Cour de cassation, civile, Chambre civile 1, 21 novembre 2018, 17-26.245, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :



Sur le moyen unique, commun aux pourvois principal et incident :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 15 mars 2017), que Mme Z..., créancière de M. Charles X..., a assigné celui-ci, M. Clément X... et M. A..., en partage de l'indivision existant entre eux et licitation du bien indivis ;

Attendu que MM. Charles et Clément X... font grief à l'arrêt d'accueillir la demande, alors, selon le moyen :

1°/ que si les créanciers personnels d'un indivisaire peuvent exercer les droits et actions de leurs débiteurs et ont la faculté de provoquer le partage d'une indivision, c'est à la condition de caractériser la carence du débiteur et de démontrer que leurs droits sont compromis ; qu'en énonçant qu'en sa qualité de propriétaire indivis, M. Charles X... n'a exercé aucune action en partage, ce qui caractérise une carence dans le respect de ses obligations et une négligence de sa part mettant en péril les intérêts de la créancière et que son inaction, condition d'exercice de l'action oblique est donc constatée, après avoir pourtant relevé par ailleurs, par des motifs exclusifs de cette carence, que l'immeuble litigieux ne pouvait être partagé en nature et que « les diligences de M. Charles X... en vue de parvenir à la vente du bien litigieux, n'ont pas abouti », ce dont il résulte que M. Charles X... a bien fait diligence pour tenter de parvenir au partage du bien indivis, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences de ses propres constatations au regard des articles 815-17 du code civil et 1166 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 qu'elle a violés ;

2°/ que si les créanciers personnels d'un indivisaire peuvent exercer les droits et actions de leurs débiteurs et ont la faculté de provoquer le partage d'une indivision, c'est à la condition de caractériser la carence du débiteur et de démontrer que leurs droits sont compromis ; qu'en énonçant qu'en sa qualité de propriétaire indivis, M. Charles X... n'a exercé aucune action en partage, ce qui caractérise une carence dans le respect de ses obligations et une négligence de sa part mettant en péril les intérêts de la créancière et que la condition d'exercice de l'action oblique est donc constatée, sans préciser en quoi les droits de Mme Z... auraient été en péril, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 815-17 du code civil et 1166 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 ;

3°/ que si les créanciers personnels d'un indivisaire ont la faculté de provoquer le partage au nom de leur débiteur, les coïndivisaires ont le droit d'arrêter le cours de l'action en partage en acquittant l'obligation au nom et en l'acquit du débiteur ; que l'exercice de cette dernière faculté suppose que les coïndivisaires connaissent le montant de la dette qu'ils devraient payer pour arrêter le cours de l'action ; qu'en statuant comme elle l'a fait, tout en constatant que si Mme Z... dispose d'une créance certaine liquide et exigible, le montant exact de la dette de M. X... n'est pas déterminé ce dont il résulte que les coïndivisaires assignés en partage du bien indivis, n'ont pas été mis en mesure d'exercer la faculté d'arrêter le cours de l'action en partage en offrant d'acquitter la créance prétendue, la cour d'appel a violé l'article 815-18 du code civil ;

Mais attendu qu'après avoir constaté que la dette était impayée depuis plus de dix ans, malgré les mesures d'exécution diligentées, que le bien litigieux, non partageable en nature, constituait le seul élément d'actif du patrimoine de M. Charles X... et que celui-ci, dont les diligences en vue de parvenir à une vente amiable n'avaient pas abouti, n'avait exercé aucune action en partage, la cour d'appel a souverainement estimé que la carence du débiteur était établie, caractérisant ainsi le péril dans lequel se trouvait la créance de Mme Z..., de nature à justifier l'exercice de l'action oblique en partage ;

Et attendu que M. Clément X... et M. A... n'ayant comparu ni en première instance ni en cause d'appel, ils n'ont pu de ce fait exercer la faculté d'arrêter le cours de l'action en partage en offrant d'acquitter la créance invoquée ;

D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois principal et incident ;

Condamne MM. Charles et Clément X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette leurs demandes et les condamne à payer à Mme Z..., chacun, la somme de 1 500 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un novembre deux mille dix-huit. MOYENS ANNEXES au présent arrêt.

Moyen commun produit AUX POURVOIS PRINCIPAL ET INCIDENT par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour MM. Charles et Clément X....

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir ordonné qu'aux requêtes poursuites et diligences de Mme Corinne Y... épouse Z..., en présence de M. Charles X..., M. Nicolas A... et M. Clément X..., ou ceux-ci dûment appelés, il soit procédé aux opérations de comptes, liquidation et partage de l'indivision existant entre M. Charles X..., M. Nicolas A... et M. Clément X..., et ordonné que préalablement au partage et pour y parvenir, il soit procédé aux mêmes requêtes et diligences à la vente sur licitation en un seul lot du bien immobilier situé [...] cadastré section [...] et d'avoir rejeté la demande de M. Charles X... tendant à voir ordonner le sursis au partage pour une durée de deux ans à compter de la décision à intervenir ;

AUX MOTIFS QUE pour s'opposer aux demandes formées par Mme Corinne Z..., M. Charles X... prétend que la créance est indéterminée et que les intérêts ne peuvent être réclamés au-delà de 5 ans ;
qu'il demande qu'il soit sursis à partage faisant valoir que l'intimée a déjà perçu la somme de 154.521,17 euros ; que Mme Corinne Z... demande la confirmation du jugement rendu le 18 mars 2016 et demande, sur le fondement des articles 1166 et 815-17 du code civil, l'ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de l'indivision existant entre M. Charles X..., M. Nicolas A... et M. Clément X... et qu'il soit procédé à la licitation du bien immobilier leur appartenant, sis [...] ; que l'article 815-17 du code civil dispose que « les créanciers qui auraient pu agir sur les biens indivis avant qu'il y eût indivision, et ceux dont la créance résulte de la conservation ou de la gestion des biens indivis, seront payés par prélèvement sur l'actif avant le partage. Ils peuvent en outre poursuivre la saisie et la vente des biens indivis. Les créanciers personnels d'un indivisaire ne peuvent saisir sa part dans les biens indivis, meubles ou immeubles. Ils ont toutefois la faculté de provoquer le partage au nom de leur débiteur ou d'intervenir dans le partage provoqué par lui. Les coïndivisaires peuvent arrêter le cours de l'action en partage en acquittant l'obligation au nom et en l'acquit du débiteur. Ceux qui exerceront cette faculté se rembourseront par prélèvement sur les biens indivis » et qu'à l'article 1166 du même code, il est précisé « néanmoins, les créanciers peuvent exercer tous les droits et actions de leur débiteur, à l'exception de ceux qui sont exclusivement attachés à la personne » ; que la créance de Mme Corinne Z... à l'égard de M. Charles X... qui résulte des condamnations ci-dessus rappelées, est certaine, liquide et exigible ; que M. Charles X... produit un décompte d'huissier qui fait état de 22 versements de 3050 euros (67.100 euros), d'un de 2.500 euros ; qu'il ne rapporte donc pas la preuve d'avoir réglé la totalité des sommes qui lui sont réclamées qui comprennent le montant des condamnations remontant pour certaines d'entre elles à plus de 15 ans, laissant courir les intérêts ; que M. Charles X... demande à voir dire que Mme Corinne Z... ne peut réclamer les intérêts pour la période antérieure au 8 novembre 2008, du fait de l'acquisition de la prescription ; que l'intimée n'agissant pas en paiement des intérêts d'une créance périodique, la prescription invoquée, tirée de l'article 2277 ancien du code civil, ne s'applique pas ; que sa demande sera rejetée ; qu'en sa qualité de propriétaire indivis, M. Charles X... n'a exercé aucune action en partage, ce qui caractérise une carence dans le respect de ses obligations et une négligence de sa part, mettant en péril les intérêts de la créancière ; que son inaction, condition d'exercice de l'action oblique, est donc constatée dans le cas d'espèce et permet à Mme Corinne Z... qui en est titulaire, d'obtenir le partage qui sera ordonné, le jugement entrepris étant confirmé de ce chef ; qu'il résulte de l'article 1377 du code de procédure civile, que le tribunal ordonne dans les conditions qu'il détermine la vente par adjudication des biens s'ils ne peuvent être facilement partagés ou attribués dans les conditions fixées aux articles 1271 et suivants du code de procédure civile ; qu'il est constant que M. Charles X..., M. Nicolas A... et M. Clément X... sont en indivision sur le bien sis [...] ainsi décrit par l'une des promesses de ventes produite par l'appelant : maison individuelle de 9/10 pièces comprenant au rez de chaussée un séjour double, une cuisine équipée, deux chambres, une salle de bain, un WC, à l'étage, cinq chambres, une salle de bain et un WC le tout sur un sous-sol total, édifié sur un terrain de 834 m², cadastré section [...] ; qu'il résulte de cette description que le bien immobilier constitue une seule unité d'habitation qui n'est pas aisément partageable ; que les diligences de M. Charles X... en vue de parvenir à la vente du bien litigieux, n'ont pas abouti ; que le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a ordonné la licitation dudit bien ; que M. Charles X... sollicite un sursis, sans démontrer ainsi qu'il le prétend, qu'un partage immédiat risquerait de porter atteinte à la valeur du bien ; qu'au regard des circonstances particulières et notamment de l'ancienneté des condamnations prononcées à l'encontre de l'appelant qui a dès lors, eu tout le loisir de procéder lui-même à une vente à l'amiable avant que ne soit prononcée la licitation, trois ans s'étant écoulés depuis l'assignation en partage, il convient de rejeter la demande de sursis qu'il forme ; Considérant que la mise à prix qui n'est pas critiquée ainsi que les autres dispositions du jugement doivent être confirmées ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES du jugement que le décompte produit par Mme Z... est difficilement compréhensible et apparait partiellement erroné, notamment quant aux taux d'intérêts appliqués. Toutefois le montant précis de la créance de Mme Z... apparait indifférent à la présente instance ;

1°- ALORS QUE si les créanciers personnels d'un indivisaire peuvent exercer les droits et actions de leurs débiteurs et ont la faculté de provoquer le partage d'une indivision, c'est à la condition de caractériser la carence du débiteur et de démontrer que leurs droits sont compromis ; qu'en énonçant qu'en sa qualité de propriétaire indivis, M. Charles X... n'a exercé aucune action en partage, ce qui caractérise une carence dans le respect de ses obligations et une négligence de sa part mettant en péril les intérêts de la créancière et que son inaction, condition d'exercice de l'action oblique est donc constatée, après avoir pourtant relevé par ailleurs, par des motifs exclusifs de cette carence, que l'immeuble litigieux ne pouvait être partagé en nature et que « les diligences de M. Charles X... en vue de parvenir à la vente du bien litigieux, n'ont pas abouti », ce dont il résulte que M. X... a bien fait diligence pour tenter de parvenir au partage du bien indivis, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences de ses propres constatations au regard des articles 815-17 du code civil et 1166 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 qu'elle a violés ;

2°- ALORS QUE si les créanciers personnels d'un indivisaire peuvent exercer les droits et actions de leurs débiteurs et ont la faculté de provoquer le partage d'une indivision, c'est à la condition de caractériser la carence du débiteur et de démontrer que leurs droits sont compromis ; qu'en énonçant qu'en sa qualité de propriétaire indivis, M. Charles X... n'a exercé aucune action en partage, ce qui caractérise une carence dans le respect de ses obligations et une négligence de sa part mettant en péril les intérêts de la créancière et que la condition d'exercice de l'action oblique est donc constatée, sans préciser en quoi les droits de Mme Z... auraient été en péril, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 815-17 du code civil et 1166 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 ;

3°- ALORS QUE si les créanciers personnels d'un indivisaire ont la faculté de provoquer le partage au nom de leur débiteur, les coïndivisaires ont le droit d'arrêter le cours de l'action en partage en acquittant l'obligation au nom et en l'acquit du débiteur ; que l'exercice de cette dernière faculté suppose que les coïndivisaires connaissent le montant de la dette qu'ils devraient payer pour arrêter le cours de l'action ; qu'en statuant comme elle l'a fait, tout en constatant que si Mme Z... dispose d'une créance certaine liquide et exigible, le montant exact de la dette de M. X... n'est pas déterminé ce dont il résulte que les coindivisaires assignés en partage du bien indivis, n'ont pas été mis en mesure d'exercer la faculté d'arrêter le cours de l'action en partage en offrant d'acquitter la créance prétendue, la Cour d'appel a violé l'article 815-18 du code civil.ECLI:FR:CCASS:2018:C101096
Retourner en haut de la page