Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 30 mai 2018, 16-26.403 16-27.691, Publié au bulletin
Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 30 mai 2018, 16-26.403 16-27.691, Publié au bulletin
Cour de cassation - Chambre commerciale
- N° de pourvoi : 16-26.403, 16-27.691
- ECLI:FR:CCASS:2018:CO00548
- Publié au bulletin
- Solution : Rejet et cassation partielle
Audience publique du mercredi 30 mai 2018
Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, du 23 septembre 2016- Président
- Mme Mouillard
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Joint les pourvois n° 16-27.691 et n° 16-26.403 qui attaquent le même arrêt ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que par un contrat du 10 février 2011, la société Spéciaux transports aériens Roissy (la société STAR), aux droits de laquelle est venue la société TFN Val, devenue la société Atalian Cleaning, (la société Atalian), a cédé à la société NRJ, qui exerce comme elle une activité de commissionnaire de transport, sa branche d'activité de distribution de fret dans la région Ile-de-France ; que par une convention de prestation de services du 21 février 2011, la société STAR s'est engagée à mettre des locaux à la disposition de la société NRJ contre rémunération ; que reprochant à la société STAR des réticences dolosives, la société NRJ l'a assignée en annulation de la cession ; que la société STAR ayant reconventionnellement demandé le paiement d'une indemnité d'occupation en exécution de la convention de prestation de services, la société NRJ a soulevé l'irrecevabilité de la demande pour inobservation de la clause de conciliation préalable stipulée dans cette dernière convention ;
Sur le moyen unique du pourvoi n° 16-27.691 :
Attendu que la société Atalian fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevable sa demande en paiement au titre de l'occupation des locaux alors, selon le moyen :
1°/ que la clause contractuelle prévoyant une tentative de règlement amiable, non assortie de conditions particulières de mise en oeuvre, ne constitue pas une procédure de conciliation obligatoire préalable à la saisine du juge, dont le non-respect caractérise une fin de non-recevoir s'imposant à celui-ci ; qu'en jugeant que la demande reconventionnelle de la société TFN Val serait irrecevable faute d'avoir respecté la clause de conciliation préalable, après avoir relevé que cette clause se contentait d'énoncer qu'"en cas de litiges, les Parties s'engagent à trouver un accord amiable, avec l'arbitrage de la FEDIMAG. A défaut d'accord amiable, compétence est attribuée au tribunal de commerce de Bobigny, nonobstant pluralité de parties", sans prévoir de conditions particulières de mises en oeuvre justifiant que son non-respect caractérise une fin de non-recevoir s'imposant à elle, la cour d'appel a violé l'article 122 du code de procédure civile ;
2°/ qu'en tout état de cause, en ne vérifiant pas, comme il lui était demandé si la clause de conciliation litigieuse était assortie de conditions particulières de mises en oeuvre justifiant que son non-respect caractérise une fin de non-recevoir s'imposant à elle, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 122 du code de procédure civile ;
3°/ qu'une clause de conciliation préalable ne peut s'opposer à la recevabilité d'une demande reconventionnelle lorsque cette demande se rattache aux prétentions originaires par un lien suffisant ; qu'en jugeant, après avoir relevé que les conventions litigieuses, dont la convention de prestations de services du 21 février 2001, "s'inscriv(ent) toutes dans le cadre de la cession d'une branche d'activité de la société STAR", que la demande reconventionnelle de la société TFN Val serait irrecevable faute d'avoir respecté la clause de conciliation préalable, la cour d'appel a violé les articles 70 et 122 du code de procédure civile ;
4°/ que l'assignation par un contractant de son cocontractant en nullité du contrat principal d'un ensemble contractuel lui interdit de se prévaloir d'une clause de conciliation préalable stipulée dans un contrat accessoire du même ensemble, dont la caducité devrait être constatée si la demande d'annulation du contrat principal était jugée fondée ; qu'en jugeant que la demande reconventionnelle de la société TFN Val serait irrecevable faute d'avoir respecté la clause de conciliation préalable après avoir admis que les conventions litigieuses, dont la convention de prestations de services du 21 février 2001, "s'inscriv(ent) toutes dans le cadre de la cession d'une branche d'activité de la société STAR", la cour d'appel a violé l'article 122 du code de procédure civile ;
5°/ qu'une partie ne saurait se prévaloir d'une clause de conciliation préalable lorsqu'elle a refusé cette dernière, fût-ce après l'introduction de l'instance ; qu'en jugeant que bien que la FEDIMAG ait constaté par procès-verbal du 8 juillet 2014 qu'aucune conciliation n'avait pu aboutir entre les parties, la demande reconventionnelle de la société TFN Val était irrecevable dès lors que "la clause instituant un préalable obligatoire de conciliation, aucune régularisation de la fin de non-recevoir ne peut intervenir en cours d'instance", la cour d'appel a violé l'article 122 du code de procédure civile ;
Mais attendu, en premier lieu, qu'ayant constaté que l'article 6 de la convention de prestation de services prévoyait qu'"en cas de litige, les parties s'engagent à trouver un accord amiable avec l'arbitrage de la FEDIMAG. A défaut d'accord amiable, compétence est attribuée au tribunal de commerce (...) nonobstant pluralité des parties", la cour d'appel en a exactement déduit qu'il instituait une procédure de conciliation préalable ;
Et attendu, en second lieu, qu'ayant relevé que le contrat de prestation de services, qui fondait la demande reconventionnelle de la société STAR, contenait, à la différence du contrat de cession faisant l'objet de la demande principale de la société NRJ, une clause de conciliation préalable, la cour d'appel en a exactement déduit que la demande reconventionnelle devait être précédée d'une tentative de conciliation, laquelle ne pouvait être régularisée en cours d'instance ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le moyen unique du pourvoi n° 16-26.403, pris en sa troisième branche :
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu que pour rejeter la demande d'annulation pour dol du contrat de cession formée par la société NRJ, l'arrêt retient que, professionnelle du transport, cette dernière ne pouvait ignorer que les transports de moteurs SNECMA effectués à la demande de l'un des clients cédés pouvaient relever de conditions d'assurance particulières et plus onéreuses, et que c'est en vain qu'elle reproche à la société STAR de lui avoir dissimulé ses propres conditions d'assurance et qu'elle invoque la dissimulation d'un contrat qui comporterait de prétendues clauses exorbitantes du droit commun ;
Qu'en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions de la société NRJ qui faisait valoir que la société STAR lui avait dissimulé que le contrat d'assurance pour cette activité avait été négocié et conclu par le Groupe Atalian qui bénéficiait, pour l'ensemble des sociétés du groupe, de concessions inhabituelles de la part de l'assureur, et que les primes d'assurance étaient payées par la société mère du groupe et non par la société STAR elle-même, la cour d‘appel a méconnu les exigences du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
REJETTE le pourvoi n° 16-27.691 ;
Et sur le pourvoi n° 16-26.403 :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette la demande en nullité de la société NRJ de la vente de fonds de commerce pour dol, et en ce qu'il statue sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 23 septembre 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne la société Atalian Cleaning aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à la société NRJ la somme de 3 000 euros et rejette les autres demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du trente mai deux mille dix-huit.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt.
Moyen produit au pourvoi n° E 16-26.403 par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour la société NRJ.
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué D'AVOIR débouté la société NRJ de l'intégralité de ses demandes,
AUX MOTIFS QUE la société NRJ, professionnelle du transport, ne pouvait ignorer que les transports de moteur SNECMA effectués à la demande des clients cédés, la société SDV, pouvaient relever de conditions d'assurance particulières et plus onéreuses eu égard à la nature du bien transporté ; que c'est en vain qu'elle reproche à l'intimée de lui avoir dissimulé ses propres conditions d'assurance à ce titre et qu'elle invoque la dissimulation d'un contrat qui comporterait de prétendues clauses exorbitantes du droit commun ; (
) qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments que la société NRJ ne démontre ni un, dol, ni une erreur sur les qualités substantielles qui auraient été de nature à vicier son consentement ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QU'en sa qualité de professionnel de transport ayant déclaré dans l'acte de cession du fonds de commerce être informée de l'activité de la branche cédée, NRJ ne peut soutenir ignorer que le transport de moteurs d'avion pour une entreprise nationale de premier plan réputée pour son activité aéronautique s'effectue selon des modalités spécifiques incluant une couverture d'assurance adaptée au mode de transport entrepris, qu'au surplus, l'exécution de diligences adaptées préalables à la vente lui aurait permis de s'assurer de ces divers éléments s'agissant d'opérer le transfert des contrats en relation avec l'activité cédée, conformément au paragraphe 1.0.0, deuxième tiret de l'acte de cession s'agissant d'un client dont NRJ précise elle-même qu'il a constitué pour le premier mois de cession près de 21 % du chiffre d'affaires réalisé ; que le tribunal décidera que NRJ n'établit pas le dol de la venderesse résultant du défaut d'information au titre de la couverture d'assurance pour l'activité de transport de fret aérien effectuée pour le compte de la société SDV ; que pas davantage le tribunal reconnaîtra un comportement fautif de STAR consécutif au déférencement de NRJ, ce déférencement résultant de la méconnaissance par NRJ d'un domaine que sa qualité de professionnel lui imposait de maitriser ;
1°) ALORS QU'en retenant, pour écarter tout vice du consentement, que la société NRJ, professionnelle du transport, ne pouvait ignorer les conditions d'assurance particulières et plus onéreuses pour les transports de moteurs d'avions confiés par les deux principaux clients cédés sans répondre à ses conclusions d'appel (p. 3 et 19) qui faisaient valoir qu'elle exerçait une activité de transport routier classique de proximité sans rapport avec l'activité très spécifique de distribution de fret aérien cédée par la société STAR, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
2°) ALORS QUE dans ses conclusions d'appel (p. 17 et 19), la société NRJ a soutenu, qu'au-delà de la réticence dolosive sur ses propres conditions d'assurance, la société STAR avait procédé à une déclaration mensongère, constitutive d'un dol, en garantissant, dans l'acte de cession, qu'il n'existait « aucun contrat écrit ou oral avec un fournisseur, fabricant, ou client comportant des clauses exorbitantes de droit commun (
) » alors que les garanties exigées par le principal client cédé pour le transport aérien des moteurs SNECMA étaient exorbitantes de celles prévues par contrats types de transport routier traditionnel ; qu'en ne s'expliquant pas sur ces chefs déterminants des conclusions de la société NRJ, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
3°) ALORS QUE dans ses conclusions d'appel (p. 19 et 20), la société NRJ a fait valoir qu'outre le coût exorbitant de l'assurance exigée pour le transport des moteurs SNECMA, la société STAR lui avait dissimulé d'une part que le contrat d'assurance pour cette activité avait été négocié et conclu par le Groupe Atalian qui bénéficiait, pour l'ensemble des sociétés du groupe, de concessions inhabituelles de la part de l'assureur et d'autre part que les primes d'assurance étaient payées par la société mère du groupe et non par la société STAR elle-même ; qu'en s'abstenant de s'expliquer sur ces conclusions péremptoires de nature à établir les manoeuvres pratiquées par la société STAR pour déterminer la société NRJ à contracter aux conditions stipulées, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile. Moyen produit au pourvoi n° E 16-27.691 par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour la société Atalian Cleaning anciennement dénommée TFN Val venant aux droits de la société STAR.
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré irrecevable la demande en paiement de la société STAR au titre de l'occupation des locaux ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE, aux termes de l'arrêt attaqué, « l'article 6 de la convention de prestation de services du 21 février 2011, intitulé « litiges » est libellée comme suit : « En cas de litiges, les parties s'engagent à trouver un accord amiable avec l'arbitrage de la FEDIMAG. A défaut d'accord amiable, compétence est attribuée au tribunal de commerce, nonobstant pluralité des parties. » ; que par cette clause, les parties ont institué une procédure de conciliation obligatoire avant de pouvoir engager une procédure judiciaire quant aux litiges pouvant survenir relatifs à la convention de prestations de services ; que même en présence de plusieurs conventions s'inscrivant toutes dans le cadre de la cession d'une branche d'activité de la société STAR, il était loisible aux parties de stipuler, pour une partie de leurs accords régularisés le 21 février 2011 après l'annexe du 10 février 2011, ce préalable de conciliation, lequel doit être respecté ; que la clause instituant un préalable obligatoire de conciliation, aucune régularisation de la fin de non-recevoir ne peut intervenir en cours d'instance ; qu'en conséquence, le jugement sera confirmé en ce qu'il a déclaré irrecevable la demande de paiement de la société TFN VAL » ;
ET AUX MOTIFS ADOPTÉS QUE, aux termes du jugement entrepris, « concernant l'utilisation des locaux, les sommes dont se prévaut STAR résultent de l'application de la convention de prestation de services signée le 21 février 2011 par STAR et NRJ ; que l'article 6 de cette convention stipule qu'en cas de litige, les parties s'engagent à trouver un accord amiable, avec l'arbitrage de la FEDIMAG, et qu'à défaut d'accord amiable, compétence est attribuée au tribunal de commerce de Bobigny ; qu'il n'est pas contesté que la recherche d'un accord amiable avec l'arbitrage de la FEDIMAG n'a pas été engagée, et que cette clause s'impose aux parties ; que le tribunal décidera que la demande de STAR au titre d'utilisation de locaux est irrecevable du fait de l'absence d'application des stipulations contractuelles précitées » ;
ALORS en premier lieu QUE la clause contractuelle prévoyant une tentative de règlement amiable, non assortie de conditions particulières de mise en oeuvre, ne constitue pas une procédure de conciliation obligatoire préalable à la saisine du juge, dont le non-respect caractérise une fin de non-recevoir s'imposant à celui-ci ; qu'en jugeant que la demande reconventionnelle de la société TFN VAL serait irrecevable faute d'avoir respecté la clause de conciliation préalable, après avoir relevé que cette clause se contentait d'énoncer qu'« en cas de litiges, les Parties s'engagent à trouver un accord amiable, avec l'arbitrage de la FEDIMAG. A défaut d'accord amiable, compétence est attribuée au Tribunal de commerce de Bobigny, nonobstant pluralité de parties » (arrêt, p. 8), sans prévoir de conditions particulières de mises en oeuvre justifiant que son non-respect caractérise une fin de non-recevoir s'imposant à elle, la cour d'appel a violé l'article 122 du code de procédure civile ;
ALORS en deuxième lieu QU'en tout état de cause, en ne vérifiant pas, comme il lui était demandé (conclusions de la société TFN VAL, p. 38-39) si la clause de conciliation litigieuse était assortie de conditions particulières de mises en oeuvre justifiant que son non-respect caractérise une fin de non-recevoir s'imposant à elle, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 122 du code de procédure civile ;
ALORS en troisième lieu, subsidiairement, QU'une clause de conciliation préalable ne peut s'opposer à la recevabilité d'une demande reconventionnelle lorsque cette demande se rattache aux prétentions originaires par un lien suffisant ; qu'en jugeant, après avoir relevé que les conventions litigieuses, dont la convention de prestations de services du 21 février 2001, « s'inscriv(ent) toutes dans le cadre de la cession d'une branche d'activité de la société STAR » (arrêt, p. 8), que la demande reconventionnelle de la société TFN VAL serait irrecevable faute d'avoir respecté la clause de conciliation préalable, la cour d'appel a violé les articles 70 et 122 du code de procédure civile ;
ALORS en quatrième lieu, subsidiairement, QUE l'assignation par un contractant de son cocontractant en nullité du contrat principal d'un ensemble contractuel lui interdit de se prévaloir d'une clause de conciliation préalable stipulée dans un contrat accessoire du même ensemble, dont la caducité devrait être constatée si la demande d'annulation du contrat principal était jugée fondée ; qu'en jugeant que la demande reconventionnelle de la société TFN VAL serait irrecevable faute d'avoir respecté la clause de conciliation préalable après avoir admis que les conventions litigieuses, dont la convention de prestations de services du 21 février 2001, « s'inscriv(ent) toutes dans le cadre de la cession d'une branche d'activité de la société STAR » (arrêt, p. 8), la cour d'appel a violé l'article 122 du code de procédure civile ;
ALORS en cinquième lieu, subsidiairement, QU'une partie ne saurait se prévaloir d'une clause de conciliation préalable lorsqu'elle a refusé cette dernière, fût-ce après l'introduction de l'instance ; qu'en jugeant que bien que la FEDIMAG ait constaté par procès-verbal du 8 juillet 2014 qu'aucune conciliation n'avait pu aboutir entre les parties, la demande reconventionnelle de la société TFN VAL était irrecevable dès lors que « la clause instituant un préalable obligatoire de conciliation, aucune régularisation de la fin de non-recevoir ne peut intervenir en cours d'instance » (arrêt, p. 8), la cour d'appel a violé l'article 122 du code de procédure civile.ECLI:FR:CCASS:2018:CO00548
Joint les pourvois n° 16-27.691 et n° 16-26.403 qui attaquent le même arrêt ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que par un contrat du 10 février 2011, la société Spéciaux transports aériens Roissy (la société STAR), aux droits de laquelle est venue la société TFN Val, devenue la société Atalian Cleaning, (la société Atalian), a cédé à la société NRJ, qui exerce comme elle une activité de commissionnaire de transport, sa branche d'activité de distribution de fret dans la région Ile-de-France ; que par une convention de prestation de services du 21 février 2011, la société STAR s'est engagée à mettre des locaux à la disposition de la société NRJ contre rémunération ; que reprochant à la société STAR des réticences dolosives, la société NRJ l'a assignée en annulation de la cession ; que la société STAR ayant reconventionnellement demandé le paiement d'une indemnité d'occupation en exécution de la convention de prestation de services, la société NRJ a soulevé l'irrecevabilité de la demande pour inobservation de la clause de conciliation préalable stipulée dans cette dernière convention ;
Sur le moyen unique du pourvoi n° 16-27.691 :
Attendu que la société Atalian fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevable sa demande en paiement au titre de l'occupation des locaux alors, selon le moyen :
1°/ que la clause contractuelle prévoyant une tentative de règlement amiable, non assortie de conditions particulières de mise en oeuvre, ne constitue pas une procédure de conciliation obligatoire préalable à la saisine du juge, dont le non-respect caractérise une fin de non-recevoir s'imposant à celui-ci ; qu'en jugeant que la demande reconventionnelle de la société TFN Val serait irrecevable faute d'avoir respecté la clause de conciliation préalable, après avoir relevé que cette clause se contentait d'énoncer qu'"en cas de litiges, les Parties s'engagent à trouver un accord amiable, avec l'arbitrage de la FEDIMAG. A défaut d'accord amiable, compétence est attribuée au tribunal de commerce de Bobigny, nonobstant pluralité de parties", sans prévoir de conditions particulières de mises en oeuvre justifiant que son non-respect caractérise une fin de non-recevoir s'imposant à elle, la cour d'appel a violé l'article 122 du code de procédure civile ;
2°/ qu'en tout état de cause, en ne vérifiant pas, comme il lui était demandé si la clause de conciliation litigieuse était assortie de conditions particulières de mises en oeuvre justifiant que son non-respect caractérise une fin de non-recevoir s'imposant à elle, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 122 du code de procédure civile ;
3°/ qu'une clause de conciliation préalable ne peut s'opposer à la recevabilité d'une demande reconventionnelle lorsque cette demande se rattache aux prétentions originaires par un lien suffisant ; qu'en jugeant, après avoir relevé que les conventions litigieuses, dont la convention de prestations de services du 21 février 2001, "s'inscriv(ent) toutes dans le cadre de la cession d'une branche d'activité de la société STAR", que la demande reconventionnelle de la société TFN Val serait irrecevable faute d'avoir respecté la clause de conciliation préalable, la cour d'appel a violé les articles 70 et 122 du code de procédure civile ;
4°/ que l'assignation par un contractant de son cocontractant en nullité du contrat principal d'un ensemble contractuel lui interdit de se prévaloir d'une clause de conciliation préalable stipulée dans un contrat accessoire du même ensemble, dont la caducité devrait être constatée si la demande d'annulation du contrat principal était jugée fondée ; qu'en jugeant que la demande reconventionnelle de la société TFN Val serait irrecevable faute d'avoir respecté la clause de conciliation préalable après avoir admis que les conventions litigieuses, dont la convention de prestations de services du 21 février 2001, "s'inscriv(ent) toutes dans le cadre de la cession d'une branche d'activité de la société STAR", la cour d'appel a violé l'article 122 du code de procédure civile ;
5°/ qu'une partie ne saurait se prévaloir d'une clause de conciliation préalable lorsqu'elle a refusé cette dernière, fût-ce après l'introduction de l'instance ; qu'en jugeant que bien que la FEDIMAG ait constaté par procès-verbal du 8 juillet 2014 qu'aucune conciliation n'avait pu aboutir entre les parties, la demande reconventionnelle de la société TFN Val était irrecevable dès lors que "la clause instituant un préalable obligatoire de conciliation, aucune régularisation de la fin de non-recevoir ne peut intervenir en cours d'instance", la cour d'appel a violé l'article 122 du code de procédure civile ;
Mais attendu, en premier lieu, qu'ayant constaté que l'article 6 de la convention de prestation de services prévoyait qu'"en cas de litige, les parties s'engagent à trouver un accord amiable avec l'arbitrage de la FEDIMAG. A défaut d'accord amiable, compétence est attribuée au tribunal de commerce (...) nonobstant pluralité des parties", la cour d'appel en a exactement déduit qu'il instituait une procédure de conciliation préalable ;
Et attendu, en second lieu, qu'ayant relevé que le contrat de prestation de services, qui fondait la demande reconventionnelle de la société STAR, contenait, à la différence du contrat de cession faisant l'objet de la demande principale de la société NRJ, une clause de conciliation préalable, la cour d'appel en a exactement déduit que la demande reconventionnelle devait être précédée d'une tentative de conciliation, laquelle ne pouvait être régularisée en cours d'instance ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le moyen unique du pourvoi n° 16-26.403, pris en sa troisième branche :
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu que pour rejeter la demande d'annulation pour dol du contrat de cession formée par la société NRJ, l'arrêt retient que, professionnelle du transport, cette dernière ne pouvait ignorer que les transports de moteurs SNECMA effectués à la demande de l'un des clients cédés pouvaient relever de conditions d'assurance particulières et plus onéreuses, et que c'est en vain qu'elle reproche à la société STAR de lui avoir dissimulé ses propres conditions d'assurance et qu'elle invoque la dissimulation d'un contrat qui comporterait de prétendues clauses exorbitantes du droit commun ;
Qu'en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions de la société NRJ qui faisait valoir que la société STAR lui avait dissimulé que le contrat d'assurance pour cette activité avait été négocié et conclu par le Groupe Atalian qui bénéficiait, pour l'ensemble des sociétés du groupe, de concessions inhabituelles de la part de l'assureur, et que les primes d'assurance étaient payées par la société mère du groupe et non par la société STAR elle-même, la cour d‘appel a méconnu les exigences du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
REJETTE le pourvoi n° 16-27.691 ;
Et sur le pourvoi n° 16-26.403 :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette la demande en nullité de la société NRJ de la vente de fonds de commerce pour dol, et en ce qu'il statue sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 23 septembre 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne la société Atalian Cleaning aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à la société NRJ la somme de 3 000 euros et rejette les autres demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du trente mai deux mille dix-huit.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt.
Moyen produit au pourvoi n° E 16-26.403 par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour la société NRJ.
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué D'AVOIR débouté la société NRJ de l'intégralité de ses demandes,
AUX MOTIFS QUE la société NRJ, professionnelle du transport, ne pouvait ignorer que les transports de moteur SNECMA effectués à la demande des clients cédés, la société SDV, pouvaient relever de conditions d'assurance particulières et plus onéreuses eu égard à la nature du bien transporté ; que c'est en vain qu'elle reproche à l'intimée de lui avoir dissimulé ses propres conditions d'assurance à ce titre et qu'elle invoque la dissimulation d'un contrat qui comporterait de prétendues clauses exorbitantes du droit commun ; (
) qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments que la société NRJ ne démontre ni un, dol, ni une erreur sur les qualités substantielles qui auraient été de nature à vicier son consentement ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QU'en sa qualité de professionnel de transport ayant déclaré dans l'acte de cession du fonds de commerce être informée de l'activité de la branche cédée, NRJ ne peut soutenir ignorer que le transport de moteurs d'avion pour une entreprise nationale de premier plan réputée pour son activité aéronautique s'effectue selon des modalités spécifiques incluant une couverture d'assurance adaptée au mode de transport entrepris, qu'au surplus, l'exécution de diligences adaptées préalables à la vente lui aurait permis de s'assurer de ces divers éléments s'agissant d'opérer le transfert des contrats en relation avec l'activité cédée, conformément au paragraphe 1.0.0, deuxième tiret de l'acte de cession s'agissant d'un client dont NRJ précise elle-même qu'il a constitué pour le premier mois de cession près de 21 % du chiffre d'affaires réalisé ; que le tribunal décidera que NRJ n'établit pas le dol de la venderesse résultant du défaut d'information au titre de la couverture d'assurance pour l'activité de transport de fret aérien effectuée pour le compte de la société SDV ; que pas davantage le tribunal reconnaîtra un comportement fautif de STAR consécutif au déférencement de NRJ, ce déférencement résultant de la méconnaissance par NRJ d'un domaine que sa qualité de professionnel lui imposait de maitriser ;
1°) ALORS QU'en retenant, pour écarter tout vice du consentement, que la société NRJ, professionnelle du transport, ne pouvait ignorer les conditions d'assurance particulières et plus onéreuses pour les transports de moteurs d'avions confiés par les deux principaux clients cédés sans répondre à ses conclusions d'appel (p. 3 et 19) qui faisaient valoir qu'elle exerçait une activité de transport routier classique de proximité sans rapport avec l'activité très spécifique de distribution de fret aérien cédée par la société STAR, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
2°) ALORS QUE dans ses conclusions d'appel (p. 17 et 19), la société NRJ a soutenu, qu'au-delà de la réticence dolosive sur ses propres conditions d'assurance, la société STAR avait procédé à une déclaration mensongère, constitutive d'un dol, en garantissant, dans l'acte de cession, qu'il n'existait « aucun contrat écrit ou oral avec un fournisseur, fabricant, ou client comportant des clauses exorbitantes de droit commun (
) » alors que les garanties exigées par le principal client cédé pour le transport aérien des moteurs SNECMA étaient exorbitantes de celles prévues par contrats types de transport routier traditionnel ; qu'en ne s'expliquant pas sur ces chefs déterminants des conclusions de la société NRJ, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
3°) ALORS QUE dans ses conclusions d'appel (p. 19 et 20), la société NRJ a fait valoir qu'outre le coût exorbitant de l'assurance exigée pour le transport des moteurs SNECMA, la société STAR lui avait dissimulé d'une part que le contrat d'assurance pour cette activité avait été négocié et conclu par le Groupe Atalian qui bénéficiait, pour l'ensemble des sociétés du groupe, de concessions inhabituelles de la part de l'assureur et d'autre part que les primes d'assurance étaient payées par la société mère du groupe et non par la société STAR elle-même ; qu'en s'abstenant de s'expliquer sur ces conclusions péremptoires de nature à établir les manoeuvres pratiquées par la société STAR pour déterminer la société NRJ à contracter aux conditions stipulées, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile. Moyen produit au pourvoi n° E 16-27.691 par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour la société Atalian Cleaning anciennement dénommée TFN Val venant aux droits de la société STAR.
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré irrecevable la demande en paiement de la société STAR au titre de l'occupation des locaux ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE, aux termes de l'arrêt attaqué, « l'article 6 de la convention de prestation de services du 21 février 2011, intitulé « litiges » est libellée comme suit : « En cas de litiges, les parties s'engagent à trouver un accord amiable avec l'arbitrage de la FEDIMAG. A défaut d'accord amiable, compétence est attribuée au tribunal de commerce, nonobstant pluralité des parties. » ; que par cette clause, les parties ont institué une procédure de conciliation obligatoire avant de pouvoir engager une procédure judiciaire quant aux litiges pouvant survenir relatifs à la convention de prestations de services ; que même en présence de plusieurs conventions s'inscrivant toutes dans le cadre de la cession d'une branche d'activité de la société STAR, il était loisible aux parties de stipuler, pour une partie de leurs accords régularisés le 21 février 2011 après l'annexe du 10 février 2011, ce préalable de conciliation, lequel doit être respecté ; que la clause instituant un préalable obligatoire de conciliation, aucune régularisation de la fin de non-recevoir ne peut intervenir en cours d'instance ; qu'en conséquence, le jugement sera confirmé en ce qu'il a déclaré irrecevable la demande de paiement de la société TFN VAL » ;
ET AUX MOTIFS ADOPTÉS QUE, aux termes du jugement entrepris, « concernant l'utilisation des locaux, les sommes dont se prévaut STAR résultent de l'application de la convention de prestation de services signée le 21 février 2011 par STAR et NRJ ; que l'article 6 de cette convention stipule qu'en cas de litige, les parties s'engagent à trouver un accord amiable, avec l'arbitrage de la FEDIMAG, et qu'à défaut d'accord amiable, compétence est attribuée au tribunal de commerce de Bobigny ; qu'il n'est pas contesté que la recherche d'un accord amiable avec l'arbitrage de la FEDIMAG n'a pas été engagée, et que cette clause s'impose aux parties ; que le tribunal décidera que la demande de STAR au titre d'utilisation de locaux est irrecevable du fait de l'absence d'application des stipulations contractuelles précitées » ;
ALORS en premier lieu QUE la clause contractuelle prévoyant une tentative de règlement amiable, non assortie de conditions particulières de mise en oeuvre, ne constitue pas une procédure de conciliation obligatoire préalable à la saisine du juge, dont le non-respect caractérise une fin de non-recevoir s'imposant à celui-ci ; qu'en jugeant que la demande reconventionnelle de la société TFN VAL serait irrecevable faute d'avoir respecté la clause de conciliation préalable, après avoir relevé que cette clause se contentait d'énoncer qu'« en cas de litiges, les Parties s'engagent à trouver un accord amiable, avec l'arbitrage de la FEDIMAG. A défaut d'accord amiable, compétence est attribuée au Tribunal de commerce de Bobigny, nonobstant pluralité de parties » (arrêt, p. 8), sans prévoir de conditions particulières de mises en oeuvre justifiant que son non-respect caractérise une fin de non-recevoir s'imposant à elle, la cour d'appel a violé l'article 122 du code de procédure civile ;
ALORS en deuxième lieu QU'en tout état de cause, en ne vérifiant pas, comme il lui était demandé (conclusions de la société TFN VAL, p. 38-39) si la clause de conciliation litigieuse était assortie de conditions particulières de mises en oeuvre justifiant que son non-respect caractérise une fin de non-recevoir s'imposant à elle, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 122 du code de procédure civile ;
ALORS en troisième lieu, subsidiairement, QU'une clause de conciliation préalable ne peut s'opposer à la recevabilité d'une demande reconventionnelle lorsque cette demande se rattache aux prétentions originaires par un lien suffisant ; qu'en jugeant, après avoir relevé que les conventions litigieuses, dont la convention de prestations de services du 21 février 2001, « s'inscriv(ent) toutes dans le cadre de la cession d'une branche d'activité de la société STAR » (arrêt, p. 8), que la demande reconventionnelle de la société TFN VAL serait irrecevable faute d'avoir respecté la clause de conciliation préalable, la cour d'appel a violé les articles 70 et 122 du code de procédure civile ;
ALORS en quatrième lieu, subsidiairement, QUE l'assignation par un contractant de son cocontractant en nullité du contrat principal d'un ensemble contractuel lui interdit de se prévaloir d'une clause de conciliation préalable stipulée dans un contrat accessoire du même ensemble, dont la caducité devrait être constatée si la demande d'annulation du contrat principal était jugée fondée ; qu'en jugeant que la demande reconventionnelle de la société TFN VAL serait irrecevable faute d'avoir respecté la clause de conciliation préalable après avoir admis que les conventions litigieuses, dont la convention de prestations de services du 21 février 2001, « s'inscriv(ent) toutes dans le cadre de la cession d'une branche d'activité de la société STAR » (arrêt, p. 8), la cour d'appel a violé l'article 122 du code de procédure civile ;
ALORS en cinquième lieu, subsidiairement, QU'une partie ne saurait se prévaloir d'une clause de conciliation préalable lorsqu'elle a refusé cette dernière, fût-ce après l'introduction de l'instance ; qu'en jugeant que bien que la FEDIMAG ait constaté par procès-verbal du 8 juillet 2014 qu'aucune conciliation n'avait pu aboutir entre les parties, la demande reconventionnelle de la société TFN VAL était irrecevable dès lors que « la clause instituant un préalable obligatoire de conciliation, aucune régularisation de la fin de non-recevoir ne peut intervenir en cours d'instance » (arrêt, p. 8), la cour d'appel a violé l'article 122 du code de procédure civile.