Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 6 mars 2019, 17-24.701, Inédit
Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 6 mars 2019, 17-24.701, Inédit
Cour de cassation - Chambre sociale
- N° de pourvoi : 17-24.701
- ECLI:FR:CCASS:2019:SO00341
- Non publié au bulletin
- Solution : Cassation
Audience publique du mercredi 06 mars 2019
Décision attaquée : Cour d'appel de Dijon, du 06 juillet 2017- Président
- M. Chauvet (conseiller doyen faisant fonction de président)
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique pris en sa première branche :
Vu le principe de l'autorité au civil de la chose jugée au pénal ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme R..., employée en qualité de caissière à compter du 1er février 1979, par la société Mazagran services et en dernier lieu en qualité de directrice de magasin, a été licenciée pour faute grave le 13 janvier 2012 pour n'avoir pas respecté l'article 26 du règlement intérieur selon lequel : « toute marchandise sortie du magasin doit faire l'objet d'un passage en caisse préalablement à sa sortie de l'établissement » ; qu'à la suite du dépôt de plainte de son employeur, elle a été relaxée des faits de vol pour lesquels elle était poursuivie ;
Attendu que pour dire le licenciement fondé sur une faute grave et débouter la salariée de l'ensemble de ses demandes, l'arrêt retient qu'elle a sorti du magasin, pour se les approprier, sans les avoir préalablement payés des articles dont il n'est pas, au moins pour certains d'entre eux, établi qu'ils aient été impropres à la consommation ou périmés ;
Qu'en statuant ainsi alors que la décision de relaxe devenue définitive dont avait bénéficié la salariée, poursuivie pour vols, était motivée par le fait que les articles en cause, qui étaient les mêmes que ceux visés dans la lettre de licenciement, avaient été retirés de la vente et mis à la poubelle dans l'attente de leur destruction, car impropres à la consommation, la cour d'appel a violé le principe sus visé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 6 juillet 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Dijon ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Besançon ;
Condamne la société Mazagran services aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Mazagran services à payer à Mme R... née G... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du six mars deux mille dix-neuf. MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat aux Conseils, pour Mme G..., veuve R...
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR jugé fondé le licenciement pour faute grave de Mme R... et d'AVOIR débouté celle-ci de l'ensemble de ses demandes ;
AUX MOTIFS QUE Mme R... a été licenciée pour faute grave par lettre du 13 janvier 2012 rédigée en ces termes : « Le jeudi 22 décembre 2011, M. D... a constaté que vous mettiez dans votre coffre de voiture de la marchandise du magasin. Or, après vérification, il s'avère que cette marchandise n'avait fait l'objet d'aucun paiement de votre part. Le sac de marchandise contenait :
1 salade de museau de porc à 2,46 € avec une DLC au 22/12/2011
4 plaquettes de beurre Noisy à 2,01 €, soit un montant de 8,04 € avec une DLC au 23/12/2011 1 boîte de physalis à 1,38 €
3 paquets de jambons à poêler à 2,86 € soit un montant de 8,58 € avec une DLC au 21/12/2011
1 fleuron de canard à 2 € avec une DLC au 21/12/2011
1 paquet de Gervais fraise à boire à 2,21 € avec une DLC au 18/12/2011
1 rognon de porc X3 à 1,78 € avec une DLC au 22/12/2011
Millefeuille 8 parts à 4,90 € avec une DLC au 21/12/2011
1 taboulé oriental raisin à 0,91 € avec une DLC au 21/12/2011
1 faux-filet de boeuf X2 à 9,09 € avec une DLC au 22/12/2011
1 Tendre Noix à la broche à 2,21 € avec une DLC au 21/12/2011
4 paquets de jambon de Paris 2 tranches à 1,19€ soit un montant de 4,76 € avec une DLC au 22/12/2011
des poires Rochas à 0,95 €
des bananes à 1,28 €
soit pour un montant total de 51,21 €.
Nous avons donc déposé plainte auprès de la gendarmerie. Après perquisition de votre domicile, les gendarmes ont retrouvé dans un sac de la marchandise appartenant au magasin non payé. Celui-ci contenait :
3 paquets de jambon cru 10 tranches à 2,15 € soit un montant total de 6,45 €
1 haché de jambon à 1,84 €
1 paquet de cuisses de poulet rôti à 3,77 €
1 paquet de petits yaourts aux fruits de marque Rick et Rock à 2,72 €
2 pâtes d'amande Vahiné à 2,52 € l'unité, soit un montant total de 5,04 €
3 pâtes d'amande tricolores à 1,54 € l'unité, soit un montant total de 4,92 €
6 pâtes d'amande vertes à 1,58 € l'unité, soit un montant total de 9,48 €
1 pâte d'amande blanche à 1,58 €
1 paquet « Feuilleté de mousse » de marque La Laitière à 2,01 €
1 paquet de 4 yaourts Fjord à 2,01 €
1 paquet de 12 petits suisses Gervais à 2,24 €
1 paquet de faisselle de marque Rians à 2,33 €
1 pot de crème fraîche à 2,17 €
1 pot de 1 kg de faisselle Auchan à 2,76 €
soit un préjudice de 49,32 €.
Vous n'avez pas respecté l'article 26 du règlement intérieur de la société Mazagran qui stipule que « Toute marchandise sortie du magasin doit faire l'objet d'un passage en caisse préalablement à leur sortie de l'établissement ». Cet article ne fait aucune distinction entre la marchandise retirée de la vente et celle toujours en vente. En tant que directrice de magasin, vous ne pouviez ignorer ce règlement intérieur.
Le 22 décembre 2011, vous avez d'ailleurs reconnu ne pas avoir payé ces marchandises devant M. D.... En agissant de la sorte, vous n'avez pas respecté les procédures de caisse en vigueur et le règlement intérieur de l'entreprise.
Compte tenu de votre statut, nous ne saurions tolérer un tel comportement au sein de notre établissement. En effet, celui-ci s'avère extrêmement préjudiciable au bon fonctionnement et à l'image de notre magasin. En conséquence, au regard de ce qui précède, nous sommes dans l'obligation de vous notifier votre licenciement pour faute grave par lettre recommandée avec accusé de réception à compter de la date d'envoi de celle-ci » ;
que la faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise ; qu'il appartient à l'employeur de l'établir ; qu'il est constant que, le 22 décembre 2011, M. D..., responsable régional du supermarché Schiever, informé de ses agissements par d'autres salariés, a constaté, vers 7h du matin, que Mme R..., la directrice du magasin, en sortait et se rendait à son véhicule stationné sur le parking du magasin, tenant un sac dans lequel se trouvaient des marchandises ; que la liste de ces marchandises a été établie le jour même à 7h10 en présence de Mme R... qui a reconnu, par écrit, le même jour, avoir sorti du magasin ces produits périmés qui remplissaient le sac qui était en sa possession ; que cette liste correspond exactement à l'énumération qui en est faite en première partie de l'énumération figurant dans la lettre de licenciement ; que Mme R... indique qu'elle ne savait pas qu'il était interdit de récupérer des articles qui auraient dû être retirés de la vente compte tenu de leur date de péremption et qu'elle avait agi dans le souci d'éviter le gaspillage de la marchandise ; qu'en ce qui concerne les poires et les bananes qu'elle avait récupérées directement dans le rayon, il n'est pas établi qu'elles aient été, ainsi que le soutient Mme R..., impropres à la consommation étant observé qu'elle n'explique pas quel pouvait être l'intérêt pour elle de récupérer des fruits non consommables ; qu'en ce qui concerne les articles énumérés dans la seconde partie, retrouvés dans son réfrigérateur lors de la perquisition ayant eu lieu à son domicile, qu'elle a reconnu avoir pris dans le magasin sans les avoir payés, lors de son audition par les services de police, il ne résulte d'aucun document qu'ils aient été périmés ; que Mme R... ne le prétendait même pas, se bornant, en ce qui concerne les pâtes d'amande, à déclarer qu'il s'agissait d'invendus, ce qu'elle ne prouve pas ; qu'il est établi, au vu de l'ensemble de ces éléments, que Mme R... a sorti du magasin pour se les approprier sans les avoir préalablement payés des articles dont il n'est pas, au moins pour certains d'entre eux, établi qu'ils aient été impropres à la consommation ou périmés ; que ce comportement caractérise de la part de Mme R... un manquement à ses obligations contractuelles d'autant plus grave qu'elle occupait le poste de directrice du magasin, ce qui rendait impossible son maintien dans l'entreprise ; que par suite, son licenciement pour faute grave était justifié ; qu'elle doit en conséquence être déboutée de l'ensemble des demandes qu'elle avait formées au titre des indemnités de rupture ;
1° ALORS QUE l'autorité de la chose jugée au pénal s'attache à l'ensemble des constatations qui sont le soutien nécessaire de la décision répressive ; qu'en l'espèce, l'exposante, poursuivie pour avoir récupéré sans les payer des produits du magasin dans lequel elle travaillait, a été relaxée par un arrêt définitif, au motif que ces produits, périmés, étaient voués à la destruction ; qu'en jugeant, pour retenir l'existence d'une faute grave justifiant son licenciement sans indemnité, qu'il n'était pas établi que tous les produits récupérés aient été impropres à la consommation ou périmés, la cour d'appel a méconnu le principe de l'autorité de la chose jugée au pénal ;
2° ALORS QUE la preuve de l'existence d'une faute grave imputée au salarié incombe à l'employeur ; qu'en retenant, en l'espèce, pour lui imputer une faute grave justifiant son licenciement sans indemnité, que Mme R... ne démontrait pas que tous les produits du magasin qu'elle avait récupérés étaient périmés, quand il appartenait à la société Mazagran Services, à qui incombait la preuve de l'existence de la faute grave alléguée, d'établir que la salariée avait récupéré des produits non périmés, la cour d'appel, qui a inversé la charge de la preuve, a violé l'article 1315 du code civil, dans sa version antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;
3° ALORS QUE seuls peuvent justifier un licenciement pour faute grave des manquements d'une gravité telle qu'ils rendent impossible le maintien du salarié dans l'entreprise ; qu'en l'espèce, en s'abstenant de rechercher si le seul fait d'avoir récupéré des denrées périmées était susceptible de constituer une faute suffisamment grave pour rendre impossible le maintien de Mme R... dans l'entreprise, la cour d'appel, qui n'a pas caractérisé l'existence d'une faute grave, a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail.ECLI:FR:CCASS:2019:SO00341
Sur le moyen unique pris en sa première branche :
Vu le principe de l'autorité au civil de la chose jugée au pénal ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme R..., employée en qualité de caissière à compter du 1er février 1979, par la société Mazagran services et en dernier lieu en qualité de directrice de magasin, a été licenciée pour faute grave le 13 janvier 2012 pour n'avoir pas respecté l'article 26 du règlement intérieur selon lequel : « toute marchandise sortie du magasin doit faire l'objet d'un passage en caisse préalablement à sa sortie de l'établissement » ; qu'à la suite du dépôt de plainte de son employeur, elle a été relaxée des faits de vol pour lesquels elle était poursuivie ;
Attendu que pour dire le licenciement fondé sur une faute grave et débouter la salariée de l'ensemble de ses demandes, l'arrêt retient qu'elle a sorti du magasin, pour se les approprier, sans les avoir préalablement payés des articles dont il n'est pas, au moins pour certains d'entre eux, établi qu'ils aient été impropres à la consommation ou périmés ;
Qu'en statuant ainsi alors que la décision de relaxe devenue définitive dont avait bénéficié la salariée, poursuivie pour vols, était motivée par le fait que les articles en cause, qui étaient les mêmes que ceux visés dans la lettre de licenciement, avaient été retirés de la vente et mis à la poubelle dans l'attente de leur destruction, car impropres à la consommation, la cour d'appel a violé le principe sus visé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 6 juillet 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Dijon ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Besançon ;
Condamne la société Mazagran services aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Mazagran services à payer à Mme R... née G... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du six mars deux mille dix-neuf. MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat aux Conseils, pour Mme G..., veuve R...
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR jugé fondé le licenciement pour faute grave de Mme R... et d'AVOIR débouté celle-ci de l'ensemble de ses demandes ;
AUX MOTIFS QUE Mme R... a été licenciée pour faute grave par lettre du 13 janvier 2012 rédigée en ces termes : « Le jeudi 22 décembre 2011, M. D... a constaté que vous mettiez dans votre coffre de voiture de la marchandise du magasin. Or, après vérification, il s'avère que cette marchandise n'avait fait l'objet d'aucun paiement de votre part. Le sac de marchandise contenait :
1 salade de museau de porc à 2,46 € avec une DLC au 22/12/2011
4 plaquettes de beurre Noisy à 2,01 €, soit un montant de 8,04 € avec une DLC au 23/12/2011 1 boîte de physalis à 1,38 €
3 paquets de jambons à poêler à 2,86 € soit un montant de 8,58 € avec une DLC au 21/12/2011
1 fleuron de canard à 2 € avec une DLC au 21/12/2011
1 paquet de Gervais fraise à boire à 2,21 € avec une DLC au 18/12/2011
1 rognon de porc X3 à 1,78 € avec une DLC au 22/12/2011
Millefeuille 8 parts à 4,90 € avec une DLC au 21/12/2011
1 taboulé oriental raisin à 0,91 € avec une DLC au 21/12/2011
1 faux-filet de boeuf X2 à 9,09 € avec une DLC au 22/12/2011
1 Tendre Noix à la broche à 2,21 € avec une DLC au 21/12/2011
4 paquets de jambon de Paris 2 tranches à 1,19€ soit un montant de 4,76 € avec une DLC au 22/12/2011
des poires Rochas à 0,95 €
des bananes à 1,28 €
soit pour un montant total de 51,21 €.
Nous avons donc déposé plainte auprès de la gendarmerie. Après perquisition de votre domicile, les gendarmes ont retrouvé dans un sac de la marchandise appartenant au magasin non payé. Celui-ci contenait :
3 paquets de jambon cru 10 tranches à 2,15 € soit un montant total de 6,45 €
1 haché de jambon à 1,84 €
1 paquet de cuisses de poulet rôti à 3,77 €
1 paquet de petits yaourts aux fruits de marque Rick et Rock à 2,72 €
2 pâtes d'amande Vahiné à 2,52 € l'unité, soit un montant total de 5,04 €
3 pâtes d'amande tricolores à 1,54 € l'unité, soit un montant total de 4,92 €
6 pâtes d'amande vertes à 1,58 € l'unité, soit un montant total de 9,48 €
1 pâte d'amande blanche à 1,58 €
1 paquet « Feuilleté de mousse » de marque La Laitière à 2,01 €
1 paquet de 4 yaourts Fjord à 2,01 €
1 paquet de 12 petits suisses Gervais à 2,24 €
1 paquet de faisselle de marque Rians à 2,33 €
1 pot de crème fraîche à 2,17 €
1 pot de 1 kg de faisselle Auchan à 2,76 €
soit un préjudice de 49,32 €.
Vous n'avez pas respecté l'article 26 du règlement intérieur de la société Mazagran qui stipule que « Toute marchandise sortie du magasin doit faire l'objet d'un passage en caisse préalablement à leur sortie de l'établissement ». Cet article ne fait aucune distinction entre la marchandise retirée de la vente et celle toujours en vente. En tant que directrice de magasin, vous ne pouviez ignorer ce règlement intérieur.
Le 22 décembre 2011, vous avez d'ailleurs reconnu ne pas avoir payé ces marchandises devant M. D.... En agissant de la sorte, vous n'avez pas respecté les procédures de caisse en vigueur et le règlement intérieur de l'entreprise.
Compte tenu de votre statut, nous ne saurions tolérer un tel comportement au sein de notre établissement. En effet, celui-ci s'avère extrêmement préjudiciable au bon fonctionnement et à l'image de notre magasin. En conséquence, au regard de ce qui précède, nous sommes dans l'obligation de vous notifier votre licenciement pour faute grave par lettre recommandée avec accusé de réception à compter de la date d'envoi de celle-ci » ;
que la faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise ; qu'il appartient à l'employeur de l'établir ; qu'il est constant que, le 22 décembre 2011, M. D..., responsable régional du supermarché Schiever, informé de ses agissements par d'autres salariés, a constaté, vers 7h du matin, que Mme R..., la directrice du magasin, en sortait et se rendait à son véhicule stationné sur le parking du magasin, tenant un sac dans lequel se trouvaient des marchandises ; que la liste de ces marchandises a été établie le jour même à 7h10 en présence de Mme R... qui a reconnu, par écrit, le même jour, avoir sorti du magasin ces produits périmés qui remplissaient le sac qui était en sa possession ; que cette liste correspond exactement à l'énumération qui en est faite en première partie de l'énumération figurant dans la lettre de licenciement ; que Mme R... indique qu'elle ne savait pas qu'il était interdit de récupérer des articles qui auraient dû être retirés de la vente compte tenu de leur date de péremption et qu'elle avait agi dans le souci d'éviter le gaspillage de la marchandise ; qu'en ce qui concerne les poires et les bananes qu'elle avait récupérées directement dans le rayon, il n'est pas établi qu'elles aient été, ainsi que le soutient Mme R..., impropres à la consommation étant observé qu'elle n'explique pas quel pouvait être l'intérêt pour elle de récupérer des fruits non consommables ; qu'en ce qui concerne les articles énumérés dans la seconde partie, retrouvés dans son réfrigérateur lors de la perquisition ayant eu lieu à son domicile, qu'elle a reconnu avoir pris dans le magasin sans les avoir payés, lors de son audition par les services de police, il ne résulte d'aucun document qu'ils aient été périmés ; que Mme R... ne le prétendait même pas, se bornant, en ce qui concerne les pâtes d'amande, à déclarer qu'il s'agissait d'invendus, ce qu'elle ne prouve pas ; qu'il est établi, au vu de l'ensemble de ces éléments, que Mme R... a sorti du magasin pour se les approprier sans les avoir préalablement payés des articles dont il n'est pas, au moins pour certains d'entre eux, établi qu'ils aient été impropres à la consommation ou périmés ; que ce comportement caractérise de la part de Mme R... un manquement à ses obligations contractuelles d'autant plus grave qu'elle occupait le poste de directrice du magasin, ce qui rendait impossible son maintien dans l'entreprise ; que par suite, son licenciement pour faute grave était justifié ; qu'elle doit en conséquence être déboutée de l'ensemble des demandes qu'elle avait formées au titre des indemnités de rupture ;
1° ALORS QUE l'autorité de la chose jugée au pénal s'attache à l'ensemble des constatations qui sont le soutien nécessaire de la décision répressive ; qu'en l'espèce, l'exposante, poursuivie pour avoir récupéré sans les payer des produits du magasin dans lequel elle travaillait, a été relaxée par un arrêt définitif, au motif que ces produits, périmés, étaient voués à la destruction ; qu'en jugeant, pour retenir l'existence d'une faute grave justifiant son licenciement sans indemnité, qu'il n'était pas établi que tous les produits récupérés aient été impropres à la consommation ou périmés, la cour d'appel a méconnu le principe de l'autorité de la chose jugée au pénal ;
2° ALORS QUE la preuve de l'existence d'une faute grave imputée au salarié incombe à l'employeur ; qu'en retenant, en l'espèce, pour lui imputer une faute grave justifiant son licenciement sans indemnité, que Mme R... ne démontrait pas que tous les produits du magasin qu'elle avait récupérés étaient périmés, quand il appartenait à la société Mazagran Services, à qui incombait la preuve de l'existence de la faute grave alléguée, d'établir que la salariée avait récupéré des produits non périmés, la cour d'appel, qui a inversé la charge de la preuve, a violé l'article 1315 du code civil, dans sa version antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;
3° ALORS QUE seuls peuvent justifier un licenciement pour faute grave des manquements d'une gravité telle qu'ils rendent impossible le maintien du salarié dans l'entreprise ; qu'en l'espèce, en s'abstenant de rechercher si le seul fait d'avoir récupéré des denrées périmées était susceptible de constituer une faute suffisamment grave pour rendre impossible le maintien de Mme R... dans l'entreprise, la cour d'appel, qui n'a pas caractérisé l'existence d'une faute grave, a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail.