Cour de cassation, civile, Chambre civile 3, 25 octobre 2018, 16-17.172, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :



Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 19 avril 2016), qu'après résiliation du bail commercial consenti, le 6 juillet 2004, par la société civile immobilière Liberty( la SCI) à la société La Celia et portant sur des locaux à destination de salles de réception, réunion, fêtes diverses, restauration, la bailleresse a demandé condamnation de la locataire au paiement d'une certaine somme correspondant à la franchise de loyers octroyée au locataire suivant pour remettre en état des locaux dégradés ;

Sur le premier moyen :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur le second moyen :

Vu les articles 1731 et 1732 du code civil ;

Attendu que, pour rejeter la demande de la SCI, l'arrêt relève que les locaux ont subi des dégradations et retient que, si malgré l'absence d'état des lieux d'entrée, le preneur est présumé les avoir reçus en bon état de réparations locatives, celui-ci ne répond que des dégradations ou des pertes lui incombant conformément aux dispositions de l'article 1732 du code civil, ce qui n'est pas le cas en l'espèce ;

Qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si le preneur n'avait pas abandonné les lieux sans procéder à leur sécurisation avant son expulsion, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette la demande de la SCI Liberty en condamnation de la société La Celia au versement de la somme de 54 000 euros au titre de la remise en état des lieux, l'arrêt rendu le 19 avril 2016, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;

Condamne la société La Celia aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société La Celia et la condamne à verser la somme de 3 000 euros à la SCI Liberty ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq octobre deux mille dix-huit. MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par Me Y..., avocat aux Conseils, pour la société Liberty

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR condamné la SCI Liberty à payer à la société La Celia la somme de 144 319,29 euros au titre des travaux qu'elle avait entrepris dans les lieux loués ;

AUX MOTIFS QUE la SCI Liberty ne peut opposer la clause d'accession prévue au bail dès lors qu'elle n'a pas satisfait à son obligation de délivrance ; qu'au regard des justificatifs produits, la SCI Liberty doit être condamnée à payer à la Sarl La Celia la somme de 144 319,29 euros ;

ALORS, 1°), QUE le juge est tenu de trancher le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables ; qu'en faisant droit à la demande en paiement de la société La Celia au titre des travaux effectués dans les lieux loués sans préciser le fondement juridique de sa décision, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 12 du code de procédure civile ;

ALORS, 2°),QUE le juge est tenu de trancher le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables ; qu'en considérant que la SCI Liberty ne pouvait pas opposer à la demande adverse la clause d'accession stipulée dans le bail dès lors qu'elle avait manqué à son obligation de délivrance sans préciser le fondement juridique de sa décision, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 12 du code de procédure civile ;

ALORS, 3°) et en tout état de cause, QU'en faisant droit à la demande de la société La Celia, sans assortir sa décision d'aucun motif et sans répondre au moyen de la SCI Liberty tiré de ce que la société Celia, en faisant exécuter des travaux sans avoir entrepris, au préalable, aucune démarche afin d'être autorisée à exercer son activité, comme le bail lui en faisait pourtant l'obligation, avait commis une faute qui était seule à l'origine de son préjudice et de ce que la SCI Liberty, compte-tenu de l'état dans lequel les lieux avaient été restitués, n'avait pu tirer aucun profit des travaux exécutés par la société preneuse, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR débouté la SCI Liberty de sa demande tendant à voir condamner la société La Celia à lui verser la somme de 54 000 euros, au titre des travaux de remise en état des lieux ;

AUX MOTIFS QUE la SCI Liberty sollicite reconventionnellement le paiement d'une somme de 54 000 euros correspondant à la gratuité de loyers pendant une année consentie au nouveau preneur des lieux, en contrepartie de la réalisation des travaux de remise en état ; que citant le rapport de l'expert judiciaire, la SCI Liberty indique que les locaux sont inexploités et ont fait l'objet de dégradations consécutivement à des actes de vandalisme, ce qui résulte également des trois procès-verbaux de constat d'huissier dressés les 14 février 2007, 12 octobre 2009 et 9 avril 2010 ; qu'il en résulte que si malgré l'absence d'état des lieux d'entrée, le preneur est présumé les avoir reçus en bon état de réparations locatives, celui-ci ne répond que des dégradations ou des pertes lui incombant conformément aux dispositions de l'article 1732 du code civil, ce qui n'est pas le cas en l'espèce ;

ALORS QUE le preneur répond des dégradations ou des pertes qui arrivent pendant sa jouissance, à moins qu'il ne prouve qu'elles ont eu lieu sans sa faute ; qu'en se bornant à relever, pour débouter la société SCI Liberty de sa demande au titre des dégradations subies par les lieux loués, que ces dernières sont consécutives à des actes de vandalisme et n'incombent donc pas à la société La Celia, sans rechercher, comme elle y avait été invitée, si ces actes de vandalisme n'avaient pas été rendus possibles par le comportement de la société preneuse, qui avait abandonné les lieux loués sans donner congé au bailleur, ni restituer les clés ni prendre les précautions nécessaires pour assurer la sécurité des lieux, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles 1728, 1731 et 1732 du code civil.ECLI:FR:CCASS:2018:C300933
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