Cour de cassation, civile, Chambre civile 2, 17 mai 2018, 16-28.390, Publié au bulletin

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :



Sur la recevabilité de la note en délibéré :

Attendu que la Cour n'a pas demandé aux parties de note en délibéré, que le délai pour établir un mémoire en défense a couru à compter du 15 novembre 2017 et que l'avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, constitué pour la défenderesse au pourvoi depuis le 19 janvier 2018 et avisé de ce que l'affaire était appelée à l'audience du 4 avril 2018, n'a averti la Cour avant cette date d'aucune difficulté ;

D'où il suit que la note en délibéré adressée le 13 avril 2018 par Mme X... est irrecevable ;

Sur le troisième moyen, pris en sa première branche :

Vu l'article 562 du code de procédure civile ;

Attendu que la cour d'appel qui annule un jugement, pour un motif autre que l'irrégularité de l'acte introductif d'instance, est, en vertu de l'effet dévolutif de l'appel, tenue de statuer sur le fond de l'affaire ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'à la suite du placement en redressement judiciaire puis en liquidation judiciaire de la société Laroche Peltier, le comptable, responsable du pôle de recouvrement spécialisé de Niort (le comptable public) a sollicité d'un tribunal de grande instance que Mme X..., gérante de la société Colibri, qui assurait la présidence de la société Laroche Peltier, soit déclarée solidairement tenue de la dette fiscale de cette société en application de l'article L. 267 du livre des procédures fiscales ; que ce tribunal s'étant déclaré incompétent au profit de son président, celui-ci a statué sur la demande du comptable public ;

Attendu que pour se borner à annuler l'ordonnance du président du tribunal de grande instance, l'arrêt retient qu'au regard de l'effet dévolutif, le non respect du contradictoire est assimilé à la nullité de l'assignation, dont il est acquis qu'elle prive l'appel de son effet dévolutif ;

Qu'en statuant ainsi la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

DECLARE IRRECEVABLE la note en délibéré adressée le 13 avril 2018 par Mme X... ;

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il a déclaré l'appel recevable, l'arrêt rendu le 26 octobre 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Poitiers ; remet, en conséquence , sauf sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux ;

Condamne Mme X... aux dépens ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept mai deux mille dix-huit.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Foussard et Froger, avocat aux Conseils, pour le comptable, responsable du pôle de recouvrement spécialisé de Niort.

PREMIER MOYEN DE CASSATION

L'arrêt attaqué encourt la censure ;

EN CE QU'il a annulé l'ordonnance du 26 août 2014, par laquelle la présidente du Tribunal de grande instance de Niort a déclaré Mme Y... solidairement tenue, avec la société SAS LAROCHE PELLETIER, du paiement des impôts éludés, puis refusé de statuer sur la demande ;

AUX MOTIFS QUE « Le comptable des Finances publiques écrit en page 3 de ses conclusions : « Le greffe du Tribunal de Grande Instance de Niort n'ayant pas procédé au renvoi automatique, l'avocat de l'administration a été contraint de procéder à une nouvelle assignation », ce faisant le comptable des Finances Publiques a introduit une nouvelle instance et n'est plus fondé à se prévaloir du principe rappelé par la Cour de cassation aux termes duquel « en cas de renvoi devant une autre juridiction, l'instance régulièrement engagée devant le tribunal initialement saisi se poursuit devant le tribunal de renvoi ». Force est donc de constater que la Présidente a pris l'ordonnance dont appel en se référant à des écritures prises par le comptable des finances publiques dans le cadre d'une instance distincte. L'ordonnance entreprise doit donc être déclarée nulle et non avenue comme ayant enfreint le principe du contradictoire. Les parties ont conclu au fond. Il n'en reste pas moins qu'au regard de l'effet dévolutif, le non-respect du contradictoire est assimilé à la nullité de l'assignation, dont il est acquis qu'elle prive l'appel de son effet dévolutif. La cour n'est donc pas en mesure d'évoquer » ;

ALORS QUE, premièrement, lorsqu'un juge se déclare incompétent, l'instance introduite devant ce juge se poursuit devant le juge qu'il a désigné comme compétent ; que les conclusions déposées devant le juge originairement saisi continuent de produire leurs effets et imposent au juge nouvellement saisi de statuer ; qu'en estimant que le juge désigné compétent ne pouvait pas statuer au vu des conclusions déposées devant le premier juge, les juges du fond ont violé les articles 1, 2, 96 § 2, 97 et 481 du Code de procédure civile, ensemble l'article 562 du Code de procédure civile ;

ALORS QUE, deuxièmement, si par l'effet d'un dysfonctionnement, la juridiction originairement saisie ne transmet pas le dossier à la juridiction nouvellement saisie, toute partie intéressée, et notamment le demandeur, pour éviter ce dysfonctionnement et obtenir une décision de justice dans les délais raisonnable, peut prendre l'initiative d'assigner son adversaire devant le juge désormais saisi et d'enrôler son assignation à son greffe ; que toutefois, une telle assignation n'a pas pour objet d'introduire l'instance, laquelle demeure introduite par l'acte porté devant le juge originaire ; qu'en décidant le contraire, les juges du fond ont violé les articles 1, 2, 53, 96 § 2, 97 et 481 du Code de procédure civile, ensemble l'article 562 du Code de procédure civile ;

ET ALORS QUE, troisièmement, et en toute hypothèse, à supposer par impossible que les conclusions originaires ne lient pas le juge nouvellement saisi, l'absence de nouvelles conclusions, qui ne concernent pas l'acte introductif d'instance, mais le déroulement d'une instance d'ores et déjà introduite, ne pouvait échec à l'effet dévolutif ; qu'en décidant le contraire, les juges du fond ont violé les articles 1, 2, 53, 96 § 2, 97 et 481 du Code de procédure civile, ensemble l'article 562 du Code de procédure civile.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION

L'arrêt attaqué encourt la censure ;

EN CE QU'il a annulé l'ordonnance du 26 août 2014, par laquelle la présidente du Tribunal de grande instance de Niort a déclaré Mme Y... solidairement tenue, avec la société SAS LAROCHE PELLETIER, du paiement des impôts éludés, puis refusé de statuer sur la demande ;

AUX MOTIFS QUE « Le comptable des Finances publiques écrit en page 3 de ses conclusions : « Le greffe du Tribunal de Grande Instance de Niort n'ayant pas procédé au renvoi automatique, l'avocat de l'administration a été contraint de procéder à une nouvelle assignation », ce faisant le comptable des Finances Publiques a introduit une nouvelle instance et n'est plus fondé à se prévaloir du principe rappelé par la Cour de cassation aux termes duquel « en cas de renvoi devant une autre juridiction, l'instance régulièrement engagée devant le tribunal initialement saisi se poursuit devant le tribunal de renvoi ». Force est donc de constater que la Présidente a pris l'ordonnance dont appel en se référant à des écritures prises par le comptable des finances publiques dans le cadre d'une instance distincte. L'ordonnance entreprise doit donc être déclarée nulle et non avenue comme ayant enfreint le principe du contradictoire. Les parties ont conclu au fond. Il n'en reste pas moins qu'au regard de l'effet dévolutif, le non-respect du contradictoire est assimilé à la nullité de l'assignation, dont il est acquis qu'elle prive l'appel de son effet dévolutif. La cour n'est donc pas en mesure d'évoquer » ;

ALORS QUE, et en tout état de cause, en soulevant d'office l'impossibilité d'user de l'effet dévolutif sans interpeller les parties pour qu'elles puissent s'en expliquer, les juges du fond ont méconnu le principe du contradictoire et violé l'article 16 du Code de procédure civile.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION

L'arrêt attaqué encourt la censure ;

EN CE QU'il a annulé l'ordonnance du 26 août 2014, par laquelle la présidente du Tribunal de grande instance de Niort a déclaré Mme Y... solidairement tenue, avec la société SAS LAROCHE PELLETIER, du paiement des impôts éludés, puis refusé de statuer sur la demande ;

AUX MOTIFS QUE « Le comptable des Finances publiques écrit en page 3 de ses conclusions : « Le greffe du Tribunal de Grande Instance de Niort n'ayant pas procédé au renvoi automatique, l'avocat de l'administration a été contraint de procéder à une nouvelle assignation », ce faisant le comptable des Finances Publiques a introduit une nouvelle instance et n'est plus fondé à se prévaloir du principe rappelé par la Cour de cassation aux termes duquel « en cas de renvoi devant une autre juridiction, l'instance régulièrement engagée devant le tribunal initialement saisi se poursuit devant le tribunal de renvoi ». Force est donc de constater que la Présidente a pris l'ordonnance dont appel en se référant à des écritures prises par le comptable des finances publiques dans le cadre d'une instance distincte. L'ordonnance entreprise doit donc être déclarée nulle et non avenue comme ayant enfreint le principe du contradictoire. Les parties ont conclu au fond. Il n'en reste pas moins qu'au regard de l'effet dévolutif, le non-respect du contradictoire est assimilé à la nullité de l'assignation, dont il est acquis qu'elle prive l'appel de son effet dévolutif. La cour n'est donc pas en mesure d'évoquer » ;

ALORS QUE, premièrement, à supposer par impossible que l'assignation devant le juge désigné comme compétent puisse être regardé comme introductif d'une nouvelle instance, de toute façon la référence aux conclusions déposées devant le juge qui s'est déclaré incompétent n'affecte pas l'assignation délivrée devant le juge désigné comme compétent ; qu'à ce titre, cet événement ne pouvait en aucune façon faire obstacle à l'effet dévolutif ; qu'en décidant le contraire, les juges du fond ont violé l'article 562 du Code de procédure civile ;

ALORS QUE, deuxièmement, les irrégularités de fond font l'objet d'une énumération limitative à l'article 117 du Code de procédure civile ; qu'en dehors de cette énumération, les irrégularités doivent être traitées comme des nullités de forme ; que si dans la seconde hypothèse la nullité suppose la preuve d'un grief, dans la première, l'irrégularité emporte automatiquement nullité ; qu'en raisonnant en l'espèce comme s'ils étaient en présence d'une nullité de fond pour se dispenser d'avoir à rechercher l'existence d'un grief, les juges du fond ont violé l'article 117 du Code de procédure civile par fausse application. ECLI:FR:CCASS:2018:C200667
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