Cour de cassation, civile, Chambre civile 1, 4 juillet 2019, 18-11.758, Publié au bulletin
Cour de cassation, civile, Chambre civile 1, 4 juillet 2019, 18-11.758, Publié au bulletin
Cour de cassation - Chambre civile 1
- N° de pourvoi : 18-11.758
- ECLI:FR:CCASS:2019:C100651
- Publié au bulletin
- Solution : Cassation partielle
Audience publique du jeudi 04 juillet 2019
Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, du 06 décembre 2017Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme M... (l'avocate) a conclu, le 1er août 2009, un contrat de collaboration avec l'association d'avocats à responsabilité professionnelle individuelle dénommée Vigo (l'association) ; que, le 11 février 2013, elle a annoncé sa décision de quitter l'association et de rechercher une nouvelle collaboration ; que, les 16 et 17 mai 2013, elle a informé les membres de l'association de son état de grossesse ; que l'association a estimé que le délai de prévenance avait couru à compter du 11 février 2013 et que le contrat avait pris fin le 11 juin 2013 ; que, considérant qu'il n'avait pas été mis fin au contrat de collaboration avant la déclaration de sa grossesse, mais pendant la période de protection dont elle bénéficiait en application de l'article 14.4 du règlement intérieur national de la profession d'avocat (RIN) et de l'article 14.4.1 du règlement intérieur du barreau de Paris, l'avocate a saisi le bâtonnier de l'ordre des avocats audit barreau sur le fondement de l'article 142 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 organisant la profession d'avocat ;
Sur le premier moyen, pris en ses première et deuxième branches :
Attendu que l'avocate fait grief à l'arrêt de juger que, dès lors qu'elle avait annoncé sa démission le 11 février 2013, le délai de prévenance avait couru à compter de cette date et de rejeter l'intégralité de ses demandes relatives à la protection des collaboratrices enceintes, alors, selon le moyen :
1°/ que, si, dans le cadre d'un contrat de collaboration libérale, chaque partie peut unilatéralement mettre fin sans formalité audit contrat, à tout le moins faut-il que la résiliation, dès lors qu'elle est supposée procéder d'une initiative du collaborateur, puisse s'inférer d'un acte manifestant sans équivoque sa volonté de quitter effectivement ses fonctions à l'expiration du délai de prévenance ; que la prétendue rupture du contrat est nécessairement équivoque lorsque le collaborateur a préalablement ou concomitamment reçu l'assurance qu'il ne serait assujetti à aucun délai de prévenance strict et qu'il pourrait à sa guise continuer d'exercer le temps qui lui serait nécessaire pour trouver une collaboration de substitution ; qu'il s'infère des constatations de l'arrêt que tel était le cas en l'espèce, si bien qu'en qualifiant de « démission », dans ces circonstances particulières, l'annonce faite dès février 2013 par l'avocate de sa décision de quitter l'association et de rechercher une nouvelle collaboration, pour en déduire, en raison de son antériorité à l'annonce de son état de grossesse, l'inapplicabilité des dispositions protectrices de la collaboratrice enceinte, la cour d'appel a violé l'article 14.4 du RIN, dans sa rédaction applicable à la cause, ensemble l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;
2°/ qu'en tout état de cause, à dater de la déclaration de grossesse et jusqu'à l'expiration de la période de suspension du contrat à l'occasion de l'accouchement, le contrat de collaboration libérale ne peut être rompu sauf manquement grave aux règles professionnelles non liées à l'état de grossesse ; qu'en admettant même que l'annonce par l'avocate de son départ en février 2013 ait pu être assimilé à une « démission », il n'en était pas moins constant que les parties étaient convenues à cette date, par dérogation au délai de prévenance fixé par le RIN, de ne s'enfermer dans aucun délai de prévenance fixe et que c'était finalement la décision ultérieure des associés du cabinet Vigo, intervenue postérieurement à l'annonce de la grossesse, et plus précisément le 10 juin 2013, d'exiger l'application stricte du délai de prévenance fixé par le règlement qui avait entraîné la rupture effective du contrat de collaboration ; qu'en retenant, néanmoins, que n'étaient pas applicable à la cause les règles protectrices de la collaboratrice enceinte prohibant toute rupture du contrat de collaboration postérieurement à la déclaration de sa grossesse, la cour d'appel a de nouveau violé l'article 14.4 du RIN, dans sa rédaction applicable à la cause, ensemble l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;
Mais attendu, en premier lieu, que l'arrêt constate que l'avocate, qui avait choisi de rechercher une autre collaboration dès le mois de février 2013, avait décidé de ne plus collaborer au sein de l'association et annoncé ce choix le 11 février 2013 ; que la cour d'appel a ainsi caractérisé l'existence d'un acte unilatéral par lequel l'avocate avait manifesté de façon claire et non équivoque sa volonté de mettre fin au contrat, peu important que l'association ait été disposée, à cette date, à ne pas appliquer le délai légal de prévenance aux fins de laisser à sa collaboratrice le temps nécessaire aux démarches lui permettant de trouver une autre collaboration ;
Attendu, en second lieu, qu'en ce qu'il soutient que la décision des associés, intervenue le 10 juin 2013, d'exiger l'application stricte du délai de prévenance fixé par le règlement a entraîné la rupture effective du contrat de collaboration, le moyen ne tend qu'à remettre en discussion, devant la Cour de cassation, le pouvoir souverain d'appréciation de la cour d'appel qui, après avoir analysé les messages électroniques échangés courant mai et juin 2013, a estimé que l'association avait appliqué, conformément aux dispositions du contrat de collaboration, le délai légal de prévenance, par suite de l'absence de réponse claire de l'avocate sur la date de son départ et sur un accord possible quant à la durée du délai de prévenance ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur la troisième branche du même moyen :
Vu l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, ensemble les articles 129 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 et 14.4 du RIN, dans sa rédaction applicable ;
Attendu qu'aux termes du dernier texte, sauf meilleur accord des parties, chaque partie peut mettre fin au contrat de collaboration en avisant l'autre au moins trois mois à l'avance ; que, selon la même disposition, ce délai est augmenté d'un mois par année au-delà de trois ans de présence révolus, sans qu'il puisse excéder six mois ;
Attendu que, pour rejeter l'ensemble des demandes de l'avocate relatives à la protection des collaboratrices enceintes, l'arrêt retient que le délai légal applicable à la rupture du contrat de collaboration signé le 1er août 2009 est de quatre mois et non de trois mois, dès lors que l'article 14-4 du RIN applicable prévoit que le délai de trois mois est augmenté d'un mois par année au-delà de trois ans de présence révolus ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'augmentation du délai de prévenance prévu à l'article 14-4, alinéa 2, du RIN est d'un mois par année révolue postérieure aux trois années de présence révolues dont dépend la prolongation de ce délai, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il dit que, Mme M... ayant annoncé sa démission le 11 février 2013, le délai de prévenance courait à compter de cette date, l'arrêt rendu le 6 décembre 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne Mme J..., M. Y..., M. T..., M. K... et Mme H... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatre juillet deux mille dix-neuf.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par la SCP Claire Leduc et Solange Vigand, avocat aux Conseils, pour Mme M....
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir dit et jugé que Mme M... ayant annoncé sa démission le 11 février 2013, le délai de prévenance courrait à compter de cette date et, en conséquence, débouté Mme M... de l'intégralité de ses demandes relatives à la protection des collaboratrices enceintes ;
AUX MOTIFS PROPRES QU'il résulte de l'ensemble des pièces versées aux débats que Mme M..., qui ne conteste pas la teneur de l'entretien du mois de janvier, aux termes duquel il lui appartenait soit de redresser la barre, soit de quitter le cabinet Vigo, a choisi de rechercher une autre collaboration dès le mois de février 2013 ; qu'en effet, les nombreuses attestations de collaborateurs ou ex-collaborateurs du cabinet Vigo révèlent que l'appelante a alors décidé de ne plus collaborer au sein du cabinet d'avocats et que ce qu'elle qualifie dans ses conclusions « d'accord de principe sur la recherche d'une nouvelle collaboration » constitue en réalité une décision de la collaboratrice qui a fait le choix de quitter le cabinet Vigo en l'annonçant le 11 février 2013 ; qu'ainsi Mme X... R..., qui a quitté le cabinet à la fin du mois de juin 2013 et M. César E... attestent que Mme M... leur a fait part de sa décision de quitter le cabinet à cette date en leur indiquant également qu'elle recherchait activement une autre collaboration ; que l'attestation de Mme G... D... , comme celles de M. W... et de M. C... Q..., qui ne sont pas avocats au sein du cabinet Vigo, ne concernent que les propos que leur aurait tenus Mme M... quant à son possible départ ; que c'est donc à juste titre que la sentence déférée a retenu la démission de Mme M... clairement exprimée à la date du 11 février 2013 ; qu'en conséquence, Mme M... est mal fondée à invoquer les dispositions des articles 14.4 du règlement intérieur national et 14.04 du règlement intérieur du barreau de Paris qui ne concernent pas les ruptures de contrat de collaboration intervenues à l'initiative de la collaboratrice enceinte et antérieurement à la grossesse de cette dernière ; que sur le délai de prévenance, le délai légal applicable à la rupture du contrat de collaboration de Mme M... dont le contrat de collaboration avait été signé le 1er août 2009 est de quatre mois et non de trois mois comme le soutient l'appelante dès lors que l'article du RIN applicable prévoit que le délai de trois mois est augmenté d'un mois par année au-delà de trois ans de présence révolus ; qu'il n'est pas contestable, au vu des mails échangés entre les parties, que le cabinet Vigo était prêt à ne pas appliquer le délai légal et à laisser à sa collaboratrice le temps nécessaire aux démarches lui permettant de trouver une autre collaboration ; qu'il résulte également des mails échangés fin mai et début juin 2013 qu'à défaut par celle-ci de respecter ses engagements, le cabinet Vigo qui n'obtenait pas de réponse claire quant à la date du épart de Mme M... et par conséquent quant à un accord possible sur la durée du délai de prévenance, a appliqué à juste titre et conformément aux dispositions du contrat de collaboration, le délai légal de quatre mois ; que la renonciation du cabinet Vigo d'appliquer un délai de prévenance consensuel ne résulte donc pas de l'état de grossesse de la collaboratrice mais du comportement de cette dernière qui entendait revenir sur sa décision préalable de sorte que la discrimination alléguée n'est pas démontrée ; qu'en revanche, et même si Mme M... a bénéficié de fait d'un délai raisonnable pour préparer son départ, les conditions dans lesquelles il a été mis fin au délai de prévenance en lui interdisant pour le lendemain tout accès au cabinet d'avocat, caractérisent de la part du cabinet Vigo une faute qui a causé un préjudice moral certain à Mme M... du fait de la brutalité des conditions de la rupture, cependant qu'un délai supplémentaire pouvait parfaitement lui être concédé pour organiser son départ effectif, d'autant que le cabinet Vigo avait accepté à l'origine une durée du délai de prévenance négociée et que le retour au délai légal a été décidé la veille de sa mise en application ; que c'est donc à juste titre que la sentence déférée a alloué à Mme M... la somme de 10.000 € en réparation du préjudice résultant des conditions de la rupture du contrat de collaboration ;
ET AUX MOTIFS, à les supposer adoptés de la sentence entreprise, QU' il convient de rechercher, au vu des pièces produites, si Mme I... M... a ou n'a pas, le 11 février 2013, clairement donné sa démission, prenant ainsi l'initiative de la rupture de son contrat de collaboration, étant précisé qu'aucun formalisme n'est exigé pour la rupture du contrat de collaboration libérale, le fait que cette rupture n'ait pas été actée par écrit ne pouvant remettre en cause sa réalité et sa validité ; que chacune des parties communique pour démontrer sa position (
) ; que l'AARPI Vigo produit de nombreuses attestations émanant d'avocats du cabinets, d'avocats extérieurs au cabinet ou ayant quitté le cabinet et d'assistantes, qui démontrent que la décision de démission était clairement actée le 11 février 2013 (
) ; qu'ainsi, ces attestations émanant d'avocats libres de leurs propos sont très claires et démontrent que c'est à juste titre que le cabinet Vigo soutient que la démission, même non formalisée, a été clairement exprimée le 11 février 20013 par Mme I... M..., qui a décidé de la rendre publique en informant l'intégralité des collaborateurs et associés du cabinet, ainsi que des confrères extérieurs ; que cette démission est de surcroît établie par les conditions mêmes dans lesquelles la collaboration de Mme I... M... s'est déroulée à compter de la mi-février, puisque celle-ci a accepté de changer de bureau, un nouveau collaborateur a été engagé pour la remplacer, elle n'assistait que très épisodiquement aux réunions d'agendas, aucun nouveau dossier ne lui était donné le cabinet lui ayant simplement demandé de finaliser les dossiers en cours et d'assurer le cas échéant les urgences (
) ; que de surcroît et de manière surabondante, le cabinet Vigo démontre le respect porté aux collaboratrices enceintes et leur attachement aux principes essentiels de la profession ; que dans ces conditions, les pièces produites aux débats et qui ne peuvent être sérieusement contestées par Mme I... M... démontrent que cette dernière a clairement fait part de sa décision de démissionner le 11 février 2013, le délai de prévenance courant donc à compter de cette date ; que le fait que les parties, conformément aux usages au sein du barreau, aient souhaité dans un premier temps trouver des solutions, dans l'attente de la conclusion d'un nouveau contrat de collaboration, voire prendre en compte la maternité de Mme I... M... pour lui proposer de nouvelles modalités ne peuvent remettre en cause ce principe, faute par les parties d'avoir trouvé un accord ; que cependant, même si une recherche de solution amiable conforme à ce principe a été tentée et a échoué, les pièces produites de part et d'autre démontrent que la date butoir de départ du 11 février n'a été décidée que la veille, la fin du délai de prévenance n'ayant jamais été annoncée avec précision et le cabinet Vigo ayant toujours accepté le principe d'un délai de prévenance allongé ; cependant, au regard des discussions intervenues, le fait que Mme I... M... apprenne le 10 juin que le contrat prenait fin le 11 est particulièrement brutal ; que ces conditions brutales, si elles peuvent être comprises, au regard de l'inquiétude légitime que les nouvelles prétentions de Mme I... M... ont pu susciter, ont causé à celle-ci un préjudice moral ;
1/ ALORS QUE si, dans le cadre d'un contrat de collaboration libérale, chaque partie peut unilatéralement mettre fin sans formalité audit contrat, à tout le moins faut-il que la résiliation, dès lors qu'elle est supposée procéder d'une initiative du collaborateur, puisse s'inférer d'un acte manifestant sans équivoque sa volonté de quitter effectivement ses fonctions à l'expiration du délai de prévenance ; que la prétendue rupture du contrat est nécessairement équivoque lorsque le collaborateur a préalablement ou concomitamment reçu l'assurance qu'il ne serait assujetti à aucun délai de prévenance strict et qu'il pourrait à sa guise continuer d'exercer le temps qui lui serait nécessaire pour trouver une collaboration de substitution ; qu'il s'infère des constatations de l'arrêt que tel était le cas en l'espèce (cf. notamment, l'arrêt p. 4, pénultième al.), si bien qu'en qualifiant de « démission », dans ces circonstances particulières, l'annonce faite dès février 2013 par Mme M... de sa décision de quitter le cabinet Vigo et de rechercher une nouvelle collaboration, pour en déduire, en raison de son antériorité à l'annonce de son état de grossesse, l'inapplicabilité des dispositions protectrices de la collaboratrice enceinte, la cour d'appel a violé l'article 14.4 du règlement intérieur national (RIN) de la profession d'avocat, dans sa rédaction applicable à la cause, ensemble l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;
2/ ALORS QUE, en tout état de cause, à dater de la déclaration de grossesse et jusqu'à l'expiration de la période de suspension du contrat à l'occasion de l'accouchement, le contrat de collaboration libérale ne peut être rompu sauf manquement grave aux règles professionnelles non liées à l'état de grossesse ; qu'en admettant même que l'annonce par Mme M... de son départ en février 2013 ait pu être assimilé à une « démission », il n'en était pas moins constant que les parties étaient convenues à cette date, par dérogation au délai de prévenance fixé par le règlement intérieur national (RIN), de ne s'enfermer dans aucun délai de prévenance fixe et que c'était finalement la décision ultérieure des associés du cabinet Vigo, intervenue postérieurement à l'annonce de la grossesse, et plus précisément le 10 juin 2013, d'exiger l'application stricte du délai de prévenance fixé par le règlement qui avait entraîné la rupture effective du contrat de collaboration ; qu'en retenant néanmoins que n'étaient pas applicable à la cause les règles protectrices de la collaboratrice enceinte prohibant toute rupture du contrat de collaboration postérieurement à la déclaration de sa grossesse, la cour d'appel a de nouveau violé l'article 14.4 du règlement intérieur national (RIN) de la profession d'avocat, dans sa rédaction applicable à la cause, ensemble l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;
3/ ALORS QUE, subsidiairement, sauf meilleur accord, chaque partie peut mettre fin au contrat de collaboration en avisant l'autre au moins trois mois à l'avance ; que ce délai est augmenté d'un mois par année au-delà de trois ans de présence révolus, sans qu'il puisse excéder six mois ; qu'il s'en déduit que le collaborateur qui ne bénéficie pas encore de quatre ans révolus d'ancienneté ne peut prétendre, à défaut d'accord dérogatoire, qu'à un délai de prévenance de trois mois et non de quatre mois ; qu'en décidant le contraire, pour écarter le moyen tiré de la renonciation du cabinet Vigo à se prévaloir du délai de prévenance fixé, à défaut d'accord, par le RIN, la cour d'appel a encore violé l'article 14.4 du règlement intérieur national (RIN) de la profession d'avocat, dans sa rédaction applicable à la cause, ensemble l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016.
SECOND MOYEN DE CASSATION
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Mme M... de toutes demandes plus amples ou contraires, et ce faisant d'avoir rejeté ses demandes tendant au paiement des sommes de 33.000 et 50.000 €, au titre respectivement de ses préjudices financier et moral du fait du caractère discriminatoire de la rupture du contrat de collaboration, ensemble d'avoir limité à la somme de 10.000 € la condamnation prononcée au titre de son préjudice moral afférent aux conditions de la rupture ;
AUX MOTIFS QUE qu'il n'est pas contestable, au vu des mails échangés entre les parties, que le cabinet Vigo était prêt à ne pas appliquer le délai légal et à laisser à sa collaboratrice le temps nécessaire aux démarches lui permettant de trouver une autre collaboration ; qu'il résulte également des mails échangés fin mai et début juin 2013 qu'à défaut par celle-ci de respecter ses engagements, le cabinet Vigo qui n'obtenait pas de réponse claire quant à la date du départ de Mme M... et par conséquent quant à un accord possible sur la durée du délai de prévenance, a appliqué à juste titre et conformément aux dispositions du contrat de collaboration, le délai légal de quatre mois ; que la renonciation du cabinet Vigo d'appliquer un délai de prévenance consensuel ne résulte donc pas de l'état de grossesse de la collaboratrice mais du comportement de cette dernière qui entendait revenir sur sa décision préalable de sorte que la discrimination alléguée n'est pas démontrée ; qu'en revanche, et même si Mme M... a bénéficié de fait d'un délai raisonnable pour préparer son départ, les conditions dans lesquelles il a été mis fin au délai de prévenance en lui interdisant pour le lendemain tout accès au cabinet d'avocat, caractérisent de la part du cabinet Vigo une faute qui a causé un préjudice moral certain à Mme M... du fait de la brutalité des conditions de la rupture, cependant qu'un délai supplémentaire pouvait parfaitement lui être concédé pour organiser son départ effectif, d'autant que le cabinet Vigo avait accepté à l'origine une durée du délai de prévenance négociée et que le retour au délai légal a été décidé la veille de sa mise en application ; que c'est donc à juste titre que la sentence déférée a alloué à Mme M... la somme de 10.000 € en réparation du préjudice résultant des conditions de la rupture du contrat de collaboration ;
1/ ALORS QUE toute discrimination directe ou indirecte est interdite en raison de la grossesse ou de la maternité ; que toute personne qui s'estime victime d'une discrimination doit seulement présenter les faits qui permettent d'en faire présumer l'existence, à charge pour la partie défenderesse, au vu de ces éléments, de prouver que la mesure en cause est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ; que ces règles s'appliquent aux relations entre une collaboratrice libérale et le ou les avocats auprès desquels elle exerce ; qu'en retenant, pour rejeter les demandes de Mme M... fondées sur l'existence d'une discrimination liée à la révélation de sa grossesse, que la discrimination alléguée n'était pas démontrée, la cour d'appel, qui a inversé la charge de la preuve, a violé l'article 1353 (anciennement 1315) du code civil, ensemble l'article 4 de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 ;
2/ ALORS QUE toute discrimination directe ou indirecte est interdite en raison de la grossesse ou de la maternité ; que toute personne qui s'estime victime d'une discrimination doit seulement présenter les faits qui permettent d'en faire présumer l'existence, à charge pour la partie défenderesse, au vu de ces éléments, de prouver que la mesure en cause est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ; que ces règles s'appliquent aux relations entre une collaboratrice libérale et le ou les avocats auprès desquels elle exerce ; qu'en retenant que la discrimination alléguée par Mme M... n'était pas démontrée, sans avoir recherché, comme elle y était invitée (cf. les dernières écritures de Mme M..., p. 17), si le courriel que lui avait adressé le cabinet Vigo le 27 mai 2013, qui faisait clairement le lien entre l'annonce de la grossesse et l'urgence supposée en résulter de la fixation de la date de son départ effectif, ensemble la quasi-concomitance des dates auxquelles Mme M... avait annoncé son état de grossesse et le cabinet Vigo subitement décidé d'exiger le strict respect du délai de prévenance fixé par l'article 14-4 du RIN, ne constituaient pas des faits de nature à faire présumer l'existence d'une discrimination en raison de la grossesse, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 2, 3°, 4 et 5, I de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 pris dans leur rédaction applicable en la cause.ECLI:FR:CCASS:2019:C100651
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme M... (l'avocate) a conclu, le 1er août 2009, un contrat de collaboration avec l'association d'avocats à responsabilité professionnelle individuelle dénommée Vigo (l'association) ; que, le 11 février 2013, elle a annoncé sa décision de quitter l'association et de rechercher une nouvelle collaboration ; que, les 16 et 17 mai 2013, elle a informé les membres de l'association de son état de grossesse ; que l'association a estimé que le délai de prévenance avait couru à compter du 11 février 2013 et que le contrat avait pris fin le 11 juin 2013 ; que, considérant qu'il n'avait pas été mis fin au contrat de collaboration avant la déclaration de sa grossesse, mais pendant la période de protection dont elle bénéficiait en application de l'article 14.4 du règlement intérieur national de la profession d'avocat (RIN) et de l'article 14.4.1 du règlement intérieur du barreau de Paris, l'avocate a saisi le bâtonnier de l'ordre des avocats audit barreau sur le fondement de l'article 142 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 organisant la profession d'avocat ;
Sur le premier moyen, pris en ses première et deuxième branches :
Attendu que l'avocate fait grief à l'arrêt de juger que, dès lors qu'elle avait annoncé sa démission le 11 février 2013, le délai de prévenance avait couru à compter de cette date et de rejeter l'intégralité de ses demandes relatives à la protection des collaboratrices enceintes, alors, selon le moyen :
1°/ que, si, dans le cadre d'un contrat de collaboration libérale, chaque partie peut unilatéralement mettre fin sans formalité audit contrat, à tout le moins faut-il que la résiliation, dès lors qu'elle est supposée procéder d'une initiative du collaborateur, puisse s'inférer d'un acte manifestant sans équivoque sa volonté de quitter effectivement ses fonctions à l'expiration du délai de prévenance ; que la prétendue rupture du contrat est nécessairement équivoque lorsque le collaborateur a préalablement ou concomitamment reçu l'assurance qu'il ne serait assujetti à aucun délai de prévenance strict et qu'il pourrait à sa guise continuer d'exercer le temps qui lui serait nécessaire pour trouver une collaboration de substitution ; qu'il s'infère des constatations de l'arrêt que tel était le cas en l'espèce, si bien qu'en qualifiant de « démission », dans ces circonstances particulières, l'annonce faite dès février 2013 par l'avocate de sa décision de quitter l'association et de rechercher une nouvelle collaboration, pour en déduire, en raison de son antériorité à l'annonce de son état de grossesse, l'inapplicabilité des dispositions protectrices de la collaboratrice enceinte, la cour d'appel a violé l'article 14.4 du RIN, dans sa rédaction applicable à la cause, ensemble l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;
2°/ qu'en tout état de cause, à dater de la déclaration de grossesse et jusqu'à l'expiration de la période de suspension du contrat à l'occasion de l'accouchement, le contrat de collaboration libérale ne peut être rompu sauf manquement grave aux règles professionnelles non liées à l'état de grossesse ; qu'en admettant même que l'annonce par l'avocate de son départ en février 2013 ait pu être assimilé à une « démission », il n'en était pas moins constant que les parties étaient convenues à cette date, par dérogation au délai de prévenance fixé par le RIN, de ne s'enfermer dans aucun délai de prévenance fixe et que c'était finalement la décision ultérieure des associés du cabinet Vigo, intervenue postérieurement à l'annonce de la grossesse, et plus précisément le 10 juin 2013, d'exiger l'application stricte du délai de prévenance fixé par le règlement qui avait entraîné la rupture effective du contrat de collaboration ; qu'en retenant, néanmoins, que n'étaient pas applicable à la cause les règles protectrices de la collaboratrice enceinte prohibant toute rupture du contrat de collaboration postérieurement à la déclaration de sa grossesse, la cour d'appel a de nouveau violé l'article 14.4 du RIN, dans sa rédaction applicable à la cause, ensemble l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;
Mais attendu, en premier lieu, que l'arrêt constate que l'avocate, qui avait choisi de rechercher une autre collaboration dès le mois de février 2013, avait décidé de ne plus collaborer au sein de l'association et annoncé ce choix le 11 février 2013 ; que la cour d'appel a ainsi caractérisé l'existence d'un acte unilatéral par lequel l'avocate avait manifesté de façon claire et non équivoque sa volonté de mettre fin au contrat, peu important que l'association ait été disposée, à cette date, à ne pas appliquer le délai légal de prévenance aux fins de laisser à sa collaboratrice le temps nécessaire aux démarches lui permettant de trouver une autre collaboration ;
Attendu, en second lieu, qu'en ce qu'il soutient que la décision des associés, intervenue le 10 juin 2013, d'exiger l'application stricte du délai de prévenance fixé par le règlement a entraîné la rupture effective du contrat de collaboration, le moyen ne tend qu'à remettre en discussion, devant la Cour de cassation, le pouvoir souverain d'appréciation de la cour d'appel qui, après avoir analysé les messages électroniques échangés courant mai et juin 2013, a estimé que l'association avait appliqué, conformément aux dispositions du contrat de collaboration, le délai légal de prévenance, par suite de l'absence de réponse claire de l'avocate sur la date de son départ et sur un accord possible quant à la durée du délai de prévenance ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur la troisième branche du même moyen :
Vu l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, ensemble les articles 129 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 et 14.4 du RIN, dans sa rédaction applicable ;
Attendu qu'aux termes du dernier texte, sauf meilleur accord des parties, chaque partie peut mettre fin au contrat de collaboration en avisant l'autre au moins trois mois à l'avance ; que, selon la même disposition, ce délai est augmenté d'un mois par année au-delà de trois ans de présence révolus, sans qu'il puisse excéder six mois ;
Attendu que, pour rejeter l'ensemble des demandes de l'avocate relatives à la protection des collaboratrices enceintes, l'arrêt retient que le délai légal applicable à la rupture du contrat de collaboration signé le 1er août 2009 est de quatre mois et non de trois mois, dès lors que l'article 14-4 du RIN applicable prévoit que le délai de trois mois est augmenté d'un mois par année au-delà de trois ans de présence révolus ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'augmentation du délai de prévenance prévu à l'article 14-4, alinéa 2, du RIN est d'un mois par année révolue postérieure aux trois années de présence révolues dont dépend la prolongation de ce délai, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il dit que, Mme M... ayant annoncé sa démission le 11 février 2013, le délai de prévenance courait à compter de cette date, l'arrêt rendu le 6 décembre 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne Mme J..., M. Y..., M. T..., M. K... et Mme H... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatre juillet deux mille dix-neuf.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par la SCP Claire Leduc et Solange Vigand, avocat aux Conseils, pour Mme M....
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir dit et jugé que Mme M... ayant annoncé sa démission le 11 février 2013, le délai de prévenance courrait à compter de cette date et, en conséquence, débouté Mme M... de l'intégralité de ses demandes relatives à la protection des collaboratrices enceintes ;
AUX MOTIFS PROPRES QU'il résulte de l'ensemble des pièces versées aux débats que Mme M..., qui ne conteste pas la teneur de l'entretien du mois de janvier, aux termes duquel il lui appartenait soit de redresser la barre, soit de quitter le cabinet Vigo, a choisi de rechercher une autre collaboration dès le mois de février 2013 ; qu'en effet, les nombreuses attestations de collaborateurs ou ex-collaborateurs du cabinet Vigo révèlent que l'appelante a alors décidé de ne plus collaborer au sein du cabinet d'avocats et que ce qu'elle qualifie dans ses conclusions « d'accord de principe sur la recherche d'une nouvelle collaboration » constitue en réalité une décision de la collaboratrice qui a fait le choix de quitter le cabinet Vigo en l'annonçant le 11 février 2013 ; qu'ainsi Mme X... R..., qui a quitté le cabinet à la fin du mois de juin 2013 et M. César E... attestent que Mme M... leur a fait part de sa décision de quitter le cabinet à cette date en leur indiquant également qu'elle recherchait activement une autre collaboration ; que l'attestation de Mme G... D... , comme celles de M. W... et de M. C... Q..., qui ne sont pas avocats au sein du cabinet Vigo, ne concernent que les propos que leur aurait tenus Mme M... quant à son possible départ ; que c'est donc à juste titre que la sentence déférée a retenu la démission de Mme M... clairement exprimée à la date du 11 février 2013 ; qu'en conséquence, Mme M... est mal fondée à invoquer les dispositions des articles 14.4 du règlement intérieur national et 14.04 du règlement intérieur du barreau de Paris qui ne concernent pas les ruptures de contrat de collaboration intervenues à l'initiative de la collaboratrice enceinte et antérieurement à la grossesse de cette dernière ; que sur le délai de prévenance, le délai légal applicable à la rupture du contrat de collaboration de Mme M... dont le contrat de collaboration avait été signé le 1er août 2009 est de quatre mois et non de trois mois comme le soutient l'appelante dès lors que l'article du RIN applicable prévoit que le délai de trois mois est augmenté d'un mois par année au-delà de trois ans de présence révolus ; qu'il n'est pas contestable, au vu des mails échangés entre les parties, que le cabinet Vigo était prêt à ne pas appliquer le délai légal et à laisser à sa collaboratrice le temps nécessaire aux démarches lui permettant de trouver une autre collaboration ; qu'il résulte également des mails échangés fin mai et début juin 2013 qu'à défaut par celle-ci de respecter ses engagements, le cabinet Vigo qui n'obtenait pas de réponse claire quant à la date du épart de Mme M... et par conséquent quant à un accord possible sur la durée du délai de prévenance, a appliqué à juste titre et conformément aux dispositions du contrat de collaboration, le délai légal de quatre mois ; que la renonciation du cabinet Vigo d'appliquer un délai de prévenance consensuel ne résulte donc pas de l'état de grossesse de la collaboratrice mais du comportement de cette dernière qui entendait revenir sur sa décision préalable de sorte que la discrimination alléguée n'est pas démontrée ; qu'en revanche, et même si Mme M... a bénéficié de fait d'un délai raisonnable pour préparer son départ, les conditions dans lesquelles il a été mis fin au délai de prévenance en lui interdisant pour le lendemain tout accès au cabinet d'avocat, caractérisent de la part du cabinet Vigo une faute qui a causé un préjudice moral certain à Mme M... du fait de la brutalité des conditions de la rupture, cependant qu'un délai supplémentaire pouvait parfaitement lui être concédé pour organiser son départ effectif, d'autant que le cabinet Vigo avait accepté à l'origine une durée du délai de prévenance négociée et que le retour au délai légal a été décidé la veille de sa mise en application ; que c'est donc à juste titre que la sentence déférée a alloué à Mme M... la somme de 10.000 € en réparation du préjudice résultant des conditions de la rupture du contrat de collaboration ;
ET AUX MOTIFS, à les supposer adoptés de la sentence entreprise, QU' il convient de rechercher, au vu des pièces produites, si Mme I... M... a ou n'a pas, le 11 février 2013, clairement donné sa démission, prenant ainsi l'initiative de la rupture de son contrat de collaboration, étant précisé qu'aucun formalisme n'est exigé pour la rupture du contrat de collaboration libérale, le fait que cette rupture n'ait pas été actée par écrit ne pouvant remettre en cause sa réalité et sa validité ; que chacune des parties communique pour démontrer sa position (
) ; que l'AARPI Vigo produit de nombreuses attestations émanant d'avocats du cabinets, d'avocats extérieurs au cabinet ou ayant quitté le cabinet et d'assistantes, qui démontrent que la décision de démission était clairement actée le 11 février 2013 (
) ; qu'ainsi, ces attestations émanant d'avocats libres de leurs propos sont très claires et démontrent que c'est à juste titre que le cabinet Vigo soutient que la démission, même non formalisée, a été clairement exprimée le 11 février 20013 par Mme I... M..., qui a décidé de la rendre publique en informant l'intégralité des collaborateurs et associés du cabinet, ainsi que des confrères extérieurs ; que cette démission est de surcroît établie par les conditions mêmes dans lesquelles la collaboration de Mme I... M... s'est déroulée à compter de la mi-février, puisque celle-ci a accepté de changer de bureau, un nouveau collaborateur a été engagé pour la remplacer, elle n'assistait que très épisodiquement aux réunions d'agendas, aucun nouveau dossier ne lui était donné le cabinet lui ayant simplement demandé de finaliser les dossiers en cours et d'assurer le cas échéant les urgences (
) ; que de surcroît et de manière surabondante, le cabinet Vigo démontre le respect porté aux collaboratrices enceintes et leur attachement aux principes essentiels de la profession ; que dans ces conditions, les pièces produites aux débats et qui ne peuvent être sérieusement contestées par Mme I... M... démontrent que cette dernière a clairement fait part de sa décision de démissionner le 11 février 2013, le délai de prévenance courant donc à compter de cette date ; que le fait que les parties, conformément aux usages au sein du barreau, aient souhaité dans un premier temps trouver des solutions, dans l'attente de la conclusion d'un nouveau contrat de collaboration, voire prendre en compte la maternité de Mme I... M... pour lui proposer de nouvelles modalités ne peuvent remettre en cause ce principe, faute par les parties d'avoir trouvé un accord ; que cependant, même si une recherche de solution amiable conforme à ce principe a été tentée et a échoué, les pièces produites de part et d'autre démontrent que la date butoir de départ du 11 février n'a été décidée que la veille, la fin du délai de prévenance n'ayant jamais été annoncée avec précision et le cabinet Vigo ayant toujours accepté le principe d'un délai de prévenance allongé ; cependant, au regard des discussions intervenues, le fait que Mme I... M... apprenne le 10 juin que le contrat prenait fin le 11 est particulièrement brutal ; que ces conditions brutales, si elles peuvent être comprises, au regard de l'inquiétude légitime que les nouvelles prétentions de Mme I... M... ont pu susciter, ont causé à celle-ci un préjudice moral ;
1/ ALORS QUE si, dans le cadre d'un contrat de collaboration libérale, chaque partie peut unilatéralement mettre fin sans formalité audit contrat, à tout le moins faut-il que la résiliation, dès lors qu'elle est supposée procéder d'une initiative du collaborateur, puisse s'inférer d'un acte manifestant sans équivoque sa volonté de quitter effectivement ses fonctions à l'expiration du délai de prévenance ; que la prétendue rupture du contrat est nécessairement équivoque lorsque le collaborateur a préalablement ou concomitamment reçu l'assurance qu'il ne serait assujetti à aucun délai de prévenance strict et qu'il pourrait à sa guise continuer d'exercer le temps qui lui serait nécessaire pour trouver une collaboration de substitution ; qu'il s'infère des constatations de l'arrêt que tel était le cas en l'espèce (cf. notamment, l'arrêt p. 4, pénultième al.), si bien qu'en qualifiant de « démission », dans ces circonstances particulières, l'annonce faite dès février 2013 par Mme M... de sa décision de quitter le cabinet Vigo et de rechercher une nouvelle collaboration, pour en déduire, en raison de son antériorité à l'annonce de son état de grossesse, l'inapplicabilité des dispositions protectrices de la collaboratrice enceinte, la cour d'appel a violé l'article 14.4 du règlement intérieur national (RIN) de la profession d'avocat, dans sa rédaction applicable à la cause, ensemble l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;
2/ ALORS QUE, en tout état de cause, à dater de la déclaration de grossesse et jusqu'à l'expiration de la période de suspension du contrat à l'occasion de l'accouchement, le contrat de collaboration libérale ne peut être rompu sauf manquement grave aux règles professionnelles non liées à l'état de grossesse ; qu'en admettant même que l'annonce par Mme M... de son départ en février 2013 ait pu être assimilé à une « démission », il n'en était pas moins constant que les parties étaient convenues à cette date, par dérogation au délai de prévenance fixé par le règlement intérieur national (RIN), de ne s'enfermer dans aucun délai de prévenance fixe et que c'était finalement la décision ultérieure des associés du cabinet Vigo, intervenue postérieurement à l'annonce de la grossesse, et plus précisément le 10 juin 2013, d'exiger l'application stricte du délai de prévenance fixé par le règlement qui avait entraîné la rupture effective du contrat de collaboration ; qu'en retenant néanmoins que n'étaient pas applicable à la cause les règles protectrices de la collaboratrice enceinte prohibant toute rupture du contrat de collaboration postérieurement à la déclaration de sa grossesse, la cour d'appel a de nouveau violé l'article 14.4 du règlement intérieur national (RIN) de la profession d'avocat, dans sa rédaction applicable à la cause, ensemble l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;
3/ ALORS QUE, subsidiairement, sauf meilleur accord, chaque partie peut mettre fin au contrat de collaboration en avisant l'autre au moins trois mois à l'avance ; que ce délai est augmenté d'un mois par année au-delà de trois ans de présence révolus, sans qu'il puisse excéder six mois ; qu'il s'en déduit que le collaborateur qui ne bénéficie pas encore de quatre ans révolus d'ancienneté ne peut prétendre, à défaut d'accord dérogatoire, qu'à un délai de prévenance de trois mois et non de quatre mois ; qu'en décidant le contraire, pour écarter le moyen tiré de la renonciation du cabinet Vigo à se prévaloir du délai de prévenance fixé, à défaut d'accord, par le RIN, la cour d'appel a encore violé l'article 14.4 du règlement intérieur national (RIN) de la profession d'avocat, dans sa rédaction applicable à la cause, ensemble l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016.
SECOND MOYEN DE CASSATION
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Mme M... de toutes demandes plus amples ou contraires, et ce faisant d'avoir rejeté ses demandes tendant au paiement des sommes de 33.000 et 50.000 €, au titre respectivement de ses préjudices financier et moral du fait du caractère discriminatoire de la rupture du contrat de collaboration, ensemble d'avoir limité à la somme de 10.000 € la condamnation prononcée au titre de son préjudice moral afférent aux conditions de la rupture ;
AUX MOTIFS QUE qu'il n'est pas contestable, au vu des mails échangés entre les parties, que le cabinet Vigo était prêt à ne pas appliquer le délai légal et à laisser à sa collaboratrice le temps nécessaire aux démarches lui permettant de trouver une autre collaboration ; qu'il résulte également des mails échangés fin mai et début juin 2013 qu'à défaut par celle-ci de respecter ses engagements, le cabinet Vigo qui n'obtenait pas de réponse claire quant à la date du départ de Mme M... et par conséquent quant à un accord possible sur la durée du délai de prévenance, a appliqué à juste titre et conformément aux dispositions du contrat de collaboration, le délai légal de quatre mois ; que la renonciation du cabinet Vigo d'appliquer un délai de prévenance consensuel ne résulte donc pas de l'état de grossesse de la collaboratrice mais du comportement de cette dernière qui entendait revenir sur sa décision préalable de sorte que la discrimination alléguée n'est pas démontrée ; qu'en revanche, et même si Mme M... a bénéficié de fait d'un délai raisonnable pour préparer son départ, les conditions dans lesquelles il a été mis fin au délai de prévenance en lui interdisant pour le lendemain tout accès au cabinet d'avocat, caractérisent de la part du cabinet Vigo une faute qui a causé un préjudice moral certain à Mme M... du fait de la brutalité des conditions de la rupture, cependant qu'un délai supplémentaire pouvait parfaitement lui être concédé pour organiser son départ effectif, d'autant que le cabinet Vigo avait accepté à l'origine une durée du délai de prévenance négociée et que le retour au délai légal a été décidé la veille de sa mise en application ; que c'est donc à juste titre que la sentence déférée a alloué à Mme M... la somme de 10.000 € en réparation du préjudice résultant des conditions de la rupture du contrat de collaboration ;
1/ ALORS QUE toute discrimination directe ou indirecte est interdite en raison de la grossesse ou de la maternité ; que toute personne qui s'estime victime d'une discrimination doit seulement présenter les faits qui permettent d'en faire présumer l'existence, à charge pour la partie défenderesse, au vu de ces éléments, de prouver que la mesure en cause est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ; que ces règles s'appliquent aux relations entre une collaboratrice libérale et le ou les avocats auprès desquels elle exerce ; qu'en retenant, pour rejeter les demandes de Mme M... fondées sur l'existence d'une discrimination liée à la révélation de sa grossesse, que la discrimination alléguée n'était pas démontrée, la cour d'appel, qui a inversé la charge de la preuve, a violé l'article 1353 (anciennement 1315) du code civil, ensemble l'article 4 de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 ;
2/ ALORS QUE toute discrimination directe ou indirecte est interdite en raison de la grossesse ou de la maternité ; que toute personne qui s'estime victime d'une discrimination doit seulement présenter les faits qui permettent d'en faire présumer l'existence, à charge pour la partie défenderesse, au vu de ces éléments, de prouver que la mesure en cause est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ; que ces règles s'appliquent aux relations entre une collaboratrice libérale et le ou les avocats auprès desquels elle exerce ; qu'en retenant que la discrimination alléguée par Mme M... n'était pas démontrée, sans avoir recherché, comme elle y était invitée (cf. les dernières écritures de Mme M..., p. 17), si le courriel que lui avait adressé le cabinet Vigo le 27 mai 2013, qui faisait clairement le lien entre l'annonce de la grossesse et l'urgence supposée en résulter de la fixation de la date de son départ effectif, ensemble la quasi-concomitance des dates auxquelles Mme M... avait annoncé son état de grossesse et le cabinet Vigo subitement décidé d'exiger le strict respect du délai de prévenance fixé par l'article 14-4 du RIN, ne constituaient pas des faits de nature à faire présumer l'existence d'une discrimination en raison de la grossesse, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 2, 3°, 4 et 5, I de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 pris dans leur rédaction applicable en la cause.