Cour de cassation, criminelle, Chambre criminelle, 10 avril 2018, 17-80.315, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :


-
Mme Véronique X..., épouse Y...,


contre l'arrêt de la cour d'appel de NÎMES, chambre correctionnelle, en date du 6 décembre 2016, qui, pour diffamation publique envers un particulier, l'a condamnée à 2 000 euros d'amende, et a prononcé sur les intérêts civils ;











La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 27 février 2018 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, M. Ricard, conseiller rapporteur, M. Straehli, conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : M. Bétron ;

Sur le rapport de M. le conseiller RICARD, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, de la société civile professionnelle CÉLICE, SOLTNER, TEXIDOR et PÉRIER, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général DESPORTES ;

Vu les mémoires en demande et en défense et les observations complémentaires produits ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 10, § 2, et 11 de la Convention européenne des droits de l'homme, 23 alinéa 1, 29 alinéa 1, 32 et 42 de la loi du 29 juillet 1881, 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a condamné Mme Véronique X..., épouse Y... du chef de diffamation publique envers un particulier ;

"aux motifs que l'article 29 alinéa premier de la loi du 29 juillet 1881 définit la diffamation comme « toute allégation ou imputation d'un fait qui porte atteinte à l'honneur ou à la considération de la personne ou du corps auquel le fait est imputé» ; qu'il doit s'agir d'un fait précis susceptible de faire l'objet d'un débat contradictoire ; qu'il résulte de l'examen du contenu des 23 bulles composant le tract incriminé : que les bulles déjà mentionnées plus haut n°8, 9, 14, 23 et la 5, ainsi rédigée : « Moi, Benoit B..., directeur, je décide de présenter des comptes analytiques erronés », constituent des accusations graves à l'encontre du directeur de l'Aharp de détournements de fonds publics et de présentations de comptes erronés pour masquer ces agissements constitutifs d'infraction pénale, faits de nature à porter atteinte à l'honneur et à la considération de M. B... ; que les bulles n° 6, 7, 11 et 13 allèguent que M. B... viole la loi et la Convention collective ce qui constitue à l'évidence une accusation grave pour un directeur et portant atteinte à son honneur et à sa réputation ; que les bulles n°1 : «Moi, Benoit B..., directeur, je décide d'augmenter substantiellement et uniquement les salaires des cadres», n° 2 : «Moi, Benoit B..., directeur, je décide l'embauche d'un cadre supplémentaire pour étoffer ma cour» ; n° 16 : « Moi, Benoit B..., directeur, je décide de nommer une directrice adjointe en charge des services financiers sans les qualifications requises pour encadrer 1,8 ETP » ; n° 15 : « Moi, Benoit B..., directeur, je décide de nommer un cadre pour deux auxiliaires de vie» ; n° 18 : « Moi, Benoit B..., directeur, je décide de nommer quatres cadres dirigeants et un cadre pour encadrer trente-quatre temps plein », tendent à démontrer que l'action de M. B... est sous tendue par la seule volonté de favoriser les cadres et qu'il irait jusqu'à embaucher du personnel non qualifié, ce qui à l'évidence porte atteinte à la réputation et à l'honneur de M. B... ; que les bulles n° 3 : « Moi, Benoit B..., directeur, je décide de communiquer dans la presse sur des représentants syndicaux qui ne veulent pas discuter, espérant duper les tutelles et l'opinion » ; n° 19 : « Moi, Benoit B..., directeur, je décide de répéter à longueur de journée et à qui veut l'entendre dialogue social croyant pouvoir donner le change », accusent M. B... de violer le dialogue social, ce qui porte atteinte de façon évidente à l'honneur d'un directeur d'association ; que les bulles n° 4 : «Moi, Benoit B..., directeur, je décide de ne pas associer le personnel au développement de l'association» ; n° 17 : « Moi, Benoit B..., directeur, je décide de ne pas donner suite à mes engagements concernant les réponses aux revendications des salariés» ; n°20 : « Moi, Benoit B..., directeur, je décide dans le même temps de renforcer les contraintes de travail du personnel éducatif et de durcir les plannings »; n° 21 : « Moi, Benoit B..., directeur, je décide de considérer les risques psychosociaux comme un phénomène de mode », indiquent clairement que M. B... inflige des « mauvais traitements» à ses salariés et ne les prend absolument pas en considération ; qu'il s'agit là également d'une accusation de nature à jeter le discrédit et l'opprobre sur M. B... ; que la bulle n°12: « Moi, Benoit B..., Directeur, je décide de ne pas maintenir ni entretenir l'outil de travail », tend à démontrer que M. B... n'effectue aucun investissement pour assurer la sécurité et l'entretien des bâtiments ; qu'il s'agit là d'une faute grave reprochée à un directeur et de nature à nuire gravement à sa réputation ; qu'enfin, la caricature du directeur, présenté comme écrasant sous sa semelle en hurlant : « c'est scandaleux, vous pouvez pas vous faire exploiter en silence comme tout le monde? Un peu de dignité bon sang », le présente comme un véritable dictateur, ne pensant qu'à faire taire ses collaborateurs pour se faire de l'argent sur leur dos ; que cette caricature et les bulles susvisées visent à l'évidence à dénigrer l'homme et son action au sein de l'association et portent atteinte à son honneur et à sa considération ; que cette présentation tend à le discréditer gravement auprès de l'association qui remploie, des salariés, des tarificateurs auprès desquels il a une mission de représentation et auprès des partenaires de l'association ; que ces propos diffamatoires atteignent également l'association, dans la mesure où son directeur n'est pas critiqué en tant que particulier mais en sa qualité de représentant de l'association, l'objectif paraissant bien être de discréditer l'association auprès de ses partenaires ; que cette volonté apparaît clairement sur la deuxième page du tract : « les partenaires actuels et partenaires de l'Aharp sont-ils bien au courant de cette gouvernance plutôt particulière de notre direction ? » ; qu'il a d'ailleurs été indiqué dans le cadre de la procédure d'instruction que la gouvernance relève de la compétence du conseil d'administration qui est de fait mis en cause dans ce tract ; Mme Y... entend invoquer la bonne foi, précisant que le tract s'inscrivait dans un contexte particulier de grève ; que les imputations diffamatoires sont réputées de droit, faites avec intention de nuire, mais peuvent être justifiées lorsque leur auteur a établi sa bonne foi, en prouvant qu'il a poursuivi un but légitime, étranger à toute animosité personnelle, et qu'il s'est conformé à un certain nombre d'exigences, en particulier de sérieux de l'enquête et de prudence dans l'expression ; que ces critères sont cumulatifs et non alternatifs ; en l'espèce, que Mme Y..., peut à juste titre invoquer la légitimité du but poursuivi pour avoir, en sa qualité de représentante du syndicat Sud, rejoint un mouvement de grève afin de défendre les salariés et faire connaître leurs revendications ; que, par contre, pour se faire, elle a participé à la distribution d'un tract dont elle-même a reconnu qu'il avait pu être mal perçu ; que ce tract révèle à l'évidence une animosité personnelle importante envers M. B... et l'association qu'il dirige, son nom revenant comme une litanie à chaque bulle, suivie de la mention directeur, associant ainsi l'association aux attaques particulièrement virulentes, personnelles, et nombreuses qui tendent principalement à salir l'honneur du directeur de l'Aharp, et par là même à jeter l'opprobre sur l'association ; que la caricature de M. B..., au centre du tract et écrasant les salariés sous sa semelle en est la démonstration flagrante ; que, de même, la prévenue ne peut valablement invoquer la prudence dans l'expression, alors que la violence des termes utilisés, le caractère péremptoire des imputations en particulier celles accusant M. B... d'être l'auteur d'infractions pénales et d'enfreindre la législation du travail de façon délibérée, ainsi que le manque de nuance de certains propos sur son mode de direction de l'association, dénotent une absence totale de mesure dans l'expression, et la volonté clairement exprimée de jeter le discrédit sur l'association et porter une atteinte grave à l'honneur et à la considération de son directeur ; qu'en conséquence, le sérieux de l'enquête n'ayant pu être valablement démontré, la cour retiendra la prévenue dans les liens de la prévention et la déclarera coupable des faits qui lui sont reprochés, réformant ainsi le jugement déféré ;



"1°) alors que l'appréciation du caractère « diffamatoire » des propos doit être effectuée en fonction du contexte dans lequel ils ont été émis et notamment de la polémique née d'un conflit de travail ; que les propos figurant dans ces tracts distribués à l'occasion d'un mouvement de grève critiquant exclusivement l'exercice de la fonction de directeur d'une association, même véhéments, excessifs ou exagérés ne sont pas diffamatoires en l'absence d'imputation personnelle et vexatoire ; qu'en jugeant diffamatoires les propos incriminés qui ne visaient que l'exercice des fonctions de directeur et son autorité, la cour d'appel a méconnu le principe de la liberté d'expression syndicale et les textes susvisés ;

"2°) alors que le fait justificatif de bonne foi se caractérise par la légitimité du but poursuivi, l'absence d'animosité personnelle, la prudence et la mesure dans l'expression ainsi que par le sérieux de l'enquête ; que les juges du fond doivent adapter leur appréciation de la bonne foi au regard du contexte dans lequel les écrits litigieux ont été rédigés et prendre en compte la qualité de la personne qui les diffuse ; que l'invective politique dans le cadre du mandat syndical fait partie intégrante du droit à la liberté d'expression ; que dans le cadre d'un conflit social, il est permis, comme à toute personne qui s'engage dans un débat public, de recourir à une certaine exagération et d'être véhément et immodéré dans ses propos ; que la condamnation de Mme Y..., représentante de section syndicale qui n'est pas même l'auteur des écrits incriminés, constitue une atteinte disproportionnée à la liberté d'expression et au droit et à la liberté d'un syndicat de dénoncer, fût-ce de façon vive, une situation de crise profonde d'un organisme, en l'occurrence l'association pour l'hébergement, l'accueil et la réinsertion en Provence, en sorte que les reproches formulés à l'encontre du directeur de l'association, destinés à frapper l'opinion, ne sont pas répréhensibles et ne dépassent pas les limites de l'exagération et de la provocation admissibles dans un tel contexte ; qu'en retenant néanmoins le caractère diffamatoire des écrits litigieux, la cour d'appel a violé les textes susvisés ; que la cassation interviendra sans renvoi" ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que M. Benoit B..., directeur de l'association pour l'hébergement, l'accueil et la réinsertion en Provence (AHARP), ainsi que ladite association ont porté plainte et se sont constitués parties civiles du chef de diffamation publique en raison de la distribution d'un tract syndical par Mme Véronique Y..., représentante de la section syndicale SUD au sein de l'AHARP, devant le centre hospitalier [...],

lequel est lié à ladite association par un contrat de collaboration ; que l'écrit en cause comprend en son centre une caricature de M. B..., à laquelle sont rattachées deux "bulles" contenant les propos ""c'est scandaleux ! Vous ne pouvez pas vous faire exploiter en silence comme tout l'monde ?? Un peu de dignité bon sang !!!", elle-même entourée de vingt-trois rectangles comprenant chacun une phrase commençant par "Moi, Benoît B... directeur, je décide" dont le contenu a été considéré comme diffamatoire par les parties civiles ; que Mme Y..., après avoir été mise en examen du chef susvisé, a fait l'objet d'une ordonnance de renvoi de ce chef devant le tribunal correctionnel qui l'a relaxée ; que le procureur de la République a relevé appel de cette décision, de même que les parties civiles ;

Attendu que pour dire établi le caractère diffamatoire des propos dénoncés, l'arrêt énonce que, parmi les vingt-trois rectangles ou "bulles" composant le tract incriminé figurent, notamment, des accusations graves à l'encontre du directeur de l'AHARP de détournements de fonds publics et de présentations de comptes erronés afin de masquer des agissements constitutifs d'infraction pénale, d'une action sous-tendue par la seule volonté de favoriser les cadres, allant jusqu'à embaucher du personnel non qualifié, de refus du dialogue social et d'un comportement consistant à infliger de "mauvais traitements"à ses salariés, tout en refusant de les prendre en considération, alors que les propos contenus dans les "bulles" rattachées à la caricature représentant M. B... le présentent comme un dictateur, voulant faire taire ses collaborateurs ; qu'il en déduit que les éléments susvisés portent atteinte à l'honneur et à la considération de l'intéressé et tendent à le discréditer auprès de l'association qui l'emploie, les salariés, les tarificateurs et les partenaires de l'association et qu'ils atteignent également l'association dans son image auprès de ses partenaires ;

Que pour refuser l'excuse de bonne foi, les juges relèvent que, si la prévenue a pu invoquer la légitimité du but poursuivi pour avoir, en sa qualité de représentante syndicale, fait connaître les revendications des salariés à l'occasion d'un mouvement de grève, les propos en cause recèlent une animosité personnelle importante envers B... et l'association qu'il dirige, déduite de la reprise du patronyme de l'intéressé dans chacune des "bulles" dudit tract suivie de la mention de sa fonction de directeur et de nombreuses attaques virulentes et personnelles ; qu'ils ajoutent que la violence des termes utilisés, le caractère péremptoire des imputations, en particulier celles accusant M. B... d'enfreindre la législation du travail de façon délibérée et d'être l'auteur d'infractions pénales et le manque de nuance de certains propos sur son mode de direction de l'association, dénotent une absence totale de mesure dans l'expression ;

Attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a, par des motifs exempts d'insuffisance ou de contradiction et répondant aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie, exactement apprécié le sens et la portée des propos litigieux qui, d'une part, portaient nécessairement atteinte à l'honneur et à la considération des plaignants, d'autre part, tout en s'exprimant sur un sujet d'intérêt général dans un contexte de polémique syndicale, nourrissaient en fait une animosité de nature personnelle à l'égard de M. B... et apparaissaient dépourvus de prudence dans l'expression d'accusations graves, incluant de multiples violations légales ou réglementaires, lesquelles ne sauraient avoir été faites de bonne foi ;

D'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 23 alinéa 1, 29 alinéa 1, 32 et 42 de la loi du 29 juillet 1881, 121-1 du code pénal, 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a déclaré Mme Y... coupable de diffamation publique envers un particulier ;

"aux motifs que M. B... précisait les circonstances de la diffusion du tract qualifié diffamatoire : le 21 janvier 2014 ; qu'il arrivait à la porte de l'association, [...]               , où était apposée une feuille indiquant "Aharp en grève" et il rencontrait Mmes C... et Y... qui l'informaient d'un mouvement de grève et lui remettaient un tract revendicatif avant de se retirer ; qu'au cours de l'après-midi, M. B... recevait un sms de M. Jean-Luc Z..., cadre supérieur au Centre Hospitalier [...] contenant le tract incriminé et ses "bulles" (différent de celui remis par les représentantes syndicales dans la matinée), M. Z... l'informant que le tract était distribué devant l'hôpital

[...] ; M. B... précisait que l'établissement hospitalier et l'association étaient des partenaires privilégiés ayant mis en place un projet expérimental commun et il indiquait que Mmes C... et Y... avaient été reçues ce jour-là dans le cadre d'une réunion des cadres de santé, au cours de laquelle M. Z... et un autre cadre de l'établissement hospitalier avaient fait état de ce tract ; que le tribunal a suivi l'argumentation des prévenues selon laquelle le tract litigieux avait été distribué à l'entrée du centre hospitalier

[...] au personnel de l'établissement et de l'association Aharp ; que ces deux entités étaient liées par une communauté d'intérêts et que le caractère public de la distribution n'était pas établie ; que la cour ne retiendra pas cette analyse, pas plus que la thèse des parties civiles soutenant que l'absence de publicité était due au fait que l'Aharp et le centre hospitalier étaient liés par une communauté d'intérêt ; qu'en effet, il a été établi par la procédure et reconnu à l'audience par les prévenues elles-mêmes que le tract avait été distribué dans la cour de l'hôpital ; qu'il s'agit dès lors d'un lieu public par nature car accessible à tous les usagers ; qu'il se déduit de cette constatation que le tract n'a pas été distribué qu'au personnel de l'hôpital mais à n'importe quel usager du centre ou passant ; que, par ailleurs, les locaux de l'Aharp étant totalement distincts du centre hospitalier, le tribunal ne pouvait en aucune façon affirmer que le tract n'avait été distribué qu'aux membres de l'hôpital et de l'association ; qu'en conséquence, le caractère public de l'écrit étant établi, l'ensemble des destinataires de cet écrit ne pouvaient être liés par une communauté d'intérêt ; et que la cour, réformant le jugement déféré, constate que le caractère public de la distribution est parfaitement établi ; qu'il est reproché aux deux prévenues d'avoir participé à la distribution de ce tract dont il a été démontré que le contenu était diffamatoire tant à l'égard de M. B... que de l'association Aharp ; que Mme Y... a reconnu avoir distribué le tract litigieux le jour des faits devant l'hôpital ; qu'elle l'a également admis devant la cour ; que, dans le cadre de sa défense, elle entend faire valoir l'excuse de vérité et entend faire la preuve de ce qui est mentionné dans le tract tout en admettant d'ailleurs que les termes employés ont été exagérés et étaient de nature, pour certains, à entacher l'honneur de M. B... ; que cette offre de preuve n'est pas recevable car les formalités de l'article 55 de la loi de 1881 n'ont pas été respectées par la prévenue ; que cet article dispose que le prévenu qui veut être admis à prouver la vérité des faits diffamatoires, doit, dans le délai de dix jours après la signification de la citation faire signifier au ministère public ou au plaignant au domicile par lui élu, les faits articulés et qualifiés dans la citation dont il entend prouver la vérité, la copie des pièces, les noms, professions et demeures des témoins par lesquels il entend faire la preuve ; que ces formalités sont d'ordre public et que la prévenue ne s'y étant pas conformée, elle est déchue de son droit à l'offre de preuve ;

"alors que le délit de diffamation publique n'est susceptible d'être caractérisé que s'il est établi que les écrits poursuivis ont été distribués à un large public ; qu'il ne peut en être ainsi lorsque l'écrit, support desdits propos, n'a été communiqué ou diffusé que dans le cercle restreint de personnes liées entre elles par une communauté d'intérêts ; qu'en l'espèce, la cour d'appel qui constate que l'écrit incriminé avait été diffusé devant l'hôpital [...], aux personnels de l'Aharp et du CHS

[...], organismes liés par contrat de collaboration avec mise en commun des moyens et des personnels, n'a pas déduit les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations en considérant que le caractère public de la diffusion du tract syndical en cause était caractérisé" ;

Attendu que pour retenir le caractère public des propos litigieux, l'arrêt relève que le tract ayant été distribué dans la cour de l'hôpital, lieu public par nature, dès lors qu'il est accessible à tous les usagers, il en résulte que le document en cause n'a pas été distribué aux seuls personnels du centre hospitalier, lesquels étaient liés par une communauté d'intérêts à ceux de l'association AHARP, mais à n'importe quel usager du centre ou passant ;

Attendu qu'en l'état de ces motifs, exempts d'insuffisance comme de contradiction, la cour d'appel, qui, par une appréciation souveraine des faits, a déduit des modalités et de la localisation de la distribution du tract en cause le caractère public des propos qu'il contenait, a justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen ne peut qu'être écarté ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le dix avril deux mille dix-huit ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.ECLI:FR:CCASS:2018:CR00572
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