Cour de cassation, criminelle, Chambre criminelle, 19 février 2019, 19-80.513, Publié au bulletin
Cour de cassation, criminelle, Chambre criminelle, 19 février 2019, 19-80.513, Publié au bulletin
Cour de cassation - Chambre criminelle
- N° de pourvoi : 19-80.513
- ECLI:FR:CCASS:2019:CR00468
- Publié au bulletin
- Solution : Cassation et désignation de juridiction
Audience publique du mardi 19 février 2019
Décision attaquée : Chambre de l'instruction de la cour d'appel de Versailles, du 15 janvier 2019- Président
- M. Soulard
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° H 19-80.513 F-P+B+I
N° 468
SM12
19 FÉVRIER 2019
CASSATION
M. SOULARD président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le dix-neuf février deux mille dix-neuf, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller BONNAL, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général QUINTARD ;
CASSATION et désignation de juridiction sur le pourvoi formé par M. Karim Pascal A..., contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Versailles, en date du 15 janvier 2019, qui a autorisé sa remise aux autorités judiciaires italiennes, en exécution d'un mandat d'arrêt européen ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 5, 6 et 8 de la Convention européenne des droits de l'homme, 1 de la décision-cadre du 13 juin 2002 du Conseil de l'Union européenne (2002/584/JAI) relative au mandat d'arrêt européen et aux procédures de remise entre Etats membres, 1, 4 et 9 de la décision-cadre du 27 novembre 2008 du Conseil de l'Union européenne (2008/909/JAI) concernant l'application du principe de reconnaissance mutuelle aux jugements en matière pénale prononçant des peines ou des mesures privatives de liberté aux fins de leur exécution dans l'Union européenne, 695-24, 728-31, 728-32, 728-33, 695-29, 591 et 593 du code de procédure pénale :
"en ce que l'arrêt attaqué a ordonné la remise de M. A... aux autorités judiciaires italiennes en exécution du mandat d'arrêt décerné 12 décembre 2016 par le procureur général près la cour d'appel de Rome, pour l'exécution d'un arrêt rendu par la cour d'appel de Rome 4 mars 2015, devenu irrévocable le 10 novembre 2016, l'ayant condamné à une peine de dix ans et huit mois d'emprisonnement ;
"aux motifs "que les documents transmis le 20 novembre 2018 par les autorités italiennes, constituées du certificat visé à la décision-cadre 2009/909/JAI libellé au nom de M. A..., afin de demander la reconnaissance de l'arrêt de condamnation rendu à son encontre le 4 mars 2015 par la cour d'appel de Rome et le transfèrement en France de l'exécution de la peine privative de liberté correspondante, de la communication relative à la décision devant être signifiée au condamné, de l'état d'exécution actualisé de l'arrêt du 4 mars 2015 de la cour d'appel de Rome, devenu irrévocable le 10 novembre 2016, permettent de considérer que ces autorités ne s'opposent pas à ce que la peine prononcée par la juridiction italienne soit exécutée sur le territoire français ; que pour autant les dispositions de l'article 695-24 du code de procédure pénale constituent des causes facultatives de refus d'exécution d'un mandat d'arrêt européen et non des causes impératives ; qu'en l'espèce, il résulte de la procédure, et notamment des déclarations même de l'intéressé lors de son interpellation par la brigade de recherche des fugitifs, que M. A..., bien que de nationalité française et algérienne, ne réside plus sur le territoire national depuis 2003, puisqu'il a indiqué le 25 octobre 2018 être arrivé en France au mois d'avril 2018, qu'auparavant il résidait en Espagne avec sa femme et ses cinq enfants, qu'il n'avait aucun emploi depuis son arrivée en France et qu'en Espagne il ne faisait rien depuis 2003, qu'il vivait de ses économies ; qu'il a indiqué être arrivé en France en avril 2018 car il était recherché par les italiens et que de nationalité française, il préférait être interpellé en France ; que l'analyse du casier judiciaire de l'intéressé confirme ses déclarations dans la mesure où la dernière condamnation le concernant prononcée par une juridiction française remonte au 2 février 1996 pour des faits commis le même mois, alors que les condamnations postérieures ont été prononcées en Italie en 2011 et en 2015 pour des faits commis respectivement en 2003 et en 2002, et en Espagne en 2013 et en 2017 pour des faits commis respectivement en 2011 et en 2017 ; que les principaux intérêts familiaux et économiques de M. A... se situent sur le territoire espagnol ; qu'en effet il y a sa résidence habituelle ou demeure sa compagne Mme Monya H... avec laquelle il déclare vivre depuis 21 ans, ainsi que leurs cinq enfants âgés respectivement de 18, 16, 12, 9, 6 ; que sa compagne attend actuellement leur 6ème enfant qui selon les déclarations de l'intéressé devrait naître au mois d'avril prochain ; que ne résident en France que la fille de l'intéressé issue d'une précédente union, Mme Sabrina A..., âgée de 35 ans qui habite à [...] (92) et la mère de M. A..., Mme Gaétane D..., âgée de 72 ans et demeurant à [...] (93) ; que manifestement ces deux proches vivaient d'ores et déjà éloignées de l'intéressé depuis de très nombreuses années ; que l'appartement de Nanterre dans lequel il résidait au moment de son interpellation ne constituait de toute évidence qu'un domicile de passage loué car il se savait recherché par les autorités italiennes ; que le simple fait de bénéficier d'une double nationalité, dont la nationalité française, ne saurait suffire à mettre en échec l'exécution d'un mandat d'arrêt européen ; que rien ne justifie que M. A... exécute la peine prononcée par la cour d'appel de Rome le 4 mars 2015 et devenu irrévocable Ie 10 novembre 2016, sur le territoire français ; qu'il ne sera pas plus difficile à sa compagne et ses enfants, résidant dans le sud de l'Espagne de le visiter en Italie plutôt qu'en France ; qu'à titre purement indicatif, la cour ne peut que constater que les dernières écritures déposées par son conseil le 10 décembre 2018 ne sollicitent plus l'application des dispositions de l'article 694-24 du code de procédure pénale ; qu'il résulte de ce qui précède qu'il n'existe pas de cause facultative de refus qui apparaisse devoir être relevée au sens de l'article 695-24 du code de procédure pénale ; qu'il convient dès lors d'ordonner la remise de M. A... aux autorités judiciaires italiennes en exécution du mandat d'arrêt émis le 12 décembre 2016" ;
"1°) alors que la possibilité d'exécuter une peine ou une mesure privatives de liberté sur le territoire de l'Etat requis, lorsque la personne recherchée en est ressortissante, figure parmi les objectifs de la décision-cadre du 13 juin 2002 modifiée relative au mandat d'arrêt européen et aux procédures de remise entre états membres ; qu'en affirmant "que le simple fait de bénéficier [de] la nationalité française, ne saurait suffire à mettre en échec l'exécution d'un mandat d'arrêt européen", la chambre de l'instruction a méconnu le sens et la portée de la décision-cadre du 13 juin 2002 ;
"2°) alors que selon l'article 695-24, 2°, du code de procédure pénale, l'exécution d'un mandat d'arrêt européen peut être refusée si la personne recherchée pour l'exécution d'une peine ou d'une mesure de sûreté privatives de liberté est de nationalité française ou réside régulièrement de façon ininterrompue depuis au moins cinq ans sur le territoire national et que la décision de condamnation est exécutoire sur le territoire français en application de l'article 728-31 ; que selon l'article 728-31 du code de procédure pénale, la reconnaissance et l'exécution sur le territoire français d'une décision de condamnation prononcée par la juridiction d'un autre Etat membre ne peuvent être refusées que dans les cas prévus aux articles 728-32 et 728-33 ; que l'arrêt attaqué constate que M. A... est de nationalité française, qu'il se trouve dans le cas visé par l'article 695-22-1, 2°, du code de procédure pénale (p. 14, § 2) et que le certificat aux fins de reconnaissance et d'exécution sur le territoire français de l'arrêt du 4 mars 2015 de la cour d'appel de Rome, devenu irrévocable le 10 novembre 2016, a été transmis par les autorités italiennes, de sorte que la décision de condamnation était exécutoire sur le territoire français en application de l'article 728-31 ; qu'en énonçant néanmoins, se fondant sur des circonstances inopérantes au regard de ce texte, que ,rien ne justifie que M. A... exécute la peine prononcée par la cour d'appel de Rome. sur le territoire français", la chambre de l'instruction a violé l'article 728-31 du code de procédure pénale par refus d'application, ensemble l'article 695-24, 2°, du code de procédure pénale ;
"3°) alors qu'en retenant encore "qu'il n'existe pas de cause facultative de refus qui apparaisse devoir être relevée au sens de l'article 695-24 du code de procédure pénale" cependant que les conditions du 2° de cet article étaient remplies, la chambre de l'instruction a violé ce texte par refus d'application ;
"4°) alors en toute hypothèse qu'en n'expliquant pas en quoi l'exécution de la condamnation en France, par un ressortissant français, qui parle le français, et qui y a de la famille au 1er degré (une de ses filles, sa mère), ne contribuera pas à atteindre l'objectif consistant à faciliter la réinsertion sociale et la réintégration de la personne condamnée dans la société ou y contribuerait moins bien qu'en Italie, la chambre de l'instruction n'a pas justifié sa décision ;
"5°) alors que la cour ne pouvait, sans se contredire, retenir "qu'il ne sera pas plus difficile à sa compagne et ses enfants, résidant dans le sud de l'Espagne de le visiter en Italie plutôt qu'en France", tout en constatant que la mère de M. A... et l'une de ses filles demeurent en France ;
"6°) alors qu'en retenant enfin que "les dernières écritures déposées par son conseil le 10 décembre 2018 ne sollicitent plus l'application des dispositions de l'article 694-24 du code de procédure pénale" cependant qu'il n'avait pas été renoncé à ce moyen, dont la cour était régulièrement saisie par le mémoire déposé pour l'audience du 6 novembre 2018, moyen auquel elle a d'ailleurs répondu, la chambre de l'instruction n'a pas mieux justifié sa décision" ;
Vu les articles 695-24 et 728-31 du code de procédure pénale, ensemble l'article 695-33 du même code ;
Attendu qu'il se déduit du premier de ces textes que, lorsque, sollicité en application du troisième par la chambre de l'instruction devant laquelle la personne réclamée en vertu d'un mandat d'arrêt européen décerné en vue de l'exécution d'une peine privative de liberté a justifié qu'elle est de nationalité française ou réside régulièrement de façon ininterrompue depuis au moins cinq ans sur le territoire national et a fait valoir, pour s'opposer à sa remise, que la décision est exécutoire sur le territoire français en application du deuxième de ces articles, l'Etat requérant a formulé une demande aux fins de reconnaissance et d'exécution de la condamnation, la chambre de l'instruction ne peut statuer sur la remise sans avoir invité le procureur de la République compétent à lui faire connaître sans délai sa décision sur ladite demande de l'Etat requérant ni fait état de sa réponse ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que les autorités judiciaires italiennes ont décerné un mandat d'arrêt européen contre M. A... en vue de l'exécution d'une peine d'emprisonnement prononcée par la cour d'appel de Rome ; que, la personne réclamée, de nationalité française, ayant invoqué les dispositions de l'article 695-24, 2°, précité, la chambre de l'instruction, par un premier arrêt, a demandé aux autorités judiciaires italiennes si elles envisageaient de formuler une demande aux fins de reconnaissance et d'exécution de la condamnation sur le territoire français ; que le procureur général de Rome a répondu positivement à cette demande et adressé le certificat prévu par l'article 728-12 du code de procédure pénale ;
Attendu que, pour ordonner la remise de l'intéressé, l'arrêt énonce notamment que l'article 695-24 n'énumère que des causes facultatives de non-remise, que les principaux intérêts familiaux et économiques de M. A..., certes de nationalités française et algérienne, se trouvent en Espagne, où il réside depuis 2003 avec sa compagne, enceinte, et leurs cinq enfants, cependant qu'il admet lui-même n'être arrivé sur le territoire national qu'au mois d'avril 2018, parce qu'il se savait recherché par les autorités judiciaires italiennes et que, de nationalité française, il préférait être interpellé en France ; que les juges ajoutent que la personne réclamée n'a en France comme seule famille que sa mère et une fille d'un premier lit, dont il vit éloigné depuis plusieurs années, et qu'il ne sera pas plus difficile à sa compagne et à leurs enfants, habitant dans le sud de l'Espagne, de le visiter en Italie qu'en France ; qu'ils concluent que le simple fait de bénéficier d'une double nationalité, dont la nationalité française, ne saurait suffire à mettre en échec l'exécution d'un mandat d'arrêt européen ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, alors que, s'il ressort des motifs de l'arrêt que les autorités italiennes avaient donné suite à la question qui leur avait été posée dans le cadre du complément d'information précédemment ordonné, ledit arrêt ne fait pas état d'une réponse qui aurait été apportée par le procureur de la République à la question qu'elle lui avait elle-même posée aux fins de savoir si celui-ci entendait ou non décider de reconnaître la décision italienne de condamnation comme exécutoire sur le territoire français en application de l'article 728-42 du code de procédure pénale, la chambre de l'instruction n'a pas justifié sa décision ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Versailles, en date du 15 janvier 2019, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ;
RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de chambre de l'instruction de la cour d'appel de Versailles et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, M. Bonnal, conseiller rapporteur, M. Straehli, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : M. Bétron ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.ECLI:FR:CCASS:2019:CR00468
N° H 19-80.513 F-P+B+I
N° 468
SM12
19 FÉVRIER 2019
CASSATION
M. SOULARD président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le dix-neuf février deux mille dix-neuf, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller BONNAL, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général QUINTARD ;
CASSATION et désignation de juridiction sur le pourvoi formé par M. Karim Pascal A..., contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Versailles, en date du 15 janvier 2019, qui a autorisé sa remise aux autorités judiciaires italiennes, en exécution d'un mandat d'arrêt européen ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 5, 6 et 8 de la Convention européenne des droits de l'homme, 1 de la décision-cadre du 13 juin 2002 du Conseil de l'Union européenne (2002/584/JAI) relative au mandat d'arrêt européen et aux procédures de remise entre Etats membres, 1, 4 et 9 de la décision-cadre du 27 novembre 2008 du Conseil de l'Union européenne (2008/909/JAI) concernant l'application du principe de reconnaissance mutuelle aux jugements en matière pénale prononçant des peines ou des mesures privatives de liberté aux fins de leur exécution dans l'Union européenne, 695-24, 728-31, 728-32, 728-33, 695-29, 591 et 593 du code de procédure pénale :
"en ce que l'arrêt attaqué a ordonné la remise de M. A... aux autorités judiciaires italiennes en exécution du mandat d'arrêt décerné 12 décembre 2016 par le procureur général près la cour d'appel de Rome, pour l'exécution d'un arrêt rendu par la cour d'appel de Rome 4 mars 2015, devenu irrévocable le 10 novembre 2016, l'ayant condamné à une peine de dix ans et huit mois d'emprisonnement ;
"aux motifs "que les documents transmis le 20 novembre 2018 par les autorités italiennes, constituées du certificat visé à la décision-cadre 2009/909/JAI libellé au nom de M. A..., afin de demander la reconnaissance de l'arrêt de condamnation rendu à son encontre le 4 mars 2015 par la cour d'appel de Rome et le transfèrement en France de l'exécution de la peine privative de liberté correspondante, de la communication relative à la décision devant être signifiée au condamné, de l'état d'exécution actualisé de l'arrêt du 4 mars 2015 de la cour d'appel de Rome, devenu irrévocable le 10 novembre 2016, permettent de considérer que ces autorités ne s'opposent pas à ce que la peine prononcée par la juridiction italienne soit exécutée sur le territoire français ; que pour autant les dispositions de l'article 695-24 du code de procédure pénale constituent des causes facultatives de refus d'exécution d'un mandat d'arrêt européen et non des causes impératives ; qu'en l'espèce, il résulte de la procédure, et notamment des déclarations même de l'intéressé lors de son interpellation par la brigade de recherche des fugitifs, que M. A..., bien que de nationalité française et algérienne, ne réside plus sur le territoire national depuis 2003, puisqu'il a indiqué le 25 octobre 2018 être arrivé en France au mois d'avril 2018, qu'auparavant il résidait en Espagne avec sa femme et ses cinq enfants, qu'il n'avait aucun emploi depuis son arrivée en France et qu'en Espagne il ne faisait rien depuis 2003, qu'il vivait de ses économies ; qu'il a indiqué être arrivé en France en avril 2018 car il était recherché par les italiens et que de nationalité française, il préférait être interpellé en France ; que l'analyse du casier judiciaire de l'intéressé confirme ses déclarations dans la mesure où la dernière condamnation le concernant prononcée par une juridiction française remonte au 2 février 1996 pour des faits commis le même mois, alors que les condamnations postérieures ont été prononcées en Italie en 2011 et en 2015 pour des faits commis respectivement en 2003 et en 2002, et en Espagne en 2013 et en 2017 pour des faits commis respectivement en 2011 et en 2017 ; que les principaux intérêts familiaux et économiques de M. A... se situent sur le territoire espagnol ; qu'en effet il y a sa résidence habituelle ou demeure sa compagne Mme Monya H... avec laquelle il déclare vivre depuis 21 ans, ainsi que leurs cinq enfants âgés respectivement de 18, 16, 12, 9, 6 ; que sa compagne attend actuellement leur 6ème enfant qui selon les déclarations de l'intéressé devrait naître au mois d'avril prochain ; que ne résident en France que la fille de l'intéressé issue d'une précédente union, Mme Sabrina A..., âgée de 35 ans qui habite à [...] (92) et la mère de M. A..., Mme Gaétane D..., âgée de 72 ans et demeurant à [...] (93) ; que manifestement ces deux proches vivaient d'ores et déjà éloignées de l'intéressé depuis de très nombreuses années ; que l'appartement de Nanterre dans lequel il résidait au moment de son interpellation ne constituait de toute évidence qu'un domicile de passage loué car il se savait recherché par les autorités italiennes ; que le simple fait de bénéficier d'une double nationalité, dont la nationalité française, ne saurait suffire à mettre en échec l'exécution d'un mandat d'arrêt européen ; que rien ne justifie que M. A... exécute la peine prononcée par la cour d'appel de Rome le 4 mars 2015 et devenu irrévocable Ie 10 novembre 2016, sur le territoire français ; qu'il ne sera pas plus difficile à sa compagne et ses enfants, résidant dans le sud de l'Espagne de le visiter en Italie plutôt qu'en France ; qu'à titre purement indicatif, la cour ne peut que constater que les dernières écritures déposées par son conseil le 10 décembre 2018 ne sollicitent plus l'application des dispositions de l'article 694-24 du code de procédure pénale ; qu'il résulte de ce qui précède qu'il n'existe pas de cause facultative de refus qui apparaisse devoir être relevée au sens de l'article 695-24 du code de procédure pénale ; qu'il convient dès lors d'ordonner la remise de M. A... aux autorités judiciaires italiennes en exécution du mandat d'arrêt émis le 12 décembre 2016" ;
"1°) alors que la possibilité d'exécuter une peine ou une mesure privatives de liberté sur le territoire de l'Etat requis, lorsque la personne recherchée en est ressortissante, figure parmi les objectifs de la décision-cadre du 13 juin 2002 modifiée relative au mandat d'arrêt européen et aux procédures de remise entre états membres ; qu'en affirmant "que le simple fait de bénéficier [de] la nationalité française, ne saurait suffire à mettre en échec l'exécution d'un mandat d'arrêt européen", la chambre de l'instruction a méconnu le sens et la portée de la décision-cadre du 13 juin 2002 ;
"2°) alors que selon l'article 695-24, 2°, du code de procédure pénale, l'exécution d'un mandat d'arrêt européen peut être refusée si la personne recherchée pour l'exécution d'une peine ou d'une mesure de sûreté privatives de liberté est de nationalité française ou réside régulièrement de façon ininterrompue depuis au moins cinq ans sur le territoire national et que la décision de condamnation est exécutoire sur le territoire français en application de l'article 728-31 ; que selon l'article 728-31 du code de procédure pénale, la reconnaissance et l'exécution sur le territoire français d'une décision de condamnation prononcée par la juridiction d'un autre Etat membre ne peuvent être refusées que dans les cas prévus aux articles 728-32 et 728-33 ; que l'arrêt attaqué constate que M. A... est de nationalité française, qu'il se trouve dans le cas visé par l'article 695-22-1, 2°, du code de procédure pénale (p. 14, § 2) et que le certificat aux fins de reconnaissance et d'exécution sur le territoire français de l'arrêt du 4 mars 2015 de la cour d'appel de Rome, devenu irrévocable le 10 novembre 2016, a été transmis par les autorités italiennes, de sorte que la décision de condamnation était exécutoire sur le territoire français en application de l'article 728-31 ; qu'en énonçant néanmoins, se fondant sur des circonstances inopérantes au regard de ce texte, que ,rien ne justifie que M. A... exécute la peine prononcée par la cour d'appel de Rome. sur le territoire français", la chambre de l'instruction a violé l'article 728-31 du code de procédure pénale par refus d'application, ensemble l'article 695-24, 2°, du code de procédure pénale ;
"3°) alors qu'en retenant encore "qu'il n'existe pas de cause facultative de refus qui apparaisse devoir être relevée au sens de l'article 695-24 du code de procédure pénale" cependant que les conditions du 2° de cet article étaient remplies, la chambre de l'instruction a violé ce texte par refus d'application ;
"4°) alors en toute hypothèse qu'en n'expliquant pas en quoi l'exécution de la condamnation en France, par un ressortissant français, qui parle le français, et qui y a de la famille au 1er degré (une de ses filles, sa mère), ne contribuera pas à atteindre l'objectif consistant à faciliter la réinsertion sociale et la réintégration de la personne condamnée dans la société ou y contribuerait moins bien qu'en Italie, la chambre de l'instruction n'a pas justifié sa décision ;
"5°) alors que la cour ne pouvait, sans se contredire, retenir "qu'il ne sera pas plus difficile à sa compagne et ses enfants, résidant dans le sud de l'Espagne de le visiter en Italie plutôt qu'en France", tout en constatant que la mère de M. A... et l'une de ses filles demeurent en France ;
"6°) alors qu'en retenant enfin que "les dernières écritures déposées par son conseil le 10 décembre 2018 ne sollicitent plus l'application des dispositions de l'article 694-24 du code de procédure pénale" cependant qu'il n'avait pas été renoncé à ce moyen, dont la cour était régulièrement saisie par le mémoire déposé pour l'audience du 6 novembre 2018, moyen auquel elle a d'ailleurs répondu, la chambre de l'instruction n'a pas mieux justifié sa décision" ;
Vu les articles 695-24 et 728-31 du code de procédure pénale, ensemble l'article 695-33 du même code ;
Attendu qu'il se déduit du premier de ces textes que, lorsque, sollicité en application du troisième par la chambre de l'instruction devant laquelle la personne réclamée en vertu d'un mandat d'arrêt européen décerné en vue de l'exécution d'une peine privative de liberté a justifié qu'elle est de nationalité française ou réside régulièrement de façon ininterrompue depuis au moins cinq ans sur le territoire national et a fait valoir, pour s'opposer à sa remise, que la décision est exécutoire sur le territoire français en application du deuxième de ces articles, l'Etat requérant a formulé une demande aux fins de reconnaissance et d'exécution de la condamnation, la chambre de l'instruction ne peut statuer sur la remise sans avoir invité le procureur de la République compétent à lui faire connaître sans délai sa décision sur ladite demande de l'Etat requérant ni fait état de sa réponse ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que les autorités judiciaires italiennes ont décerné un mandat d'arrêt européen contre M. A... en vue de l'exécution d'une peine d'emprisonnement prononcée par la cour d'appel de Rome ; que, la personne réclamée, de nationalité française, ayant invoqué les dispositions de l'article 695-24, 2°, précité, la chambre de l'instruction, par un premier arrêt, a demandé aux autorités judiciaires italiennes si elles envisageaient de formuler une demande aux fins de reconnaissance et d'exécution de la condamnation sur le territoire français ; que le procureur général de Rome a répondu positivement à cette demande et adressé le certificat prévu par l'article 728-12 du code de procédure pénale ;
Attendu que, pour ordonner la remise de l'intéressé, l'arrêt énonce notamment que l'article 695-24 n'énumère que des causes facultatives de non-remise, que les principaux intérêts familiaux et économiques de M. A..., certes de nationalités française et algérienne, se trouvent en Espagne, où il réside depuis 2003 avec sa compagne, enceinte, et leurs cinq enfants, cependant qu'il admet lui-même n'être arrivé sur le territoire national qu'au mois d'avril 2018, parce qu'il se savait recherché par les autorités judiciaires italiennes et que, de nationalité française, il préférait être interpellé en France ; que les juges ajoutent que la personne réclamée n'a en France comme seule famille que sa mère et une fille d'un premier lit, dont il vit éloigné depuis plusieurs années, et qu'il ne sera pas plus difficile à sa compagne et à leurs enfants, habitant dans le sud de l'Espagne, de le visiter en Italie qu'en France ; qu'ils concluent que le simple fait de bénéficier d'une double nationalité, dont la nationalité française, ne saurait suffire à mettre en échec l'exécution d'un mandat d'arrêt européen ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, alors que, s'il ressort des motifs de l'arrêt que les autorités italiennes avaient donné suite à la question qui leur avait été posée dans le cadre du complément d'information précédemment ordonné, ledit arrêt ne fait pas état d'une réponse qui aurait été apportée par le procureur de la République à la question qu'elle lui avait elle-même posée aux fins de savoir si celui-ci entendait ou non décider de reconnaître la décision italienne de condamnation comme exécutoire sur le territoire français en application de l'article 728-42 du code de procédure pénale, la chambre de l'instruction n'a pas justifié sa décision ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Versailles, en date du 15 janvier 2019, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ;
RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de chambre de l'instruction de la cour d'appel de Versailles et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, M. Bonnal, conseiller rapporteur, M. Straehli, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : M. Bétron ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.