., inscrite au RCS de Bourg-en-Bresse sous le n° 350 384 081, exerçant sous le nom « [...] » sise [...] » (sic) et par voie de conséquence, d'AVOIR rejeté la demande en nullité du jugement du Tribunal de grande instance de Bourg-En-Bresse du 5 janvier 2017;
AUX MOTIFS QUE M. T... soutient sur le fondement de l'article 117 du code de procédure civile que l'assignation délivrée le 11 janvier 2016par la société MJ Synergie se prétendant liquidateur de l'EIRL H... T..., est entachée d'une nullité de fond dès lors qu'il n'existe aucune décision de justice qui désigne cette société en qualité de liquidateur de cette EIRL ; qu'il prétend que la société MJ Synergie a ainsi usé d'une fausse qualité et n'avait aucun droit ni titre pour agir en justice pour le compte de cette EIRL ; qu'il fait valoir qu'il a fait l'objet d'une procédure collective à titre personnel, alors que l'EIRL qu'il a constituée pour son exercice professionnel devait être assignée pour l'ouverture d'une telle procédure; qu'il ajoute que l'absence de précision de la forme juridique de cette société MJ Synergie comme des personnes physiques qui la représentent en justice entache également de nullité cette assignation ; que la SELARL MJ Synergie répond que cette absence de précision sur sa forme juridique et ses représentants légaux n'a pas vicié la compréhension de M. T... sur la personne du mandataire, cette irrégularité formelle nécessitant en application de l'article 114 du code de procédure civile qu'il justifie d'un grief ; qu'elle conteste avoir usé d'une fausse qualité en faisant délivrer l'assignation et souligne que M. T... a affirmé dans ses conclusions par ailleurs déposées pour obtenir le changement de liquidateur qu'elle avait été nommée liquidateur de l'EIRL H... T... ; que la SELARL MJ Synergie est bien fondée à soutenir que la création d'une EIRL ne fait pas naître une personne juridique nouvelle et distincte de la personne physique de l'entrepreneur et ne permet que la distinction du patrimoine affecté à l'activité de ce dernier et de protéger son patrimoine personnel ; que l'article L. 526-6 du code de commerce définit en effet dans son article 2 l'EIRL comme un patrimoine affecté, l'acte notarié du 25 avril 2013 invoqué par M. T... lui ayant également rappelé en page 6 « La déclaration d'affectation ne crée pas une personnalité morale distincte de l'entrepreneur individuel »; que l'assignation a été délivrée le 11 janvier à la demande de « MJ Synergie, liquidateur judiciaire de l'EIRL H... T..., inscrite au RCS de Bourg-en-Bresse sous le n° 350 384 081, exerçant sous le nom [...], sise [...] » ; que le numéro du Registre du commerce et des sociétés visé dans cette assignation correspond : - à l'inscription de M. T... en qualité de commerçant qui a fait l'objet d'une cessation d'activité à compter du 25 février 2005, l'extrait Kbis produit mentionnant « Radiation du RCS d'une entreprise équestre individuelle devenue agricole », - à l'identifiant SIRENE de l'entreprise exploitée par l'appelant, ainsi qu'il ressort de l'extrait INSEE du 8 octobre 2012, - aux neuf premiers chiffres du n° SIRET affecté à l'EIRL créé par M. T...; que contrairement à l'affirmation de M. T..., l'EIRL qu'il a créée ne pouvait pas faire l'objet d'une procédure collective et la liquidation de son entreprise individuelle agricole nécessitait que l'affectation à son activité d'une partie de son patrimoine dans le cadre de cette EIRL soit prise en compte pour déterminer la portée des opérations liquidatives; que la SELARL MJ Synergie n'a pas fait usage d'une fausse qualité et disposait de la qualité et des pouvoirs pour agir en qualité de liquidateur judiciaire de l'entreprise individuelle de M. T... ; que l'erreur commise dans la désignation de son administré, provenant d'ailleurs de cette limite imposée par le statut d'EIRL, n'affecte pas sa capacité à agir et ne constitue pas une cause de nullité au sens de l'article 117 du code de procédure civile mais une irrégularité formelle sanctionnée par l'article 114 du même code ; que dans ses conclusions déposées pour obtenir le changement de liquidateur (pièce 20 de l'intimé) M. T... mentionne qu'il agit contre « la SA MJ Synergie (liquidateur de l'EIRL H... T...) SA inscrite au RCS de Bourg-en-Bresse sous le n° 538 422 056 00043 dont le siège social se trouve au [...] agissant dans la présente procédure par le biais de MM. I... R... et K... J... » comme dans sa requête en récusation perpétuelle déposée au greffe du tribunal de grande instance de Bourg-en-Bresse le 20 mars 2017 ; que M. T... était pleinement informé de l'intervention de ce liquidateur judiciaire pour liquider son entreprise individuelle ; qu'il n'invoque et ne justifie ainsi d'aucun grief au sens de l'article 114 précité ;
1/ ALORS QUE constitue une nullité de fond le défaut de capacité d'ester en justice en demande; que constitue ainsi une irrégularité de fond le fait pour le liquidateur judiciaire demandeur désigné dans le cadre d'une procédure de redressement et liquidation judiciaires concernant le demandeur en son ancienne qualité de commerçant dès lors qu'il avait été radié du RCS plusieurs années avant le jugement d'ouverture, de notifier à celui-ci en sa qualité actuelle d' entrepreneur individuel à responsabilité limitée une assignation en inopposabilité de l'affectation prévue par l'article L. 526 du code de commerce; qu'il résulte des constatations de l'arrêt que l'assignation du 11 janvier 2016 a été délivrée à M. H... T... à la requête de « MJ Synergie es qualités de liquidateur de l'EIRL H... T..., inscrite au RCS de Bourg-en-Bresse sous le n° 350 384 081 » mais que la procédure de redressement judiciaire convertie en liquidation judiciaire avait été ouverte non pas à l'égard de M. H... T... exerçant en qualité d'entrepreneur individuel à responsabilité limitée sous le n° de SIRET 350 834 081 0019 mais à l'égard de M. H... T... qui, jusqu'à sa radiation à la date du 25 février 2005, avait exercé en qualité de commerçant sous le n° de RCS 350 834 081; que ces constatations opérées, dont résultait le défaut de capacité d'ester en justice en demande, en écartant la qualification de vice de fond pour rejeter l'exception de nullité de l'assignation, la cour d'appel a violé l'article 117 du code de procédure civile ;
2/ ALORS QUE constitue une nullité de fond le défaut de capacité d'ester en justice en défense; que constitue une irrégularité de fond le fait pour le liquidateur judiciaire demandeur désigné dans le cadre d'une procédure de redressement et liquidation judiciaires concernant le demandeur en son ancienne qualité de commerçant dès lors qu'il avait été radié du RCS plusieurs années avant le jugement d'ouverture, de notifier à celui-ci en sa qualité actuelle d'entrepreneur individuel à responsabilité limitée une assignation en inopposabilité de l'affectation prévue par l'article L. 526 du code de commerce ; qu'il résulte des constatations de l'arrêt que l'assignation du 11 janvier 2016 a été délivrée à M. H... T... à la requête de « MJ Synergie es qualités de liquidateur de l'EIRL H... T..., inscrite au RCS de Bourg-en-Bresse sous le n° 350 384 081 » mais que la procédure de redressement judiciaire convertie en liquidation judiciaire avait été ouverte non pas à l'égard de M. H... T... exerçant en qualité d'entrepreneur individuel à responsabilité limitée sous le n° de SIRET 350.834.081.0019 mais à l'égard de M. H... T... qui jusqu'à sa radiation à la date du 25 février 2005 avait exercé en qualité de commerçant sous le n° de RCS 350.834.081; que ces constatations opérées, dont résultait le défaut de capacité d'ester en justice en défense, en écartant la qualification de vice de fond pour rejeter l'exception de nullité de l'assignation, la cour d'appel a violé l'article 117 du code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION (SUBSIDIAIRE)
Il est fait grief à la cour d'appel de Lyon d'AVOIR dit n'y avoir lieu de se prononcer sur les faux opposés aux jugements rendus par le tribunal de grande instance de Bourg-en-Bresse les 26 février et 29 juin 2015, argués de faux dans l'inscription de faux à titre incident déposée par M. T... le 22 août 2017 ;
AUX MOTIFS QUE si la SELARL MJ Synergie a déclaré vouloir se servir de ces jugements à l'appui de ces moyens et prétentions au visa de l'article 314 du code de procédure civile, l'article 307 de ce code conduit la cour à retenir qu'elle est en mesure de statuer sur le litige sans tenir compte de ces pièces arguées de faux; que l'inscription de faux présentée par M. T... ne tend pas à leur remise en cause mais uniquement à ce que soient retenues fausses plusieurs de leurs mentions ; que le litige entre les parties porte en effet sur des évènements postérieurs à l'intervention de ces décisions ; que les parties ne contestent pas que ces deux décisions de procédure collective sont intervenues et ne discutent pas de la désignation par jugement du 29 juin 2015 de la SELARL MJ Synergie en qualité de liquidateur judiciaire, qualité qui est confirmée par sa publication au BODACC produite par M. T... ;
1/ ALORS QUE le juge se prononce sur le faux à moins qu'il ne puisse statuer sans tenir compte de la pièce arguée de faux ; qu'appelée à statuer sur la nullité de l'assignation délivrée à la demande de « MJ Synergie, liquidateur judiciaire de l'Eirl H... T... », en raison du défaut de capacité d'ester en justice en demande et en défense, la cour d'appel devait nécessairement se prononcer sur le faux incident qui visait les jugements des 26 février et 29 juin 2015 ayant prononcé, respectivement, le redressement judiciaire puis la liquidation judiciaire de M. H... T... et désigné la Selarl MJ Synergie comme mandataire puis comme liquidateur judiciaire ; qu'en jugeant au contraire, pour dire n'y avoir lieu de se prononcer sur les faux opposés, que le litige ne portait que sur des évènements postérieurs à l'intervention de ces décisions, la Cour d'appel a violé l'article 307 du code de procédure civile ;
2/ ALORS QU'à l'appui du faux incident, M. H... T... avait fait valoir dans ses conclusions que les jugements du Tribunal de grande instance de Bourg-En-Bresse des 26 février 2015 et 29 juin 2015 comportaient des mentions inexactes, constatées par les juges, et qu'il en était particulièrement ainsi des constatations de fait suivantes : « Attendu qu'il résulte des indications données à l'audience et des pièces produites que M. H... T... se trouve dans l'impossibilité de faire face à son passif avec son actif disponible
» lesquelles figuraient dans le jugement d'ouverture du redressement judiciaire du 26 février 2015 ; que la cessation des paiements conditionnait l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire et du même coup la désignation de la Selarl MJ Synergie comme mandataire puis comme liquidateur judiciaire, l'une et l'autre litigieuses eu égard à la capacité d'ester en justice en demande et en défense des parties;
qu'en considérant pour dire n'y avoir lieu de se prononcer sur les faux opposés, que « les parties ne constest(aient) pas qu'il est constant que ces deux décisions de procédure collective sont intervenues et ne discutent pas de la désignation par jugement du 29 juin 2015 de la SELARL MJ Synergie en qualité de liquidateur judiciaire », la cour d'appel a violé l'article 4 du code de procédure civile.