Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 21 novembre 2018, 17-11.122, Publié au bulletin

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :



Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'engagé le 9 février 2005 par la société Atos Euronext en qualité de chef de projet, M. Y... a été affecté ultérieurement par avenant auprès d'Atos Origin Malaisie pour une mission de deux ans renouvelable, jusqu'au 30 juin 2012, l'activité informatique de cotation de marché exercée par l'employeur étant reprise par la société Nyse technologies aujourd'hui dénommée Euronext technologies ; que par lettre du 13 août 2012, M. Y... a été licencié pour motif personnel ; qu'estimant que son licenciement était nul, il a saisi la juridiction prud'homale ;

Sur le premier moyen pris en ses trois premières branches, les deuxième, troisième, quatrième et cinquième moyens du pourvoi principal de l'employeur et sur les premier et deuxième moyens du pourvoi incident du salarié :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les moyens annexés qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Sur le premier moyen du pourvoi principal de l'employeur :

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de prononcer la nullité du licenciement, d'ordonner la réintégration du salarié dans un emploi équivalent en matière de fonction, de responsabilités et de rémunération ainsi qu'à lui verser, en deniers ou en quittance, le montant des salaires entre le 15 novembre 2012 jusqu'à la date de réintégration, sur la base d'une rémunération mensuelle brute de 6 750 euros, revalorisée sur la base de la moyenne des augmentations générales dans l'entreprise depuis 2000 augmentée d'un 13e mois, dont sont à déduire les sommes qui ont été versées à titre de revenus de remplacement, alors, selon le moyen, que seule la référence, dans la lettre de licenciement, à une action judiciaire effectivement engagée par le salarié est susceptible de constituer une atteinte effective au droit d'agir en justice et ce faisant, de justifier l'annulation du licenciement ; qu'en affirmant que la référence à la procédure envisagée par le salarié était constitutive d'une atteinte à la liberté fondamentale d'agir en justice entraînant à elle seule la nullité du licenciement, la cour d'appel a violé, par fausse application, les dispositions de l'article L. 1121-1 du code du travail, ensemble l'article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Mais attendu qu'ayant constaté que la lettre de licenciement reprochait notamment au salarié d'avoir menacé l'employeur d'entamer des procédures à l'encontre de la société, la cour d'appel en a exactement déduit que la seule référence dans la lettre de rupture à une procédure contentieuse envisagée par le salarié était constitutive d'une atteinte à la liberté fondamentale d'ester en justice entraînant à elle seule la nullité de la rupture ; que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le troisième moyen du pourvoi incident du salarié :

Vu l'alinéa premier du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 et l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789 ;

Attendu qu'il résulte de ces textes qu'est nul comme portant atteinte à une liberté fondamentale constitutionnellement garantie, le licenciement intervenu en raison d'une action en justice introduite ou susceptible d'être introduite par le salarié à l'encontre de son employeur ; que le salarié qui demande sa réintégration a droit au paiement d'une indemnité égale au montant de la rémunération qu'il aurait dû percevoir entre son éviction de l'entreprise et sa réintégration, sans déduction des éventuels revenus de remplacement dont il a pu bénéficier pendant cette période ;

Attendu que la cour d'appel, après avoir prononcé la nullité du licenciement pour atteinte au droit d'agir en justice, ordonne que soit déduit du rappel de salaires dû entre la date du licenciement et la date effective de réintégration du salarié dans l'entreprise, les sommes perçues à titre de revenus de remplacement ;

Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit qu'il convient de déduire des sommes dues à M. Y... au titre du rappel de salaires entre le 15 novembre 2012 et jusqu'à la date effective de réintégration les sommes versées au salarié à titre de revenu de remplacement, l'arrêt rendu le 23 novembre 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Condamne la société Euronext technologies aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Euronext technologies à payer à M. Y... la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un novembre deux mille dix-huit. MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits au pourvoi principal par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour la société Euronext technologies.

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué, infirmatif de ce chef, d'AVOIR dit nul le licenciement, en conséquence, d'AVOIR ordonné à la SAS EURONEXT de réintégrer M. Jean-Michel Y... dans un emploi équivalent en matière de fonction, de responsabilités et de rémunération ainsi qu'à lui verser, en deniers ou en quittance, le montant des salaires entre le 15 novembre 2012 jusqu'à la date de réintégration, sur la base d'une rémunération mensuelle brute de 6750 euros, revalorisée sur la base de la moyenne des augmentations générales dans l'entreprise depuis 2000 augmentée d'un 13ième mois, dont sont à déduire les sommes qui ont été versées à Monsieur Jean-Michel Y... à titre de revenu de remplacement ;

AUX MOTIFS QUE : « Monsieur Jean-Michel Y... sollicite le prononcé de la nullité de son licenciement en faisant valoir que les motifs en sont le fait qu'il a écrit différents mails et menacé de saisir les tribunaux alors qu'il s'agit de l'exercice de deux libertés fondamentales, la liberté d'expression et la liberté d'agir en justice, libertés dont la violation par l'employeur entraîne la nullité du licenciement, et qu'il a dénoncé la dégradation de ses conditions de travail, constitutive d'un harcèlement moral. La SAS EURONEXT TECHNOLOGIES répond que le licenciement disciplinaire est justifié par le fait que l'intéressé a dénigré à plusieurs reprise ses collègues dans des termes outrageants, visant à mettre en cause leur capacité à remplir les missions qui leur étaient assignées et se refusant à collaborer avec eux, et à faire pression sur son employeur pour obtenir une renégociation de son contrat au mieux de ses intérêts en impliquant le client. Elle soutient que la motivation du licenciement est étrangère à toute violation de la liberté d'expression ou du droit de saisir les tribunaux du salarié ainsi qu'à la dénonciation de harcèlement moral liée à la dégradation de ses conditions de travail. Dans la lettre du 13 août 2012 par laquelle la SAS EURONEXT TECHNOLOGIES a notifié à Monsieur Jean-Michel Y... son licenciement, il est mentionné ce qui suit : « Le 21 juin 2012, la Responsable Ressources Humaines vous adressait un projet de reconduction de votre expatriation conforme aux politiques de mobilité du groupe NYSE Euronext et à l'échange téléphonique de la semaine précédente. Le jour même vous lui répondiez que cela vous donnait « l'occasion de vous débarrasser de cette mission d'esclave », que vous ne vouliez plus en discuter et vous menaciez alors d'entamer des procédures à {'encontre de la société. » La seule présence dans la lettre de licenciement, fixant les limites du litige, d'une référence à une procédure contentieuse envisagée par le salarié objet du licenciement, est constitutive d'une atteinte à la liberté fondamentale d'ester en justice entraînant à elle seule la nullité de la rupture et rendant inopérant les autres griefs énoncés dans la lettre de licenciement que le juge n'a alors pas à vérifier. Le jugement est infirmé et la nullité du licenciement est prononcée. La nullité de ce licenciement a pour conséquence que Monsieur Jean-Michel Y... doit être réintégré dans l'entreprise, et qu'il a droit au paiement d'une somme correspondant à la réparation de la totalité du préjudice subi au cours de la période qui s'est écoulée entre son licenciement et sa réintégration dans la limite des salaires dont il a été privé, et dont sont déduits, lorsque l'employeur le demande, ce qui est le cas en l'espèce, les revenus de remplacement et notamment les allocations de chômage. Aucune circonstance de l'espèce ne conduit à assortir l'obligation de réintégration d'une mesure d'astreinte, en raison de la disposition relative au versement de la rémunération. Le jugement est infirmé ».

1) ALORS QUE dans ses écritures, (Concl., p. 30), au soutien de sa demande tendant à ce que son licenciement soit déclaré nul, M. Y... s'est borné à faire état d'une violation de sa liberté d'expression et subsidiairement, de la volonté de son employeur de sanctionner la dénonciation de faits de harcèlement moral sans jamais à aucun moment se prévaloir d'une violation de son droit d'agir en justice et en particulier de la circonstance que son employeur aurait voulu sanctionner son intention de saisir la juridiction prud'homale ; qu'en affirmant que M. Y... sollicitait la nullité de son licenciement en faisant valoir que son employeur aurait violé sa liberté d'expression et son droit d'agir en justice, la cour d'appel, qui a dénaturé les écritures de M. Y..., a violé l'article 4 du code de procédure civile, ensemble le principe suivant lequel il est interdit au juge de dénaturer les éléments de la cause ;

2) ALORS ENCORE QUE, dans ses écritures, (Concl., p. 30), au soutien de sa demande tendant à ce que son licenciement soit déclaré nul, M. Y... s'est borné à faire état d'une violation de sa liberté d'expression et subsidiairement de la volonté de son employeur de sanctionner la dénonciation de faits de harcèlement moral sans jamais à aucun moment se prévaloir d'une violation de son droit d'agir en justice et en particulier de la circonstance que son employeur aurait voulu sanctionner son intention de saisir la juridiction prud'homale ; qu'en retenant, pour dire le licenciement nul, que la simple référence, dans la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige, à une procédure contentieuse envisagée par le salarié était constitutive d'une atteinte à la liberté fondamentale entraînant à elle-seule la nullité de la rupture, la cour d'appel, qui a dénaturé les termes du litige, a violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile ;

3) ALORS A TOUT LE MOINS QUE le juge doit en toutes circonstances faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en retenant, et sans provoquer préalablement les observations des parties à cet égard, que la seule référence dans la lettre de licenciement, à la procédure envisagée par M. Y... justifiait la nullité du licenciement, après avoir indiqué que les écritures des parties avaient été reprises et soutenues oralement à l'audience et que les écritures de M. Y... ne comportaient aucun moyen visant à se prévaloir de la nullité de son licenciement, motif pris que son ancien employeur aurait méconnu son droit d'ester en justice, la cour d'appel, qui a soulevé ce moyen d'office, sans avoir préalablement recueilli les observations des parties à cet égard, a violé l'article 16 du code de procédure civile ;

4) ALORS EN TOUT ETAT DE CAUSE QUE seule la référence, dans la lettre de licenciement, à une action judiciaire effectivement engagée par le salarié est susceptible de constituer une atteinte effective au droit d'agir en justice et ce faisant, de justifier l'annulation du licenciement ; qu'en affirmant que la référence à la procédure envisagée par M. Y... était constitutive d'une atteinte à la liberté fondamentale d'agir en justice entraînant à elle seule la nullité du licenciement, la cour d'appel a violé, par fausse application, les dispositions de l'article L.1121-1 du code du travail, ensemble l'article 6§1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué, infirmatif de ce chef, d'AVOIR condamné la SAS EURONEXT TECHNOLOGIES à payer à Monsieur Jean-Michel Y... la somme de 2000 euros de dommages et intérêts pour non-respect de l'obligation de reclassement à l'issue de l'expatriation ;

AUX MOTIFS QUE : « Monsieur Jean-Michel Y... fait valoir que son employeur était tenu de le réintégrer et de le reclasser à l'issue de son expatriation, qu'il a manqué à cette obligation ce qui lui cause un préjudice distinct de celui de la perte de son emploi. La SAS EURONEXT TECHNOLOGIES répond que le droit à réintégration n'exclut pas la possibilité d'une rupture du contrat de travail et qu'elle avait pris les dispositions pour réintégrer Monsieur Jean-Michel Y..., avant que le comportement qu'il avait adopté juste avant son retour en France, ne la conduise à le licencier. Aux termes de la convention collective applicable, en cas de déplacement d'une durée supérieure à 6 mois, l'ordre de mission stipule le principe de la réintégration du salarié dans sa société d'origine à des conditions au moins équivalentes à celles du départ. L'avenant de 2005 stipule qu'au terme de la mission, Monsieur Jean-Michel Y... sera réintégré dans sa société d'origine et au niveau de rémunération convenue pour la durée de la mission. La SAS EURONEXT TECHNOLOGIES estime justifier avoir organisé la réintégration de Monsieur Jean-Michel Y... à son retour en France, notamment par la production d'un mail du 21 mai 2012, faisant suite à un mail de Monsieur Y... de la veille l'avisant de la date de son arrivée, dans lequel il est demandé aux service des moyens généraux d'organiser le « bureau/téléphone/badge ». Dans la mesure où le retour en France de Monsieur Jean-Michel Y... n'est finalement intervenu que le 24 juillet 2012 et que, le 30 juillet suivant, son employeur a initié la procédure de licenciement sans justifier de la mise en place dans l'intervalle d'une réintégration dans l'entreprise par l'affectation à un poste, il apparaît qu'il n'a pas satisfait à son obligation. Le préjudice résultant pour le salarié de ce manquement est toutefois limité du fait que, par suite de la nullité du licenciement, il lui est reconnu le droit de percevoir une somme correspondant au montant des salaires dont il a été privé. Ce préjudice sera chiffré à la somme de 2000 euros ».

1) ALORS QUE, en se bornant à affirmer que le préjudice résultant du prétendu manquement de la Société EURONEXT à son obligation de réintégration devait être chiffrée à la somme de 2000 euros sans caractériser ce préjudice ni son lien de causalité avec le prétendu manquement de l'employeur, après avoir pourtant constaté qu'était en cause une obligation, non pas légale mais de source conventionnelle et contractuelle à laquelle l'employeur avait manqué sur une seule période de 6 jours sans que M. Y... soit privé des salaires subséquents, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L.1221-1 du code du travail, ensemble l'article 1147 du code civil dans sa rédaction alors en vigueur ;

2) ALORS A TOUT LE MOINS QUE , en se bornant à affirmer que le préjudice de M. Y... sera chiffré à 2000 euros, après avoir constaté qu'était en cause une obligation conventionnelle et contractuelle à laquelle l'employeur avait seulement manqué sur une période de 6 jours, la cour d'appel, qui n'a pas motivé sa décision, a violé l'article 455 du code de procédure civile.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué, infirmatif de ce chef, d'AVOIR condamné la SAS EURONEXT TECHNOLOGIES à payer à M. Jean-Michel Y... la somme de 37960 euros de dommages et intérêts pour non-réévaluation du montant de sa rémunération ;

AUX MOTIFS QUE : « Sur la demande de dommages et intérêts non réévaluation du coût de la vie. Monsieur Jean-Michel Y... fait valoir qu'aux termes de l'article 4.4 de l'avenant d'affectation en Malaisie, sa rémunération devait faire l'objet d'une réévaluation annuelle pour tenir compte de l'évolution des changes au cours de l'année écoulée, que son employeur n'a jamais procédé à cette réévaluation et que le change 6/RM a été défavorable. Il ajoute que l'employeur était contractuellement tenu de calculer, au début de chaque année, le montant d'un éventuel différentiel du coût de la vie devant s'ajouter à son salaire net. La SAS EURONEXT TECHNOLOGIES répond que le taux de change devenant défavorable au salarié, elle a décidé de ne pas l'appliquer, si bien que l'intéressé a été bénéficiaire, et que l'indice du coût de la vie a été négatif, mais qu'elle n'en a pas tiré de conséquences défavorables pour le salarié. Il est constant que la rémunération de Monsieur Jean-Michel Y... n'a pas été régularisée annuellement pour tenir compte de l'évolution des changes au cours de l'année écoulée et que le différentiel coût de la vie n'a pas été revu au début de chaque année, ainsi qu'il est prévu par l'avenant d'affectation en Malaisie. Pour établir que l'indice du coût de la vie a été négatif sur toute la période d'expatriation de Monsieur Y..., la SAS EURONEXT TECHNOLOGIES produit aux débats un document en langue anglaise insusceptible de démontrer ce fait. En 2005, le taux de change interbancaire était de 5,06316 RM pour un euro. Au cours des années suivantes, la valeur de l'euro vis-à-vis du RM est toujours restée inférieure au taux de 2005. Il s'ensuit que le montant de la rémunération de Monsieur Jean-Michel Y..., déterminé en euros a été amoindri, alors qu'il vivait en Malaisie et assurait ses dépenses en monnaie locale. Au vu du tableau produit aux débats par Monsieur Jean-Michel Y..., il apparaît que l'absence de régularisation annuelle de sa rémunération pour tenir compte de l'évolution des changes, l'a privé de la somme totale de 37 960 euros. Le jugement est infirmé ».

1) ALORS D'UNE PART, s'agissant de l'indice du coût de la vie, QUE, à l'appui de ses écritures et en complément au document rédigé en anglais, la Société EURONEXT avait versé aux débats les analyses du cabinet ADEXPAT lequel avait attesté, sans être contesté, que l'indice du coût de la vie à Paris était resté supérieur à celui de Kuala Lampur de 2007 à 2012 en sorte que le salarié conservait un pouvoir d'achat supérieur en Malaisie ne nécessitant pas une réévaluation ; qu'en retenant que, pour établir le caractère négatif de l'indice du coût de la vie, la Société EURONEXT avait produit un document en anglais, la cour d'appel, qui a dénaturé le bordereau des pièces versé aux débats par la Société EURONEXT, a violé l'article 4 du code de procédure civile, ensemble le principe suivant lequel il est interdit au juge de dénaturer les éléments de la cause ;

2) ALORS subsidiairement EN TOUT ETAT DE CAUSE QUE, qu'à l'appui de ses écritures et en complément du document rédigé en anglais, la Société EURONEXT avait versé aux débats les analyses du cabinet ADEXPAT lequel avait attesté, sans être contesté, que l'indice du coût de la vie à Paris était resté supérieur à celui de Kuala Lampur de 2007 à 2012 en sorte que le salarié conservait un pouvoir d'achat supérieur en Malaisie ne nécessitant pas une réévaluation ; qu'en s'abstenant, même sommairement, d'analyser cette pièce, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

3) ALORS D'AUTRE PART, sur le taux de change, QUE la Société EURONEXT avait encore démontré, pièces à l'appui, et sans être contestée, qu'elle avait choisi de ne pas réévaluer le salaire en euros et en monnaie locale de M. Y... au regard de l'évolution du taux de change car la dévaluation de l'euro aurait entraîné une diminution notable de sa rémunération en monnaie locale que ne pouvait compenser l'application du taux de change à sa rémunération en euros de sorte qu'in fine, en ne procédant à aucune régularisation tant du salaire en euro que du salaire en monnaie locale, M. Y... était même bénéficiaire d'environ 17 000 euros ; qu'en se bornant, pour faire droit à la demande de M. Y..., à affirmer que le taux de change interbancaire entre l'euro et le ringgit avait toujours été inférieur au taux de 2005 en sorte que la rémunération en euro de M. Y... avait été amoindrie, sans rechercher, ainsi cependant qu'elle y était invitée, si le refus de la Société EURONEXT de faire application de l'évolution du taux de change tant à la part de rémunération en euro qu'à la part de rémunération en monnaie locale n'avait pas en définitive était favorable à M. Y..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L.1221-1 du code du travail, ensemble l'article 1134 du code civil dans sa rédaction alors en vigueur ;

4) ALORS A TOUT LE MOINS QUE, en se bornant, pour faire droit à la demande de M. Y..., à affirmer que le taux de change interbancaire entre l'euro et le ringgit avait toujours été inférieur au taux de 2005 en sorte que la rémunération en euro de M. Y... avait été amoindrie, sans répondre aux écritures précises et circonstanciées de la Société EURONEXT dont il résultait qu'elle avait choisi de ne pas réévaluer le salaire en euros et en monnaie locale de M. Y... au regard de l'évolution du taux de change car la dévaluation de l'euro aurait entraîné une diminution notable de sa rémunération en monnaie locale que ne pouvait compenser l'application du taux de change à sa rémunération en euros de sorte qu'in fine, en ne procédant à aucune régularisation tant du salaire en euro que du salaire en monnaie locale, M. Y... était même bénéficiaire d'environ 17 000 euros, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

5) ALORS EN TOUT ETAT DE CAUSE QUE la Société EURONEXT avait encore démontré que les calculs opérés par M. Y... à l'appui de sa demande de rappel de salaire étaient erronés dès lors qu'ils incluaient les frais de déplacement, de logement ou encore de garage, cependant que l'avenant au contrat de travail produit par M. Y... précisait expressément que la réévaluation ne devait s'appliquer qu'à la rémunération annuelle nette d'expatriation laquelle ne comprenait pas les frais de transport, de voyage, de loyers pourtant inclus par M. Y... dans ses calculs ; qu'en se bornant à entériner les calculs opérés par M. Y... sans rechercher, ainsi cependant qu'elle y était invitée, si les divers frais annexes à la rémunération devaient effectivement, au vu du contrat de travail, être réévalués, la cour d'appel a derechef privé sa décision de base légale au regard de l'article L.1221-1 du code du travail, ensemble l'article 1134 du code civil dans sa rédaction alors en vigueur ;

6) ALORS A TOUT LE MOINS QUE, en entérinant purement et simplement les calculs de M. Y... sans répondre aux écritures de la Société EURONEXT laquelle avait démontré qu'il résultait de l'avenant au contrat de travail signé par M. Y... que les frais de voyage, de transport et de logement qu'il avait inclus dans ses calculs, ne devaient pas faire l'objet d'une réévaluation, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.

QUATRIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué, d'AVOIR condamné la Société EURONEXT à verser à M. Jean-Michel Y... la somme de 126 072 euros de dommages et intérêts au titre des astreintes ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE : « Monsieur Jean-Michel Y... fait valoir que le droit applicable, choisi par les parties dans le contrat, est le droit français, que le forfait en jours prévu dans son contrat de travail initial lui est inopposable, étant soumis à des horaires impératifs et qu'il a été soumis à des astreintes. La SAS EURONEXT TECHNOLOGIES répond que l'accord statutaire U.E.S Atos Euronext qui prévoit en son article 14 .3 l'indemnisation des astreintes, exclut de son champ d'application les collaborateurs relevant d'un forfait jours, que Monsieur Jean-Michel Y... est défaillant dans l'administration de la charge de la preuve de la réalisation d'heures d'astreinte. Le contrat de travail stipule que le temps de travail du salarié est décompté en jours, dans la limite de 216 jours. L'article 14 de l'avenant par lequel la société ATOS EURONEXT et Monsieur Jean-Michel Y... ont convenu des conditions de la mission en Malaisie, stipule expressément que les signataires entendent se référer, quant à la législation applicable, aux dispositions légales et conventionnelles régissant les conditions de travail en France métropolitaine, à l'exception des dispositions d'ordre public absolu en vigueur dans le pays où Monsieur Jean Michel Y... est amené à exercer son activité. En conséquence les dispositions légales et conventionnelles françaises s'appliquent pour régir les conditions de travail du salarié, sauf dispositions de droit local contraire d'ordre public absolu. La SAS EURONEXT TECHNOLOGIES ne fait pas valoir qu'il existe en Malaisie des dispositions d'ordre public absolu en contradiction avec les dispositions françaises applicables à Monsieur Jean-Michel Y... en matière d'astreinte. Peuvent conclure une convention de forfait en jours sur l'année, les cadres qui disposent d'une autonomie dans l'organisation de leur emploi du temps et dont la nature des fonctions ne les conduit pas à suivre l'horaire collectif applicable au sein de l'atelier, du service ou de l'équipe auxquels ils sont intégrés, ainsi qu'aux salariés dont la durée du travail ne peut être prédéterminée et qui disposent d'une réelle autonomie dans l'organisation de leur emploi du temps pour l'exercice des responsabilités qui leur sont confiées. Le salarié dont l'emploi du temps et le planning d'intervention sont déterminés par sa hiérarchie ne peut pas conclure une convention de forfait en jours. L'autonomie dans l'organisation de l'emploi du temps du salarié sous convention de forfait annuel en jours exclut la possibilité de lui imposer des heures de début et de fin de travail. Au cas d'espèce, il résulte des pièces produites aux débats que l'employeur de Monsieur Jean-Michel Y... s'était engagé, vis-à-vis de la bourse malaisienne, à assurer un support standard durant les heures d'ouverture de la bourse de 9 heures à 18 heures, que c'est à Monsieur Jean-Michel Y... qu'avait été confiée cette mission de support technique et que d'ailleurs il était le seul salarié de la société détaché auprès de la bourse de Malaisie. En conséquence, Monsieur Jean-Michel Y... s'est vu imposer des horaires de travail de sorte qu'il ne peut être regardé comme étant un cadre autonome et que la clause de forfait annuel en jours lui est inopposable. Dès lors il peut revendiquer le bénéfice du régime des astreintes. L'astreinte est une période pendant laquelle le salarié doit être à la disposition permanente et immédiate de l'employeur afin d'être en mesure d'intervenir pour accomplir un travail au service de l'entreprise. L'astreinte doit être compensée. Le contrat signé entre l'employeur de Monsieur Jean-Michel Y... et la bourse de Malaisie, prévoit une activité de support, en sus des heures de base (9h-l 8h) durant lesquelles la ressource serait sur site au bureau de Bursa, durant des heures en appel de 18h à 9h, durant lesquelles la ressource de support sera à Kuala Lumpur, sera joignable avec un téléphone portable et viendra à l'office de Bursa dans les meilleurs délais si nécessaire. Il en résulte d'une part que l'employeur disposait sur place d'une ressource humaine pour assurer un service d'astreinte durant les heures de fermeture de la Bourse et que c'est bien Monsieur Jean-Michel Y..., seul agent de la SAS EURONEXT TECHNOLOGIES en Malaisie, qui était la ressource de support et sur qui pesait l'astreinte durant les heures d'appel. Ce fait est notamment attesté par la teneur d'un message du 26 octobre 2010 qui présente Jean-Michel Y... comme étant le support sur site pour la bourse de Malaisie et ne mentionne aucun autre nom de salarié à cette fonction. Compte tenu du tableau détaillé des astreintes réalisées établi par Monsieur Jean-Michel Y..., des éléments de calcul produits par le requérant à l'appui de sa demande de dommages-intérêts, des dispositions statutaires qui édictent des limites maximales quant au nombre des astreintes, du fait que le contrat de travail s'est poursuivi en Malaisie jusqu'à la date du rapatriement de l'intéressé, il est fait droit à la demande de dommages et intérêts à titre de compensation des astreintes pour un montant de 126 072 euros, au titre de la période non prescrite. Le jugement est infirmé quant au quantum ».

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE : « II convient de distinguer les relations contractuelles entre les parties dans leur chronologie. L'avenant au contrat signé en juin 2005 détermine les conditions de l'expatriation de monsieur Y.... Cet avenant stipule expressément que les signataires "entendent se référer aux dispositions légales et conventionnelles (cf. Titre IX de la convention collective nationale applicable au personnel des bureaux d'études techniques des cabinets d'ingénieurs-conseils et des Sociétés de conseils) régissant les conditions de travail en France métropolitaine, à l'exception des dispositions d'ordre public absolu en vigueur dans le pays où monsieur Jean-Michel Y... est amené à exercer son activité. [...]" Par conséquent, les dispositions légales et conventionnelles françaises s'appliquent pour régir les conditions de travail du salarié, et la Société défenderesse ne démontre aucunement que les astreintes et la réduction du temps de travail seraient couvertes par un "ordre public absolu " en Malaisie excluant le bénéfice du droit français. D'ailleurs, un courriel de NYSE Technologies en date du 23 février 2010 demandant au salarié de régulariser ses jours de RTT de 2009 confirme l'application du droit français. Dans ces conditions, pour la période non prescrite de septembre 2007 à juin 2009, les demandes sont conformes aux termes de la convention conclue par les parties. Ensuite, la liberté nécessairement laissée au salarié dans l'organisation de sa journée et de sa semaine de travail, ne saurait exclure les récupérations au titre des réductions du temps de travail et des compensations de ses astreintes. Concernant ces dernières, monsieur Y... établit de manière suffisante, par les courriels produits aux débats notamment en 2007,2008 et 2009 les contraintes particulières qui étaient les siennes, au regard des horaires étendus de support, pour la maintenance du site qu'il assurait seul (ainsi le courriel du 27 mai 2008 ou du 7 janvier 2009). Compte tenu des éléments de calcul produits par le requérant, à l'appui de sa demande de dommages-intérêts, et des dispositions statutaires ( 7 astreintes maximum par périodes de 4 semaines consécutives et un week-end sur deux d'astreinte maximum), il sera fait droit, sur la période non prescrite de septembre 2007 à juin 2009, à la demande pour un montant de 54.500 €. L'accord sur le temps de travail prévoyant 12 jours de RTT, la demande de compensation rapportée à la période sera accueillie pour un montant de 6.900 € (base brute mensuelle retenue à défaut de calcul subsidiaire: 6,750) Pour la période postérieure, à la suite de la reprise par la Société NYSE Technologies, l'économie contractuelle se trouve radicalement modifiée par les nouveaux contrats de travail signés en juin 2009 et 2010. Le contrat de travail français d'expatriation se trouve suspendu -et il ne peut s'induire d'aucune stipulation contractuelle, notamment à la lecture des points 7 et 11, que l'employeur était tenu de compenser la RTT ou bien des astreintes conformément à la législation française. Par conséquent, les demandes, de dommages-intérêts au titre de la RTT et des astreintes ne seront pas accueillies pour le surplus ».

1) ALORS QUE, en retenant, pour dire que M. Y... était fondé en sa demande et entériner sa demande fixée à la somme de 126 072 euros, qu'un message du 26 octobre 2010 présentait M. Y... comme le support technique sur site pour la bourse de Malaisie cependant qu'il était parfaitement acquis et tel que la cour d'appel l'a constaté, qu'il exerçait précisément la fonction de support technique de 9 à 18 heures et qu'était en cause la question de savoir s'il assurait le support technique en dehors de ses heures de bureau, entre 18h et 9 heures, la cour d'appel, qui a statué par un motif inopérant, a violé l'article L.3121-5 du code du travail, dans sa rédaction alors en vigueur ;

2) ALORS EN OUTRE QUE la Société EURONEXT avait soutenu et démontré, pièces à l'appui, que contrairement aux allégations de M. Y... qui se bornait à produire ses propres courriels de réclamation, il était acquis que le support technique en dehors des heures de bureau devait être assuré à distance par les équipes parisiennes de la Société EURONEXT et que l'équipe de collaborateurs à distance mobilisable en permanence était au moins de 10 personnes ; qu'en se fondant, pour dire que M. Y... était fondé en sa demande, sur les courriels de réclamation produits par ce dernier, sans rechercher, ainsi cependant qu'elle y était invitée, si M. Y... n'était pas simplement désigné comme la ressource support sur place en Malaisie, les heures d'astreinte étant toutefois assurées par les équipes en place sur Paris, la cour d'appel a derechef privé sa décision de base légale au regard de l'article L.3121-5 du code du travail dans sa rédaction alors en vigueur ;

3) ALORS ENFIN QUE, en retenant, pour se déterminer comme elle l'a fait, que M. Y... établissait ses contraintes en termes d'astreinte par le biais de courriels établis en 2007,2008,2009, cependant que la demande de M. Y... portait sur la période allant de 2007 à 2012, la cour d'appel, qui n'a pas motivé sa décision, a violé l'article L.3121-5 du code du travail dans sa rédaction alors en vigueur.

CINQUIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué, d'AVOIR condamné la Société EURONEXT à verser à M. Jean-Michel Y... la somme de 5000 euros de dommages et intérêt au titre des congés payés ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE : « Monsieur Jean-Michel Y... fait valoir qu'en raison de ses charges de travail, il n'a pas pu prendre l'intégralité de ses congés payés et qu'il a été rappelé par son employeur au cours de certains de ses congés payés pour faire face à des difficultés survenues à la Bourse. La SAS EURONEXT TECHNOLOGIES répond que les congés ne sont pas reportables, sauf autorisation exceptionnelle du Manager, que le salarié bénéficiait d'une large autonomie dans la gestion de ses congés et que son attention a été appelée à plusieurs reprises sur la nécessité de prendre ses congés payés, qu'elle n'a jamais fait obstacle à ce que l'intéressé prenne ses congés payés et qu'elle a finalement accepté de régler à Monsieur Jean-Michel Y... les congés non pris. Il appartient à l'employeur de fixer la période de congés payés des salariés ainsi que la date des départs en congés. Monsieur Jean-Michel Y... avait droit à 25 jours de congés payés par an. Au vu des conditions d'emploi de Monsieur Jean-Michel Y..., chargé par son employeur d'assurer seul la maintenance technique du site malaisien, il était difficile pour l'intéressé de poser et de prendre ses congés. Il résulte en outre des pièces produites qu'il a dû écourter ses congés payés à la demande de son employeur en septembre et décembre 2008. Il en résulte que Monsieur Jean-Michel Y... démontre que ce n'est pas de son fait s'il n'a pas pris l'intégralité des congés payés auxquels il avait droit, l'organisation du travail par son employeur ne lui étant pas imputable. Il a, du fait de la non prise de ses congés payés et de la privation d'une partie de la période de repos à laquelle il avait droit, subi un préjudice que le premier juge a exactement chiffré à 5000 euros. Le jugement est confirmé sur ce point ».

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE : « Monsieur Y... fonde sa demande sur l'article 3141-1 du code du travail, nonobstant une organisation du travail qui lui était imposée. La Société NYSE fait valoir que monsieur Y... jouissait d'une autonomie considérable dans la gestion de son temps de travail et de ses congés payés et qu'il ne les prenait pas tous ou ne les déclarait pas malgré les relances du service RH. Il aurait donc dû les prendre et n'en aurait jamais été empêché. Toutefois, la Société aurait toujours versé des indemnités de récupération pour compenser les jours non pris. Le salarié serait rempli de ses droits. Les conventions entre les parties prévoient 25 jours de congés payés. Il est exact que sur la période non prescrite en. 2007 et 2009, le salarié n'a pas pris tous ses jours de congés mais qu'il a bénéficié d'indemnités de récupération. Dans un courriel du 12 février 2009, l'intéressé indique lui-même qu'il était presque satisfait, de 9 jours d'indemnités perçus. Pour la période ultérieure, des échanges de courriel indiquent que l'employeur demandait au salarié de faire un point sur ses congés en lui rappelant qu'à défaut de prise effective, les droits seraient perdus. Pour autant, le versement d'une indemnité ne peut totalement suppléer la prise effective de congés réparateurs et en toute hypothèse nécessaires à la santé et à l'équilibre du salarié. L'organisation du travail contraignait monsieur Y... à tenir seul la maintenance technique, ce qui rendait à l'évidence difficile pour lui de poser des congés et l'a même conduit à les écourter à la demande de son employeur en septembre et décembre 2008. Dans de telles conditions, monsieur Y... établit suffisamment qu'il n'a pas été en situation de poser toujours normalement des congés payés auxquels il avait pourtant droit, l'organisation du travail et les demandes du client ne lui étant pas imputables. Son préjudice sera compensé à concurrence d'un montant de 5.000 € ».

1) ALORS QUE la cassation à intervenir du chef du quatrième moyen emportera, par application des dispositions de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation de l'arrêt en ce qu'il a condamné la Société EURONEXT à verser à M. Jean-Michel Y... la somme de 5000 euros de dommages et intérêt au titre des congés payés ;

2) ALORS AU SURPLUS QUE, en affirmant que M. Y... avait été contraint d'écourter ses congés à deux reprises à la demande de son employeur sans préciser les éléments sur lesquels elle fondait une telle affirmation et alors qu'aucun élément du débat ne permettait de constater une telle demande de l'employeur, la cour d'appel, qui n'a pas motivé sa décision, a violé les dispositions de l'article 455 du code de procédure civile. Moyens produits au pourvoi incident par la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat aux Conseils, pour M. Y....

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR débouté le salarié de sa demande indemnitaire pour non-respect de l'obligation de formation,

AUX MOTIFS propres QUE Monsieur Jean-Michel Y... fait valoir qu'il travaillait sur un système de cotation obsolète que seule la bourse malaisienne appliquait et que son employeur n'a pas satisfait à son obligation de formation à son égard. La SAS EURONEXT TECHNOLOGIES répond qu'elle lui a communiqué toutes les informations utiles et nécessaires à la mise à jour de ses connaissances devant lui permettre d'assurer la maintenance du logiciel vendu à la bourse de Malaisie et que Monsieur Jean-Michel Y... a décliné les offres de formations qui lui ont été proposées. L'employeur assure l'adaptation des salariés à leur poste de travail et veille au maintien de leur capacité à occuper un emploi au regard notamment de l'évolution des emplois, des technologies et des organisations. Au cas d'espèce, la SAS EURONEXT TECHNOLOGIES démontre par une attestation de Madame B... que Monsieur Jean-Michel Y... recevaient les informations nécessaires à la mise à niveau de ses connaissances concernant le logiciel qu'il utilisait dans son travail. Monsieur Jean-Michel Y... s'est vu proposer par la SAS EURONEXT TECHNOLOGIES plusieurs formations à des nouvelles technologies qu'il a déclinées ou auxquelles il ne s'est pas rendu. Ainsi la SAS EURONEXT TECHNOLOGIES a satisfait à son obligation de formation à l'égard de Monsieur Jean-Michel Y.... Le jugement est confirmé ;

AUX MOTIFS adoptés QUE Monsieur Y... bénéficiait d'un droit à formation en langue anglaise (60h) qu'il n'a pas souhaité utiliser. C'est tardivement en mai 2012 qu'il a fait une demande en langue chinoise ou malaise. Il ne conteste pas avoir été informé des informations possibles et ne justifie d'aucune demande particulière en la matière, ayant même refusé d'être formé pour une mise à jour d'un nouveau système UT, ne souhaitant pas s'impliquer "avec l'équipe NOC actuelle" (courriel du 17 janvier 2012). Le requérant ne démontre donc pas qu'il a été véritablement demandeur auprès de son employeur de formations lui permettant d'élargir sa spécialisation fin de favoriser une évolution ou une reconversion professionnelle éventuelle. Aucun manquement de l'employeur n'est établi.

1° ALORS QUE l'employeur a l'obligation d'assurer l'adaptation du salarié à son poste de travail et de veiller au maintien de sa capacité à occuper un emploi pendant toute la durée de la relation de travail ; qu'en affirmant par motifs adoptés que l'employeur avait satisfait à son obligation dès lors que le salarié ne démontre donc pas qu'il a été véritablement demandeur auprès de son employeur de formations lui permettant d'élargir sa spécialisation afin de favoriser une évolution ou une reconversion professionnelle éventuelle, la cour d'appel a violé l'article L6321-1 du code du travail, ensemble l'article 1134 alors applicable, devenu 1104 du code civil ;

2° ALORS QUE l'employeur a l'obligation d'assurer l'adaptation du salarié à son poste de travail et de veiller au maintien de sa capacité à occuper un emploi pendant toute la durée de la relation de travail ; qu'après avoir condamné l'employeur à délivrer au salarié un certificat de travail mentionnant l'exact poste occupé par ce dernier, à savoir « Directeur de Projet », la cour d'appel a débouté le salarié de sa demande indemnitaire au titre de l'obligation de formation alors qu'à l'appui de cette demande, le salarié faisait valoir « qu'il n'a eu aucune formation de Direction de projet correspondant à son titre et à sa fonction » ; qu'en s'abstenant de rechercher – comme il lui était expressément demandé – si le salarié avait été en mesure de bénéficier de formations pour le poste qu'il a occupé durant son expatriation, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L6321-1 du code du travail, ensemble l'article 1134 alors applicable, devenu 1104 du code civil ;

3° ALORS QUE, tout jugement doit être motivé ; qu'en s'abstenant de répondre aux écritures du salarié par lesquelles celui-ci soulignait qu'il n'a eu aucune formation de Direction de projet correspondant à son titre et à sa fonction, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

4° ALORS QUE, l'employeur a l'obligation d'assurer l'adaptation du salarié à son poste de travail et de veiller au maintien de sa capacité à occuper un emploi pendant toute la durée de la relation de travail ; que l'employeur assure cette adaptation au regard de l'évolution des emplois, des technologies et des organisations ; que, dans ses écritures le salarié faisait valoir qu'il n'avait travaillé et n'avait été formé que sur un système de cotation qui, depuis 2009, était devenu obsolète puisqu'il n'était plus utilisé qu'en Malaisie ; qu'en déboutant le salarié sans rechercher, comme il lui était expressément demandé, si l'employeur avait fait la moindre proposition de formation au salarié sur le nouveau système de cotation venu supplanter l'ancien, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L6321-1 du code du travail, ensemble l'article 1134 alors applicable, devenu 1104 du code civil.

DEUXIÈME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt partiellement confirmatif attaqué d'AVOIR débouté le salarié de ses demandes indemnitaires au titre du harcèlement moral,

AUX MOTIFS propres QUE, Monsieur Jean-Michel Y... invoque les faits suivants : il était astreint à une disponibilité professionnelle au détriment de sa vie privée et de sa santé, il a été laissé dans l'incertitude quant à la date de son retour et n'a pas bénéficié de la totalité des visites médicales périodiques auxquelles il avait droit. Si Monsieur Jean-Michel Y..., du fait des astreintes, avait un rythme de travail soutenu et s'il est exact qu'il a pu, en deux occasions, être amené à interrompre ses vacances en raison de la nécessité d'une intervention urgente, il n'est pas établi que ses droits en matière de vie privée en a souffert ni que sa santé s'en est trouvée affectée, l'intéressé ne produisant pas aux débats d'élément à cet égard. L'avenant d'expatriation en Malaisie en 2005 stipule que la mission est de deux ans renouvelables par période d'un an et qu'elle pourra être prolongée d'un commun accord. Il stipule également une faculté de cessation anticipée à l'initiative des parties. Dans ces conditions, le fait que la mission a été prolongée à plusieurs reprises ou encore le fait qu'il a pu être envisagé, en 2008, de l'abréger, ne peut, en l'absence d'atteinte aux droits du salarié, être un élément contribuant à faire présumer l'existence d'un harcèlement. S'agissant du défaut de visite médicale périodique, lorsque le salarié expatrié ne vient pas au moins une fois par an en France, le salarié fait sa visite médicale en Malaisie et adresse le certificat d'aptitude à la DRH en France. L'avenant d'expatriation qui contient cette disposition ne met pas à la charge du salarié l'organisation de la visite médicale sur place. Il n'est pas contesté que Monsieur Jean-Michel Y... a bénéficié de visites périodiques lors de ses retours en France en 2011 et 2012, mais qu'il n'a pas bénéficié de visite médicale en 2007 et 2009. Monsieur Jean-Michel Y... a exprimé sa réticence à se soumettre à l'examen médical. Si l'omission d'organisation par l'employeur de ces deux visites constitue un manquement à l'obligation de sécurité, dans la mesure où ces visites obligatoires avaient pour objet de vérifier l'aptitude du salarié à son poste au regard de son état de santé, ce fait ne peut être un élément contribuant à faire présumer l'existence d'un harcèlement. En l'état des explications et des pièces fournies, la matérialité d'éléments de fait précis et concordants qui, considérés dans leur ensemble, laissent supposer l'existence d'un harcèlement moral n'est pas démontrée. En revanche, le défaut d'organisation par l'employeur de la visite médicale sur le lieu d'emploi constitue un manquement à son obligation de sécurité. En considération du préjudice occasionné à Monsieur Jean-Michel Y... par ce manquement, et en tenant compte du fait que l'intéressé ne fait pas état d'une altération objective de sa santé et qu'il a été reconnu apte postérieurement aux visites médicales omises, la cour chiffre à 1000 euros le montant des dommages et intérêts. Le jugement est confirmé quant aux demandes relatives au harcèlement moral est infirmé en ce qui regarde le manquement à l'obligation de sécurité.

ET AUX MOTIFS partiellement adoptés QUE, Monsieur Y... soutient que les méthodes managériales dont il faisait l'objet en Malaisie ont conduit à une dégradation de ses conditions de travail. Par ailleurs, l'employeur n'aurait pas respecté ses obligations en matières de temps de travail et une telle atteinte participerait aussi du harcèlement moral. S'ajouterait également un traitement moins favorable que celui de ses collègues et une diminution de ses responsabilités ainsi qu'une incertitude professionnelle et personnelle du fait de reports ou des avancées de la date de retour en France. L'employeur n'aurait pas veillé non plus aux visites médicales annuelles obligatoires. Concernant ce dernier point, il sera relevé que lorsque le salarié expatrié ne vient pas au moins une fois par an en France, il lui appartient d'initier un suivi médical qui manifestement n'a pas été diligenté par l'intéressé, lui-même étant réticent à une telle démarche (cf courriel du 5 avril "Je dois repasser un nouvel examen médical, en plus de celui que j‘ai passé l'an dernier en janvier. [
] les RH s'inquiètent toujours"). Il ne peut donc être sérieusement soutenu que le nombre de visites médicales annuelles, effectivement insuffisant, participe d'un harcèlement moral du salarié ou bien d'un manquement caractérisé de l'employeur. Il sera ensuite observé que monsieur Y... a été examiné par le médecin du travail en 2011 qui l'a déclaré apte, comme en 2005 et qu'aucune observation n'a été formulée, y compris à la demande de l'intéressé, concernant ses conditions de travail ou le comportement de son employeur. Ensuite, les nombreux courriels échangés sur plusieurs années par monsieur Y... en interne, avec son manager ou bien le service RH notamment, par la liberté de ton ou d'action qu'ils traduisent, n'indiquent pas que monsieur Y... se soit confronté à une situation de nature à se rattacher à un harcèlement moral, au sens de la loi, le salarié étant d'abord préoccupé, à juste titre, par une prise en compte financière plus importante de sa charge de travail et des contraintes de son emploi. Monsieur Y... a d'ailleurs finalement souhaité être maintenu à son poste seul, en l'état, moyennant une amélioration financière, ce qui apparaît contradictoire avec les griefs faits à l'employeur. Il n'est pas non plus établi que Monsieur Y... ait été moins bien traité que ses collègues, dès lors que ces derniers se trouvaient dans une situation différente. La demande indemnitaire au titre du harcèlement moral ou d'un manquement à l'obligation de sécurité dont les conditions légales n'apparaissent pas réunies, ne sera donc pas accueillie.

1° ALORS QUE, pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement moral, il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments invoqués par le salarié – dont il ne doit en omettre aucun – pour ensuite apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral ; qu'au titre de la disponibilité professionnelle qui lui avait été imposée au détriment de sa vie privée, le salarié invoquait plusieurs éléments, notamment la non prise et l'interruption de ses congés payés, le travail effectué les week-end non récupéré et les astreintes six nuits par semaines ; qu'après avoir condamné l'employeur au paiement de dommages-intérêts au titre des astreintes, des RTT et des congés payés, la cour d'appel a cantonné son appréciation des éléments laissant présumer un harcèlement moral aux astreintes et aux interruptions de congés payés, délaissant la non prise des RTT qu'elle avait pourtant constaté et condamné par ailleurs ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel, qui n'a pas respecté le processus probatoire a violé l'article L. 1154-1 du code du travail ;

2° ALORS QU'aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible d'altérer sa santé physique ou mentale ; qu'après avoir constaté que les horaires du salarié étaient de 9 h à 18 h et que le salarié était d'astreinte de 18 h à 9 h, la cour d'appel retient qu'il n'est pas établi que ses droits en matière de vie privée en ont souffert ; qu'en statuant ainsi, sans mieux s'expliquer sur la « vie privée » que peut avoir le salarié qui se tient à la disposition de son employeur neuf heures par jours soit quarante-huit heures par semaine et qui, pour les treize heures restantes de la journée et de la nuit, six jours par semaine, sans être à la disposition permanente et immédiate de l'employeur, a l'obligation de demeurer à son domicile ou à proximité afin d'être en mesure d'intervenir pour accomplir un travail au service de l'entreprise, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences qui s'évinçaient de ses constatations a violé les articles L1152-1, L1154-1, L3121-5, dans sa version en vigueur, et L4121-1 du code du travail ;

3° ALORS QUE lorsqu'un des éléments invoqués par le salarié au titre du harcèlement moral est matériellement établi, il échet à l'employeur de prouver et au juge de constater que cet élément est justifié objectivement et étranger à tout harcèlement ; que dans ses écritures et par les preuves régulièrement produites à l'appui, le salarié établissait que son expatriation avait été reportée neuf fois de mai 2007 à juin 2012 ; qu'après avoir constaté que l'avenant d'expatriation était d'une durée de deux ans renouvelables par période de un an, la cour d'appel n'a pas recherché pour quelle raison objective l'employeur avait imposé au salarié tant de reports aux mépris des stipulations de l'avenant ; qu'en statuant ainsi, elle a privé sa décision de base légale au regard des articles L1152-1 et L1154-1 du code du travail, ensemble l'article 1134 alors applicable, devenu 1203 nouveau du code civil ;

4° ALORS QUE, pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement moral, il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments invoqués par le salarié et d'apprécier si les faits matériellement établis pris dans leur ensemble permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral ; qu'en appréciant séparément les manquements de l'employeur en matière de cadences de travail imposées au salarié, puis en matière de reports successifs de la durée d'expatriation, puis en matière d'obligation de sécurité de résultat, la cour d'appel a violé les articles L1152-1 et L1154-1 du code du travail.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR partiellement débouté le salarié de ses demandes indemnitaires au titre de la nullité du licenciement en déduisant les revenus de remplacement ;

AUX MOTIFS QUE la nullité de ce licenciement a pour conséquence que Monsieur Jean-Michel Y... doit être réintégré dans l'entreprise, et qu'il a droit au paiement d'une somme correspondant à la réparation de la totalité du préjudice subi au cours de la période qui s'est écoulée entre son licenciement et sa réintégration dans la limite des salaires dont il a été privé, et dont sont déduits, lorsque l'employeur le demande, ce qui est le cas en l'espèce, les revenus de remplacement et notamment les allocations de chômage ;

1° ALORS QUE le licenciement prononcé à l'égard d'un salarié en raison de l'exercice de sa liberté fondamentale d'ester en justice est nul ; que le salarié qui demande sa réintégration a droit au paiement d'une indemnité égale au montant de la rémunération qu'il aurait dû percevoir entre son éviction de l'entreprise et sa réintégration, peu important qu'il ait reçu des salaires ou un revenu de remplacement pendant cette période ; qu'après avoir déclaré nul le licenciement, la cour d'appel a condamné l'employeur au paiement d'une somme correspondant aux salaires dont a été privé l'intéressé au cours de la période qui s'est écoulée entre son licenciement et sa réintégration dont elle a déduit les revenus de remplacement et notamment les allocations de chômage ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, l'article 1304 du code civil dans sa rédaction en vigueur, ensemble le principe de la réparation intégrale ;

2° ALORS QUE dans ses écritures, le salarié faisait valoir qu'en cas de nullité de licenciement, seul le salarié est tenu de restituer au pôle emploi les revenus de remplacement versés et qu'en conséquence, l'employeur qui est étranger à cette répétition de l'indû n'avait pas à en tirer profit pour déduire le montant des revenus de remplacement de la somme correspondant aux salaires qu'il doit au salarié au titre de la nullité du licenciement ; qu'en affirmant que lorsque l'employeur le demande, les revenus de remplacement perçus par le salarié viennent en déduction du montant des salaires dus par ce dernier sans s'expliquer pour quelle raison juridique ils le devraient, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, l'article 1304 du code civil dans sa rédaction en vigueur, ensemble le principe de la réparation intégrale ;

3° ALORS QUE, tout jugement doit être motivé ; qu'en s'abstenant de répondre au moyen précité des écritures du salarié, la cour d'appel a, à tout le moins, violé l'article 455 du code de procédure civile.ECLI:FR:CCASS:2018:SO01671
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