Cour de cassation, civile, Chambre civile 3, 14 février 2019, 18-11.101, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :





Sur le moyen unique :



Vu l'article L. 113-1 du code des assurances ;



Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 23 octobre 2017), rendu sur renvoi après cassation (3e Civ., 29 septembre 2015, pourvois n° 14-16.600 et 14-18.269), que la société Antunes, déclarée partiellement responsable des désordres affectant le revêtement de façade appliqué sur l'immeuble de la société Rivepar, a sollicité la garantie de la société MMA IARD SA et de la société MMA IARD assurances mutuelles (les sociétés MMA), leur assureur, venant aux droits de la société Winterthur ;



Attendu que, pour condamner les sociétés MMA à garantir, au titre de la police « responsabilité civile des entreprises du bâtiment », la société Antunes pour les condamnations mises à sa charge, l'arrêt retient que la clause d'exclusion stipulée à l'article 8-15° des conventions spéciales, aux termes de laquelle le contrat ne couvre pas le coût de la réfection des travaux, de la remise en état ou du remplacement des produits livrés ou ouvrages exécutés qui ont été à l'origine des dommages contredit, en les vidant de leur substance, les stipulations de l'article 5-2° de la police aux termes duquel l'assureur garantit l'assuré pour les dommages matériels causés au maître de l'ouvrage lorsque ces dommages ont pour effet générateur une malfaçon dans les travaux exécutés et qu'ils surviennent après l'achèvement des travaux ;



Qu'en statuant ainsi, alors que cette clause, claire et précise, laissant dans le champ de la garantie les dommages autres que ceux résultant des malfaçons affectant les ouvrages ou travaux, est formelle et limitée, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;



Et vu l'article 627 du code de procédure civile, après avis donné aux parties en application de l'article 1015 du même code ;



PAR CES MOTIFS :



CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne les sociétés MMA à garantir, au titre de la police « responsabilité civile des entreprises du bâtiment », la société Antunes pour les condamnations définitives mises à sa charge par le jugement du 5 juin 2012 et celles non atteintes par la cassation de l‘arrêt du 10 mars 2014, l'arrêt rendu le 23 octobre 2017, par la cour d'appel de Versailles ;



DIT n'y avoir lieu à renvoi ;



Rejette les demandes formées par la société Antunes contre les sociétés MMA ;



Condamne la société Antunes aux dépens d'appel ;



Condamne la société Antunes aux dépens ;



Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;



Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;



Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze février deux mille dix-neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt



Moyen produit par la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat aux Conseils, pour les sociétés MMA IARD et MMA IARD assurances mutuelles





Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR déclaré recevable et non prescrite l'action de la société Antunes à l'encontre de la société MMA IARD du chef de la police d'assurance « responsabilité civile des entreprises du bâtiment » et d'AVOIR dit que la société MMA IARD devait relever et garantir, dans les limites de cette police, la société Antunes, des condamnations définitives mises à la charge de cette dernière par les dispositions du jugement déféré du 5 juin 2012 et celles, non atteintes par la cassation, de l'arrêt du 10 mars 2014 ;



AUX MOTIFS QUE l'action de la société Antunes à l'encontre de la société MMA IARD du chef de la police "responsabilité civile" n'est pas prescrite et se trouve, en conséquence, recevable ; que cette police couvre, selon l'article 5 des conventions spéciales, intitulé "Quel est l'objet de la garantie", "la responsabilité civile après travaux", précisant à cet égard en 5-2° : "Nous garantissons les dommages corporels ou matériels causés à autrui, y compris au maître de l'ouvrage, par les travaux exécutés, lorsque ces dommages ont pour effet générateur une malfaçon et qu'ils surviennent après l'achèvement des travaux" ; qu'il découle de l'énoncé précité que l'assureur répond des dommages matériels causés en l'espèce à la société Rivepar, maître de l'ouvrage, des suites des malfaçons, dont la société Antunes a été définitivement retenue responsable, dans l'exécution des travaux de ravalement consistant en la pose du revêtement ‘Marmorella', sur les façades de l'immeuble en construction ; que la société MMA IARD invoque quant à elle la clause d'exclusion stipulée à l'article 8-15° des conventions spéciales, aux termes de laquelle il est indiqué, sous le titre "Quels sont les cas où notre garantie ne joue pas", que le contrat ne couvre pas "le coût de la réfection des travaux, de la remise en état ou du remplacement des produits livrés ou ouvrages exécutés, qui ont été à l'origine des dommages" ; qu'or, pour être opposable à l'assuré, la clause d'exclusion doit être, en vertu des dispositions de l'article L. 113-1 du code des assurances, formelle et limitée ; que tel n'est pas le cas lorsque la clause d'exclusion est sujette à interprétation ou encore, lorsqu'elle tend à vider de toute portée la garantie accordée par l'assureur ; qu'en l'espèce, la société MMA IARD interprète la clause d'exclusion comme privant de garantie l'assuré pour la réfection des désordres affectant les travaux exécutés par ce dernier ; qu'il en découle que la clause contredit, en les vidant de leur substance, les stipulations de l'article 5-2° de la police aux termes duquel l'assureur garantit l'assuré pour les dommages matériels causés au maître de l'ouvrage lorsque ces dommages ont pour effet générateur une malfaçon dans les travaux exécutés et qu'ils surviennent après l'achèvement des travaux ; que la clause d'exclusion ne peut être, dans ces conditions, opposable à la société Antunes ; qu'il en résulte que la société MMA IARD, doit relever et garantir la société Antunes, dans les limites de la police, au titre des condamnations définitives mises à la charge de cette dernière par les dispositions du jugement du 5 juin 2012 et celles, non atteintes par la cassation, de l'arrêt du 10 mars 2014 ;



ALORS QUE les clauses d'exclusion de garantie sont valables lorsqu'elles revêtent un caractère formel et limité ; qu'en jugeant que la clause excluant de la garantie « après travaux » « le coût de la réfection des travaux, de la remise en état ou du remplacement des produits livrés ou ouvrages exécutés, qui ont été à l'origine des dommages » viderait de sa substance la garantie couvrant les dommages « corporels ou matériels, causés à autrui, y compris au maître de l'ouvrage, par les travaux exécutés, lorsque ces dommages ont pour fait générateur une malfaçon et qu'ils surviennent après l'achèvement des travaux », quand cette exclusion, formelle et limitée, laissait dans le champ de la garantie l'ensemble des dommages corporels et matériels causés par une malfaçon, à l'exception du coût des travaux nécessaires pour remédier à ladite malfaçon, la cour d'appel a violé l'article L. 113-1 du code des assurances.ECLI:FR:CCASS:2019:C300110
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