Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 13 mars 2019, 18-11.046, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :



Attendu, selon les arrêts attaqués, rendus en matière de référé, que la société Datafirst, spécialisée dans le développement de solutions informatiques pour la distribution automobile, a conclu avec M. M... et la société XC Investissement un protocole d'accord portant sur l'acquisition des parts détenues par ces derniers dans le capital de la société XC développement, qui exerce la même activité, et stipulant une obligation de non-concurrence à la charge des cédants jusqu'au 30 septembre 2014 ; que reprochant à la société Bee2link, détenue par M. M... et la société XC Investissement, d'avoir démarché ses clients en août 2014, notamment par l'annonce de la mise en place d'un logiciel de la relation client pour l'automobile (CRM), la société Datafirst les a assignés en paiement de dommages-intérêts, d'une part, pour violation de la clause de non-concurrence, d'autre part, pour concurrence déloyale ; que le tribunal a accueilli la première demande et rejeté la seconde ; que par une lettre du 26 mai 2016, la société Datafirst a informé le président du directoire du groupe Volkswagen France que la société Bee2link avait fait l'objet d'une condamnation judiciaire pour concurrence déloyale ; que cette correspondance était adressée à au moins un autre membre du réseau Volkswagen ; qu'invoquant un trouble manifestement illicite résultant de l'envoi de ce courrier, la société Bee2link a assigné la société Datafirst, sur le fondement de l'article 873 du code de procédure civile, pour obtenir des mesures d'interdiction et d'injonction de communication, sous astreinte ;

Sur le moyen unique, pris en ses première et deuxième branches :

Attendu que la société Datafirst fait grief à l'arrêt de lui interdire, sous astreinte, de faire mention auprès de tout tiers, lié de près ou de loin au groupe Volkswagen France, quelqu'en soit le support ou l'expression, de la société Bee2link, de son dirigeant ou de ses produits, et de lui enjoindre de communiquer à la société Bee2link dans un certain délai les nom et coordonnées complètes de toutes les entités ayant été destinataires du courrier litigieux alors, selon le moyen :

1°/ que l'information donnée par une entreprise à un client de la condamnation judiciaire de l'un de ses concurrents, même si elle comporte une erreur sans conséquence sur le fondement juridique de ladite condamnation, qui plus est rectifiée, ne constitue pas un acte de dénigrement ; qu'ainsi, la violation d'une clause de non concurrence, bien qu'ayant un cadre juridique différent, constitue un acte aussi grave et répréhensible qu'un acte de concurrence déloyale commis hors contrat ; qu'au surplus, le fait que l'acte déloyal ait été perpétré dans le cadre d'une relation contractuelle ou hors de ce cadre, est sans incidence pour le client destinataire de l'information ; qu'en décidant au contraire que cette mauvaise qualification juridique sans conséquence pour le client et déjà rectifiée, était constitutive d'un trouble manifestement illicite, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article 1240 du code civil et 873 du code de procédure civile ;

2°/ que le trouble manifestement illicite constitué par l'envoi par une société d'une information erronée à l'un de ses clients sur une entreprise concurrente, ne subsiste plus lorsque l'auteur adresse au destinataire une lettre venant rectifier ladite erreur ; qu'en décidant en l'espèce, que le trouble perdurait sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si la lettre du 15 juin 2016 venant rectifier celle du 26 mai 2016, adressée par la société Datafirst au même destinataire de la société Volkswagen, qui précisait que la société Bee2link avait été condamnée non pas pour concurrence déloyale mais pour « violation d'un engagement contractuel de non concurrence », n'était pas de nature à remédier au prétendu trouble illicite, de même que la lettre adressée en réponse par la société Bee2link elle-même à la société Volkswagen, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions de l'article 873 du code de procédure civile ;

Mais attendu, d'une part, qu'après avoir relevé que la société Datafirst avait présenté devant le tribunal de commerce deux demandes distinctes, dont les fondements juridiques étaient différents, l'une au titre de la violation de la clause de non-concurrence, l'autre au titre de la concurrence déloyale, et constaté que le tribunal, s'il avait effectivement condamné solidairement la société Bee2link et son dirigeant pour non-respect de la clause de non-concurrence, avait expressément rejeté la demande fondée sur la concurrence déloyale, l'arrêt retient, par motifs propres et adoptés, qu'en faisant état, dans le courrier du 26 mai 2016 adressé à la société Volkswagen, d'une condamnation de la société Bee2link pour concurrence déloyale, la société Datafirst avait sciemment modifié le fondement de la condamnation prononcée et qu'elle ne pouvait sérieusement soutenir qu'il s'agissait d'une erreur sémantique ; qu'il retient encore que cette déformation volontaire de la décision de justice ainsi que la référence vague, mais menaçante contenue dans la formule de son courrier « ce dont nous vous laissons mesurer l'impact et les conséquences » caractérise la volonté de créer une suspicion à l'encontre de la société Bee2link ; qu'il retient enfin qu'à l'évidence, le choix de la date d'envoi du courrier un mois après que le groupe Volkswagen France eut été informé par courrier du 26 avril 2016 du déploiement de la solution du concurrent Digitall, n'était pas fortuit, mais tendait manifestement à faire pression sur le groupe Volkswagen France afin qu'il change son choix de solution CRM ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations souveraines, la cour d'appel a pu retenir que le dénigrement de la société Bee2link opéré par la société Datafirst, dans ce contexte particulier, était manifeste et constituait un trouble manifestement illicite, qu'il convenait de faire cesser ;

Et attendu, d'autre part, qu'ayant relevé par motifs adoptés que le courrier litigieux du 26 mai 2016 avait été adressé au président du directoire du groupe Volkswagen France et à au moins l'un des membres de ce réseau, ce dont il résulte que le courrier de rectification adressé le 15 juin 2016 par la société Datafirst à la seule société Volkswagen France était insusceptible en soi de faire cesser le trouble manifestement illicite causé par la diffusion du courrier du 26 mai 2016 auprès des autres distributeurs du groupe, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder à la recherche invoquée que ses constatations rendaient inopérante, a légalement justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le moyen, pris en sa troisième branche :

Vu l'article 873 du code de procédure civile ;

Attendu que l'arrêt confirme l'ordonnance qui, sous astreinte, interdit à la société Datafirst de faire mention auprès de tout tiers, lié de près ou de loin au groupe Volkswagen France, quel qu'en soit le support ou l'expression, de la société Bee2link, de son dirigeant ou de ses produits ;

Qu'en se déterminant ainsi, sans vérifier si la mesure ordonnée n'était pas disproportionnée, au regard des faits de dénigrement, en ce qu'elle empêcherait la société Datafirst de travailler sur ses principaux contrats et avec ses principaux partenaires, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il confirme l'ordonnance qui, sous astreinte, interdit à la société Datafirst de faire mention auprès de tout tiers, lié de près ou de loin au groupe Volkswagen France, quel qu'en soit le support ou l'expression, de la société Bee2link, de son dirigeant ou de ses produits, l'arrêt rendu le 9 mai 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon et rectifié par arrêt du 18 juillet 2017 ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Dijon ;

Condamne la société Bee2link aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à la société Datafirst la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du treize mars deux mille dix-neuf. MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour la société Datafirst.

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt confirmatif attaqué et à l'arrêt en rectification d'erreur matérielle attaqué D'AVOIR interdit à la société Datafirst sous astreinte, de faire mention auprès de tout tiers, lié de près ou de loin au Groupe Volkswagen France, quel qu'en soit le support ou l'expression, de la société Bee2link, de son dirigeant ou de ses produits, DE LUI AVOIR fait injonction de communiquer à la société Bee2link dans un délai de huit jours à compter du prononcé de l'ordonnance, le nom et les coordonnées complètes de toutes les entités ayant été destinataires de courriers ou messages quel qu'en soit le support, à laquelle était jointe une copie de la lettre adressée le 26 mai 2016 au président du directoire du Groupe Volkswagen France, sous astreinte, ET DE L'AVOIR débouté de ses demandes d'injonction à la société Bee2link de produire le courrier en réponse envoyé à la société Volkswagen suite à la lettre du 26 mai 2016 sous astreinte et de condamnation de la société Bee2link à lui payer la somme de 10.000 € pour procédure abusive,

AUX MOTIFS QU'aux termes des dispositions de l'article 873 du Code de procédure civile, le président du Tribunal de commerce peut prescrire même en présence d'une contestation sérieuse, les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent soit pour prévenir un dommage imminent soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite ; en l'espèce, la demande présentée au juge des référés est fondée sur la communication d'une information mensongère sur un concurrent au moment où celui-ci déploie une application ; l'acte de dénigrement invoqué est contesté ; il convient de rappeler les termes exacts de ce qui est reproché à la société Datafirst et contenu dans son courrier du 26 mai 2016 adressé au président du directoire du groupe Volkswagen France : « Enfin et pour que le tableau soit complet il nous semble utile de préciser ici que votre prestataire Bee2link (fournisseur de Digit'all), solidairement avec son dirigeant, ont été récemment et lourdement condamnés en première instance et de façon exécutoire pour concurrence déloyale à notre égard, ce dont nous vous laissons mesurer l'impact et les conséquences » ; comme l'a justement relevé le premier juge, la communication d'une décision de justice par nature publique, n'est pas en soi constitutive d'un quelconque acte de dénigrement, sous réserve cependant que cette décision ne soit pas dénaturée ou altérée ; or, le jugement visé rendu par le tribunal de commerce de Lyon le 12 mai 2016, s'il a effectivement condamné la société Bee2link et son dirigeant solidairement pour non-respect d'une clause de concurrence, a débouté la société Datafirst de sa demande sur le terrain de la concurrence déloyale, celle-ci ayant présenté deux demandes distinctes, l'une au titre de la violation de la clause de non-concurrence, l'autre au titre de la concurrence déloyale, visant des fondements juridiques distincts à savoir respectivement un fondement contractuel et un fondement délictuel ; la société Datafirst qui a ainsi formé deux demandes distinctes sur des fondements différents et qui a été expressément déboutée de sa demande au titre de la concurrence déloyale, ne peut venir sérieusement soutenir qu'il s'agirait d'une erreur sémantique ; cette déformation volontaire de la décision de justice ainsi que la référence vague mais menaçante contenue dans la formule «ce dont nous vous laissons mesurer l'impact et les conséquences» caractérise la volonté de créer une suspicion à l'encontre de Bee2link et un acte de dénigrement ; à titre surabondant, il convient de relever que la clause de non-concurrence était largement expirée au moment de l'envoi de ce courrier puisque se terminant le 30 septembre 2014, ce que le paragraphe incriminé se garde bien de préciser ; c'est donc à bon droit que le premier juge a fait droit à la demande de Bee2link d'interdire à la société Datafirst de faire mention auprès de tout tiers, attachés de près ou de loin au groupe Volkswagen France de la mention de la société Bee2link, de son dirigeant ou de ses produits ; de même, c'est à bon droit qu'il a constaté qu'une copie de la correspondance litigieuse avait été diffusée au moins à l'un des membres du réseau du groupe Volkswagen France et a enjoint à Datafirst de communiquer les noms et coordonnées complètes de toutes les entités ayant été destinataires de courriers ou messages dans laquelle copie de cette lettre était jointe ; ces condamnations ont été assorties à juste titre d'une astreinte pour s'assurer de leur exécution ; l'ordonnance sera donc confirmée et la société Datafirst déboutée en conséquence de ses demandes en communication de correspondance internes à la société Bee2link, de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive comme de celle formée au titre des frais irrépétibles ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QU'il convient en premier lieu de rechercher si la phrase en question constitue un acte de dénigrement ; à titre liminaire, il convient de rappeler que la communication à tout tiers d'une décision de justice, par essence publique, ce qui est le cas en l'espèce, n'est nullement constitutive d'un quelconque acte de dénigrement, sous réserve que ladite décision ne soit pas dénaturée ou altérée ; en revanche, il est tout aussi constant, au visa de la jurisprudence, que la communication d'une telle décision de justice, tronquée, voire même altérée dans sa substance, est susceptible de constituer un tel acte de dénigrement ; en l'espèce il est relevé que dans la correspondance adressée par la société Datafirst au Président du groupe Volkswagen France, la société Datafirst indique que la société Bee2link a été condamnée pour acte de concurrence déloyale, alors même que la société Bee2link et son dirigeant ont été solidairement condamnés pour non-respect d'une clause de non-concurrence : en d'autres termes, le fondement juridique de la condamnation a été, à l'évidence, sciemment modifié puisqu'aussi bien, la condamnation pour défaut de respect d'une clause de non-concurrence repose sur les dispositions de l'article 1134 du Code civil, alors même que de manière constante, une condamnation pour concurrence déloyale repose sur l'article 1382 du Code civil ; cette altération de la condamnation, dont ont fait l'objet la société Bee2link et son dirigeant, M. M... est d'autant plus patente que la société Datafirst a été déboutée par le Tribunal de Commerce de Lyon dans son jugement du 12 mai 2016 de son action sur le terrain de la concurrence déloyale, ce que la société Datafirst ne pouvait ignorer à la simple lecture de ce dernier ; le moyen tiré de l'erreur sémantique invoquée par la société Datafirst ne peut dès lors prospérer favorablement, et à l'évidence, cette dernière a entendu jeter le discrédit sur la société Bee2link en invoquant une condamnation erronée ; ce fait a d'autant plus d'importance que la clause de non-concurrence visée dans le protocole d'accord de 2009, et modifiée par l'avenant de 2012 voyait la terminaison de l'engagement de non-concurrence au 30 septembre 2014, de sorte qu'en tout état de cause, en 2016, cette clause de non-concurrence n'a manifestement plus vocation à s'appliquer ; qu'une telle clause de non-concurrence expirée au 30 septembre 2014 n'a pas vocation à influer d'une manière ou d'une autre le groupe Volkswagen France et son réseau de distribution dans le choix de la solution CRM qu'elle s'apprête à arrêter ; la société Datafirst affirme que l'information critiquée est exacte, alors même qu'il vient d'être démontré supra que l'information en question est fausse ; elle poursuit en considérant que la société Datafirst n'en tire aucune conséquence elle-même et qu'au contraire elle visait à inviter Volkswagen à en évaluer elle-même les conséquences ; ainsi que développé supra, cette affirmation de la société Datafirst ne peut être suivie puisqu'aussi bien, le fondement juridique de la condamnation est différent de celui rapporté par la société Datafirst dans sa correspondance adressée à Volkswagen France, et que justement, la société Datafirst se garde bien de rappeler dans la correspondance précitée que la clause de non-concurrence, réputée avoir été violée par la société Bee2link au visa du jugement précité, est expirée depuis le 30 septembre 2014 ; concernant le choix de la date d'envoi du courrier de la société Datafirst à Volkswagen France, il est acté qu'il intervient un mois après l'information de Volkswagen France du 26 avril 2016 quant au déploiement de la solution du concurrent Digit'all ; à l'évidence, ce choix de date n'est pas fortuit mais avait manifestement vocation à tenter de faire pression sur le groupe Volkswagen France aux fins qu'il change son choix de solution CRM ; le dénigrement de la société Bee2link opéré par la société Datafirst dans ce contexte particulier est manifeste et constitue à l'évidence un trouble manifestement illicite qu'il convient de faire cesser au visa des dispositions de l'article 873 du Code de Procédure Civile ; il y a donc lieu de faire droit à la demande de la société Bee2link, de sorte que la société Datafirst se verra interdire, sous astreinte de 10.000 € par infraction, de faire mention auprès de tout tiers, attachés de près ou de loin au groupe Volkswagen France et donc des différentes marques que ledit groupe exploite, quel qu'en soit le support ou l'expression, de la mention de la société Bee2link, de son dirigeant ou de ses produits ;

ALORS, D'UNE PART, QUE l'information donnée par une entreprise à un client de la condamnation judiciaire de l'un de ses concurrents, même si elle comporte une erreur sans conséquence sur le fondement juridique de ladite condamnation, qui plus est rectifiée, ne constitue pas un acte de dénigrement ; qu'ainsi, la violation d'une clause de non concurrence, bien qu'ayant un cadre juridique différent, constitue un acte aussi grave et répréhensible qu'un acte de concurrence déloyale commis hors contrat ; qu'au surplus, le fait que l'acte déloyal ait été perpétré dans le cadre d'une relation contractuelle ou hors de ce cadre, est sans incidence pour le client destinataire de l'information ; qu'en décidant au contraire que cette mauvaise qualification juridique sans conséquence pour le client et déjà rectifiée, était constitutive d'un trouble manifestement illicite, la Cour d'appel a violé les dispositions de l'article 1240 du Code civil et 873 du Code de procédure civile ;

ALORS, D'AUTRE PART, QUE le trouble manifestement illicite constitué par l'envoi par une société d'une information erronée à l'un de ses clients sur une entreprise concurrente, ne subsiste plus lorsque l'auteur adresse au destinataire une lettre venant rectifier ladite erreur ; qu'en décidant en l'espèce, que le trouble perdurait sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si la lettre du 15 juin 2016 venant rectifier celle du 26 mai 2016, adressée par la société Datafirst au même destinataire de la société Volkswagen, qui précisait que la société Bee2link avait été condamnée non pas pour concurrence déloyale mais pour « violation d'un engagement contractuel de non concurrence », n'était pas de nature à remédier au prétendu trouble illicite, de même que la lettre adressée en réponse par la société Bee2link elle-même à la société Volkswagen, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions de l'article 873 du Code de procédure civile ;

ALORS, ENFIN, QUE le président du Tribunal de commerce peut prescrire les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite, à condition que ces mesures soient justes et proportionnées ; que l'erreur juridique de qualification des faits commise par l'entreprise Datafirst, déjà rectifiée auprès des destinataires, ne justifie pas une interdiction totale de citer le nom, les dirigeants et les produits d'une entreprise avec laquelle elle continue de travailler auprès de leurs clients communs ; qu'une telle mesure outre qu'elle a un effet particulièrement préjudiciable pour l'entreprise, empêchée de travailler sur ses principaux contrats et avec ses principaux partenaires, apparaît totalement disproportionnée à l'inexactitude reprochée et méconnaître le but conservatoire visé à l'article 873 du Code de procédure civile ; qu'en décidant ainsi, la Cour d'appel a violé les dispositions de ce texte.ECLI:FR:CCASS:2019:CO00205
Retourner en haut de la page