Cour de cassation, civile, Chambre civile 1, 11 juillet 2018, 17-17.823, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :



Donne acte à Mme X... du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société Air France ;

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu l'article L. 211-16 du code du tourisme ;

Attendu qu'aux termes de ce texte, toute personne physique ou morale qui se livre aux opérations mentionnées à l'article L. 211-1 du même code est responsable de plein droit à l'égard de l'acheteur de la bonne exécution des obligations résultant du contrat, que ce contrat ait été conclu à distance ou non et que ces obligations soient à exécuter par elle-même ou par d'autres prestataires de services, sans préjudice de son droit de recours contre ceux-ci et dans la limite des dédommagements prévus par les conventions internationales ;

Attendu, selon le jugement attaqué, rendu en dernier ressort, que Mme X... a conclu avec la société Club Méditerranée (l'agent de voyages), pour elle-même et ses deux enfants, un contrat ayant pour objet un séjour à Punta Cana (République dominicaine), du 19 avril au 1er mai 2014, comprenant le vol, les transports et la pension complète, à un prix tout compris ; que les voyageurs n'ont pu embarquer à la date prévue, en raison d'une surréservation du vol mise en oeuvre par la société Air France (le transporteur), le départ ayant été reporté au lendemain ; que Mme X... a fait citer en paiement de diverses indemnités l'agent de voyages, qui a appelé en intervention forcée le transporteur ;

Attendu que, pour rejeter les demandes de Mme X..., le jugement retient qu'il ne peut être reproché à l'agent de voyages un défaut d'information relatif à l'enregistrement en ligne la veille du départ, dès lors qu'un tel enregistrement n'est pas nécessaire et était inutile, l'embarquement de Mme X... n'étant pas intervenu au seul motif de la surréservation mise en oeuvre par le transporteur ; qu'il ajoute que, la prestation de transport ayant été sous-traitée au transporteur, seul celui-ci était responsable de la gestion des passagers à l'aéroport, ce qui est reconnu par Mme X... qui a, au surplus, obtenu de celui-ci l'indemnisation de ses frais, de sorte qu'il ne peut être imputé à l'agent de voyages un manquement à son obligation d'assistance et de conseil à l'aéroport ; qu'il constate que l'agent de voyages produit le cahier des réclamations de la semaine à Punta Cana, d'où il ressort qu'aucune réclamation n'a été faite par Mme X... et qu'en outre, une proposition commerciale a été soumise au titre de la perte d'une journée, qu'elle n'a pas acceptée ; qu'il en déduit que Mme X... n'apporte pas la preuve d'une quelconque faute commise par l'agent de voyages dans l'exécution de son contrat, qui ne soit pas la conséquence directe de la surréservation, déjà indemnisée ainsi que celle-ci le reconnaît ;

Qu'en statuant ainsi, par des motifs impropres à écarter la responsabilité de plein droit de l'agent de voyages, la juridiction de proximité a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 9 mars 2017, entre les parties, par la juridiction de proximité de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le tribunal d'instance de Paris ;

Condamne la société Club Méditerranée aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à Mme X... la somme de 2 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze juillet deux mille dix-huit. MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat aux Conseils, pour Mme X....

Il est fait grief au jugement attaqué D'AVOIR débouté Madame Laurence X... de toutes ses demandes, et de l'AVOIR condamnée à payer à la société CLUB MEDITERRANEE la somme de 1.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens ;

AUX MOTIFS QU' « il ressort des dispositions du code civil sur les obligations des parties résultant des contrats conclus et notamment de l'article 1147 du code civil, qu'une partie au contrat peut être condamnée à des dommages intérêts à raison de l'inexécution de ses obligations. Les dispositions de l'article L 211-16 du code du tourisme fixent que le voyagiste est responsable de plein droit à l'égard de l'acheteur de la bonne exécution des obligations résultant du contrat que ce contrat ait été conclu à distance ou non que ces obligations soient à exécuter par elle-même ou par d'autres prestataires, sans préjudice de son droit de recours contre ceux-ci. Aux termes de l'article 1315 du code civil, il appartient à celui qui demande l'exécution d'une obligation de l'établir ; et à celui qui s'en prétend libérer d'en justifier ; que Mme X... reconnaît avoir été indemnisée par AIR FRANCE en raison du surbooking et invoque exclusivement l'application des dispositions contractuelles la liant au CLUB MEDITERRANEE ; Qu'en conséquence, il y a lieu de mettre hors de cause la société AIR France ; que Mme X... fait valoir différentes fautes, qu'aurait commis le CLUB MED : Sur le défaut d'information concernant l'enregistrement en ligne la veille du départ : d'une part que l'enregistrement en ligne n'est pas nécessaire, d'autre part qu'elle est inutile dès lors que l'embarquement de Mme X... ne s'est pas fait, au seul motif du surbooking ; Sur le manquement à l'obligation d'assistance et de conseil à l'aéroport que la prestation de transport ayant été sous traitée à AIR FRANCE seule cette Cie était responsable de la gestion des passagers à l'aéroport ce qui est reconnu par Mme X... qui a obtenu au surplus, l'indemnisation de ses frais par cette compagnie Sur l'absence de prise en charge spéciale à l'arrivée à PUNTA CANA : que le CLUB MED produit le cahier des réclamations de la semaine à PUNTA CANA d'où il ressort qu'aucune réclamation n'a été faite par Mme X... ; Qu'au surplus une proposition commerciale a été faite par le CLUB MED au titre de la perte de la journée que Mme X... n'a pas entendu accepter ; en conséquence, que Mme X... n'apporte pas la preuve d'une quelconque faute commise par le CLUB MED dans le cadre de son contrat de voyage, qui ne soit pas la conséquence directe du surbooking, lequel a déjà été indemnisé ainsi qu'elle le reconnait Qu'elle sera en conséquence déboutée de sa demande de remboursement de 528.00 Euros ainsi que de sa demande de dommages intérêts pour manquement du CLUB MED à ses obligations contractuelles ; que Mme X... ne justifie d'aucun préjudice moral indemnisable ; qu'il serait inéquitable de laisser à la charge du CLUB MED, ses frais irrépétibles non compris dans les dépens, Mme X... sera donc condamnée à payer au CLUB MED la somme de 1500 Euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ; que Mme X... succombant, sera condamnée aux entiers dépens » ;

1°) ALORS QUE le vendeur d'un forfait touristique, au sens de l'article L. 211-2 du code du tourisme, est responsable de plein droit à l'égard de l'acheteur de la bonne exécution des obligations résultant du contrat, que celui-ci ait été conclu à distance ou non et que ces obligations soient à exécuter par lui-même ou par d'autres prestataires de services, sans préjudice de son droit de recours contre ceuxci ; qu'en l'espèce, il est constant et résulte des constatations du jugement attaqué que Madame X... avait réservé pour elle, sa mère et ses deux enfants un séjour au CLUB MED de PUNTA CANA du 19 avril 2014 au 1er mai 2014, mais qu'elles n'ont pu embarquer le jour de départ convenu et qu'elles n'ont pu embarquer que le lendemain à 12h30, perdant ainsi une journée du séjour qu'elles avaient réservé, en raison d'un surbooking pratiqué par la compagnie aérienne à laquelle la prestation de transport avait été confiée ; qu'en déboutant néanmoins Madame X... de ses demandes contre la société CLUB MEDITERRANEE tendant à l'indemnisation des préjudices complémentaires non indemnisés par le transporteur, aux motifs inopérants que le surbooking avait été pratiqué par la compagnie aérienne qui avait seule la charge de la gestion des passagers à l'aéroport et non par le vendeur du forfait touristique, et qu'aucune faute distincte n'était établie à l'encontre de la société CLUB MEDITERRANEE, la juridiction de proximité a violé l'article 1231-1 du code civil (ancien article 1147 du code civil), ensemble l'article L. 211-16 du code du tourisme ;

2°) ALORS QUE le vendeur d'un forfait touristique, au sens de l'article L.211-2 du code du tourisme, est tenu d'informer l'acheteur sur les prestations fournies et en particulier, sur les modalités de préparation du voyage et du séjour ; que, pour écarter le moyen invoqué par Madame X... dans ses conclusions (p. 5-6) qui soutenait que la société CLUB MEDITERRANEE avait manqué à son obligation d'information à son égard dans la mesure où elle ne lui avait pas indiqué que les places d'avion qu'elle avait achetées étaient réservables sur internet la veille de la date de départ, la juridiction de proximité a retenu que « l'enregistrement en ligne n'est pas nécessaire, d'autre part qu'elle est inutile dès lors que l'embarquement de Mme X... ne s'est pas fait, au seul motif du surbooking » ; qu'en statuant par de tels motifs, quand le manquement de la société CLUB MEDITERRANEE à son obligation d'information quant à la possibilité de réserver ses places sur internet la veille du départ avait nécessairement fait perdre à Madame X... la possibilité de s'enregistrer préalablement à son arrivée à l'aéroport et ainsi d'éviter les conséquences du surbooking pratiqué par la compagnie aérienne, la juridiction de proximité a violé l'article 1231-1 du code civil (ancien article 1147 du code civil), ensemble les articles L. 211-10 et L. 211-16 du code du tourisme ;

3°) ALORS QUE les juges du fond doivent examiner les pièces soumises à leur examen ; que Madame X... faisait valoir dans ses conclusions (p. 6, dernier §) que contrairement à ce que prétendait la société CLUB MEDITERRANEE, elle avait bien formulé une réclamation au cours de son séjour à PUNTA CANA, ainsi que cela résultait de la réception de signalement établi par le CLUB MED, aux termes de laquelle ce dernier écrivait « Nous tenons à vous remercier de nous avoir signalé le désagrément rencontré concernant votre arrivée. (
) Ci-joint vous trouvez une attestation à remplir pour un éventuel remboursement auprès de notre service client pour la nuit que vous avez perdue due aux conditions de vols d'Air France » ; qu'en retenant, pour rejeter la demande indemnitaire de Madame X..., que le CLUB MED produisait le cahier des réclamations de la semaine à PUNTA CANA d'où il ressortait qu'aucune réclamation n'avait été faite par Madame X..., sans examiner les pièces versées aux débats par l'exposante qui démontraient que cette dernière avait bien fait état lors de son séjour d'une réclamation, la juridiction de proximité a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;

4°) ALORS QUE le refus d'une offre d'indemnisation par la victime d'un dommage ne saurait avoir pour effet de la priver du droit à réparation de son préjudice ; qu'en se fondant sur la circonstance inopérante que Madame X... avait refusé la proposition d'indemnisation que lui avait faite la société CLUB MEDITERRANEE, à hauteur de 140 €, la juridiction de proximité a violé l'article 1231-1 du code civil (ancien article 1147 du code civil), ensemble les articles L. 211-10 et L. 211-16 du code du tourisme.ECLI:FR:CCASS:2018:C100743
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