Cour de cassation, criminelle, Chambre criminelle, 7 mai 2018, 17-81.768, Inédit
Cour de cassation, criminelle, Chambre criminelle, 7 mai 2018, 17-81.768, Inédit
Cour de cassation - Chambre criminelle
- N° de pourvoi : 17-81.768
- ECLI:FR:CCASS:2018:CR00744
- Non publié au bulletin
- Solution : Cassation partielle
Audience publique du lundi 07 mai 2018
Décision attaquée : Cour d'appel de Riom, du 23 février 2017Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- La caisse primaire d'assurance maladie de l'Allier, partie civile,
contre l'arrêt de la cour d'appel de RIOM, chambre correctionnelle, en date du 23 février 2017, qui l'a déboutée de ses demandes après relaxe de Mmes Sarah X... et Y... Z... des chefs d'escroquerie, de faux et de complicité de ces délits ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 13 mars 2018 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, M. Parlos, conseiller rapporteur, M. Straehli, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Zita ;
Sur le rapport de M. le conseiller PARLOS, les observations de la société civile professionnelle FOUSSARD et FROGER, de la société civile professionnelle GASCHIGNARD, avocats en la Cour, et les conclusions de Mme l'avocat général LE DIMNA ;
Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure qu'au terme d'une enquête conduite sur une plainte de la caisse primaire d'assurance maladie de l'Allier (la CPAM) visant Mme X..., infirmière libérale dont l'activité anormalement élevée faisait suspecter le recours systématique à un remplaçant, l'intéressée, ainsi que Mme Z..., infirmière dont l'activité professionnelle passée n'était pas suffisante pour lui permettre d'exercer à titre libéral, mais l'autorisait seulement à effectuer des remplacements ponctuels, ont été renvoyées, la première des chefs, notamment, de faux et d'escroquerie, pour avoir, entre le 1er janvier 2008 et le 1er février 2011, facturé sous son nom les soins réalisés par Mme Z... et, en transmettant les feuilles de soins correspondantes à la CPAM pour en obtenir le paiement, trompé la caisse pour la déterminer à remettre des fonds, ainsi que de travail dissimulé, la seconde, de complicité de ces délits, devant le tribunal correctionnel qui a relaxé Mme Z..., relaxé Mme X... du chef de travail dissimulé, mais a déclaré cette dernière coupable des deux autres délits et a prononcé sur les intérêts civils ; que Mme X... et le ministère public ont relevé appel de cette décision ;
En cet état ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 313-1 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs ;
"en ce que l'arrêt attaqué a relaxé Mme Sarah X... du chef d'escroqueries et rejeté les demandes de dommages et intérêts de la CPAM de l'Allier ;
"aux motifs qu'il est reproché à Mme X... d'avoir "en abusant de sa qualité vraie d'infirmière libérale conventionnée et en employant des manoeuvres frauduleuses, en l'espèce en adressant à la CPAM aux fins de remboursement, des feuilles de soins électroniques établies avec sa carte professionnelle pour des prestations médicales qu'elle n'avait en réalité pas personnellement dispensées, trompé la CPAM de l'Allier pour la déterminer à lui remettre des fonds, valeurs ou biens quelconques, en l'espèce le versement d'honoraires auxquels elle ne pouvait prétendre ; que plus concrètement il lui est fait grief : - d'avoir demandé ou toléré que Mme Y... Z... ne raye pas son nom sur la fiche de soins pour y préciser que c'était elle qui avait réalisé l'acte infini-lier - de ne pas avoir utilisé la "feuille de soins papier" mais la télé-transmission ; que la cour relève qu'il est constant, et non contesté par la CPAM que : toutes les rétrocessions prévues par les deux infirmières dans leurs contrats de remplacement successifs ont été assurées ; que sur ce point, la cour relève que la question de la rétrocession est étrangère aux relations des infirmières avec la CPAM et n'a aucune incidence sur la qualification pénale - tous les actes remboursées par la CPAM ont été effectivement réalisés, aucun élément ne laissant supposer une seule facturation fictive. - à aucun moment les deux infirmières ont travaillé sur une même période de temps le système en vigueur à l'époque de la prévention ne permettait pas, en cas de télé-transmission, d' établir celle-ci sous le nom de la remplaçante ; qu'en effet, de par son statut même la remplaçante ne possédait pas de carte professionnelle et ne pouvait donc pas utiliser, sous son nom, le système de la télé-transmission ; que le seul fait de télécharger sous son nom des actes réalisés par sa remplaçante sans que cette dernière n'ait barré son nom et mentionné le sien à la place ne caractérise nullement une manoeuvre frauduleuse ou l'abus d'une qualité vraie, des simples allégations mensongères ne suffisant pas à caractériser de telles manoeuvres en l'absence de toute autre circonstance ; qu'en toute hypothèse, que ce soit le système de la feuille de soins papier ou de la télé-transmission, le remplaçant ne perçoit jamais d'honoraires ni directement du patient ni de la CPAM, les versements s'effectuant à l'infirmier remplacé qui, par la suite, rétrocède au remplaçant les sommes correspondantes aux actes réalisés, éventuellement amputées d'une commission ; qu'au final, il en ressort simplement l'absence de mention par Mme Z... de ce qu'elle a réalisé des actes ; que pour autant, il ne s'agit pas là de manoeuvres frauduleuses puisque dans tous les cas les actes devaient être payés à Mme X... ; que de même, sur le plan de l'intention frauduleuse, force est de constater que Mmes X... et Z... n'ont jamais cherché à cacher quoi que ce soit ou à induire en erreur qui que ce soit, et notamment la CPAM ; que, conformément aux règles en vigueur, elles ont établi un contrat de remplacement, renouvelé tous les ans, mis à disposition des autorités et organismes sociaux si ceux-ci le souhaitaient ; qu'aussi, faute de moyen frauduleux utilisé, de remise de fond indue et d'intention frauduleuse manifestée, le délit d'escroquerie ne saurait être retenu à l'encontre de Mme X... ;
"1°) alors que la circonstance pour Mme X... d'avoir fait apparaître, accompagnant les autres éléments et dans le cadre de la télé-transmission, qu'elle avait accompli personnellement un acte, ce qui était inexact, constituait une manoeuvre, déterminant une remise indue et caractérisait une escroquerie ; qu'en décidant le contraire, les juges du fond ont violé l'article 313-1 du code de procédure pénale ;
"2°) alors que, dès lors que les informations télé-transmises sont assorties de certains éléments destinés à leur donner crédit et à déterminer en conséquence la remise, les fausses indications affectant la télé-transmission ne peuvent être assimilées à de simples mensonges ; qu'en décidant le contraire, les juges du fond ont violé l'article 313-1 du code de procédure pénale ;
"3°) et alors qu'il importe peu que le professionnel ait pu obtenir en indiquant que l'acte avait été accompli par un tiers la somme correspondant à la prise en charge de cet acte dès lors que le procédé utilisé révélait l'existence de manoeuvres déterminantes de la remise ; que de ce point de vue également, l'arrêt attaqué a été rendu en violation de l'article 313-1 du code de procédure pénale" ;
Vu l'article 593 du code de procédure pénale, ensemble l'article 313-1 du code pénal ;
Attendu que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision ; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ;
Attendu que, pour relaxer la prévenue, l'arrêt énonce, notamment, que le système en vigueur à l'époque de la prévention n'a pas permis, en cas de télé-transmission, d'établir celle-ci sous le nom de la remplaçante, Mme Z..., qui, par son statut ne possédait pas de carte professionnelle et ne pouvait donc pas utiliser, sous son nom, le système de la télé-transmission, le seul fait de télécharger sous son nom des actes réalisés par l'infirmière remplaçante ne caractérisant nullement une manoeuvre frauduleuse ou l'abus d'une qualité vraie ; que les juges retiennent qu'en toute hypothèse, que ce soit le système de la feuille de soins papier ou de la télé-transmission, le remplaçant ne perçoit jamais d'honoraires ni directement du patient ni de la CPAM, les versements s'effectuant à l'infirmier remplacé qui, par la suite, rétrocède au remplaçant les sommes correspondant aux actes réalisés, éventuellement amputées d'une commission ;
Mais attendu qu'en se déterminant ainsi, alors qu'elle constatait que les feuilles de soins transmises à la caisse primaire d'assurance maladie et établies au nom de Mme X... correspondaient en réalité à des soins effectués non pas par elle, mais par celle qui la remplaçait sans que fussent respectées les règles du code de la sécurité sociale sur le remplacement des infirmiers libéraux, de sorte que la prévenue avait employé des manoeuvres frauduleuses susceptibles d'ouvrir droit à la réparation du préjudice de la partie civile en déterminant la CPAM à payer des soins qui avaient été effectués par sa remplaçante, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision ;
D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;
Et sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 441-1 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs ;
"en ce que l'arrêt attaqué a relaxé Mme X... du chef de faux et rejeté les demandes de dommages et intérêts formées par la CPAM de l'Allier ;
"aux motifs qu'il est reproché à Mme X... d'avoir altéré frauduleusement la vérité d'un écrit ou de tout autre support de la pensée destiné à établir la preuve d'un droit ou d'un fait ayant des conséquences juridiques, en l'espèce en facturant sous son propre nom l'intégralité des soins réalisés par Mme Z... ; cependant, comme il a été vu, le statut de remplaçante de Mme Z... lui interdisait de facturer les actes qu'elle réalisait elle-même et imposait que les facturations soient faites au nom de Mme X..., seule habilitée à recevoir les honoraires. Tout comme pour l'analyse du délit précédent, faute de préjudice et d'intention frauduleuse il ne saurait y avoir d'infraction ;
"1°) alors que le fait d'avoir faussement indiqué au titre des informations ayant fait l'objet de la télé-transmission qu'un acte avait été accompli par elle, révélait l'existence d'un faux ; qu'en décidant le contraire, les juges du fond ont violé l'article 441-1 du code pénal ;
"2°) alors que le faux était nécessairement à l'origine d'un préjudice dès lors que la fausse indication fournie à l'occasion de la télé-transmission déterminait à ce moment précis la prise en charge par la CPAM ; qu'à cet égard, l'arrêt attaqué a été rendu en violation de l'article 441-1 du code pénal ;
"3°) et alors qu'en retenant l'absence d'intention, sans constater même sommairement qu'en envoyant les informations inexactes Mme X... n'en avait pas conscience, les juges du fond ont à tout le moins entaché leur décision d'un défaut de base légale au regard de l'article 441-1 du code pénal" ;
Vu les articles 441-1 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
Attendu que, d'une part, constitue un faux l'acte fabriqué par une ou plusieurs personnes à seule fin d'éluder la loi et créer l'apparence d'une situation juridique de nature à porter préjudicie à autrui ;
Attendu, d'autre part, que, tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision ; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ;
Attendu que, pour relaxer la prévenue, l'arrêt énonce que le statut de remplaçante de Mme Z... lui interdisant de facturer les actes qu'elle réalisait elle-même et imposant que les facturations soient faites au nom de Mme X..., seule habilitée à recevoir les honoraires, faute de préjudice et d'intention frauduleuse, il ne saurait y avoir infraction ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, alors qu'elle constatait que des feuilles de soins avaient été établies au nom d'une infirmière qui s'était fait remplacer de manière habituelle par la même praticienne, ce qui était de nature, en créant l'apparence d'une situation juridique destinée à éluder l'application à l'infirmière remplaçante de la réglementation sur l'exercice de son activité à titre libéral, à causer un préjudice à la partie civile, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés et les principes ci-dessus rappelés ;
D'où il suit que la cassation est de nouveau encourue de ce chef ;
Et sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 313-1 et 441-1 du code pénal, 121-7 du même code, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs ;
"en ce que l'arrêt attaqué a relaxé Mme Z... du chef de complicité d'escroquerie et de faux ;
"aux motifs que Mme Z... poursuivie sur la base de la complicité des faits principaux commis par Mme X... ne saurait être retenue pour les chefs de prévention en raison de l'absence d'une quelconque infraction imputable à Mme X... ;
"alors qu'eu égard à la motivation retenue, la cassation à intervenir des chefs relatifs à Mme X... ne peut manquer d'entraîner par voie de conséquence la cassation des chefs intéressant Mme Z... ";
Attendu que la cassation intervenue sur les premier et deuxième moyens entraîne, par voie de conséquence, la cassation de la décision en ce qu'elle a renvoyé des fins de la poursuite Mme Z... des chefs de complicité d'escroquerie et complicité de faux ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Riom, en date du 23 février 2017, en ses seules dispositions ayant renvoyé des fins de la poursuite Mme X... des chefs d'escroquerie et de faux et Mme Z... des chefs de complicité de ces délits, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;
Et pour qu'il soit à nouveau jugé conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée,
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Lyon à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
DIT que la cour de renvoi statuera sur les seuls intérêts civils ;
DIT n'y avoir lieu à application de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres de la cour d'appel de Riom et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le sept mai deux mille dix-huit ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.ECLI:FR:CCASS:2018:CR00744
Statuant sur le pourvoi formé par :
- La caisse primaire d'assurance maladie de l'Allier, partie civile,
contre l'arrêt de la cour d'appel de RIOM, chambre correctionnelle, en date du 23 février 2017, qui l'a déboutée de ses demandes après relaxe de Mmes Sarah X... et Y... Z... des chefs d'escroquerie, de faux et de complicité de ces délits ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 13 mars 2018 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, M. Parlos, conseiller rapporteur, M. Straehli, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Zita ;
Sur le rapport de M. le conseiller PARLOS, les observations de la société civile professionnelle FOUSSARD et FROGER, de la société civile professionnelle GASCHIGNARD, avocats en la Cour, et les conclusions de Mme l'avocat général LE DIMNA ;
Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure qu'au terme d'une enquête conduite sur une plainte de la caisse primaire d'assurance maladie de l'Allier (la CPAM) visant Mme X..., infirmière libérale dont l'activité anormalement élevée faisait suspecter le recours systématique à un remplaçant, l'intéressée, ainsi que Mme Z..., infirmière dont l'activité professionnelle passée n'était pas suffisante pour lui permettre d'exercer à titre libéral, mais l'autorisait seulement à effectuer des remplacements ponctuels, ont été renvoyées, la première des chefs, notamment, de faux et d'escroquerie, pour avoir, entre le 1er janvier 2008 et le 1er février 2011, facturé sous son nom les soins réalisés par Mme Z... et, en transmettant les feuilles de soins correspondantes à la CPAM pour en obtenir le paiement, trompé la caisse pour la déterminer à remettre des fonds, ainsi que de travail dissimulé, la seconde, de complicité de ces délits, devant le tribunal correctionnel qui a relaxé Mme Z..., relaxé Mme X... du chef de travail dissimulé, mais a déclaré cette dernière coupable des deux autres délits et a prononcé sur les intérêts civils ; que Mme X... et le ministère public ont relevé appel de cette décision ;
En cet état ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 313-1 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs ;
"en ce que l'arrêt attaqué a relaxé Mme Sarah X... du chef d'escroqueries et rejeté les demandes de dommages et intérêts de la CPAM de l'Allier ;
"aux motifs qu'il est reproché à Mme X... d'avoir "en abusant de sa qualité vraie d'infirmière libérale conventionnée et en employant des manoeuvres frauduleuses, en l'espèce en adressant à la CPAM aux fins de remboursement, des feuilles de soins électroniques établies avec sa carte professionnelle pour des prestations médicales qu'elle n'avait en réalité pas personnellement dispensées, trompé la CPAM de l'Allier pour la déterminer à lui remettre des fonds, valeurs ou biens quelconques, en l'espèce le versement d'honoraires auxquels elle ne pouvait prétendre ; que plus concrètement il lui est fait grief : - d'avoir demandé ou toléré que Mme Y... Z... ne raye pas son nom sur la fiche de soins pour y préciser que c'était elle qui avait réalisé l'acte infini-lier - de ne pas avoir utilisé la "feuille de soins papier" mais la télé-transmission ; que la cour relève qu'il est constant, et non contesté par la CPAM que : toutes les rétrocessions prévues par les deux infirmières dans leurs contrats de remplacement successifs ont été assurées ; que sur ce point, la cour relève que la question de la rétrocession est étrangère aux relations des infirmières avec la CPAM et n'a aucune incidence sur la qualification pénale - tous les actes remboursées par la CPAM ont été effectivement réalisés, aucun élément ne laissant supposer une seule facturation fictive. - à aucun moment les deux infirmières ont travaillé sur une même période de temps le système en vigueur à l'époque de la prévention ne permettait pas, en cas de télé-transmission, d' établir celle-ci sous le nom de la remplaçante ; qu'en effet, de par son statut même la remplaçante ne possédait pas de carte professionnelle et ne pouvait donc pas utiliser, sous son nom, le système de la télé-transmission ; que le seul fait de télécharger sous son nom des actes réalisés par sa remplaçante sans que cette dernière n'ait barré son nom et mentionné le sien à la place ne caractérise nullement une manoeuvre frauduleuse ou l'abus d'une qualité vraie, des simples allégations mensongères ne suffisant pas à caractériser de telles manoeuvres en l'absence de toute autre circonstance ; qu'en toute hypothèse, que ce soit le système de la feuille de soins papier ou de la télé-transmission, le remplaçant ne perçoit jamais d'honoraires ni directement du patient ni de la CPAM, les versements s'effectuant à l'infirmier remplacé qui, par la suite, rétrocède au remplaçant les sommes correspondantes aux actes réalisés, éventuellement amputées d'une commission ; qu'au final, il en ressort simplement l'absence de mention par Mme Z... de ce qu'elle a réalisé des actes ; que pour autant, il ne s'agit pas là de manoeuvres frauduleuses puisque dans tous les cas les actes devaient être payés à Mme X... ; que de même, sur le plan de l'intention frauduleuse, force est de constater que Mmes X... et Z... n'ont jamais cherché à cacher quoi que ce soit ou à induire en erreur qui que ce soit, et notamment la CPAM ; que, conformément aux règles en vigueur, elles ont établi un contrat de remplacement, renouvelé tous les ans, mis à disposition des autorités et organismes sociaux si ceux-ci le souhaitaient ; qu'aussi, faute de moyen frauduleux utilisé, de remise de fond indue et d'intention frauduleuse manifestée, le délit d'escroquerie ne saurait être retenu à l'encontre de Mme X... ;
"1°) alors que la circonstance pour Mme X... d'avoir fait apparaître, accompagnant les autres éléments et dans le cadre de la télé-transmission, qu'elle avait accompli personnellement un acte, ce qui était inexact, constituait une manoeuvre, déterminant une remise indue et caractérisait une escroquerie ; qu'en décidant le contraire, les juges du fond ont violé l'article 313-1 du code de procédure pénale ;
"2°) alors que, dès lors que les informations télé-transmises sont assorties de certains éléments destinés à leur donner crédit et à déterminer en conséquence la remise, les fausses indications affectant la télé-transmission ne peuvent être assimilées à de simples mensonges ; qu'en décidant le contraire, les juges du fond ont violé l'article 313-1 du code de procédure pénale ;
"3°) et alors qu'il importe peu que le professionnel ait pu obtenir en indiquant que l'acte avait été accompli par un tiers la somme correspondant à la prise en charge de cet acte dès lors que le procédé utilisé révélait l'existence de manoeuvres déterminantes de la remise ; que de ce point de vue également, l'arrêt attaqué a été rendu en violation de l'article 313-1 du code de procédure pénale" ;
Vu l'article 593 du code de procédure pénale, ensemble l'article 313-1 du code pénal ;
Attendu que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision ; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ;
Attendu que, pour relaxer la prévenue, l'arrêt énonce, notamment, que le système en vigueur à l'époque de la prévention n'a pas permis, en cas de télé-transmission, d'établir celle-ci sous le nom de la remplaçante, Mme Z..., qui, par son statut ne possédait pas de carte professionnelle et ne pouvait donc pas utiliser, sous son nom, le système de la télé-transmission, le seul fait de télécharger sous son nom des actes réalisés par l'infirmière remplaçante ne caractérisant nullement une manoeuvre frauduleuse ou l'abus d'une qualité vraie ; que les juges retiennent qu'en toute hypothèse, que ce soit le système de la feuille de soins papier ou de la télé-transmission, le remplaçant ne perçoit jamais d'honoraires ni directement du patient ni de la CPAM, les versements s'effectuant à l'infirmier remplacé qui, par la suite, rétrocède au remplaçant les sommes correspondant aux actes réalisés, éventuellement amputées d'une commission ;
Mais attendu qu'en se déterminant ainsi, alors qu'elle constatait que les feuilles de soins transmises à la caisse primaire d'assurance maladie et établies au nom de Mme X... correspondaient en réalité à des soins effectués non pas par elle, mais par celle qui la remplaçait sans que fussent respectées les règles du code de la sécurité sociale sur le remplacement des infirmiers libéraux, de sorte que la prévenue avait employé des manoeuvres frauduleuses susceptibles d'ouvrir droit à la réparation du préjudice de la partie civile en déterminant la CPAM à payer des soins qui avaient été effectués par sa remplaçante, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision ;
D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;
Et sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 441-1 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs ;
"en ce que l'arrêt attaqué a relaxé Mme X... du chef de faux et rejeté les demandes de dommages et intérêts formées par la CPAM de l'Allier ;
"aux motifs qu'il est reproché à Mme X... d'avoir altéré frauduleusement la vérité d'un écrit ou de tout autre support de la pensée destiné à établir la preuve d'un droit ou d'un fait ayant des conséquences juridiques, en l'espèce en facturant sous son propre nom l'intégralité des soins réalisés par Mme Z... ; cependant, comme il a été vu, le statut de remplaçante de Mme Z... lui interdisait de facturer les actes qu'elle réalisait elle-même et imposait que les facturations soient faites au nom de Mme X..., seule habilitée à recevoir les honoraires. Tout comme pour l'analyse du délit précédent, faute de préjudice et d'intention frauduleuse il ne saurait y avoir d'infraction ;
"1°) alors que le fait d'avoir faussement indiqué au titre des informations ayant fait l'objet de la télé-transmission qu'un acte avait été accompli par elle, révélait l'existence d'un faux ; qu'en décidant le contraire, les juges du fond ont violé l'article 441-1 du code pénal ;
"2°) alors que le faux était nécessairement à l'origine d'un préjudice dès lors que la fausse indication fournie à l'occasion de la télé-transmission déterminait à ce moment précis la prise en charge par la CPAM ; qu'à cet égard, l'arrêt attaqué a été rendu en violation de l'article 441-1 du code pénal ;
"3°) et alors qu'en retenant l'absence d'intention, sans constater même sommairement qu'en envoyant les informations inexactes Mme X... n'en avait pas conscience, les juges du fond ont à tout le moins entaché leur décision d'un défaut de base légale au regard de l'article 441-1 du code pénal" ;
Vu les articles 441-1 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
Attendu que, d'une part, constitue un faux l'acte fabriqué par une ou plusieurs personnes à seule fin d'éluder la loi et créer l'apparence d'une situation juridique de nature à porter préjudicie à autrui ;
Attendu, d'autre part, que, tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision ; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ;
Attendu que, pour relaxer la prévenue, l'arrêt énonce que le statut de remplaçante de Mme Z... lui interdisant de facturer les actes qu'elle réalisait elle-même et imposant que les facturations soient faites au nom de Mme X..., seule habilitée à recevoir les honoraires, faute de préjudice et d'intention frauduleuse, il ne saurait y avoir infraction ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, alors qu'elle constatait que des feuilles de soins avaient été établies au nom d'une infirmière qui s'était fait remplacer de manière habituelle par la même praticienne, ce qui était de nature, en créant l'apparence d'une situation juridique destinée à éluder l'application à l'infirmière remplaçante de la réglementation sur l'exercice de son activité à titre libéral, à causer un préjudice à la partie civile, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés et les principes ci-dessus rappelés ;
D'où il suit que la cassation est de nouveau encourue de ce chef ;
Et sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 313-1 et 441-1 du code pénal, 121-7 du même code, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs ;
"en ce que l'arrêt attaqué a relaxé Mme Z... du chef de complicité d'escroquerie et de faux ;
"aux motifs que Mme Z... poursuivie sur la base de la complicité des faits principaux commis par Mme X... ne saurait être retenue pour les chefs de prévention en raison de l'absence d'une quelconque infraction imputable à Mme X... ;
"alors qu'eu égard à la motivation retenue, la cassation à intervenir des chefs relatifs à Mme X... ne peut manquer d'entraîner par voie de conséquence la cassation des chefs intéressant Mme Z... ";
Attendu que la cassation intervenue sur les premier et deuxième moyens entraîne, par voie de conséquence, la cassation de la décision en ce qu'elle a renvoyé des fins de la poursuite Mme Z... des chefs de complicité d'escroquerie et complicité de faux ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Riom, en date du 23 février 2017, en ses seules dispositions ayant renvoyé des fins de la poursuite Mme X... des chefs d'escroquerie et de faux et Mme Z... des chefs de complicité de ces délits, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;
Et pour qu'il soit à nouveau jugé conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée,
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Lyon à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
DIT que la cour de renvoi statuera sur les seuls intérêts civils ;
DIT n'y avoir lieu à application de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres de la cour d'appel de Riom et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le sept mai deux mille dix-huit ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.