Cour de cassation, civile, Chambre civile 1, 3 octobre 2018, 16-21.241, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :



Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu les articles 1147, devenu 1231-1 et 1315, devenu 1353 du code civil ;

Attendu que l'obligation de résultat, qui pèse sur le garagiste en ce qui concerne la réparation des véhicules de ses clients, emporte à la fois présomption de faute et présomption de causalité entre la faute et le dommage ;

Attendu, selon le jugement attaqué, que, le 19 novembre 2013, M. et Mme Y... ont confié à la société FMC Bymycar Lyon (le garagiste) une automobile en vue de la pose de pneus d'hiver ; que, soutenant avoir constaté, à l'occasion d'une intervention ultérieure de ce même garage, que les moyeux de roue et la visserie avaient été endommagés, ils ont assigné le garagiste en réparation de leur préjudice ;

Attendu que, pour écarter leurs demandes, le jugement retient que M. et Mme Y... n'établissent pas que l'excès de serrage ayant endommagé la visserie et les moyeux soit imputable au garagiste ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que le garagiste était le seul professionnel à être intervenu sur les roues depuis le 19 novembre 2013, la juridiction de proximité a inversé la charge de la preuve et violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 26 mai 2016, entre les parties, par la juridiction de proximité de Bourgoin-Jallieu ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le tribunal d'instance de Vienne ;

Condamne la société FMC Bymycar Lyon aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à M. et Mme Y... la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trois octobre deux mille dix-huit.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Didier et Pinet, avocat aux Conseils, pour M. et Mme Y...


Il est fait grief au jugement attaqué d'AVOIR débouté M. et Mme Y... de l'intégralité de leurs demandes ;

AUX MOTIFS QU'il appartient aux demandeurs de justifier du bien fondé de leur créance en son principe et son quantum, en application des dispositions des articles 9 du code de procédure civile et 1315 du code civil ;
Qu'en l'espèce, il résulte du rapport d'expertise amiable de M. B... du 7 octobre 2014, que les moyeux des roues et la visserie ont été endommagés par un excès de serrage ; qu'il n'est cependant pas établi que cet excès de serrage est imputable à la société FMC Bymycar Lyon, même si ce professionnel est le seul à être intervenu sur les roues depuis le 19 novembre 2013, étant relevé que le véhicule ayant à cette date 69 412 kilomètres, il est certain que d'autres professionnels sont intervenus préalablement sur le véhicule ;
Qu'en effet, les conclusions de l'expert amiable ne sont pas suffisamment précises pour établir le lien de causalité entre le changement des roues par la société FMC Bymycar Lyon et le dommage causé au moyeux et à la visserie, d'autant qu'il n'est pas démontré, en l'absence de constatations établies contradictoirement, que les éléments présentés à l'expert étaient effectivement ceux fixés sur le véhicule des demandeurs ;
Qu'en outre, il est indiscuté que, dès le 19 novembre 2013, alors que la société FMC Bymycar Lyon n'était pas intervenue avant cette date sur les roues du véhicule de M. et Mme Y..., elle leur signalait la nécessité de remplacer le moyeu de la roue droite, respectant ainsi son devoir de conseil ;
Qu'il suit de là que M. et Mme Y... étant défaillants dans la charge de l'administration de la preuve qui leur incombe, ils seront déboutés de l'intégralité de leur demande ;

1) ALORS QUE, l'obligation de résultat qui pèse sur le garagiste en ce qui concerne la réparation des véhicules de ses clients emporte à la fois présomption de faute et présomption de causalité entre la faute et le dommage ; qu'en affirmant que les époux Y... étaient « défaillants dans la charge de l'administration de la preuve qui leur incombe », quand c'était à la société FMC Bymycar Lyon de démontrer que la détérioration des quatre moyeux des roues ne résultait pas de la mauvaise qualité de ses interventions sur le véhicule, le juge de proximité a inversé la charge de la preuve et violé les articles 1147 et 1315 du code civil ;

2) ALORS QUE l'obligation de résultat qui pèse sur le garagiste en ce qui concerne la réparation des véhicules de ses clients emporte à la fois présomption de faute et présomption de causalité entre la faute et le dommage ; qu'en l'espèce, le juge de proximité a constaté que les moyeux des roues et la visserie avaient été endommagés par un excès de serrage ; qu'en déboutant les époux Y... de leurs demandes, au motif que, même si la société FMC Bymycar était la seule intervenue sur le véhicule depuis le 19 novembre 2013, il ne serait pas établi que cet excès de serrage lui était imputable dès lors que d'autres professionnels avaient pu intervenir avant cette date, quand il appartenait à la société FMC Bymycar, tenue d'une obligation de résultat, de démontrer la faute du tiers l'exonérant de son obligation de résultat, le juge de proximité a violé les articles 1147 et 1315 du code civil ;

3) ALORS QUE le juge ne peut invoquer des faits qui ne sont pas dans le débat ; qu'en l'espèce, la société FMC Bymycar n'avait pas contesté que les moyeux et la visserie analysés par l'expert étaient ceux fixés sur le véhicule des époux Y... ; qu'en déboutant les exposants de leurs demandes au motif qu'il n'était pas démontré que « les éléments présentés à l'expert étaient effectivement ceux fixés sur le véhicule des demandeurs », le juge de proximité a violé l'article 7 du code de procédure civile ;

4) ALORS QUE le juge est tenu de respecter et de faire respecter le principe du contradictoire ; qu'en soulevant d'office, sans provoquer les explications des parties, le caractère non contradictoire de l'expertise de M. B..., le juge de proximité a violé l'article 16 du code de procédure civile ;

5) ALORS QUE le garagiste est tenu d'une obligation de résultat et d'un devoir de conseil ; que les époux Y... avaient exposé dans leurs écritures que, lors d'une première intervention, la société FMC Bymycar avait indiqué qu'un seul des moyeux devait être remplacé puis, lors de la seconde intervention quelques jours plus tard, que deux moyeux de roues étaient défectueux et enfin, lors de la troisième intervention, que les quatre moyeux de roues devaient être remplacés ; qu'en considérant que la société FMC Bymycar aurait rempli son devoir de conseil en informant les exposants, dès la première intervention « de la nécessité de remplacer le moyeu de la roue droite », sans rechercher, comme il y était invité, si la société FMC Bymycar avait rempli ses obligations contractuelles au regard « des désordres apparus sur le véhicule après chaque intervention », le juge de proximité a privé son arrêt de base légale au regard de l'article 1147 du code civil.ECLI:FR:CCASS:2018:C100926
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