Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 20 décembre 2017, 16-17.199, Publié au bulletin
Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 20 décembre 2017, 16-17.199, Publié au bulletin
Cour de cassation - Chambre sociale
- N° de pourvoi : 16-17.199
- ECLI:FR:CCASS:2017:SO02701
- Publié au bulletin
- Solution : Cassation
Audience publique du mercredi 20 décembre 2017
Décision attaquée : Cour d'appel de Riom, du 15 mars 2016Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le premier moyen :
Vu les articles L. 1226-9 et L. 1226-13 du code du travail ;
Attendu, selon ces textes, qu'au cours des périodes de suspension du contrat de travail du salarié consécutives à un accident du travail ou une maladie professionnelle, l'employeur ne peut rompre ce contrat que s'il justifie soit d'une faute grave de l'intéressé, soit de son impossibilité de maintenir le contrat pour un motif étranger à l'accident ou à la maladie, toute rupture du contrat de travail prononcée en méconnaissance de ces dispositions étant nulle ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. B... F... a été engagé par la société Manufacture française des pneumatiques Michelin à compter du 9 février 1972 ; qu'en arrêt maladie pour maladie professionnelle, il a été licencié, le 23 septembre 2011, pour cause réelle et sérieuse et dispensé d'exécuter son préavis ;
Attendu que pour dire le licenciement fondé sur le premier motif visé par l'article L. 1226-9 du code du travail, à savoir la faute grave, l'arrêt retient qu'il appartient au juge de donner aux faits invoqués au soutien du licenciement leur véritable qualification, qu'il ne peut être déduit des seuls termes employés après l'exposé des motifs de la lettre : « nous avons décidé de vous licencier pour cause réelle et sérieuse », que le licenciement serait nul pour avoir été prononcé au mépris des dispositions de l'article L. 1226-9 du code du travail, que l'employeur énonçait des faits précis dont il déduisait que les agissements du salarié, « intolérables et inacceptables », devaient entraîner le licenciement, qu'il a entendu se placer sur le terrain disciplinaire et que le licenciement a été prononcé pour une faute grave reprochée au salarié, que ces faits, à savoir des propos à connotation sexuelle, un comportement indécent, des attitudes et gestes déplacés, revêtaient une gravité certaine compte tenu de leur nature même et rendaient impossible le maintien du salarié au sein de l'entreprise ;
Qu'en statuant ainsi, alors que le juge ne peut aggraver la qualification de la faute retenue par l'employeur et qu'elle avait constaté que la lettre de licenciement ne prononçait qu'un licenciement pour cause réelle et sérieuse et non pour une faute grave, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il soit nécessaire de statuer sur le second moyen :
CASSE ET ANNULE en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 15 mars 2016, entre les parties par la cour d'appel de Riom ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon ;
Condamne la société Manufacture française des pneumatiques Michelin aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à M. B... F... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt décembre deux mille dix-sept.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, avocat aux Conseils, pour M. B... F...
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit que le licenciement de M. B... F... est fondé exclusivement sur le premier motif visé par l'article L. 1226-9 du code du travail, à savoir la faute grave ; de l'avoir débouté de sa demande de condamnation de la société Manufacture française des pneumatiques Michelin, employeur, au paiement de la somme de 4497,16 € à titre d'indemnité de préavis, outre 449 € de congés payés afférents ; 80 000 € d'indemnité pour rupture abusive du contrat de travail ; et 30 000 € de dommages et intérêts pour préjudice moral..;
AUX MOTIFS PROPRES QU'aux tChiantermes de l'article L. 1226-7 du code du travail, le contrat de travail du salarié victime d'un accident du travail, autre qu'un accident de trajet, ou d'une maladie professionnelle est suspendu pendant la durée de l'arrêt de travail provoqué par l'accident ou la maladie ; que selon l'article L. 1226-9 du même code, au cours des périodes de suspension du contrat de travail, l'employeur ne peut rompre ce dernier que s'il justifie soit d'une faute grave de l'intéressé, soit de son impossibilité de maintenir ce contrat pour un motif étranger à l'accident ou à la maladie ; qu'il convient de préciser que dans ce dernier cas, l'employeur ne peut invoquer l'impossibilité où il se trouve de maintenir le contrat qu'en justifiant de circonstances indépendantes du comportement du salarié, donc étrangères à la faute grave ; qu'en application de l'article L. 1226-13, le licenciement prononcé, pendant la période de suspension du contrat de travail provoqué par un accident du travail ou une maladie professionnelle, pour tout autre motif que ceux visés à l'article L. 1226-9, est nul ; que la protection particulière instituée en faveur des salariés victimes d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle, dans leurs rapports avec l'employeur au service duquel a été contractée la maladie, doit être mise en oeuvre dès que l'inaptitude du salarié, quel que soit le moment où elle est constatée ou invoquée, a au moins partiellement pour origine cette maladie et que l'employeur avait connaissance de cette origine professionnelle au moment du licenciement ; qu'en l'espèce, il n'est pas contesté par l'employeur que M. B... F... a contracté, alors qu'il était à son service, une maladie professionnelle, reconnue comme telle depuis le 2 août 2010 et pour laquelle un taux d'incapacité permanente de 15 % a été retenu ; que l'arrêt de travail du 6 septembre 2011 correspond à une rechute de cette maladie professionnelle, et qu'il était informé à la date du licenciement du caractère professionnel de la maladie affectant le salarié..; qu'il sera observé en premier lieu que s'agissant d'un licenciement intervenu pendant une période de suspension du contrat de travail par suite d'une maladie professionnelle, il n'y a pas lieu de distinguer, comme le fait M. B... F... entre l'irrégularité de la procédure, du fait que le licenciement n'aurait pas été prononcé pour faute grave, mais pour cause réelle et sérieuse, et l'absence de fondement réel et sérieux du licenciement au motif que la faute grave ne serait pas caractérisée ; qu'en effet, en application de l'article L. 1226-13 précité, toute rupture du contrat de travail prononcée en méconnaissance des dispositions des articles L. 1226-9 et L 1226-18, c'est-à-dire alors qu'il n'est pas justifié ni d'une faute grave, ni de l'impossibilité de maintenir ce contrat pour un motif étranger à l'accident ou à la maladie, est nulle..; qu'en l'espèce, la lettre de licenciement, datée du 23 septembre 2011, qui fixe les limites du litige, est ainsi libellée : « (
) Nous avons été informés le 29 juillet 2011 des faits suivants :
- Vous avez agressé verbalement et physiquement à plusieurs reprises, une collègue intérimaire, qui est venue relater ces faits auprès de votre responsable hiérarchique.
- Le 22/07/2011 vous avez passé votre main sous le tee-shirt de Mme Z... et en l'agrippant, l'avez embrassée dans le cou alors qu'elle vous avait signifié qu'elle ne voulait pas être embrassée par vous.
Toujours le 22/07/2011 vous vous êtes approché de son poste et, en lui jetant une banane, vous lui avez dit (je cite) "vous n'avez qu'à vous la mettre dans le cul".
- Un témoin vous a vu au milieu de la semaine 29 au moment de la pause de 6 h, avoir des gestes équivoques envers Mme Z... (baisers forcés, vous asseoir à califourchon sur elle contre son gré).
Les explications recueillies auprès de vous, au cours de l'entretien, ne nous ont pas permis de modifier notre appréciation à ce sujet. Vos agissements sont intolérables et inacceptables, aussi, nous avons décidé de vous licencier pour cause réelle et sérieuse.
Votre préavis débutera le lundi 26 septembre 2011 pour se terminer le vendredi 25 novembre 2011 inclus, date à laquelle vous ne ferez plus partie de nos effectifs. Nous vous dispensons d'effectuer votre préavis qui vous sera rémunéré aux échéances normales. (
) » ; que la SCA Michelin soutient que le licenciement a été prononcé pour faute grave ; que comme elle le souligne à juste titre, il importe de distinguer le motif du licenciement et les conséquences résultant de ce motif, s'agissant de la mesure arrêtée par l'employeur ; qu'en effet, la lettre de licenciement fixe les limites du litige, ce qui signifie qu'il est interdit à l'employeur d'invoquer de nouveaux griefs, et au juge d'examiner d'autres griefs que ceux évoqués dans la lettre de licenciement, mais également que c'est le motif de rupture mentionné dans celle-ci qui définit le caractère disciplinaire ou non du licenciement ; qu'il appartient donc au juge de donner aux faits invoqués au soutien du licenciement leur véritable qualification au regard de la lettre de licenciement ;
que l'employeur qui se place sur le terrain de la faute a le choix de la sanction qu'il prononce, et peut opter, dans le cadre de son pouvoir disciplinaire, pour une sanction moindre que le licenciement pour motif disciplinaire ; qu'il résulte de ces explications que M. B... F... ne peut déduire des seuls termes employés après l'exposé des motifs de la lettre : « nous avons décidé de vous licencier pour cause réelle et sérieuse », que le licenciement serait nul pour avoir été prononcé au mépris des dispositions de l'article L. 1226-9 du code du travail ; qu'il convient en effet, afin de statuer sur la validité du licenciement prononcé, dans un premier temps d'examiner la lettre de licenciement dans son ensemble afin de vérifier que l'employeur a recouru au licenciement en invoquant une faute grave ; qu'il sera rappelé à cet égard que cette occurrence est exclue si la rupture du contrat de travail n'est pas immédiate, ce qui ne peut se déduire du versement de l'indemnité compensatrice de préavis, dès lors que l'employeur a dispensé le salarié d'exécuter le préavis ; que dans un second temps, il doit être recherché, au regard des circonstances de l'espèce et des pièces produites, si la faute grave était caractérisée ; qu'il sera observé que M. B... F... a été convoqué par l'employeur à l'entretien préalable dans la perspective d'une sanction disciplinaire pouvant aller jusqu'au licenciement, et a été averti de la possibilité de se faire assister d'une personne de son choix appartenant au personnel de l'entreprise ; que la lettre de licenciement a été adressée dans les délais prévus dans le cadre d'une procédure disciplinaire ; qu'il résulte des termes de la lettre de licenciement que l'employeur reproche à M. B... F... l'agression verbale et physique à plusieurs reprises d'une collègue de travail, par des gestes et des paroles indécents ou déplacés ; que l'employeur énonce des faits précis, et dont il déduit que les agissements du salarié, « intolérables et inacceptables..», doivent entraîner le licenciement ; qu'il apparaît ainsi que l'employeur a bien entendu se placer sur le terrain disciplinaire et que le licenciement a été prononcé pour une faute grave reprochée au salarié ; qu'il sera noté en outre que M. B... F... a été expressément dispensé de l'exécution de son préavis, et qu'il ne peut ainsi être soutenu qu'en lui réglant l'indemnité compensatrice de préavis, l'employeur a entendu renoncer à se prévaloir de la faute grave ; qu'il incombe à l'employeur d'apporter la preuve de la faute grave qu'il invoque ; que la faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié, constituant une violation des obligations imposées par le contrat de travail ou les relations de travail, d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise ; qu'à l'appui de sa position, la SCA Michelin produit les éléments suivants :
– l'attestation de Mme Z... rédigée en ces termes :
– « depuis un certain temps M. B... F... a modifié son comportement relationnel avec moi-même.
D'un comportement amical, il est passé à un comportement plus qu'avenant.
Depuis une quinzaine de jours, M. B... F... a entrepris de se rapprocher de moi de façon irrespectueuse en me faisant des avances, en me caressant en faisant des propositions et en me tenant des propos incorrects, voire obscènes.
À mon arrivée dans l'atelier début juin, je le saluais en lui donnant une poignée de main. Par la suite il a voulu que je l'embrasse, je n'ai pas voulu, il a insisté et même si cela n'était pas violent il m'a forcée physiquement à lui faire une bise.
Entre 5 heures et 7 heures bien souvent quand il vient à mon poste il passe près de moi en me frôlant, en me touchant le bras, j'ai modifié ma position et je contestais.
Malgré cela, le vendredi 22 juillet, il a passé sa main sous mon T-shirt en m'agrippant par les épaules et m'a embrassée dans le cou.
Dans la même période, il se permettait de m'interpeller par des mots doux « mon coeur, mon amour », il me demandait de le regarder dans les yeux. Il va jusqu'à me dire « je suis bien avec vous, j'aime bien vous voir » ;
« Le 28 juillet il me demande de le rencontrer après le travail.
Le 27 juillet en prétextant l'orage il m'avait demandé de le ramener chez lui.
Suite à mes réticences maintenant il me harcèle verbalement « vous êtes une garce ».
M. B... F... avait pris l'habitude de partager son fruit avec moi.
Vendredi 22 juillet il vient à mon poste, me jette une banane en me disant « vous n'avez qu'à vous la mettre dans le cul » ;
– l'attestation de Mme A..., collègue de Mme Z..., rédigée en ces termes :
– « Cela s'est passé en milieu de semaine 29. Jusqu'à présent B... nous serrait la main en arrivant, ce jour-là il a voulu nous faire la bise, nous avons refusé.
Au moment de notre pause de 6 h 30 que nous prenons sur le quai, nous étions assises l'une en face de l'autre et là B... est venu vers nous et il s'est sauvagement jeté à califourchon sur Nathalie en essayant de l'embrasser.
Un autre jour, pour nous éloigner de lui, nous avons pris notre pause de 10 heures dans le petit jardin, et là en passant dans le couloir, il nous a vues et il est venu vers nous.
En fait il était souvent vers elle au poste skimage pendant la journée.
Vers midi il mangeait souvent un fruit qu'il partageait avec Nathalie.
Un jour il a mangé une banane et il a fait des réflexions que je ne me rappelle pas un autre jour dans une peau d'orange il a fait un découpage qui représentait un petit homme avec un « zizi en érection » ; que M. B... F... fait observer que ces attestations ne seraient pas fiables dans la mesure où elles ont dans un premier temps été transmises dans le cadre du débat contradictoire, alors qu'elles n'étaient pas datées, la date n'ayant été apposée que postérieurement à la rédaction, ce qui n'est pas contesté ; que toutefois, il est constant qu'une attestation non conforme aux exigences de l'article 202 du code de procédure civile ne peut être écartée des débats pour le seul motif tiré de son irrégularité formelle, et qu'il appartient au juge d'apprécier si elle présente des garanties suffisantes pour emporter sa conviction ; qu'or, en l'espèce les témoignages de Mmes Z... et A... relatent de manière circonstanciée des faits, replacés dans un contexte qui est décrit précisément notamment quant à l'évolution du comportement de M. B... F..., et le fait que ces attestations aient été datées après leur rédaction ne modifie pas l'appréciation qui peut être faite de la situation compte tenu de leur contenu détaillé ; que M. B... F... produit des attestations de plusieurs collègues qui estiment qu'aucun crédit ne peut être apporté au témoignage de Mme A..., qui aurait dans le passé déjà porté des accusations mensongères à l'égard d'un collègue ; que toutefois, il apparaît d'une part que ces affirmations sont relativement floues sur les circonstances de l'affaire survenue dans le passé, et sont insuffisantes pour considérer comme établi le fait que Mme A... aurait déjà menti, d'autre part qu'aucun élément objectif ne permet de douter de la sincérité des déclarations de Mme Z..., qui était embauchée en qualité d'intérimaire, et qui, contrairement à ce qui est soutenu, n'avait aucun intérêt particulier à mentir sur le comportement d'un collègue en portant à son égard des accusations graves ; que M. B... F..., pour contester les faits qui lui sont reprochés, produit de multiples témoignages établis « en sa faveur » ; qu'il sera observé toutefois que ces témoignages émanent pour certains de collègues qui avaient déjà quitté l'entreprise en 2011, ou encore qui ne travaillaient pas aux mêmes horaires que M. B... F... et Mme Z..., ou qui ne sont restés dans l'entreprise que pendant une très courte période ; que les autres témoins, pour l'essentiel de leurs déclarations, décrivent M. B... F... comme un excellent collègue, incapable de commettre les faits qui lui sont imputés, et affirment qu'ils n'ont jamais personnellement assisté à des gestes et propos tels que ceux qui sont relatés par Mme Z... et Mme A..., ce qui est insuffisant pour en conclure que les faits, rapportés de façon précise, ne sont pas survenus ; qu'il sera observé par ailleurs que si M. B... F... est présenté à travers l'ensemble des attestations versées aux débats comme un salarié au comportement exemplaire s'agissant de ses relations professionnelles, cette appréciation doit être nuancée alors que M. B... F... ne conteste pas avoir reçu en 2009 un blâme pour avoir adopté à l'égard d'un collègue un comportement violent ; qu'en considération de ces explications, il doit être retenu que l'employeur rapporte la preuve, à travers des éléments objectifs, des faits qu'il reproche à M. B... F... ; que ces faits, à savoir des propos à connotation sexuelle, un comportement indécent, des attitudes et gestes déplacés, revêtent une gravité certaine compte tenu de leur nature même et rendaient impossible le maintien du salarié au sein de l'entreprise ; qu'à cet égard, il sera rappelé que le prononcé d'une mise à pied conservatoire n'est pas un préalable absolument impératif dans le cadre d'un licenciement pour faute grave, la nécessité d'une telle mesure devant être appréciée en fonction des circonstances ; qu'en l'espèce, il apparaît que les faits ont été portés à la connaissance de l'employeur le 29 juillet 2011 et il n'est pas contesté qu'à cette date M. B... F... a été reçu en entretien par le chef d'atelier qui lui a demandé de ne plus avoir aucun contact avec Mme Z..., que quelques jours après seulement il est parti en congé, et qu'il n'a pas repris le travail par la suite puisqu'il a été victime d'une rechute de maladie professionnelle le 5 septembre 2011, de sorte que, de fait, sa présence dans l'entreprise, notamment à proximité de Mme Z..., a été très limitée dans le temps après la révélation à l'employeur des incidents survenus ; que le jugement sera ainsi confirmé, sauf à préciser que le licenciement est fondé exclusivement sur le premier motif visé par l'article L. 1226-9 du code du travail, à savoir la faute grave, et non sur le second motif visé par cet article, à savoir l'impossibilité de maintenir le contrat pour un motif étranger à l'accident ou à la maladie ; ET AUX MOTIFS EN PARTIE ADOPTÉS QUE l'article L. 1235-1 du code du travail dispose : « En cas de litige, le juge à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié » ; qu'en principe, la charge de la preuve du caractère réel et sérieux du motif de licenciement n'incombe pas spécialement à l'une ou l'autre des parties ; que le juge forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties ; que l'employeur doit se cantonner à la preuve des faits articulés dans la lettre de licenciement ; que la lettre de licenciement notifiée à M. B... F... en date du 24 septembre 2011 et qui fixe les limites du litige met en évidence les motifs suivants : « (
) Nous avons été informés le 29 juillet 2011 des faits suivants :
- Vous avez agressé verbalement et physiquement à plusieurs reprises, une collègue intérimaire, qui est venue relater ces faits auprès de votre responsable hiérarchique.
- Le 22/07/2011 vous avez passé votre main sous le tee-shirt de Mme Z... et en l'agrippant, l'avez embrassée dans le cou alors qu'elle vous avait signifié qu'elle ne voulait pas être embrassée par vous.
Toujours le 22/07/2011 vous vous êtes approché de son poste et, en lui jetant une banane, vous lui avez dit (je cite) "vous n'avez qu'à vous la mettre dans le cul"
- Un témoin vous a vu au milieu de la semaine 29 au moment de la pause de 6 h, avoir des gestes équivoques envers Mme Z... (baisers forcés, vous asseoir à califourchon sur elle contre son gré).
Les explications recueillies auprès de vous, au cours de [l] entretien, ne nous ont pas permis de modifier notre appréciation à ce sujet. Vos agissements sont intolérables et inacceptables, aussi, nous avons décidé de vous licencier pour cause réelle et sérieuse.
Votre préavis débutera le lundi 26 septembre 2011 pour se terminer le vendredi 25 novembre 2011 inclus, date à laquelle vous ne ferez plus partie de nos effectifs. Nous vous dispensons d'effectuer votre préavis qui vous sera rémunéré aux échéances normales. (
) » ; que l'article L. 1226-9 du code du travail dispose :
« Au cours des périodes de suspension du contrat de travail, l'employeur ne peut rompre ce dernier que s'il justifie soit d'une faute grave de l'intéressé, soit de son impossibilité de maintenir ce contrat pour un motif étranger à l'accident ou à la maladie » ; que cet article prohibe la résiliation du contrat de travail, mais n'interdit pas l'engagement d'une mesure de licenciement pour faute grave au cours de la période de suspension ; que selon la Cour de cassation, la faute grave est définie comme la faute qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis ; qu'en d'autres termes, la faute grave est celle qui justifie la cessation immédiate du contrat de travail sans préavis ; que c'est donc cette seule considération qui doit servir de critère afin d'apprécier s'il y a ou non faute grave ; que dans ces conditions, le versement, comme cela a été le cas en l'espèce, d'une indemnité compensatrice de préavis dès lors qu'une rupture avec effet immédiat a été notifiée, n'implique pas nécessairement que l'employeur ait renoncé à se prévaloir de la faute grave ; qu'il appartient au juge d'apprécier la gravité de la faute qui implique une réaction immédiate de l'employeur, lequel, notamment peut encourir un risque du fait du comportement du salarié ; qu'en l'occurrence, il ne saurait cependant être reproché à la Manufacture Michelin d'avoir attendu environ deux mois - dont le mois d'août, période de congé du personnel - entre la révélation des faits reprochés et le licenciement de M. B... F... qui se trouvait alors en arrêt de travail ; que ce délai, bref dans un tel contexte, ne peut non plus faire obstacle à ce que la faute grave soit invoquée par l'employeur ; qu'enfin, il résulte d'attestations produites par la Manufacture Michelin (attestations Jean-Michel C... et Alexandre D...) que dès le 29 juillet 2011, il a été demandé à M. B... F... de ne plus intervenir sur le poste de travail de Mme Z... et d'avoir avec elle des relations strictement professionnelles dans l'attente d'éléments permettant d'évaluer la gravité des faits ; que la faute grave peut en particulier résulter du harcèlement sexuel qui rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise et la Cour de cassation considère que dès lors qu'un harcèlement sexuel est établi à l'encontre du salarié, la faute grave est systématique ; qu'on rappellera aussi qu'aux termes des dispositions de l'article L. 1153-5 du code du travail, il appartient à l'employeur de prendre toutes dispositions nécessaires en vue de prévenir les agissements de harcèlement sexuel ; que compte tenu de ce qui précède, il convient de débouter M. B... F... de sa demande d'annulation de la procédure de licenciement lequel est fondé sur un motif disciplinaire étranger à son accident ou sa maladie ; qu'il y a lieu en l'espèce d'apprécier la réalité d'une cause sérieuse du licenciement de M. B... F... ; que les termes précis de la lettre de licenciement ont été rappelés précédemment ; que la Manufacture des Pneumatiques Michelin verse en particulier aux débats une attestation établie par Mme Z..., laquelle indique : « (
) Depuis une quinzaine de jours, M. E... F... a entrepris de se rapprocher de moi de façon irrespectueuse en me faisant des avances, en me caressant en faisant des propositions et en me tenant des propos incorrects, voire obscènes. À mon arrivée dans l'atelier début juin, je le saluais en lui donnant une poignée de main. Par la suite il a voulu que je l'embrasse. Je n'ai pas voulu. Il a insisté et même si cela n'était pas violent il m'a forcé physiquement à lui faire une bise. (
) Bien souvent quand il vient à mon poste il passe près de moi en me frôlant, en me touchant le bras, je modifiais ma position et je contestais. Malgré cela, le vendredi 22/07 il a passé sa main sous mon tee-shirt et en m'agrippant par les épaules m'a embrassé dans le cou. Dans la même période, il se permettait de m'interpeller par des mots doux « mon coeur, mon amour » il me demandait de le regarder dans les yeux. Il va jusqu'à me dire « je suis bien avec vous, j'aime bien vous voir » (
) Suite à mes réticences maintenant il me harcèle verbalement « vous êtes une garce ». M. E... F... avait pris l'habitude de partager son fruit avec moi. Vendredi 22/07, il vient à mon poste, me jette une banane en me disant « vous n'avez qu'à vous la mettre dans le cul » ; que d'autre part, Mme A... atteste : « (
) Au milieu de la semaine 29 (
) B... est venu vers nous et il s'est sauvagement jeté à califourchon sur Nathalie en essayant de l'embrasser. (
) Vers midi il mangeait souvent un fruit qu'il partageait avec Nathalie. Un jour il a mangé une banane et il a fait des réflexions que je ne me rappelle pas
un autre jour dans une peau d'orange il a fait un découpage qui représentait un petit homme avec un "zizi" en érection. (
) » ; qu'il n'est pas contesté que les dates figurant sur ces attestations - 07.09.11 pour l'attestation Z... et 05.09.11 pour l'attestation A... - ont été apposées postérieurement à leur rédaction ; que l'article 202 du code de procédure civile dispose notamment que l'attestation contient la relation des faits auxquels son auteur a assisté ou qu'il a personnellement constatés et qu'elle est écrite, datée et signée de la main de son auteur, celui-ci devant annexer, en original ou en photocopie, tout document officiel justifiant de son identité et comportant sa signature ; que toutefois, ces dispositions ne sont pas prescrites à peine de nullité et il appartient au juge d'apprécier si l'attestation non conforme présente des garanties suffisantes pour emporter sa conviction ; qu'aucun élément lié à leur formalisme ne permet en l'espèce d'écarter les attestations versées aux débats par l'employeur et qui relatent de manière précise des faits dont rien n'amène à douter que leur auteur en ait effectivement été le témoin ; qu'il ne pourra non plus être tiré parti du fait que Mme A..., qui ne fait pour l'essentiel que corroborer des éléments retenus à l'encontre de M. B... F..., ait pu témoigner par le passé dans une affaire distincte ; que les nombreuses attestations « de moralité » établies en faveur de M. B... F... par des collègues ou des proches ne sont pas non plus de nature à jeter le doute sur les éléments objectifs ainsi produits par l'employeur ; qu'on ne saurait par ailleurs tirer argument de troubles physiologiques ou de problème de « libido » mis en avant par le demandeur au regard de la nature précise des faits qui lui sont effectivement reprochés ; qu'il convient en conséquence de dire et juger que le licenciement de M. B... F... repose sur une cause réelle et sérieuse ;
1°) ALORS QU'au cours d'une période de suspension du contrat de travail en raison d'une maladie professionnelle, l'employeur ne peut rompre ce dernier que s'il justifie soit de son impossibilité de maintenir ce contrat pour un motif étranger à l'accident ou à la maladie, soit d'une faute grave, et que le juge ne peut dans ce cas aggraver la qualification de la cause du licenciement retenue par l'employeur dans la lettre de licenciement ; qu'ayant constaté que le licenciement avait été prononcé pour « cause réelle et sérieuse » pendant une période de suspension du contrat de travail, en refusant d'en prononcer l'annulation aux motifs inopérants que les faits énoncés dans la lettre de licenciement étaient constitutifs d'une faute grave, la cour d'appel a violé les articles L. 1226-9 et L. 1226-13 du code du travail ;
2°) ALORS AU DEMEURANT QUE la faute grave est définie comme un fait personnel imputable au salarié, caractérisant un manquement au contrat objectivement considéré, sans qu'il ait la nature d'une simple insuffisance professionnelle, et rendant immédiatement impossible la poursuite du contrat de travail ; que s'agissant d'un reproche contesté de paroles et gestes déplacés ou indécents à l'égard d'une collègue après quarante ans d'ancienneté sans précédent comparable et alors que l'employeur avait pris une mesure d'isolement des intéressés, la cour d'appel, qui n'a pas caractérisé l'impossibilité immédiate de poursuivre le contrat de travail, a violé les articles L. 226-9 et L. 1226-13 du code du travail.
SECOND MOYEN DE CASSATION
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. B... F..., salarié, de sa demande de condamnation de la société Manufacture française des pneumatiques Michelin, employeur, au paiement de la somme de 4 497,16 € à titre d'indemnité de préavis, outre 449 € de congés payés afférents ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE M. B... F... maintient en appel sa demande relative au versement de l'indemnité compensatrice de préavis sans développer davantage d'explications, alors que l'employeur soutient que cette indemnité, qu'il s'était engagé à verser dans la lettre de licenciement, a été réglée, ce qui a été retenu à juste titre par le premier juge..; ET AUX MOTIFS RÉPUTÉS ADOPTÉS QUE M. B... F... doit également être débouté de sa demande de paiement d'une indemnité de préavis, ce préavis lui ayant été payé ;
ALORS QUE l'employeur qui se prétend libéré de son obligation de paiement d'une dette salariale doit le prouver ; qu'en déboutant le salarié de sa demande de paiement d'une indemnité compensatrice de préavis figurant sur son dernier bulletin de paie aux motifs inopérants qu'il ne démontrait pas l'absence de paiement, la cour d'appel a violé l'article 1315 du code civil.ECLI:FR:CCASS:2017:SO02701
Sur le premier moyen :
Vu les articles L. 1226-9 et L. 1226-13 du code du travail ;
Attendu, selon ces textes, qu'au cours des périodes de suspension du contrat de travail du salarié consécutives à un accident du travail ou une maladie professionnelle, l'employeur ne peut rompre ce contrat que s'il justifie soit d'une faute grave de l'intéressé, soit de son impossibilité de maintenir le contrat pour un motif étranger à l'accident ou à la maladie, toute rupture du contrat de travail prononcée en méconnaissance de ces dispositions étant nulle ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. B... F... a été engagé par la société Manufacture française des pneumatiques Michelin à compter du 9 février 1972 ; qu'en arrêt maladie pour maladie professionnelle, il a été licencié, le 23 septembre 2011, pour cause réelle et sérieuse et dispensé d'exécuter son préavis ;
Attendu que pour dire le licenciement fondé sur le premier motif visé par l'article L. 1226-9 du code du travail, à savoir la faute grave, l'arrêt retient qu'il appartient au juge de donner aux faits invoqués au soutien du licenciement leur véritable qualification, qu'il ne peut être déduit des seuls termes employés après l'exposé des motifs de la lettre : « nous avons décidé de vous licencier pour cause réelle et sérieuse », que le licenciement serait nul pour avoir été prononcé au mépris des dispositions de l'article L. 1226-9 du code du travail, que l'employeur énonçait des faits précis dont il déduisait que les agissements du salarié, « intolérables et inacceptables », devaient entraîner le licenciement, qu'il a entendu se placer sur le terrain disciplinaire et que le licenciement a été prononcé pour une faute grave reprochée au salarié, que ces faits, à savoir des propos à connotation sexuelle, un comportement indécent, des attitudes et gestes déplacés, revêtaient une gravité certaine compte tenu de leur nature même et rendaient impossible le maintien du salarié au sein de l'entreprise ;
Qu'en statuant ainsi, alors que le juge ne peut aggraver la qualification de la faute retenue par l'employeur et qu'elle avait constaté que la lettre de licenciement ne prononçait qu'un licenciement pour cause réelle et sérieuse et non pour une faute grave, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il soit nécessaire de statuer sur le second moyen :
CASSE ET ANNULE en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 15 mars 2016, entre les parties par la cour d'appel de Riom ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon ;
Condamne la société Manufacture française des pneumatiques Michelin aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à M. B... F... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt décembre deux mille dix-sept.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, avocat aux Conseils, pour M. B... F...
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit que le licenciement de M. B... F... est fondé exclusivement sur le premier motif visé par l'article L. 1226-9 du code du travail, à savoir la faute grave ; de l'avoir débouté de sa demande de condamnation de la société Manufacture française des pneumatiques Michelin, employeur, au paiement de la somme de 4497,16 € à titre d'indemnité de préavis, outre 449 € de congés payés afférents ; 80 000 € d'indemnité pour rupture abusive du contrat de travail ; et 30 000 € de dommages et intérêts pour préjudice moral..;
AUX MOTIFS PROPRES QU'aux tChiantermes de l'article L. 1226-7 du code du travail, le contrat de travail du salarié victime d'un accident du travail, autre qu'un accident de trajet, ou d'une maladie professionnelle est suspendu pendant la durée de l'arrêt de travail provoqué par l'accident ou la maladie ; que selon l'article L. 1226-9 du même code, au cours des périodes de suspension du contrat de travail, l'employeur ne peut rompre ce dernier que s'il justifie soit d'une faute grave de l'intéressé, soit de son impossibilité de maintenir ce contrat pour un motif étranger à l'accident ou à la maladie ; qu'il convient de préciser que dans ce dernier cas, l'employeur ne peut invoquer l'impossibilité où il se trouve de maintenir le contrat qu'en justifiant de circonstances indépendantes du comportement du salarié, donc étrangères à la faute grave ; qu'en application de l'article L. 1226-13, le licenciement prononcé, pendant la période de suspension du contrat de travail provoqué par un accident du travail ou une maladie professionnelle, pour tout autre motif que ceux visés à l'article L. 1226-9, est nul ; que la protection particulière instituée en faveur des salariés victimes d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle, dans leurs rapports avec l'employeur au service duquel a été contractée la maladie, doit être mise en oeuvre dès que l'inaptitude du salarié, quel que soit le moment où elle est constatée ou invoquée, a au moins partiellement pour origine cette maladie et que l'employeur avait connaissance de cette origine professionnelle au moment du licenciement ; qu'en l'espèce, il n'est pas contesté par l'employeur que M. B... F... a contracté, alors qu'il était à son service, une maladie professionnelle, reconnue comme telle depuis le 2 août 2010 et pour laquelle un taux d'incapacité permanente de 15 % a été retenu ; que l'arrêt de travail du 6 septembre 2011 correspond à une rechute de cette maladie professionnelle, et qu'il était informé à la date du licenciement du caractère professionnel de la maladie affectant le salarié..; qu'il sera observé en premier lieu que s'agissant d'un licenciement intervenu pendant une période de suspension du contrat de travail par suite d'une maladie professionnelle, il n'y a pas lieu de distinguer, comme le fait M. B... F... entre l'irrégularité de la procédure, du fait que le licenciement n'aurait pas été prononcé pour faute grave, mais pour cause réelle et sérieuse, et l'absence de fondement réel et sérieux du licenciement au motif que la faute grave ne serait pas caractérisée ; qu'en effet, en application de l'article L. 1226-13 précité, toute rupture du contrat de travail prononcée en méconnaissance des dispositions des articles L. 1226-9 et L 1226-18, c'est-à-dire alors qu'il n'est pas justifié ni d'une faute grave, ni de l'impossibilité de maintenir ce contrat pour un motif étranger à l'accident ou à la maladie, est nulle..; qu'en l'espèce, la lettre de licenciement, datée du 23 septembre 2011, qui fixe les limites du litige, est ainsi libellée : « (
) Nous avons été informés le 29 juillet 2011 des faits suivants :
- Vous avez agressé verbalement et physiquement à plusieurs reprises, une collègue intérimaire, qui est venue relater ces faits auprès de votre responsable hiérarchique.
- Le 22/07/2011 vous avez passé votre main sous le tee-shirt de Mme Z... et en l'agrippant, l'avez embrassée dans le cou alors qu'elle vous avait signifié qu'elle ne voulait pas être embrassée par vous.
Toujours le 22/07/2011 vous vous êtes approché de son poste et, en lui jetant une banane, vous lui avez dit (je cite) "vous n'avez qu'à vous la mettre dans le cul".
- Un témoin vous a vu au milieu de la semaine 29 au moment de la pause de 6 h, avoir des gestes équivoques envers Mme Z... (baisers forcés, vous asseoir à califourchon sur elle contre son gré).
Les explications recueillies auprès de vous, au cours de l'entretien, ne nous ont pas permis de modifier notre appréciation à ce sujet. Vos agissements sont intolérables et inacceptables, aussi, nous avons décidé de vous licencier pour cause réelle et sérieuse.
Votre préavis débutera le lundi 26 septembre 2011 pour se terminer le vendredi 25 novembre 2011 inclus, date à laquelle vous ne ferez plus partie de nos effectifs. Nous vous dispensons d'effectuer votre préavis qui vous sera rémunéré aux échéances normales. (
) » ; que la SCA Michelin soutient que le licenciement a été prononcé pour faute grave ; que comme elle le souligne à juste titre, il importe de distinguer le motif du licenciement et les conséquences résultant de ce motif, s'agissant de la mesure arrêtée par l'employeur ; qu'en effet, la lettre de licenciement fixe les limites du litige, ce qui signifie qu'il est interdit à l'employeur d'invoquer de nouveaux griefs, et au juge d'examiner d'autres griefs que ceux évoqués dans la lettre de licenciement, mais également que c'est le motif de rupture mentionné dans celle-ci qui définit le caractère disciplinaire ou non du licenciement ; qu'il appartient donc au juge de donner aux faits invoqués au soutien du licenciement leur véritable qualification au regard de la lettre de licenciement ;
que l'employeur qui se place sur le terrain de la faute a le choix de la sanction qu'il prononce, et peut opter, dans le cadre de son pouvoir disciplinaire, pour une sanction moindre que le licenciement pour motif disciplinaire ; qu'il résulte de ces explications que M. B... F... ne peut déduire des seuls termes employés après l'exposé des motifs de la lettre : « nous avons décidé de vous licencier pour cause réelle et sérieuse », que le licenciement serait nul pour avoir été prononcé au mépris des dispositions de l'article L. 1226-9 du code du travail ; qu'il convient en effet, afin de statuer sur la validité du licenciement prononcé, dans un premier temps d'examiner la lettre de licenciement dans son ensemble afin de vérifier que l'employeur a recouru au licenciement en invoquant une faute grave ; qu'il sera rappelé à cet égard que cette occurrence est exclue si la rupture du contrat de travail n'est pas immédiate, ce qui ne peut se déduire du versement de l'indemnité compensatrice de préavis, dès lors que l'employeur a dispensé le salarié d'exécuter le préavis ; que dans un second temps, il doit être recherché, au regard des circonstances de l'espèce et des pièces produites, si la faute grave était caractérisée ; qu'il sera observé que M. B... F... a été convoqué par l'employeur à l'entretien préalable dans la perspective d'une sanction disciplinaire pouvant aller jusqu'au licenciement, et a été averti de la possibilité de se faire assister d'une personne de son choix appartenant au personnel de l'entreprise ; que la lettre de licenciement a été adressée dans les délais prévus dans le cadre d'une procédure disciplinaire ; qu'il résulte des termes de la lettre de licenciement que l'employeur reproche à M. B... F... l'agression verbale et physique à plusieurs reprises d'une collègue de travail, par des gestes et des paroles indécents ou déplacés ; que l'employeur énonce des faits précis, et dont il déduit que les agissements du salarié, « intolérables et inacceptables..», doivent entraîner le licenciement ; qu'il apparaît ainsi que l'employeur a bien entendu se placer sur le terrain disciplinaire et que le licenciement a été prononcé pour une faute grave reprochée au salarié ; qu'il sera noté en outre que M. B... F... a été expressément dispensé de l'exécution de son préavis, et qu'il ne peut ainsi être soutenu qu'en lui réglant l'indemnité compensatrice de préavis, l'employeur a entendu renoncer à se prévaloir de la faute grave ; qu'il incombe à l'employeur d'apporter la preuve de la faute grave qu'il invoque ; que la faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié, constituant une violation des obligations imposées par le contrat de travail ou les relations de travail, d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise ; qu'à l'appui de sa position, la SCA Michelin produit les éléments suivants :
– l'attestation de Mme Z... rédigée en ces termes :
– « depuis un certain temps M. B... F... a modifié son comportement relationnel avec moi-même.
D'un comportement amical, il est passé à un comportement plus qu'avenant.
Depuis une quinzaine de jours, M. B... F... a entrepris de se rapprocher de moi de façon irrespectueuse en me faisant des avances, en me caressant en faisant des propositions et en me tenant des propos incorrects, voire obscènes.
À mon arrivée dans l'atelier début juin, je le saluais en lui donnant une poignée de main. Par la suite il a voulu que je l'embrasse, je n'ai pas voulu, il a insisté et même si cela n'était pas violent il m'a forcée physiquement à lui faire une bise.
Entre 5 heures et 7 heures bien souvent quand il vient à mon poste il passe près de moi en me frôlant, en me touchant le bras, j'ai modifié ma position et je contestais.
Malgré cela, le vendredi 22 juillet, il a passé sa main sous mon T-shirt en m'agrippant par les épaules et m'a embrassée dans le cou.
Dans la même période, il se permettait de m'interpeller par des mots doux « mon coeur, mon amour », il me demandait de le regarder dans les yeux. Il va jusqu'à me dire « je suis bien avec vous, j'aime bien vous voir » ;
« Le 28 juillet il me demande de le rencontrer après le travail.
Le 27 juillet en prétextant l'orage il m'avait demandé de le ramener chez lui.
Suite à mes réticences maintenant il me harcèle verbalement « vous êtes une garce ».
M. B... F... avait pris l'habitude de partager son fruit avec moi.
Vendredi 22 juillet il vient à mon poste, me jette une banane en me disant « vous n'avez qu'à vous la mettre dans le cul » ;
– l'attestation de Mme A..., collègue de Mme Z..., rédigée en ces termes :
– « Cela s'est passé en milieu de semaine 29. Jusqu'à présent B... nous serrait la main en arrivant, ce jour-là il a voulu nous faire la bise, nous avons refusé.
Au moment de notre pause de 6 h 30 que nous prenons sur le quai, nous étions assises l'une en face de l'autre et là B... est venu vers nous et il s'est sauvagement jeté à califourchon sur Nathalie en essayant de l'embrasser.
Un autre jour, pour nous éloigner de lui, nous avons pris notre pause de 10 heures dans le petit jardin, et là en passant dans le couloir, il nous a vues et il est venu vers nous.
En fait il était souvent vers elle au poste skimage pendant la journée.
Vers midi il mangeait souvent un fruit qu'il partageait avec Nathalie.
Un jour il a mangé une banane et il a fait des réflexions que je ne me rappelle pas un autre jour dans une peau d'orange il a fait un découpage qui représentait un petit homme avec un « zizi en érection » ; que M. B... F... fait observer que ces attestations ne seraient pas fiables dans la mesure où elles ont dans un premier temps été transmises dans le cadre du débat contradictoire, alors qu'elles n'étaient pas datées, la date n'ayant été apposée que postérieurement à la rédaction, ce qui n'est pas contesté ; que toutefois, il est constant qu'une attestation non conforme aux exigences de l'article 202 du code de procédure civile ne peut être écartée des débats pour le seul motif tiré de son irrégularité formelle, et qu'il appartient au juge d'apprécier si elle présente des garanties suffisantes pour emporter sa conviction ; qu'or, en l'espèce les témoignages de Mmes Z... et A... relatent de manière circonstanciée des faits, replacés dans un contexte qui est décrit précisément notamment quant à l'évolution du comportement de M. B... F..., et le fait que ces attestations aient été datées après leur rédaction ne modifie pas l'appréciation qui peut être faite de la situation compte tenu de leur contenu détaillé ; que M. B... F... produit des attestations de plusieurs collègues qui estiment qu'aucun crédit ne peut être apporté au témoignage de Mme A..., qui aurait dans le passé déjà porté des accusations mensongères à l'égard d'un collègue ; que toutefois, il apparaît d'une part que ces affirmations sont relativement floues sur les circonstances de l'affaire survenue dans le passé, et sont insuffisantes pour considérer comme établi le fait que Mme A... aurait déjà menti, d'autre part qu'aucun élément objectif ne permet de douter de la sincérité des déclarations de Mme Z..., qui était embauchée en qualité d'intérimaire, et qui, contrairement à ce qui est soutenu, n'avait aucun intérêt particulier à mentir sur le comportement d'un collègue en portant à son égard des accusations graves ; que M. B... F..., pour contester les faits qui lui sont reprochés, produit de multiples témoignages établis « en sa faveur » ; qu'il sera observé toutefois que ces témoignages émanent pour certains de collègues qui avaient déjà quitté l'entreprise en 2011, ou encore qui ne travaillaient pas aux mêmes horaires que M. B... F... et Mme Z..., ou qui ne sont restés dans l'entreprise que pendant une très courte période ; que les autres témoins, pour l'essentiel de leurs déclarations, décrivent M. B... F... comme un excellent collègue, incapable de commettre les faits qui lui sont imputés, et affirment qu'ils n'ont jamais personnellement assisté à des gestes et propos tels que ceux qui sont relatés par Mme Z... et Mme A..., ce qui est insuffisant pour en conclure que les faits, rapportés de façon précise, ne sont pas survenus ; qu'il sera observé par ailleurs que si M. B... F... est présenté à travers l'ensemble des attestations versées aux débats comme un salarié au comportement exemplaire s'agissant de ses relations professionnelles, cette appréciation doit être nuancée alors que M. B... F... ne conteste pas avoir reçu en 2009 un blâme pour avoir adopté à l'égard d'un collègue un comportement violent ; qu'en considération de ces explications, il doit être retenu que l'employeur rapporte la preuve, à travers des éléments objectifs, des faits qu'il reproche à M. B... F... ; que ces faits, à savoir des propos à connotation sexuelle, un comportement indécent, des attitudes et gestes déplacés, revêtent une gravité certaine compte tenu de leur nature même et rendaient impossible le maintien du salarié au sein de l'entreprise ; qu'à cet égard, il sera rappelé que le prononcé d'une mise à pied conservatoire n'est pas un préalable absolument impératif dans le cadre d'un licenciement pour faute grave, la nécessité d'une telle mesure devant être appréciée en fonction des circonstances ; qu'en l'espèce, il apparaît que les faits ont été portés à la connaissance de l'employeur le 29 juillet 2011 et il n'est pas contesté qu'à cette date M. B... F... a été reçu en entretien par le chef d'atelier qui lui a demandé de ne plus avoir aucun contact avec Mme Z..., que quelques jours après seulement il est parti en congé, et qu'il n'a pas repris le travail par la suite puisqu'il a été victime d'une rechute de maladie professionnelle le 5 septembre 2011, de sorte que, de fait, sa présence dans l'entreprise, notamment à proximité de Mme Z..., a été très limitée dans le temps après la révélation à l'employeur des incidents survenus ; que le jugement sera ainsi confirmé, sauf à préciser que le licenciement est fondé exclusivement sur le premier motif visé par l'article L. 1226-9 du code du travail, à savoir la faute grave, et non sur le second motif visé par cet article, à savoir l'impossibilité de maintenir le contrat pour un motif étranger à l'accident ou à la maladie ; ET AUX MOTIFS EN PARTIE ADOPTÉS QUE l'article L. 1235-1 du code du travail dispose : « En cas de litige, le juge à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié » ; qu'en principe, la charge de la preuve du caractère réel et sérieux du motif de licenciement n'incombe pas spécialement à l'une ou l'autre des parties ; que le juge forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties ; que l'employeur doit se cantonner à la preuve des faits articulés dans la lettre de licenciement ; que la lettre de licenciement notifiée à M. B... F... en date du 24 septembre 2011 et qui fixe les limites du litige met en évidence les motifs suivants : « (
) Nous avons été informés le 29 juillet 2011 des faits suivants :
- Vous avez agressé verbalement et physiquement à plusieurs reprises, une collègue intérimaire, qui est venue relater ces faits auprès de votre responsable hiérarchique.
- Le 22/07/2011 vous avez passé votre main sous le tee-shirt de Mme Z... et en l'agrippant, l'avez embrassée dans le cou alors qu'elle vous avait signifié qu'elle ne voulait pas être embrassée par vous.
Toujours le 22/07/2011 vous vous êtes approché de son poste et, en lui jetant une banane, vous lui avez dit (je cite) "vous n'avez qu'à vous la mettre dans le cul"
- Un témoin vous a vu au milieu de la semaine 29 au moment de la pause de 6 h, avoir des gestes équivoques envers Mme Z... (baisers forcés, vous asseoir à califourchon sur elle contre son gré).
Les explications recueillies auprès de vous, au cours de [l] entretien, ne nous ont pas permis de modifier notre appréciation à ce sujet. Vos agissements sont intolérables et inacceptables, aussi, nous avons décidé de vous licencier pour cause réelle et sérieuse.
Votre préavis débutera le lundi 26 septembre 2011 pour se terminer le vendredi 25 novembre 2011 inclus, date à laquelle vous ne ferez plus partie de nos effectifs. Nous vous dispensons d'effectuer votre préavis qui vous sera rémunéré aux échéances normales. (
) » ; que l'article L. 1226-9 du code du travail dispose :
« Au cours des périodes de suspension du contrat de travail, l'employeur ne peut rompre ce dernier que s'il justifie soit d'une faute grave de l'intéressé, soit de son impossibilité de maintenir ce contrat pour un motif étranger à l'accident ou à la maladie » ; que cet article prohibe la résiliation du contrat de travail, mais n'interdit pas l'engagement d'une mesure de licenciement pour faute grave au cours de la période de suspension ; que selon la Cour de cassation, la faute grave est définie comme la faute qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis ; qu'en d'autres termes, la faute grave est celle qui justifie la cessation immédiate du contrat de travail sans préavis ; que c'est donc cette seule considération qui doit servir de critère afin d'apprécier s'il y a ou non faute grave ; que dans ces conditions, le versement, comme cela a été le cas en l'espèce, d'une indemnité compensatrice de préavis dès lors qu'une rupture avec effet immédiat a été notifiée, n'implique pas nécessairement que l'employeur ait renoncé à se prévaloir de la faute grave ; qu'il appartient au juge d'apprécier la gravité de la faute qui implique une réaction immédiate de l'employeur, lequel, notamment peut encourir un risque du fait du comportement du salarié ; qu'en l'occurrence, il ne saurait cependant être reproché à la Manufacture Michelin d'avoir attendu environ deux mois - dont le mois d'août, période de congé du personnel - entre la révélation des faits reprochés et le licenciement de M. B... F... qui se trouvait alors en arrêt de travail ; que ce délai, bref dans un tel contexte, ne peut non plus faire obstacle à ce que la faute grave soit invoquée par l'employeur ; qu'enfin, il résulte d'attestations produites par la Manufacture Michelin (attestations Jean-Michel C... et Alexandre D...) que dès le 29 juillet 2011, il a été demandé à M. B... F... de ne plus intervenir sur le poste de travail de Mme Z... et d'avoir avec elle des relations strictement professionnelles dans l'attente d'éléments permettant d'évaluer la gravité des faits ; que la faute grave peut en particulier résulter du harcèlement sexuel qui rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise et la Cour de cassation considère que dès lors qu'un harcèlement sexuel est établi à l'encontre du salarié, la faute grave est systématique ; qu'on rappellera aussi qu'aux termes des dispositions de l'article L. 1153-5 du code du travail, il appartient à l'employeur de prendre toutes dispositions nécessaires en vue de prévenir les agissements de harcèlement sexuel ; que compte tenu de ce qui précède, il convient de débouter M. B... F... de sa demande d'annulation de la procédure de licenciement lequel est fondé sur un motif disciplinaire étranger à son accident ou sa maladie ; qu'il y a lieu en l'espèce d'apprécier la réalité d'une cause sérieuse du licenciement de M. B... F... ; que les termes précis de la lettre de licenciement ont été rappelés précédemment ; que la Manufacture des Pneumatiques Michelin verse en particulier aux débats une attestation établie par Mme Z..., laquelle indique : « (
) Depuis une quinzaine de jours, M. E... F... a entrepris de se rapprocher de moi de façon irrespectueuse en me faisant des avances, en me caressant en faisant des propositions et en me tenant des propos incorrects, voire obscènes. À mon arrivée dans l'atelier début juin, je le saluais en lui donnant une poignée de main. Par la suite il a voulu que je l'embrasse. Je n'ai pas voulu. Il a insisté et même si cela n'était pas violent il m'a forcé physiquement à lui faire une bise. (
) Bien souvent quand il vient à mon poste il passe près de moi en me frôlant, en me touchant le bras, je modifiais ma position et je contestais. Malgré cela, le vendredi 22/07 il a passé sa main sous mon tee-shirt et en m'agrippant par les épaules m'a embrassé dans le cou. Dans la même période, il se permettait de m'interpeller par des mots doux « mon coeur, mon amour » il me demandait de le regarder dans les yeux. Il va jusqu'à me dire « je suis bien avec vous, j'aime bien vous voir » (
) Suite à mes réticences maintenant il me harcèle verbalement « vous êtes une garce ». M. E... F... avait pris l'habitude de partager son fruit avec moi. Vendredi 22/07, il vient à mon poste, me jette une banane en me disant « vous n'avez qu'à vous la mettre dans le cul » ; que d'autre part, Mme A... atteste : « (
) Au milieu de la semaine 29 (
) B... est venu vers nous et il s'est sauvagement jeté à califourchon sur Nathalie en essayant de l'embrasser. (
) Vers midi il mangeait souvent un fruit qu'il partageait avec Nathalie. Un jour il a mangé une banane et il a fait des réflexions que je ne me rappelle pas
un autre jour dans une peau d'orange il a fait un découpage qui représentait un petit homme avec un "zizi" en érection. (
) » ; qu'il n'est pas contesté que les dates figurant sur ces attestations - 07.09.11 pour l'attestation Z... et 05.09.11 pour l'attestation A... - ont été apposées postérieurement à leur rédaction ; que l'article 202 du code de procédure civile dispose notamment que l'attestation contient la relation des faits auxquels son auteur a assisté ou qu'il a personnellement constatés et qu'elle est écrite, datée et signée de la main de son auteur, celui-ci devant annexer, en original ou en photocopie, tout document officiel justifiant de son identité et comportant sa signature ; que toutefois, ces dispositions ne sont pas prescrites à peine de nullité et il appartient au juge d'apprécier si l'attestation non conforme présente des garanties suffisantes pour emporter sa conviction ; qu'aucun élément lié à leur formalisme ne permet en l'espèce d'écarter les attestations versées aux débats par l'employeur et qui relatent de manière précise des faits dont rien n'amène à douter que leur auteur en ait effectivement été le témoin ; qu'il ne pourra non plus être tiré parti du fait que Mme A..., qui ne fait pour l'essentiel que corroborer des éléments retenus à l'encontre de M. B... F..., ait pu témoigner par le passé dans une affaire distincte ; que les nombreuses attestations « de moralité » établies en faveur de M. B... F... par des collègues ou des proches ne sont pas non plus de nature à jeter le doute sur les éléments objectifs ainsi produits par l'employeur ; qu'on ne saurait par ailleurs tirer argument de troubles physiologiques ou de problème de « libido » mis en avant par le demandeur au regard de la nature précise des faits qui lui sont effectivement reprochés ; qu'il convient en conséquence de dire et juger que le licenciement de M. B... F... repose sur une cause réelle et sérieuse ;
1°) ALORS QU'au cours d'une période de suspension du contrat de travail en raison d'une maladie professionnelle, l'employeur ne peut rompre ce dernier que s'il justifie soit de son impossibilité de maintenir ce contrat pour un motif étranger à l'accident ou à la maladie, soit d'une faute grave, et que le juge ne peut dans ce cas aggraver la qualification de la cause du licenciement retenue par l'employeur dans la lettre de licenciement ; qu'ayant constaté que le licenciement avait été prononcé pour « cause réelle et sérieuse » pendant une période de suspension du contrat de travail, en refusant d'en prononcer l'annulation aux motifs inopérants que les faits énoncés dans la lettre de licenciement étaient constitutifs d'une faute grave, la cour d'appel a violé les articles L. 1226-9 et L. 1226-13 du code du travail ;
2°) ALORS AU DEMEURANT QUE la faute grave est définie comme un fait personnel imputable au salarié, caractérisant un manquement au contrat objectivement considéré, sans qu'il ait la nature d'une simple insuffisance professionnelle, et rendant immédiatement impossible la poursuite du contrat de travail ; que s'agissant d'un reproche contesté de paroles et gestes déplacés ou indécents à l'égard d'une collègue après quarante ans d'ancienneté sans précédent comparable et alors que l'employeur avait pris une mesure d'isolement des intéressés, la cour d'appel, qui n'a pas caractérisé l'impossibilité immédiate de poursuivre le contrat de travail, a violé les articles L. 226-9 et L. 1226-13 du code du travail.
SECOND MOYEN DE CASSATION
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. B... F..., salarié, de sa demande de condamnation de la société Manufacture française des pneumatiques Michelin, employeur, au paiement de la somme de 4 497,16 € à titre d'indemnité de préavis, outre 449 € de congés payés afférents ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE M. B... F... maintient en appel sa demande relative au versement de l'indemnité compensatrice de préavis sans développer davantage d'explications, alors que l'employeur soutient que cette indemnité, qu'il s'était engagé à verser dans la lettre de licenciement, a été réglée, ce qui a été retenu à juste titre par le premier juge..; ET AUX MOTIFS RÉPUTÉS ADOPTÉS QUE M. B... F... doit également être débouté de sa demande de paiement d'une indemnité de préavis, ce préavis lui ayant été payé ;
ALORS QUE l'employeur qui se prétend libéré de son obligation de paiement d'une dette salariale doit le prouver ; qu'en déboutant le salarié de sa demande de paiement d'une indemnité compensatrice de préavis figurant sur son dernier bulletin de paie aux motifs inopérants qu'il ne démontrait pas l'absence de paiement, la cour d'appel a violé l'article 1315 du code civil.