Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 27 mars 2019, 17-31.116, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :



Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. G... a été engagé le 9 février 2005 par la société Heliotronic en qualité de VRP exclusif ; que le 15 mars 2013, il a saisi la juridiction prud'homale d'une demande de résiliation judiciaire du contrat de travail ; que le 3 février 2014, il a été licencié pour faute grave ; que, par jugement du tribunal de commerce de Castres du 4 mai 2018, la société Heliotronic a été placée en liquidation judiciaire, Mme T... ayant été désignée en qualité de liquidateur ;

Sur le premier moyen pris en ses première à troisième, cinquième, septième et huitième branches :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen annexé qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur le premier moyen pris en sa quatrième branche :

Vu l'article 1184 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;

Attendu que pour débouter le salarié de sa demande de résiliation judiciaire, l'arrêt retient que l'article 11 du contrat de travail stipulait que les frais professionnels (déplacement, hébergement) exposés par lui seraient entièrement à sa charge, que de fait, le salarié n'a jamais, en huit ans de travail, sollicité ou justifié des frais qui se seraient heurtés à un refus de l'employeur puisqu'il n'a jamais rien réclamé ni justifié, que pour cette raison, il ne peut reprocher à la société d'avoir manqué à son obligation de rembourser ses frais ;

Qu'en statuant ainsi, par des motifs inopérants, alors qu'il résultait de ses constatations que le contrat de travail comportait une clause réputée non écrite comme mettant à la charge d'un salarié les frais engagés par celui-ci pour les besoins de son activité professionnelle et que l'absence de réclamation du salarié du remboursement des frais professionnels qu'il avait supportés n'était pas de nature à rendre le manquement inexistant, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Et attendu que la cassation sur le premier moyen entraîne, en application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation par voie de conséquence des chefs de dispositif critiqués par le second moyen se rapportant au licenciement ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il soit besoin de statuer sur le premier moyen pris en sa sixième branche :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. G... de sa demande de résiliation judiciaire, de ses demandes au titre de l'indemnité légale de licenciement, de l'indemnité de préavis et congés payés afférents, de dommages-intérêts pour licenciement abusif et pour préjudice moral et en ce qu'il dit que le licenciement repose sur une faute grave, l'arrêt rendu le 21 septembre 2017, entre les parties, par la cour d'appel d'Orléans ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bourges ;

Condamne Mme T..., ès qualités, aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne Mme T..., ès qualités, à payer à M. G... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept mars deux mille dix-neuf.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat aux Conseils, pour M. G...

PREMIER MOYEN DE CASSATION

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir jugé que la société Héliotronic n'avait pas violé ses obligations contractuelles, d'avoir jugé que la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur n'était pas fondée, d'avoir en conséquence débouté le salarié de ses demandes en paiement des sommes de 3.329,38 € au titre de l‘indemnité légale de licenciement, 15.000 € au titre de l'indemnité de préavis, 1.560 € au titre des congés payés afférents, 50.000 € au titre de l'indemnité de licenciement abusif, 45.161 € nets de CSG CRDS à titre de dommages et intérêts compensateurs du préjudice lié à la baisse de rémunération, 10.000 € nets de CSG CRDS à titre de dommages et intérêts compensateurs du préjudice lié aux sanctions pécuniaires illites, 30.000 € nets de CSG CRDS de dommages-intérêts pour préjudice moral, et d'avoir limité la condamnation de la société Héliotronic à payer à M. G... la somme de 30.000 euros représentant le remboursement des frais professionnels exposés par lui pour les années 2009 à 2013 ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE, sur la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de la société, sur la violation invoquée de l'obligation de fournier du travail, ce VRP assure qu'il était obligé de respecter de manière stricte le contrat de travail puisque dans l'article quatre, objet du contrat il était précisé qu'il devait visiter les clients particuliers dont les noms et adresses étaient fournis par la société selon un emploi du temps établi par elle, et à même de pouvoir assurer au moins 10 rendez-vous par semaine ; que l'article cinq ajoutait que les coordonnées des clients à visiter restaient l'entière propriété de la société et qu'il exerçait son activité dans les départements suivants : Aube, Loiret, Seine-et-Marne, Yonne et de manière sporadique, dans le Cher et le Val-d'Oise ; que cependant, il était tenu de respecter l'article 11 du contrat de travail, qui stipulait qu'une commission de 20 % lui serait accordée sur le montant hors taxes pour toute vente réalisée par lui pour un client dont les coordonnées ne lui étaient pas fournies par la société pour la pose de radiateur ; que même si le contrat de travail ne renvoyait pas aux dispositions de l'article L. 7311-3 du code du travail et à l'ANI de 1975, il convient de retenir que l'activité de représentation est celle qui caractérise le VRP et qu'elle se définit comme étant le fait de prospecter une clientèle, existence ou éventuelle, à l'extérieur de l'entreprise, dans le but de prendre ou de provoquer des commandes ; qu'il doit personnellement rechercher des clients et leur rendre visite pour leur présenter des produits ou services proposés par l'entreprise pour lesquels il travaille ; qu'il doit à la fois visiter la clientèle des existants et rechercher de nouveaux clients ; que son interprétation suivant laquelle il n'aurait été tenu que de se rendre aux rendez-vous organisés par l'employeur est en totale contradiction avec les principes et avec la signification claire de l'article 11 du contrat précité ; que les termes susceptibles d'interprétation doivent être pris dans le sens qui convient le mieux en matière du contrat, en sorte que l'article 11 ne peut venir qu'en complément de ce qui était précisé dans l'article 4 ; que par ailleurs, il est produit au dossier les emplois du temps fournis à M. G... pendant plusieurs années qui démontrent que la société ne lui donnait que autre ou cinq adresses de clients par semaine, ce qui s'avère notoirement insuffisant par rapport aux salaires globaux qu'il retirés de son activité, qui étaient, en moyenne, en 2009 de 4.304 €, et en 2010 de 4.207 € ; qu'il est clair qu'en sus des adresses fournies par la société, il a, de manière très régulière, prospecté des clients nouveaux, ce qui explique les rémunérations relativement confortables dont il a bénéficié ; que dans ces conditions, il n'y a pas lieu de retenir la violation de l'obligation de fournier du travail pour les raisons précitées ; que sur la violation alléguée de l'interdiction des sanctions pécuniaires illicites, l'article L. 1331-2 du code du travail dispose que les amendes ou autres sanctions pécuniaires sont interdites ; que toute dispositions ou stipulation contraire est réputée non écrite ; qu'en l'espèce, il n'a reçu strictement aucune sanction ; qu'en matière de commissions saisies en fonction du taux de remise accordé au client, étant entendu que ce taux de remise est fixé en-deçà duquel il ne pouvait y avoir aucune commission, sauf le respect du minimum conventionnel VRP ; qu'aucune commission ne saurait être due en présence d'une remise supérieure à 25 % ; qu'or, il ressort des éléments versés au débat qu'il a très largement excédé ce taux de remise autorisée dans certains cas, en sorte qu'il a perçu une commission à un taux inférieur au taux minimum de 8,6 % ; que selon ses propres pièces, en octobre 2013, il a perçu des commissions au taux moyen de 7,43 % en ayant consenti des remises au taux moyen de 37,96 % ; que ce mois-là il a systématiquement dépassé le taux de remise autorisé ; qu'il s'ensuit qu'il n'a pas existé de manquements à la prohibition des sanctions financières ; que sur le manquement allégué à l'obligation de loyauté, il prétend que l'employeur aurait manqué à son obligation de loyauté parce qu'il aurait concurrencé son propre VRP en vendant ces produits par d'autres canaux ; qu'il était contractuellement convenu qu'il assurerait la représentation de la société Héliotronic pour les produits de cette marque-là, en sorte que l'employeur pouvait parfaitement se réserver la possibilité de commercialiser, par ailleurs et par d'autres canaux, tout produit d'une autre marque, même si celle-ci lui appartenait, en sorte que tous les développements de celui-ci autour de la diffusion des produits de marque MDC s'avèrent totalement inopérants ; que cette marque était exclusivement dédiée à internet et n'avait aucun lieu avec la vente directe en particulier pratiqué par M. G... sous la marque Héliotronic ; que sur le manquement allégué à l'obligation de remboursement des frais, l'article 11 du contrat de travail stipulait que les frais professionnels (déplacement, hébergement) exposés par lui seraient entièrement à sa charge ; que de fait, il n'a jamais, en huit ans de travail, sollicité ou justifié des frais qui se seraient heurtés à un refus de l'employeur puisqu'il n'a jamais rien réclamé ni justifié ; que pour cette raison, il ne peut reprocher à la société d'avoir manqué à son obligation de rembourser ses frais ; que sur la modification alléguée unilatérale de la rémunération, son ressort géographique a été étendu et il lui appartenait de développer son propre carnet de commandes à destination de la société ; que comme il s'en est abstenu, il n'est pas recevable à invoquer la modification unilatérale de sa rémunération, qui s'est calqué très strictement sur le travail déployé ; que si, au total, aucun manquement grave de la société ayant empêché la poursuite des relations contractuelles ne peut être caractérisé à son encontre, il s'ensuit que la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de la société ne pourra qu'être rejetée, comme mal fondée et comme l'ont décidé déjà les premiers juges, ainsi que toutes les demandes concernant l'indemnité légale l'indemnité de préavis, les congés payés afférents ainsi que les dommages-intérêts pour licenciement abusif, puisque, s'il avait été établi que les manquements graves avaient été fondés, la demande de résiliation judiciaire aurait pris les effets de licenciement sans cause réelle et sérieuse (
) ; que sur ses autres demandes financières : il conclut à l'octroi d'une somme de 45.161 €, en compensation du préjudice qui serait résulté de la diminution de sa rémunération ; qu'il a été détaillé, plus haut, que cette diminution est le fruit, d'une part, d'un manque de prospection et d'autre part, du dépassement du taux de rabais consenti aux clients, qui fait diminuer mécaniquement ces commissions ; qu'aussi ne peut-il se voir allouer le moindre centime au titre de cette prétention ; qu'il en va de même pour la demande de 10.000 euros au titre des sanctions pécuniaires puisqu'elles n'ont absolument pas existé ; que reste le point litigieux du remboursement des frais professionnels ; que le contrat de travail avait stipulé que ceux-ci restaient entièrement à sa charge ; que cependant, aujourd'hui, la société n'en conteste pas le principe, mais argue simplement que son adversaire n'a rien sollicité pendant huit ans et qu'au surplus les seules pièces produites devant la cour s'avèrent illisibles et ne peuvent, en tout cas, constituer une base de remboursement ; qu'en pratique, M. G... a attendu plus de 10 ans pour produire aux débats une centaine de petites fiches concernant des taxes de péages d'autoroute et de frais de gazole ; qu'il est difficile eu égard au temps passé, de les rapporter avec certitude à des déplacements professionnels ; que par ailleurs, la cour ne peut que s'étonner de l'importance des frais de carburant, qui avoisinent très régulièrement 600 € par mois, ce qui est totalement irréaliste ; qu'il en résulte que si le principe du remboursement des frais professionnels est parfaitement admissible et admis de manière tacite par la société, ce ne peut être sur de tels tarifs ; que dans ces conditions, la cour, tout bien considéré, fixera à 22.500 € ses frais de 2009 à 2013 ; qu'il revendique également des frais d'entretien de son véhicule, qui devront rester raisonnablement fixés à 7.500 € pour ces années-là, en sorte que sa créance totale pour ses frais professionnels ne dépassera pas 30.000 € que la société sera condamnée à lui verser ;

AUX MOTIFS ADOPTES QUE sur la demande de résiliation judiciaire suivie d'un licenciement, lorsqu'un salarié demande la résiliation judiciaire de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, tout en continuant à travailler à son service, et que ce dernier licencie ultérieurement pour d'autres faits survenus au cours de la poursuite du contrat, le juge doit d'abord rechercher si la demande de résiliation du contrat de travail était justifiée ; que c'est seulement dans le cas contraire qu'il doit se prononcer sur le licenciement notifié par l'employeur ; que la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur doit reposer sur un manquement suffisamment grave rendant impossible la poursuite de la relation contractuelle ; que la gravité du manquement doit être appréciée au regard notamment du critère du temps, qu'à ce titre, si le contrat de travail se poursuit pendant des années sans que le salarié se plaigne de la situation qu'il énonce, sa situation est fragilisée ; qu'une telle action en justice, qui ne constitue pas une prise d'acte de la rupture implique la poursuite des relations contractuelles dans l'attente de la décision du juge du fond ; que c'est au salarié de rapporter la preuve des manquements commis par l'employeur ; que les juges du fond peuvent tenir compte de toutes les circonstances intervenues jusqu'au jour du jugement ; que M. G... a saisi le conseil de prud'hommes d'Orléans le 15 mars 2013 d'une demande tendant à voir prononcer la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l'employeur pour modifications imposées et non acceptées ; qu'ainsi, il estime que la SAS Héliotronic a violé l'obligation de fournir un travail, l'interdiction de sanctions pécuniaires illicites, son obligation générale de loyauté et l'obligation de remboursement des frais professionnels ; que la SAS Héliotronic s'oppose à cette demande arguant du fait qu'aucun des griefs invoqués ne sauraient fonder la résiliation judiciaire ; que faute de diligence de la part du demandeur, soit M. G... et malgré un renvoi de l'affaire, le conseil de prud'hommes a dû prononcer la radiation de l'affaire faute de pouvoir être plaidée devant le bureau de jugement du 28 mai 2014 ; que l'affaire ne fut réinscrite que le 4 juillet 2014 et le 28 août 2014, soit plus de 18 mois après la demande initiale et qu'entre-temps le licenciement pour faute grave de M. G... fut prononcé le 3 février 2014 ; qu'elle ne fut finalement plaidée que le 2 septembre 2015 ; qu'il ressort de toutes ces circonstances que M. G... a tardé à agir et de ce fait ne pouvait pas reprocher à son employeur, la SAS Héliotronic des manquements dont la gravité rendait impossible la poursuite de la relation de travail, qu'en plus tant que la décision des juges n'a pas été rendue, les relations contractuelles se poursuivaient ; que force est de constater que M. G... ne se prononce pas d'ailleurs sur ce point étant donné que depuis il n'a donné aucune nouvelle à son employeur et n'a pas exécuté ses obligations contractuelles ; qu'en plus, l'analyse des pièces versées aux débats par M. G... démontrent que les griefs invoqués n'ont jamais rendu impossible la poursuite du contrat ; que force est de constater toute d'abord que M. G... bien qu'ayant été embauché le 9 février 2005, ne s'est plaint et n'a demandé la résiliation judiciaire de son contrat de travail qu'en 2013 soit 8 ans après son embauche ; (
) que de surcroît, M. G... ne démontre pas que les conditions étaient réunies lors des campagnes promotionnelles de la SAS Héliotronic pour que des commissions lui soient versées en application de taux de remise supérieure à 25 %, voire à 29 % ou 30 % ; qu'en plus, il ressort des éléments versés aux débats qu'il aurait toujours consenti une remise au taux moyen des 37,96 % ; qu'il ne pouvait donc cependant pas prétendre à des commissions pour ces affaires ; qu'enfin, la mauvaise foi de l'employeur n'est pas établie en l'espèce, ni d'ailleurs la violation de l'article L. 1331-2 du code du travail ; que le même raisonnement doit être appliqué à la violation de l'obligation générale de loyauté : qu'en effet, M. G... soutient que l'article 6 de son contrat de travail restreint sa liberté de travail et qu'en plus la SAS Héliotronic commercialisait sous une autre enseigne sur son secteur d'activité des produits de même nature à moindre coût ; que ce faisant elle le concurrençait de manière déloyale ; mais que cet argument ne peut pas non plus être retenu puisqu'il ressort des éléments versés aux débats par la société (cote 12) que les marchés destinataires, le type de clientèle, ainsi que la gamme de produit (marque MDC) sont différents de ceux commercialisés par M. G... sur son secteur d'activité dont les radiateurs s'adressaient essentiellement à une clientèle privée avec des garanties de 20 ans et non de 10 ans ; que ce grief doit aussi être rejeté ; (
) que dans ces circonstances, le conseil constat qu'aucun des griefs sur lesquels M. G... fonde sa résiliation judiciaire n'est établi ni sérieux ; que pourtant, M. G... embauché en 2005, ne s'est jamais plaint de quoi que ce soit mais a attendu 2013, soit 8 ans, pour demander la résiliation judiciaire de son contrat de travail de sorte que les manquements reprochés à son employeur ne rendaient visiblement pas la poursuite de son contrat de travail impossible et ne constituaient pas une faute grave ; qu'enfin, comme il a déjà été rappelé plus haut, il l'a toléré durant au moins 15 mois avant de saisir le conseil et encore 16 mois avant de s'en plaindre devant le conseil de céans ; qu'en conséquence, le conseil dit que la SAS Héliotronic n'a pas violé ses obligations contractuelles et que la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur est infondée ;

1°) ALORS QUE constitue un manquement à ses obligations contractuelles empêchant la poursuite du contrat de travail et justifiant la résiliation judiciaire du contrat à ses torts le fait, pour un employeur, de ne pas fournir une liste de clients potentiels à visiter afin de garantir à son salarié VRP au minimum dix rendez-vous par semaine, tandis que cette obligation figure dans le contrat de travail ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que l'article 4 du contrat de travail de M. G... prévoyait qu'il devait visiter les clients particuliers dont les noms et adresses étaient fournis par la société, selon un emploi du temps établi par elle, afin de pouvoir assurer au moins dix rendez-vous par semaine (arrêt, p. 6 § 4) ; qu'elle a constaté que les emplois du temps fournis à M. G... pendant plusieurs années démontraient que la société ne lui donnait que quatre ou cinq adresses de clients par semaine (arrêt, p. 6 in fine) ; qu'elle aurait dû en déduire que la société Héliotronic avait méconnu ses obligations stipulées à l'article 4 du contrat de travail, en s'abstenant de fournir à M. G... au moins dix rendez-vous par semaine, ce qui constituait un manquement suffisamment grave pour empêcher la poursuite du contrat de travail et justifier sa résiliation aux torts de l'employeur ; qu'en énonçant pourtant qu'il n' y avait pas lieu de retenir la violation de l'obligation de fournir du travail, aux motifs inopérants que M. G... devait à la fois visiter la clientèle des existants et rechercher de nouveaux clients et qu'en sus des adresses fournies par la société il avait de manière très régulière prospecté des clients nouveaux (arrêt, p. 6 in fine et p. 7 § 1), la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, violant l'article L. 1231-1 du code du travail et l'article 1134 du code civil dans sa rédaction applicable au litige, aujourd'hui 1103 du code civil ;

2°) ALORS QUE la rémunération est un élément essentiel du contrat de travail ; que l'employeur ne peut diminuer unilatéralement les commissions prévues au contrat de travail, une telle modification unilatérale constituant un manquement grave empêchant la poursuite du contrat de travail et justifiant la résiliation du contrat aux torts de l'employeur ; que M. G... faisait valoir, avec offre de preuve, que la société Héliotronic avait à plusieurs reprises appliqué des taux de commissionnement inférieurs à ceux prévus au contrat de travail, ce qui constituait une modification du contrat de travail et une sanction pécuniaire illicite ; qu'il ne pouvait lui être opposé qu'aucune commission n'était due en présence d'une remise accordée au client supérieure à 25 % et que M. G... avait régulièrement accordé des remises supérieures à ce seuil, pour justifier ces baisses de commission, dès lors que les documents commerciaux versés aux débats démontraient que l'employeur imposait régulièrement à ses commerciaux de pratiquer des remises clients supérieures à 25 % (concl, p. 10 et 11) ; qu'en jugeant que la diminution des commissions unilatéralement décidée par la société Héliotronic était justifiée par le fait que M. G... avait excédé le taux de remise autorisé de 25 % (arrêt, p. 7 § 5 et 6), pour écarter tout manquement de l'employeur sur ce point, sans répondre aux conclusions de M. G... relatives à la politique commerciale de l'entreprise qui imposait régulièrement aux commerciaux de pratiquer des remises supérieures à 25 %, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

3°) ALORS QUE la détermination du secteur d'activité d'un VRP exclusif est un élément essentiel du contrat de travail ; que la modification unilatérale d'une telle clause, qui est de nature à diminuer la rémunération du salarié, constitue un manquement grave de l'employeur à ses obligations empêchant la poursuite du contrat de travail et justifiant la résiliation judiciaire du contrat à ses torts ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que la société Héliotronic avait unilatéralement étendu le secteur géographique à visiter par M. G..., mais a écarté tout manquement de l'employeur aux motifs inopérants qu'il appartenait au salarié « de développer son propre carnet de commandes à destination de la société ; comme il s'en est abstenu, il n'est pas recevable à invoquer la modification unilatérale de sa rémunération, qui s'est calqué strictement sur le travail déployé » (arrêt, p. 8 § 3) ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, d'où il résultait que l'employeur avait modifié unilatéralement le secteur géographique de M. G..., violant l'article L. 1231-1 du code du travail et l'article 1134 du code civil dans sa rédaction applicable au litige, aujourd'hui 1103 du code civil ;

4°) ALORS QUE les frais qu'un salarié justifie avoir exposés pour les besoins de son activité professionnelle et dans l'intérêt de l'employeur doivent lui être remboursés, sans qu'ils puissent être imputés sur la rémunération qui lui est due, à moins qu'il n'ait été contractuellement prévu qu'il en conserverait la charge moyennant le versement d'une somme fixée à l'avance de manière forfaitaire, et à condition, d'une part, que cette somme forfaitaire ne soit pas manifestement disproportionnée au regard du montant réel des frais engagés, d'autre part, que la rémunération proprement dite du travail reste chaque mois au moins égale au SMIC ; que la clause du contrat de travail qui met à la charge d'un salarié les frais engagés par celui-ci pour les besoins de son activité professionnelle doit être réputée non écrite ; qu'il en résulte que manque à ses obligations l'employeur qui insère dans le contrat de travail une telle clause et qui, en pratique, ne prend pas en charge les frais professionnels de son salarié ; qu'un tel manquement, qui impose au VRP d'engager des dépenses importantes pour travailler, caractérise un manquement grave aux obligations contractuelles de l'employeur empêchant la poursuite du contrat de travail, sans qu'il puisse être reproché au salarié de ne pas avoir sollicité pendant plusieurs années le remboursement de ses frais, auquel il pensait ne pas avoir droit ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que l'article 11 du contrat de travail stipulait que les frais professionnels (déplacements, hébergement) exposés par M. G... seraient entièrement à sa charge et que la société n'avait jamais pris en charge les frais professionnels de son salarié (arrêt, p. 7 in fine) ; qu'en jugeant pourtant qu'il ne pouvait être reproché à la société Héliotronic d'avoir manqué à son obligation de remboursement de frais (arrêt, p. 8 § 1), aux motifs inopérants que M. G... n'avait jamais, en huit ans de travail, sollicité ou justifié des frais qui se seraient heurtés à un refus de l'employeur puisqu'il n'avait jamais rien réclamé ni justifié, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, violant ainsi le principe selon lequel les frais professionnels engagés par le salarié doivent être supportés par l'employeur, l'article L. 1231-1 du code du travail et l'article 1134 du code civil dans sa rédaction applicable au litige, aujourd'hui 1103 du code civil ;

5°) ALORS QUE, subsidiairement, M. G... faisait valoir que l'employeur ne pouvait pas excuser sa propre méconnaissance des dispositions légales, consistant en l'insertion d'une clause illicite dans le contrat de travail, par le fait que le salarié n'aurait rien demandé (concl, p. 15) ; qu'en énonçant qu'il ne pouvait être reproché à la société Héliotronic d'avoir manqué à son obligation de remboursement de frais au motif inopérant que M. G... n'avait jamais, en huit ans de travail, sollicité ou justifié des frais qui se seraient heurtés à un refus de l'employeur puisqu'il n'a jamais rien réclamé ni justifié, sans rechercher, comme il lui était demandé, si la raison pour laquelle M. G... n'avait pas sollicité pendant huit ans le remboursement de ses frais professionnels résidait dans le fait qu'il ignorait que la clause de son contrat prévoyant que de tels frais resteraient à sa charge était illicite, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe selon lequel les frais professionnels engagés par le salarié doivent être supportés par l'employeur, l'article L. 1231-1 du code du travail et l'article 1134 du code civil dans sa rédaction applicable au litige, aujourd'hui 1103 du code civil ;

6°) ALORS QUE la contradiction de motifs équivaut à un défaut de motifs ; que la cour d'appel a estimé qu'il ne pouvait « être reproché à la société d'avoir manqué à son obligation de rembourser ses frais » (arrêt, p. 8 § 1) ; qu'elle a cependant également énoncé, faisant partiellement droit à la demande de remboursement de frais professionnels présentée par le salarié, que « la cour, tout bien considéré, fixera à 22.500 € ses frais de 2009 à 2013. Il revendique également des frais d'entretien de son véhicule, qui devront rester raisonnablement fixés à 7.500 € pour ces années-là, en sorte que sa créance totale pour ses frais professionnels ne dépassera pas 30.000 €, que la société sera condamnée à lui verser » (arrêt, p. 10 § 3) ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a entaché sa décision d'une contradiction de motifs, violant l'article 455 du code de procédure civile ;

7°) ALORS QUE le fait qu'un salarié ait tardé à solliciter la résiliation judiciaire de son contrat de travail et que l'affaire, portée devant le conseil de prud'hommes, ait été radiée avant d'être jugée, ne peut permettre d'écarter la gravité des manquements de l'employeur ni de rejeter la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail ; que la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail ne peut être assimilée à la procédure de licenciement pour faute grave qu'un employeur met en oeuvre l'employeur et qui suppose une mise à pied à titre conservatoire immédiate du salarié ; que la résiliation judiciaire du contrat de travail est fondée dès lors que les manquements sont suffisamment graves pour empêcher la poursuite du contrat de travail ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a rejeté, par motifs adoptés, la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail aux motifs que M. G... avait tardé à agir et de ce fait ne pouvait pas reprocher à son employeur des manquements dont la gravité rendait impossible la poursuite de la relation de travail (jugement, p. 5 § 3) et que « les manquements reprochés ne rendaient visiblement pas la poursuite de son contrat de travail impossible et ne constituaient pas une faute grave » puisque M. G... avait toléré durant au moins quinze mois le comportement de son employeur avant de saisir le conseil de prud'hommes et encore seize mois avant de s'en plaindre devant les juges (jugement, p. 6 § 3) ; qu'en statuant ainsi, par des motifs impropres à établir que les manquements invoqués par M. G... n'empêchaient pas la poursuite du contrat de travail, la cour d'appel a violé l'article L. 1231-1 du code du travail et l'article 1134 du code civil dans sa rédaction applicable au litige, aujourd'hui 1103 du code civil ;

8°) ALORS QUE les juges doivent motiver leur décision et ne peuvent procéder à une des évaluation forfaitaire des frais professionnels à rembourser par l'employeur ; que pour fixer à 22.500 € les frais professionnels de M. G... de 2009 à 2013, et à 7.500 € les frais d'entretien de son véhicule, de sorte que « sa créance totale pour ses frais professionnels ne dépassera pas 30.000 € », la cour d'appel n'a pas motivé sa décision au regard des pièces versées aux débats par M. G... mais a procédé à une évaluation forfaitaire des frais professionnels, violant l'article 455 du code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION (subsidiaire)

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir jugé que le licenciement pour faute grave du 3 février 2014 de M. G... était bien fondé, d'avoir en conséquence débouté le salarié de ses demandes en paiement des sommes de 3.329,38 € au titre de l‘indemnité légale de licenciement, 15.000 € au titre de l'indemnité de préavis, 1.560 € au titre des congés payés afférents, 50.000 € au titre de l'indemnité de licenciement abusif, 45.161 € nets de CSG CRDS à titre de dommages et intérêts compensateurs du préjudice lié à la baisse de rémunération, 10.000 € nets de CSG CRDS à titre de dommages et intérêts compensateurs du préjudice lié aux sanctions pécuniaires illites, 30.000 € nets de CSG CRDS de dommages-intérêts pour préjudice moral et d'avoir limité la condamnation de la société Héliotronic à payer à M. G... la somme de 30.000 euros représentant le remboursement des frais professionnels exposés par lui pour les années 2009 à 2013 ;

AUX MOTIFS QUE, sur les mérites du licenciement pour faute grave : la cause réelle du licenciement est celle qui présente un caractère d'objectivité ; qu'elle doit être existante et exacte ; que la cause sérieuse est celle d'une gravité suffisante pour rendre impossible la poursuite des relations contractuelles ; que la faute grave s'analyse comme une cause réelle et sérieuse de licenciement mais d'une telle gravité telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise, même pendant la durée du préavis ; que la lettre de licenciement du 3 février 2014 expose : « vous avez totalement déserté vos fonctions. Non seulement, vous ne réalisez plus aucune prospection de clientèle sur le secteur d'activité qui vous a été attribué, mais encore vous ne démarchez pas les clients potentiels vers lesquels la société vous oriente. Depuis le mois de septembre, vous avez refusé également de nous rendre-compte de votre activité. Nous avons à déplorer le fait que les seules ventes qui ont été réalisées sur votre secteur concernent pour l'essentiel des commandes complémentaires passées par des particuliers déjà clients de la société. Concernant ces ventes, nous avons d'ailleurs constaté que les consignes de remise sur les prix d'installation de la société ne sont pas respectées » ; que s'il prétend avoir rendu compte de son activité, il devrait être en mesure de produire des copies des documents qui ont servi de support à ses compte-rendu ; que s'il affirme avoir prospecté pris les commandes, là aussi, il devrait, encore, être en mesure de verser au débat les documents correspondants ; que précisément, aucune commission ne lui a été versée les derniers mois du contrat de travail en dehors de la rémunérations minimale garantie en l'absence de toute commande, soit 500 fois le SMIC horaire par trimestre ; qu'il en résulte que M. G... ne prospectait plus ni ne rendait des comptes, ce qui est d'ailleurs cohérent avec les systèmes qu'il a mis en oeuvre pour quitter l'entreprise à ce qu'il croyait être les meilleures conditions financières possibles ; que lui-même ne conteste nullement la matérialité des faits qui lui sont reprochés et prétend simplement qu'il résulterait des manquements de l'employeur à ses propres obligations ; qu'il a été analysé plus haut que cette thèse ne résistait pas à l'examen, si bien que rien en vient plus justifier l'absence de toute activité commerciale ; que le refus de fourniture de planning de prospection prive l'employeur de toute visibilité quant à l'activité de son salarié et l'empêche de mesurer sa performance ; qu'un tel comportement vide de sa substance le contrat de travail et porte une atteinte irrémédiable au pouvoir de subordination ; que cela empêche aussi toute poursuite du contrat, en sorte que le licenciement pour faute grave s'avère parfaitement justifié, la persistance du comportement du salarié, qui a perduré plusieurs mois, empêchant l'exécution du préavis ; que l'exception de prescription ne peut être invoquée, en raison des dispositions de l'article L. 1332-4 du code du travail, puisque les faits reprochés ont continué jusqu'au licenciement ; qu'il en ressort que ces demandes au titre de licenciement infondé devront être rejetées comme mal fondées, s'agissant de l'indemnité légale de licenciement, de l'indemnité de préavis et des congés payés afférents et des dommages-intérêts ; qu'il a sollicité également l'allocation d'une somme de 30.000 € de dommages intérêts pour préjudice moral, comme il a succombé dans toutes ses prétentions précédentes, il ne saurait y avoir un droit quelconque à une telle indemnisation, qui sera repoussée comme infondée ; que sur ses autres demandes financières : il conclut à l'octroi d'une somme de 45.161 €, en compensation du préjudice qui serait résulté de la diminution de sa rémunération ; qu'il a été détaillé, plus haut, que cette diminution est le fruit, d'une part, d'un manque de prospection et d'autre part, du dépassement du taux de rabais consenti aux clients, qui fait diminuer mécaniquement ces commissions ; qu'aussi ne peut-il se voir allouer le moindre centime au titre de cette prétention ; qu'il en va de même pour la demande de 10.000 euros au titre des sanctions pécuniaires puisqu'elles n'ont absolument pas existé ; que reste le point litigieux du remboursement des frais professionnels ; que le contrat de travail avait stipulé que ceux-ci restaient entièrement à sa charge ; que cependant, aujourd'hui, la société n'en conteste pas le principe, mais argue simplement que son adversaire n'a rien sollicité pendant huit ans et qu'au surplus les seules pièces produites devant la cour s'avèrent illisibles et ne peuvent, en tout cas, constituer une base de remboursement ; qu'en pratique, M. G... a attendu plus de 10 ans pour produire aux débats une centaine de petites fiches concernant des taxes de péages d'autoroute et de frais de gazole ; qu'il est difficile eu égard au temps passé, de les rapporter avec certitude à des déplacements professionnels ; que par ailleurs, la cour ne peut que s'étonner de l'importance des frais de carburant, qui avoisinent très régulièrement 600 € par mois, ce qui est totalement irréaliste ; qu'il en résulte que si le principe du remboursement des frais professionnels est parfaitement admissible et admis de manière tacite par la société, ce ne peut être sur de tels tarifs ; que dans ces conditions, la cour, tout bien considéré, fixera à 22.500 € ses frais de 2009 à 2013 ; qu'il revendique également des frais d'entretien de son véhicule, qui devront rester raisonnablement fixés à 7.500 € pour ces années-là, en sorte que sa créance totale pour ses frais professionnels ne dépassera pas 30.000 € que la société sera condamnée à lui verser ;

1°) ALORS QUE, sauf abus ou mauvaise foi du salarié dans l'exercice de son droit d'agir en justice, le fait d'être licencié notamment pour avoir exercé une action en résiliation judiciaire de son contrat de travail emporte à lui seul la nullité du licenciement, sans que le juge n'ait à examiner les autres griefs invoqués ; que l'aveu judiciaire est la déclaration que fait en justice la partie ou son représentant spécialement mandaté ; qu'il fait foi contre celui qui l'a fait et est irrévocable sauf en cas d'erreur de fait ; que la reconnaissance d'un fait par une partie dans ses conclusions constitue un aveu judiciaire ; qu'en l'espèce, M. G... faisait valoir, avec offre de preuve, que la société Héliotronic avait, dans ses conclusions reprises oralement devant le conseil de prud'hommes, reconnu que le licenciement était intervenu en réponse à la procédure de résiliation judiciaire mise en oeuvre par le salarié, que l'employeur qualifiait de « stratagème » ; que cette reconnaissance du lien entre la saisine des prud'hommes par le salarié, pour solliciter la résiliation judiciaire, et son licenciement pour faute grave, constituait un aveu judiciaire (concl, p. 27 et 28) ; qu'en s'abstenant de rechercher, comme il lui était demandé, si la société Héliotronic avait, dans le cadre d'un aveu judiciaire, reconnu avoir licencié M. G... notamment en raison de sa saisine du conseil de prud'hommes aux fins de résiliation judiciaire de son contrat de travail, ce qui portait atteinte à la liberté fondamentale d'agir en justice et rendait son licenciement nul, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1121-1 du code du travail, 1356 du code civil dans sa rédaction applicable au litige, aujourd'hui 1382-2 du code civil, et 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l'homme ;

2°) ALORS QUE l'objet du litige est déterminé par les conclusions des parties, reprises oralement à l'audience ; qu'en l'espèce, la société Héliotronic soutenait dans ses conclusions, reprises oralement à l'audience : « Sur la demande de résiliation judiciaire proprement dite, la position de M. G... est dramatiquement limpide. Il a manifestement décidé de quitter l'entreprise sans être en mesure de lui faire le moindre reproche consistant mais n'a malgré tout pas entendu le faire sans percevoir quelques subsides. C'est ainsi qu'après avoir introduit une action en résiliation judiciaire hasardeuse à laquelle il ne prêtera quelque fondement que très tard, il a poussé la société Héliotronic à le licencier en créant une situation qu'il savait intenable pour l'entreprise (
). Il est ainsi parvenu à rendre la situation intenable pour la société Héliotronic qui évolue dans un contexte déjà économiquement difficile. C'est ce véritable stratagème qui contraindra la société Héliotronic à procéder au licenciement » (concl, p. 17 et 18) ; que la société Héliotronic ayant admis dans ses conclusions que M. G... avait été licencié notamment en raison de son action en résiliation judiciaire, en l'absence de constat d'un abus dans l'exercice du droit d'agir en justice ou de mauvaise foi du salarié, la cour d'appel devait en déduire que le licenciement était nul ; qu'en s'abstenant de le faire, la cour d'appel a violé l'article 4 du code de procédure civile ;

3°) ALORS QUE la charge de la preuve de la faute grave incombe à l'employeur ; qu'en énonçant que si M. G... « prétend avoir rendu compte de son activité, il devrait être en mesure de produire des copies des documents qui ont servi de support à ses compte-rendu. Et s'il affirme avoir prospecté, pris les commandes, là aussi, il devrait être, encore, en mesure de verser au débat les documents correspondants. Précisément, aucune commission ne lui a été versée les derniers mois du contrat de travail en dehors de la rémunération minimale garantie en l'absence de toute commande, soit 500 fois le SMIC horaire par trimestre. Il en résulte que M. G... ne prospectait plus ni ne rendait plus des comptes, ce qui est d'ailleurs cohérent avec les systèmes qu'il a mis en oeuvre pour quitter l'entreprise à ce qu'il croyait être les meilleures conditions financières possibles » (arrêt, p. 8 in fine et p. 9 § 1), la cour d'appel a inversé la charge de la preuve, violant les articles L. 1234-1, L. 1234-5, L. 1234-9 du code du travail et l'article 1353 du code civil ;

4°) ALORS QUE dans une procédure orale, l'objet du litige est déterminé par les conclusions respectives des parties, reprises oralement à l'audience ; qu'en l'espèce, M. G... contestait la matérialité des faits qui lui étaient reprochés (concl, p. 24 et suivantes) ; qu'en énonçant pourtant que « lui-même [M. G...] ne conteste nullement la matérialité des faits qui lui sont reprochés et prétend simplement qu'il résulterait des manquements de l'employeur à ses propres obligations » (arrêt, p. 9 § 2), la cour d'appel a modifié l'objet du litige, violant l'article 4 du code de procédure civile ;

5°) ALORS QUE la contradiction de motifs équivaut à un défaut de motifs ; que la cour d'appel a constaté que M. G... plaidait à titre subsidiaire l'absence de cause réelle et sérieuse de son licenciement et « réfut[ait] le refus de prospecter, le refus de rendre compte de son activité et le non-respect des consignes de remises sur les prix et l'installation » (arrêt, p. 4 § 11) ; qu'en énonçant pourtant que « lui-même ne conteste nullement la matérialité des faits qui lui sont reprochés et prétend simplement qu'il résulterait des manquements de l'employeur à ses propres obligations » (arrêt, p. 9 § 2), la cour d'appel a statué par des motifs contradictoires, violant l'article 455 du code de procédure civile ;

6°) ALORS QUE, subsidiairement, lorsque les erreurs commises par le salarié ne relèvent pas d'une abstention volontaire ou d'une mauvaise volonté délibérée, mais de son éventuelle insuffisance professionnelle, elles ne peuvent constituer une faute grave ; qu'en l'espèce, à supposer que les griefs reprochés au salarié soient établis, la cour d'appel a constaté que la société Héliotronic reprochait à M. G... d'avoir déserté ses fonctions, de n'avoir réalisé aucune prospection de clientèle sur le secteur qui lui était attribué, de ne pas avoir démarché de clients potentiels, de ne pas avoir rendu compte de son activité et de ne pas avoir respecté les consignes de remise sur les prix d'installation (arrêt, p. 8 § 8 à 10) ; qu'en jugeant que le licenciement était fondé sur une faute grave, sans caractériser l'existence d'une mauvaise volonté délibérée de M. G..., tandis que de tels faits étaient tout au plus susceptibles de relever de l'insuffisance professionnelle du salarié, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1234-1, L. 1234-5, L. 1234-9 du code du travail.ECLI:FR:CCASS:2019:SO00518
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