Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 9 juillet 2019, 18-18.393, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :



Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bastia, 24 janvier 2018), que M. T... a été mis en redressement puis liquidation judiciaires les 25 février 2009 et 31 mars 2014, M. S... étant désigné liquidateur ; qu'à la demande de ce dernier, la procédure a été clôturée pour insuffisance d'actif par un jugement du 18 janvier 2016 ; que, par une ordonnance du même jour, le président du tribunal a désigné M. I... en remplacement de M. S... , qui avait cessé son activité professionnelle ; que le nouveau liquidateur a demandé la reprise de la liquidation au motif que le prix de vente d'un immeuble n'avait pas été distribué par son prédécesseur ;

Sur le premier moyen :

Attendu que M. T... fait grief à l'arrêt de déclarer M. I... recevable en sa demande de reprise de la liquidation judiciaire alors, selon le moyen :

1°/ que la clôture de la procédure de liquidation judiciaire pour insuffisance d'actif met fin aux fonctions du liquidateur ; que si un mandataire ad hoc peut être désigné pour poursuivre les instances en cours et répartir le cas échéant les sommes perçues à l'issue de ces procédures, il doit l'être par le jugement prononçant la clôture de la liquidation judiciaire, et dans les conditions prévues par les articles L. 643-9, alinéa 3, et R. 643-18, alinéa 2, du code de commerce ; qu'en retenant en l'espèce que Me I... avait qualité pour solliciter la reprise de la procédure de liquidation judiciaire, tout en constatant que ce mandataire judiciaire avait été désigné aux fonctions de liquidateur d'une procédure de liquidation d'ores et déjà clôturée, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, en violation des articles L. 643-9 et R. 643-18 du code de commerce ;

2°/ que la liquidation judiciaire clôturée pour insuffisance d'actif peut être reprise s'il apparaît que des actifs n'ont pas été réalisés ou que des actions dans l'intérêt des créanciers n'ont pas été engagées pendant le cours de la procédure ; que le tribunal est saisi par le liquidateur précédemment désigné, par le ministère public ou par tout créancier intéressé ; qu'en décidant en l'espèce que le liquidateur désigné postérieurement à la clôture de la procédure de liquidation judiciaire avait qualité pour en solliciter la reprise, la cour d'appel a violé l'article L. 643-13 du code de commerce ;

Mais attendu qu'il résulte des constatations de l'arrêt que M. I... a été désigné en remplacement du liquidateur précédent par une ordonnance du président du tribunal de la procédure collective rendue le jour même de la clôture de celle-ci et que cette décision de nomination n'a pas fait l'objet d'un recours ; que la cour d'appel a pu en déduire que M. I... avait qualité pour demander la reprise des opérations de liquidation ; que le moyen n'est pas fondé ;

Et sur le second moyen :

Attendu que M. T... fait grief à l'arrêt d'ordonner la reprise de la liquidation judiciaire alors, selon le moyen :

1°/ que la liquidation judiciaire clôturée pour insuffisance d'actif peut être reprise s'il apparaît que des actifs n'ont pas été réalisés ou que des actions dans l'intérêt des créanciers n'ont pas été engagées au cours de la procédure ; que s'il apparaît en revanche que des sommes issues d'actifs précédemment réalisées n'ont pas été distribuées au cours de la procédure, il est désigné un mandataire ad hoc pour procéder à cette répartition ; qu'en décidant en l'espèce que la découverte de sommes non distribuées au cours de la liquidation justifiait la reprise de la procédure, quand cette circonstance ne pouvait tout au plus donner lieu qu'à la désignation d'un mandataire ad hoc, la cour d'appel a violé l'article L. 643-13 du code de commerce ;

2°/ que la liquidation judiciaire clôturée pour insuffisance d'actif peut être reprise s'il apparaît que des actifs n'ont pas été réalisés ou que des actions dans l'intérêt des créanciers n'ont pas été engagées au cours de la procédure ; que les actions visées au texte concernent l'introduction d'actions en justice ; qu'en jugeant que la répartition entre les créanciers de sommes issues d'actifs précédemment réalisés correspondait à l'engagement d'une action par le liquidateur, la cour d'appel a encore violé l'article L. 643-13 du code de commerce ;

Mais attendu que, la distribution du prix d'actifs vendus par le liquidateur constituant, au sens de l'article L. 643-13 du code de commerce, une opération de réalisation de ces actifs, la cour d'appel n'a pas méconnu ce texte en ordonnant la reprise de la procédure de liquidation judiciaire en vue de la répartition du prix de l'immeuble vendu ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. T... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du neuf juillet deux mille dix-neuf. MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Foussard et Froger, avocat aux Conseils, pour M. T....

PREMIER MOYEN DE CASSATION

L'arrêt infirmatif attaqué encourt la censure ;

EN CE QU' il a ordonné la reprise de la procédure de liquidation judiciaire de M. T... et la distribution des actifs ;

AUX MOTIFS QU' il résulte de la rédaction du jugement de clôture du 18 janvier 2016 qu'à l'audience de clôture, le liquidateur inscrit était M. A... S... ; qu'il s'en déduit donc que l'ordonnance du 18 janvier 2016, qui a désigné M. K... I... "en qualité de mandataire judiciaire (...) dans la procédure collective de M. X... T..." est postérieure au jugement du même jour ; que le mandataire de justice désigné ne peut plus après la clôture procéder à d'autres opérations que celles énoncées d'une part aux articles R. 643-19 et R. 626-40, notamment un compte rendu de fin de mission et la reddition des comptes, et d'autre part à l'article L. 643-13 du code de commerce ; que Me K... I... a donc qualité pour agir ; que sur le fond, l'article L. 643-13 du code de commerce dispose : "Si la clôture de la liquidation judiciaire est prononcée pour insuffisance d'actif et qu'il apparaît que des actifs n'ont pas été réalisés ou que des actions dans l'intérêt des créanciers n'ont pas été engagées pendant le cours de la procédure, celle-ci peut être reprise. – Le tribunal est saisi par le liquidateur précédemment désigné, par le ministère public ou par tout créancier intéressé. S'il est saisi par un créancier, ce dernier doit justifier avoir consigné au greffe du tribunal les fonds nécessaires aux frais des opérations. Le montant des frais consignés lui est remboursé par priorité sur les sommes recouvrées à la suite de la reprise de la procédure. – La reprise de la procédure produit ses effets rétroactivement pour tous les actifs du débiteur que le liquidateur aurait dû réaliser avant la clôture de la procédure de liquidation judiciaire. – Si les actifs du débiteur consistent en une somme d'argent, la procédure prévue au chapitre IV du présent titre est de droit applicable" ; qu'en l'espèce, il est constant que la clôture de la liquidation de M. T... a été prononcée pour insuffisance d'actif ; que tous les actifs ont été réalisés mais il est apparu au mandataire nouvellement nommé que le prix de vente d'un bien immobilier n'avait pas été distribué par son prédécesseur et se trouvait maintenant en sa possession ; qu'il est manifestement de l'intérêt des créanciers et donc du devoir du liquidateur de demander, sans pour autant se contredire, que l'omission soit réparée ; que de même la reprise de la procédure pour permettre au liquidateur d'agir dans l'intérêt des créanciers, sans que ce soit d'ailleurs nécessairement par une procédure judiciaire, est expressément prévue par la loi ; que par ailleurs le premier juge, en déboutant le mandataire liquidateur pour défaut d'élément nouveau apparu après la clôture, a ajouté à la loi ; que toutes les conditions de l'article L. 643-13 du code de commerce étant remplies, le liquidateur est bien fondé à demander la reprise de la procédure de liquidation ;

ALORS QUE, premièrement, la clôture de la procédure de liquidation judiciaire pour insuffisance d'actif met fin aux fonctions du liquidateur ; que si un mandataire ad hoc peut être désigné pour poursuivre les instances en cours et répartir le cas échéant les sommes perçues à l'issue de ces procédures, il doit l'être par le jugement prononçant la clôture de la liquidation judiciaire, et dans les conditions prévues par les articles L. 643-9, alinéa 3, et R. 643-18, alinéa 2, du code de commerce ; qu'en retenant en l'espèce que Me I... avait qualité pour solliciter la reprise de la procédure de liquidation judiciaire, tout en constatant que ce mandataire judiciaire avait été désigné aux fonctions de liquidateur d'une procédure de liquidation d'ores et déjà clôturée, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, en violation des articles L. 643-9 et R. 643-18 du code de commerce ;

ALORS QUE, deuxièmement, la liquidation judiciaire clôturée pour insuffisance d'actif peut être reprise s'il apparaît que des actifs n'ont pas été réalisés ou que des actions dans l'intérêt des créanciers n'ont pas été engagées pendant le cours de la procédure ; que le tribunal est saisi par le liquidateur précédemment désigné, par le ministère public ou par tout créancier intéressé ; qu'en décidant en l'espèce que le liquidateur désigné postérieurement à la clôture de la procédure de liquidation judiciaire avait qualité pour en solliciter la reprise, la cour d'appel a violé l'article L. 643-13 du code de commerce.

SECOND MOYEN DE CASSATION

L'arrêt infirmatif attaqué encourt la censure ;

EN CE QU' il a ordonné la reprise de la procédure de liquidation judiciaire de M. T... et la distribution des actifs ;

AUX MOTIFS QU' il résulte de la rédaction du jugement de clôture du 18 janvier 2016 qu'à l'audience de clôture, le liquidateur inscrit était M. A... S... ; qu'il s'en déduit donc que l'ordonnance du 18 janvier 2016, qui a désigné M. K... I... "en qualité de mandataire judiciaire (...) dans la procédure collective de M. X... T..." est postérieure au jugement du même jour ; que le mandataire de justice désigné ne peut plus après la clôture procéder à d'autres opérations que celles énoncées d'une part aux articles R. 643-19 et R. 626-40, notamment un compte rendu de fin de mission et la reddition des comptes, et d'autre part à l'article L. 643-13 du code de commerce ; que Me K... I... a donc qualité pour agir ; que sur le fond, l'article L. 643-13 du code de commerce dispose : "Si la clôture de la liquidation judiciaire est prononcée pour insuffisance d'actif et qu'il apparaît que des actifs n'ont pas été réalisés ou que des actions dans l'intérêt des créanciers n'ont pas été engagées pendant le cours de la procédure, celle-ci peut être reprise. – Le tribunal est saisi par le liquidateur précédemment désigné, par le ministère public ou par tout créancier intéressé. S'il est saisi par un créancier, ce dernier doit justifier avoir consigné au greffe du tribunal les fonds nécessaires aux frais des opérations. Le montant des frais consignés lui est remboursé par priorité sur les sommes recouvrées à la suite de la reprise de la procédure. – La reprise de la procédure produit ses effets rétroactivement pour tous les actifs du débiteur que le liquidateur aurait dû réaliser avant la clôture de la procédure de liquidation judiciaire. – Si les actifs du débiteur consistent en une somme d'argent, la procédure prévue au chapitre IV du présent titre est de droit applicable" ; qu'en l'espèce, il est constant que la clôture de la liquidation de M. T... a été prononcée pour insuffisance d'actif ; que tous les actifs ont été réalisés mais il est apparu au mandataire nouvellement nommé que le prix de vente d'un bien immobilier n'avait pas été distribué par son prédécesseur et se trouvait maintenant en sa possession ; qu'il est manifestement de l'intérêt des créanciers et donc du devoir du liquidateur de demander, sans pour autant se contredire, que l'omission soit réparée ; que de même la reprise de la procédure pour permettre au liquidateur d'agir dans l'intérêt des créanciers, sans que ce soit d'ailleurs nécessairement par une procédure judiciaire, est expressément prévue par la loi ; que par ailleurs le premier juge, en déboutant le mandataire liquidateur pour défaut d'élément nouveau apparu après la clôture, a ajouté à la loi ; que toutes les conditions de l'article L. 643-13 du code de commerce étant remplies, le liquidateur est bien fondé à demander la reprise de la procédure de liquidation ;

ALORS QUE, premièrement, la liquidation judiciaire clôturée pour insuffisance d'actif peut être reprise s'il apparaît que des actifs n'ont pas été réalisés ou que des actions dans l'intérêt des créanciers n'ont pas été engagées au cours de la procédure ; que s'il apparaît en revanche que des sommes issues d'actifs précédemment réalisées n'ont pas été distribuées au cours de la procédure, il est désigné un mandataire ad hoc pour procéder à cette répartition ; qu'en décidant en l'espèce que la découverte de sommes non distribuées au cours de la liquidation justifiait la reprise de la procédure, quand cette circonstance ne pouvait tout au plus donner lieu qu'à la désignation d'un mandataire ad hoc, la cour d'appel a violé l'article L. 643-13 du code de commerce ;

ET ALORS QUE, deuxièmement, la liquidation judiciaire clôturée pour insuffisance d'actif peut être reprise s'il apparaît que des actifs n'ont pas été réalisés ou que des actions dans l'intérêt des créanciers n'ont pas été engagées au cours de la procédure ; que les actions visées au texte concernent l'introduction d'actions en justice ; qu'en jugeant que la répartition entre les créanciers de sommes issues d'actifs précédemment réalisés correspondait à l'engagement d'une action par le liquidateur, la cour d'appel a encore violé l'article L. 643-13 du code de commerce.ECLI:FR:CCASS:2019:CO00651
Retourner en haut de la page