Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 20 décembre 2017, 16-14.179, Inédit
Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 20 décembre 2017, 16-14.179, Inédit
Cour de cassation - Chambre sociale
- N° de pourvoi : 16-14.179
- ECLI:FR:CCASS:2017:SO02646
- Non publié au bulletin
- Solution : Rejet
Audience publique du mercredi 20 décembre 2017
Décision attaquée : Cour d'appel de Nancy, du 22 janvier 2016- Président
- Mme Guyot (conseiller doyen faisant fonction de président)
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nancy, 22 janvier 2016), que M. Y... a été engagé le 27 octobre 2009 par la société Transvert en qualité de chauffeur routier ; qu'il a été licencié, le 11 mai 2011, pour faute grave ;
Sur le moyen unique, pris en ses deuxième et troisième branches :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen annexé, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de dire le licenciement du salarié sans cause réelle et sérieuse et de le condamner à lui payer des sommes à titre de dommages-intérêts et indemnité compensatrice de préavis alors, selon le moyen que, si un fait de vie privée ou personnelle du salarié ne peut en principe justifier un licenciement disciplinaire, il en va autrement lorsque ce fait constitue un manquement du salarié à une des obligations découlant de son contrat de travail ; que, pour dire que l'accident de la circulation causé par le salarié ayant entraîné le décès d'un usager de la route ne constituait pas un manquement du salarié à une des obligations découlant de son contrat de travail, la cour d'appel s'est bornée à énoncer, d'une part qu'il n'était pas établi que le salarié conduisait sous l'empire de produits stupéfiants ou d'un état alcoolique, d'autre part que la peine de prison d'un an qui lui avait été infligée pour ces faits était assortie du sursis simple et que son permis de conduire n'avait été ni suspendu ni annulé ; qu'en statuant ainsi, par des motifs inopérants, quand elle constatait que le salarié avait été déclaré coupable du chef d'homicide involontaire pour s'être déporté sur la voie de gauche et avoir percuté le véhicule qui circulait normalement sur cette file, ce qui constituait un manquement évident à l'obligation de sécurité et de prudence découlant du contrat de travail de chauffeur routier du salarié, la cour d'appel a violé les articles L. 1232-1, L. 1234-1, L. 1234- 5 et L. 1234-9 du code du travail ;
Mais attendu qu'un motif tiré de la vie personnelle du salarié ne peut, en principe, justifier un licenciement disciplinaire, sauf s'il constitue un manquement de l'intéressé à une obligation découlant de son contrat de travail ;
Et attendu que la cour d'appel a relevé que les circonstances de l'accident de la circulation survenu durant le temps de trajet ne permettaient pas d'établir un manquement du salarié à une obligation découlant de son contrat de travail ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Transvert aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Transvert à payer à M. Y... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé et signé par Mme X..., conseiller doyen faisant fonction de président, et par Mme Lavigne, greffier de chambre présente lors de la mise à disposition de l'arrêt le vingt décembre deux mille dix-sept. MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Didier et Pinet, avocat aux Conseils, pour la société Transvert.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit le licenciement de M. Y... sans cause réelle et sérieuse et d'AVOIR condamné la société Transvert à verser au salarié diverses sommes à titre de dommages-intérêts et indemnité compensatrice de préavis ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE sur le licenciement : tout licenciement pour motif personnel doit être motivé, et justifié par une cause réelle et sérieuse ; qu'en l'espèce, la lettre de licenciement adressée par la société Transvert le 11 mai 2011 à M. Mathieu Y... repose sur les trois motifs suivants : - insubordination réitérée et refus injustifié d'exécuter une tâche prévue au contrat de travail, - violation d'une règle de sécurité pouvant mettre en péril des personnes et des biens, - violation de la réglementation en vigueur et des dispositions de la convention collective des transports routiers de marchandise ; que s'agissant du motif pris de l'insubordination réitérée et refus injustifié d'exécuter une tâche prévue au contrat de travail, il ressort du propre aveu de l'employeur contenu dans ses conclusions d'appel, que les faits fautifs invoqués par celui-ci sont soit prescrits par application des dispositions de l'article L 1332-4 du code du travail, comme n'ayant pas donné lieu à l'engagement de poursuites disciplinaires dans le délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance, hors le cas où des poursuites pénales ont été engagées dans le même délai, soit d'ores et déjà sanctionnés par un avertissement, contrevenant ainsi au principe non bis in idem selon lequel une même faute ne peut faire l'objet de deux fautes successives ; qu'ainsi les points numérotés 1 à 4 de la lettre de licenciement, qui se rapportent en réalité à des faits des 1, 2 et 3 juin 2010, ne constituent pas une cause réelle et sérieuse au licenciement au regard de l'engagement tardif des poursuites disciplinaires résultant de la remise en main propre au salarié, datée du 30 avril 2011, de la lettre de convocation à un entretien préalable en vue d'un licenciement ; que les points numérotés 5, 6, qui concernent des faits du 11 mars 2011 ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire prenant la forme d'une lettre d'avertissement remise en mains propre au salarié le 30 avril 2011, soit le même jour que la remise de la convocation à l'entretien préalable, ne constituent pas davantage une cause réelle et sérieuse au licenciement, de même que les points 7 à 11 qui pour le premier, intéresse des faits du 08 mars 2011, sanctionnés par le même avertissement, les autres faits, constatés par l'employeur le 17 mars 2011, ayant eux aussi été visés à l'occasion de l'avertissement du 30 avril 2011; qu'outre les faits rappelés ci-avant, la lettre de licenciement reproche au salarié de ne pas avoir tenu l'engagement stipulé au contrat de travail de respecter les consignes de sécurité relatives notamment aux temps de conduite et de repos journalier applicables aux chauffeurs routiers, la faute reprochée concrètement à M. Mathieu Y... étant la suivante : « Il est rappelé, pour mémoire, que suite au contrôle accompli le 26 octobre 2010 au sein de notre entreprise, le contrôleur des transports terrestres a relevé que vous aviez effectué deux infractions à l'Ordonnance N° 58-1310 du 23 décembre 1958 consécutives d'un délit et pour lesquelles vous auriez pu être poursuivi pénalement. En effet, à deux reprises, vous avez conduit votre véhicule sans insérer le disque dans le chronotachygraphe » ; que cependant, cette omission du salarié, établie par la reconnaissance de responsabilité sur ce point effectuée par M. Mathieu Y... dans son écrit du 07 décembre 2010, est également frappée de prescription, faute pour l'employeur d'avoir engagé des poursuites disciplinaires dans le délai requis ; que dans ces conditions seul le motif pris de la violation d'une règle de sécurité pouvant mettre en péril des personnes et des biens doit être examiné, afin de vérifier l'existence d'une cause réelle et sérieuse au licenciement ; que sur ce point, la lettre de licenciement est ainsi libellée : « Par ailleurs, au cours de l'entretien, l'accident de la route dans lequel vous êtes impliqué a été évoqué. En effet, Jeudi 17/03 à 4h30 du matin, vous avez percuté un automobiliste à l'entrée de Blainville en vous rendant sur votre lieu de travail avec votre véhicule personnel. Dans cet accident, le jeune homme qui arrivait en face est décédé sur le coup. Légèrement blessé physiquement, vous avez été en arrêt de travail pendant deux semaines mais, comme vous, nous ne vous imaginons plus à bord d'un poids lourd de 44 tonnes. Suite à l'enquête de gendarmerie, à laquelle nous avons également été confrontés, vous avez récupéré votre permis de conduire. En présence de Madame A..., vous avez reconnu vous être endormi et provoqué l'accident mortel. Vous avez en outre été reconnu apte à retravailler par le médecin du travail lors de votre visite de reprise du 29/04/2011. En revanche, vous n'avez pas évoqué avec le docteur en charge de votre dossier lors de cette visite médicale, vos réels problèmes de somnolence, d'assoupissements inopinés. Vous lui avez sciemment dissimulé par exemple que vous profitiez quotidiennement des déchargements pour faire la sieste. Naturellement, cette pratique sous-entendait que le cariste vous réveille jusqu'à parfois trois reprises pour charger entièrement votre remorque. Les fournisseurs de nos clients nous ont régulièrement fait part de vos mauvaises habitudes. ( ...) » ; que si l'employeur reconnaît que la faute reprochée au salarié a été commise durant le temps de trajet domicile-lieu habituel de travail, période qui ne peut être assimilée à une période effective de travail, compte tenu de la définition légale du temps de travail énoncée par l'article L 3121-1 du code du travail, il estime néanmoins que le fait invoqué dans la lettre de licenciement caractérise un manquement de M. Mathieu Y... d'une part à son obligation de loyauté où de probité, d'autre part à une obligation de sécurité ou de prudence qui perdure au-delà de l'exécution du contrat de travail ; que s'agissant de l'obligation de loyauté, la société Transvert fait plus particulièrement grief à l'intimé d'avoir dissimulé, à tout le moins au médecin du travail compte tenu de la confidentialité attachée aux renseignements relatifs à l'état de santé du salarié, sa propension à la somnolence et à l'assoupissement inopiné, faute d'abstention d'autant plus préjudiciable qu'elle peut avoir des répercussions sur la bonne exécution du contrat de travail ; que pour preuve de ce manque de loyauté, l'appelante produit les procès-verbaux de l'enquête préliminaire de gendarmerie effectuée consécutivement à l'accident du 17 mars 2011 ainsi qu'un courrier daté du 24 janvier 2011 émanant de la société Nealia, client de la société Transvert ; que certes lors de son audition du 24 mai 2011, M. Mathieu Y... a pris acte du point de choc situé sur la voie de circulation du véhicule antagoniste, confirmé l'absence de freinage de sa part, et à la question « pensez-vous que vous vous êtes assoupi ? », a répondu : « Je ne pense pas, mais il m'arrivait lors de mon travail de chauffeur routier que je dorme régulièrement pendant mes coupures » ; qu'en outre, le courrier de la société Nealia corrobore les déclarations de M. Mathieu Y..., selon lesquelles il effectuait des siestes occasionnelles pendant les temps d'attente, une fois arrivé sur la plate-forme de chargement, ce client précisant ainsi : « Il s'est en effet avéré qu'il fallait réveiller jusqu'à trois fois un de vos jeunes conducteurs, afin qu'il avance son ensemble routier et permette ainsi le chargement des matières à destination de nos clients » ; que si ces deux éléments laissent à penser que M. Mathieu Y... était, à la date de son licenciement, un adepte de la sieste, y compris les jours durant lesquels il exerçait son activité professionnelle, aucun autre élément du dossier n'établit qu'il aurait volontairement dissimulé au médecin du travail le fait de présenter les signes d'une maladie telle que narcolepsie, cataplexie ou hypersomnie, à l'évidence radicalement incompatible avec l'exercice de sa profession de chauffeur routier ; que le moyen pris du manque de loyauté restera donc au stade de l'allégation ; que le moyen pris du manquement du salarié à une obligation de sécurité ou de prudence qui perdure au-delà de l'exécution du contrat de travail ne sera pas davantage tenu pour pertinent ; qu'en effet, la circonstance de la déclaration de culpabilité de l'intimé, poursuivi pour avoir involontairement causé la mort de M. Patrick B... le [...] , à l'occasion de la conduite d'un véhicule, par maladresse, imprudence, inattention, négligence ou manquement à une obligation de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le règlement, en l'espèce en se déportant sur la voie de gauche et en venant percuter le véhicule de la victime qui circulait normalement sur cette voie, prononcée par jugement du tribunal correctionnel d'Epinal daté du 05 février 2013, ne permet pas en soi d'établir le lien allégué par l'employeur entre la faute ponctuelle commise par M. Mathieu Y... durant sa vie personnelle et un quelconque manquement de ce dernier à une obligation découlant de son contrat de travail ; que sur ce dernier point, la cour ne peut que constater d'une part l'absence de mise en évidence par l'enquête de gendarmerie, d'une conduite par M. Mathieu Y... de son véhicule personnel sous l'effet de produits stupéfiants et/ou sous l'empire d'un état alcoolique, d'autre part s'agissant de la peine infligée au prévenu, soit un an d'emprisonnement intégralement assorti du sursis simple, sans annulation ou suspension du permis de conduire, la volonté du tribunal correctionnel de détacher la faute commise par M. Mathieu Y... de la relation salariale, la motivation du jugement précisant ainsi que le choix de la peine permettra au prévenu de « continuer à exercer sa profession de chauffeur routier » (sic) ; qu'en définitive, aucun des motifs contenus dans la lettre du 11 mai 2011 ne constitue une cause réelle et sérieuse au licenciement ; qu'il convient donc de confirmer le jugement en ce qu'il a considéré abusif le licenciement de M. Mathieu Y... ; que ne sont pas applicables au licenciement d'un salarié de moins de deux ans d'ancienneté dans l'entreprise, ce qui est le cas en l'espèce, les dispositions relatives à l'absence de cause réelle et sérieuse, prévues à l'article L 1235-3 du code du travail, le salarié ne pouvant alors prétendre, en cas de licenciement abusif, qu'a une indemnité correspondant au préjudice subi ; que c'est dans l'exercice de leur pouvoir souverain d'appréciation, à l'une des circonstances de l'espèce et en considération des moyens de preuve produits par M. Mathieu Y... que les premiers juges ont fixé à la somme de 7.000 euros le montant du préjudice subi par le salarié ; que sur le préavis et les congés payés afférents : le conseil de prud'hommes a fait une exacte application des dispositions de L 1234-1 du code du travail relatives à l'indemnité de préavis ; que le jugement doit être confirmé de ce chef, ainsi que pour la demande formée au titre des congés payés afférents ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE les motifs invoqués inscrits en préambule dans la lettre de licenciement du 11 mai 2011 sont les suivants : - insubordination réitérée et refus injustifié d'exécuter une tache prévue au contrat de travail, - violation d'une règle de sécurité pouvant mettre en péril des personnes ou des biens, - violation de la réglementation en vigueur et des dispositions de la convention collective de transports routiers de marchandises ; que, dans un premier temps, la lettre de licenciement rappelle à M. Mathieu Y... : « Depuis votre embauche, vous avez été sanctionné par trois avertissements disciplinaires successifs. Ces sanctions disciplinaires ont été motivées par de nombreuses fautes professionnelles reconnues par ailleurs par vos soins en présence de votre conseiller. Elles sont rappelées ci-après en détail » ; que la lettre de licenciement rappelle ensuite en détail les « nombreuses fautes professionnelles » en 11 points ; que les points numérotés : « 1 : éclaté un pneu sur le site de la CAL de Royale aux Chênes en manoeuvrant sur le pont-bascule (le 1er juin 2010), 2 : arraché la bâche de la benne [...] sur toute la longueur (le 02 juin 2010), 3 : négligé la surveillance du matériel confié entraînant la rupture d'un tuyau hydraulique et occasionnant l'impossibilité d'effectuer le contre voyage commandé par notre client (le 03 juin 2010), 4 : ces fautes professionnelles qui ont en outre généré, pour mémoire, une perte à l'entreprise de plus de 860 euros en trois jours. » se rapportent donc à des faits des 1er, 2 et 3 juin 2010, et à leurs conséquences financières, qui n'ont pas été sanctionnés dans le délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance et se trouvent donc prescrits ; que les points numérotés : « 5 : des négligences ont été délibérément commises le vendredi 11 mars 2011, notamment à l'occasion de votre travail. Vous avez négligé le matériel de I 'entreprise qui vous est confié et délibérément garé votre véhicule sur le site, à l'extérieur du bâtiment durant le week-end. A ce titre, vous avez ainsi dérogé à la règle prétextant que vous alliez revenir le lendemain matin (samedi) ainsi que vous en aviez volontiers pris l'habitude pour entretenir le camion et effectuer son lavage. Or, il n'en fut rien. Le nettoyage n'a jamais eu lieu ce samedi matin en question. En conséquence, vous avez ainsi abandonné délibérément votre véhicule tout le week-end sur le parc, et en tout état de cause, encouragé et provoqué une incitation au vol de carburant notamment. En tout état de cause, pour des raisons qui vous appartiennent, vous avez délibérément discuté et contourné nos directives et instructions, 6 : de surcroît, vous avez cumulé vos maladresses et omis d'éteindre une veilleuse à l'intérieur de la cabine entraînant le déchargement de la batterie du véhicule. Cet incident vous a donc empêché de démarrer le camion le lundi 14 mars au matin et créé ainsi un contretemps s'agissant du transport que nous vous avions confié.» concernent donc des faits du 11 mars 2011 ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire sous la forme d'un avertissement daté du 30 avril 2011 ; que les points numérotés : » 7 : à l'occasion de la conduite de votre véhicule, le 08 mars 2011, vous avez effectué une infraction de 5ème classe. Au demeurant, cette infraction au règlement CE n° 561/2006 du 15 mars 2006 correspond à un dépassement d'au moins 1 heure 30 minutes de la durée de conduite ininterrompue de 4h 30. A titre indicatif vous aviez déjà comptabilisé cette même infraction le 03 février et 28 janvier derniers, 8 : le véhicule dont vous êtes en charge a suscité toute notre attention depuis votre arrêt de travail en date du 17 mars dernier. Ce dernier a été laissé dans un état lamentable, tant au niveau intérieur de la cabine - laquelle s'apparente à une véritable déchetterie - qu'au niveau extérieur où la vérification quotidienne liée à la sécurité et à l'entretien du véhicule est visiblement totalement inexistante depuis de nombreuses semaines, 9 : la vidange de l'ensemble routier dont vous êtes en charge, est en outre dépassée depuis plusieurs kilomètres. Il vous appartenait uniquement et simplement de surveiller/contrôler la date s'agissant notamment de cet entretien et de nous indiquer le moment venu de sa réalisation, 10 : une dizaine de voyants lumineux clignote tel un sapin de Noël sur le tableau de bord de votre véhicule. Ces voyants sont pourtant des indicateurs essentiels avertissant un éventuel disfonctionnement du véhicule..., 11 : les plaquettes de frein ont dépassé le témoin d'usure endommageant ainsi les disques de l'essieu et occasionnant le remplacement particulièrement couteux de l'ensemble du matériel » intéressent des faits du 08 mars 2011 pour le premier et des faits constatés le 17 mars 2011 pour les suivants, ayant donné lieu à une sanction par avertissement daté du 30 avril 2011 ; que, selon les termes suivants de la lettre de licenciement, si « ces négligences à répétition sont parfaitement inacceptables et témoignent de votre inattention, manque de rigueur et de professionnalisme » il n'en demeure pas moins que les griefs contenus dans la lettre de licenciement pour étayer ces négligences ont fait l'objet de sanctions par avertissements ou sont demeurés sans suite ; qu'au surplus, il est constaté que, des trois avertissements ainsi mentionnés en rappel dans la lettre de licenciement du 11 mai 2011, deux ont été remis en mains propres à M. Mathieu Y... le 30 avril 2011, simultanément à la remise de la convocation à l'entretien préalable ; qu'ainsi, les faits reprochés à M. Mathieu Y... à l'appui de son licenciement sont prescrits ou déjà sanctionnés ; que, d'autre part, la lettre de licenciement indique : « au cours de l'entretien, l'accident de la route dans lequel vous êtes impliqué a été évoqué » ; que cet accident, malheureusement mortel, provoqué par M. Mathieu Y... s'est produit lors du trajet domicile/travail, au volant de son véhicule personnel, le 17 mars 2011 ; qu'évidemment, le temps de trajet domicile/travail entre en compte pour les accidents de travail ; que cependant M. Mathieu Y... a été déclaré apte à reprendre son poste par le médecin du travail au cours de la visite de reprise du 29 avril 2011 ; que M. Mathieu Y... a été placé en congés payés, dès la fin de son arrêt de travail, soit à compter du 10 avril 2011 ; qu'au surplus, dans son jugement du 5 février 2013, le tribunal de grande instance d'Epinal, n'a pas prononcé d'annulation ni de suspension du permis de conduire de M. Mathieu Y... ; que M. Mathieu Y... pouvait donc poursuivre son métier de chauffeur-routier dès la visite de reprise ; qu'ainsi la société Transvert ne démontre pas de trouble objectif caractérisé apporté du fait de cet accident ; qu'en conséquence, au vu de l'ensemble de ces éléments, il apparaît que le licenciement de M. Mathieu Y... est dépourvu de cause réelle et sérieuse ; que M. Mathieu Y... verra sa demande en dommages et intérêts pour licenciement abusif aboutir pour la somme de 7.000 euros ; que sur le préavis et les congés payés sur préavis : le licenciement de M. Mathieu Y... a été requalifié en un licenciement sans cause réelle et sérieuse ; qu'il bénéficie d'une ancienneté inférieure à deux années ; qu'ainsi, en application de l'article L.1234-1 du code du travail, M. Mathieu Y... a droit à un préavis de un mois ; qu'en conséquence, il convient de faire droit à la demande au titre de l'indemnité de préavis pour la somme de 1.932,20 euros, ainsi qu'à la somme de 193,22 euros au titre des congés payés y afférents ;
1°) ALORS QUE, si un fait de vie privée ou personnelle du salarié ne peut en principe justifier un licenciement disciplinaire, il en va autrement lorsque ce fait constitue un manquement du salarié à une des obligations découlant de son contrat de travail ; que, pour dire que l'accident de la circulation causé par M. Y... ayant entrainé le décès d'un usager de la route ne constituait pas un manquement du salarié à une des obligations découlant de son contrat de travail, la cour d'appel s'est bornée à énoncer, d'une part qu'il n'était pas établi que le salarié conduisait sous l'empire de produits stupéfiants ou d'un état alcoolique, d'autre part que la peine de prison d'un an qui lui avait été infligée pour ces faits était assortie du sursis simple et que son permis de conduire n'avait été ni suspendu ni annulé ; qu'en statuant ainsi, par des motifs inopérants, quand elle constatait que le salarié avait été déclaré coupable du chef d'homicide involontaire pour s'être déporté sur la voie de gauche et avoir percuté le véhicule qui circulait normalement sur cette file, ce qui constituait un manquement évident à l'obligation de sécurité et de prudence découlant du contrat de travail de chauffeur routier de M. Y..., la cour d'appel a violé les articles L. 1232-1, L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail ;
2°) ALORS QUE lorsque la démonstration d'un fait dépend d'éléments détenus exclusivement par le salarié, celui-ci est tenu de les produire en vue d'une discussion contradictoire ; qu'en l'espèce, la société Transvert soutenait que M. Y... avait dissimulé ses problèmes de somnolence et que son état de santé était incompatible avec l'exercice des fonctions de conducteur routier ; qu'en retenant dès lors que l'employeur ne démontrait pas que le salarié aurait volontairement dissimulé au médecin du travail le fait de présenter les signes d'une maladie telle que narcolepsie, cataplexie ou hypersomnie, quand il appartenait, au contraire, au salarié de démontrer l'absence de lien entre sa somnolence récurrente avérée et une maladie quelconque du sommeil, la cour d'appel a violé l'article 1315 du code civil ;
3°) ET ALORS, subsidiairement, QUE le juge, à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles ; que, pour dire le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a retenu que l'employeur, qui ne prouvait notamment pas que les problèmes de somnolence du salarié étaient liés à une maladie du sommeil, ne démontrait pas le bien-fondé du licenciement ; qu'en statuant ainsi, en faisant peser sur le seul employeur la preuve du caractère réel et sérieux du licenciement, la cour d'appel a violé l'article L. 1235-1 du code du travail.ECLI:FR:CCASS:2017:SO02646
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nancy, 22 janvier 2016), que M. Y... a été engagé le 27 octobre 2009 par la société Transvert en qualité de chauffeur routier ; qu'il a été licencié, le 11 mai 2011, pour faute grave ;
Sur le moyen unique, pris en ses deuxième et troisième branches :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen annexé, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de dire le licenciement du salarié sans cause réelle et sérieuse et de le condamner à lui payer des sommes à titre de dommages-intérêts et indemnité compensatrice de préavis alors, selon le moyen que, si un fait de vie privée ou personnelle du salarié ne peut en principe justifier un licenciement disciplinaire, il en va autrement lorsque ce fait constitue un manquement du salarié à une des obligations découlant de son contrat de travail ; que, pour dire que l'accident de la circulation causé par le salarié ayant entraîné le décès d'un usager de la route ne constituait pas un manquement du salarié à une des obligations découlant de son contrat de travail, la cour d'appel s'est bornée à énoncer, d'une part qu'il n'était pas établi que le salarié conduisait sous l'empire de produits stupéfiants ou d'un état alcoolique, d'autre part que la peine de prison d'un an qui lui avait été infligée pour ces faits était assortie du sursis simple et que son permis de conduire n'avait été ni suspendu ni annulé ; qu'en statuant ainsi, par des motifs inopérants, quand elle constatait que le salarié avait été déclaré coupable du chef d'homicide involontaire pour s'être déporté sur la voie de gauche et avoir percuté le véhicule qui circulait normalement sur cette file, ce qui constituait un manquement évident à l'obligation de sécurité et de prudence découlant du contrat de travail de chauffeur routier du salarié, la cour d'appel a violé les articles L. 1232-1, L. 1234-1, L. 1234- 5 et L. 1234-9 du code du travail ;
Mais attendu qu'un motif tiré de la vie personnelle du salarié ne peut, en principe, justifier un licenciement disciplinaire, sauf s'il constitue un manquement de l'intéressé à une obligation découlant de son contrat de travail ;
Et attendu que la cour d'appel a relevé que les circonstances de l'accident de la circulation survenu durant le temps de trajet ne permettaient pas d'établir un manquement du salarié à une obligation découlant de son contrat de travail ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Transvert aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Transvert à payer à M. Y... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé et signé par Mme X..., conseiller doyen faisant fonction de président, et par Mme Lavigne, greffier de chambre présente lors de la mise à disposition de l'arrêt le vingt décembre deux mille dix-sept. MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Didier et Pinet, avocat aux Conseils, pour la société Transvert.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit le licenciement de M. Y... sans cause réelle et sérieuse et d'AVOIR condamné la société Transvert à verser au salarié diverses sommes à titre de dommages-intérêts et indemnité compensatrice de préavis ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE sur le licenciement : tout licenciement pour motif personnel doit être motivé, et justifié par une cause réelle et sérieuse ; qu'en l'espèce, la lettre de licenciement adressée par la société Transvert le 11 mai 2011 à M. Mathieu Y... repose sur les trois motifs suivants : - insubordination réitérée et refus injustifié d'exécuter une tâche prévue au contrat de travail, - violation d'une règle de sécurité pouvant mettre en péril des personnes et des biens, - violation de la réglementation en vigueur et des dispositions de la convention collective des transports routiers de marchandise ; que s'agissant du motif pris de l'insubordination réitérée et refus injustifié d'exécuter une tâche prévue au contrat de travail, il ressort du propre aveu de l'employeur contenu dans ses conclusions d'appel, que les faits fautifs invoqués par celui-ci sont soit prescrits par application des dispositions de l'article L 1332-4 du code du travail, comme n'ayant pas donné lieu à l'engagement de poursuites disciplinaires dans le délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance, hors le cas où des poursuites pénales ont été engagées dans le même délai, soit d'ores et déjà sanctionnés par un avertissement, contrevenant ainsi au principe non bis in idem selon lequel une même faute ne peut faire l'objet de deux fautes successives ; qu'ainsi les points numérotés 1 à 4 de la lettre de licenciement, qui se rapportent en réalité à des faits des 1, 2 et 3 juin 2010, ne constituent pas une cause réelle et sérieuse au licenciement au regard de l'engagement tardif des poursuites disciplinaires résultant de la remise en main propre au salarié, datée du 30 avril 2011, de la lettre de convocation à un entretien préalable en vue d'un licenciement ; que les points numérotés 5, 6, qui concernent des faits du 11 mars 2011 ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire prenant la forme d'une lettre d'avertissement remise en mains propre au salarié le 30 avril 2011, soit le même jour que la remise de la convocation à l'entretien préalable, ne constituent pas davantage une cause réelle et sérieuse au licenciement, de même que les points 7 à 11 qui pour le premier, intéresse des faits du 08 mars 2011, sanctionnés par le même avertissement, les autres faits, constatés par l'employeur le 17 mars 2011, ayant eux aussi été visés à l'occasion de l'avertissement du 30 avril 2011; qu'outre les faits rappelés ci-avant, la lettre de licenciement reproche au salarié de ne pas avoir tenu l'engagement stipulé au contrat de travail de respecter les consignes de sécurité relatives notamment aux temps de conduite et de repos journalier applicables aux chauffeurs routiers, la faute reprochée concrètement à M. Mathieu Y... étant la suivante : « Il est rappelé, pour mémoire, que suite au contrôle accompli le 26 octobre 2010 au sein de notre entreprise, le contrôleur des transports terrestres a relevé que vous aviez effectué deux infractions à l'Ordonnance N° 58-1310 du 23 décembre 1958 consécutives d'un délit et pour lesquelles vous auriez pu être poursuivi pénalement. En effet, à deux reprises, vous avez conduit votre véhicule sans insérer le disque dans le chronotachygraphe » ; que cependant, cette omission du salarié, établie par la reconnaissance de responsabilité sur ce point effectuée par M. Mathieu Y... dans son écrit du 07 décembre 2010, est également frappée de prescription, faute pour l'employeur d'avoir engagé des poursuites disciplinaires dans le délai requis ; que dans ces conditions seul le motif pris de la violation d'une règle de sécurité pouvant mettre en péril des personnes et des biens doit être examiné, afin de vérifier l'existence d'une cause réelle et sérieuse au licenciement ; que sur ce point, la lettre de licenciement est ainsi libellée : « Par ailleurs, au cours de l'entretien, l'accident de la route dans lequel vous êtes impliqué a été évoqué. En effet, Jeudi 17/03 à 4h30 du matin, vous avez percuté un automobiliste à l'entrée de Blainville en vous rendant sur votre lieu de travail avec votre véhicule personnel. Dans cet accident, le jeune homme qui arrivait en face est décédé sur le coup. Légèrement blessé physiquement, vous avez été en arrêt de travail pendant deux semaines mais, comme vous, nous ne vous imaginons plus à bord d'un poids lourd de 44 tonnes. Suite à l'enquête de gendarmerie, à laquelle nous avons également été confrontés, vous avez récupéré votre permis de conduire. En présence de Madame A..., vous avez reconnu vous être endormi et provoqué l'accident mortel. Vous avez en outre été reconnu apte à retravailler par le médecin du travail lors de votre visite de reprise du 29/04/2011. En revanche, vous n'avez pas évoqué avec le docteur en charge de votre dossier lors de cette visite médicale, vos réels problèmes de somnolence, d'assoupissements inopinés. Vous lui avez sciemment dissimulé par exemple que vous profitiez quotidiennement des déchargements pour faire la sieste. Naturellement, cette pratique sous-entendait que le cariste vous réveille jusqu'à parfois trois reprises pour charger entièrement votre remorque. Les fournisseurs de nos clients nous ont régulièrement fait part de vos mauvaises habitudes. ( ...) » ; que si l'employeur reconnaît que la faute reprochée au salarié a été commise durant le temps de trajet domicile-lieu habituel de travail, période qui ne peut être assimilée à une période effective de travail, compte tenu de la définition légale du temps de travail énoncée par l'article L 3121-1 du code du travail, il estime néanmoins que le fait invoqué dans la lettre de licenciement caractérise un manquement de M. Mathieu Y... d'une part à son obligation de loyauté où de probité, d'autre part à une obligation de sécurité ou de prudence qui perdure au-delà de l'exécution du contrat de travail ; que s'agissant de l'obligation de loyauté, la société Transvert fait plus particulièrement grief à l'intimé d'avoir dissimulé, à tout le moins au médecin du travail compte tenu de la confidentialité attachée aux renseignements relatifs à l'état de santé du salarié, sa propension à la somnolence et à l'assoupissement inopiné, faute d'abstention d'autant plus préjudiciable qu'elle peut avoir des répercussions sur la bonne exécution du contrat de travail ; que pour preuve de ce manque de loyauté, l'appelante produit les procès-verbaux de l'enquête préliminaire de gendarmerie effectuée consécutivement à l'accident du 17 mars 2011 ainsi qu'un courrier daté du 24 janvier 2011 émanant de la société Nealia, client de la société Transvert ; que certes lors de son audition du 24 mai 2011, M. Mathieu Y... a pris acte du point de choc situé sur la voie de circulation du véhicule antagoniste, confirmé l'absence de freinage de sa part, et à la question « pensez-vous que vous vous êtes assoupi ? », a répondu : « Je ne pense pas, mais il m'arrivait lors de mon travail de chauffeur routier que je dorme régulièrement pendant mes coupures » ; qu'en outre, le courrier de la société Nealia corrobore les déclarations de M. Mathieu Y..., selon lesquelles il effectuait des siestes occasionnelles pendant les temps d'attente, une fois arrivé sur la plate-forme de chargement, ce client précisant ainsi : « Il s'est en effet avéré qu'il fallait réveiller jusqu'à trois fois un de vos jeunes conducteurs, afin qu'il avance son ensemble routier et permette ainsi le chargement des matières à destination de nos clients » ; que si ces deux éléments laissent à penser que M. Mathieu Y... était, à la date de son licenciement, un adepte de la sieste, y compris les jours durant lesquels il exerçait son activité professionnelle, aucun autre élément du dossier n'établit qu'il aurait volontairement dissimulé au médecin du travail le fait de présenter les signes d'une maladie telle que narcolepsie, cataplexie ou hypersomnie, à l'évidence radicalement incompatible avec l'exercice de sa profession de chauffeur routier ; que le moyen pris du manque de loyauté restera donc au stade de l'allégation ; que le moyen pris du manquement du salarié à une obligation de sécurité ou de prudence qui perdure au-delà de l'exécution du contrat de travail ne sera pas davantage tenu pour pertinent ; qu'en effet, la circonstance de la déclaration de culpabilité de l'intimé, poursuivi pour avoir involontairement causé la mort de M. Patrick B... le [...] , à l'occasion de la conduite d'un véhicule, par maladresse, imprudence, inattention, négligence ou manquement à une obligation de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le règlement, en l'espèce en se déportant sur la voie de gauche et en venant percuter le véhicule de la victime qui circulait normalement sur cette voie, prononcée par jugement du tribunal correctionnel d'Epinal daté du 05 février 2013, ne permet pas en soi d'établir le lien allégué par l'employeur entre la faute ponctuelle commise par M. Mathieu Y... durant sa vie personnelle et un quelconque manquement de ce dernier à une obligation découlant de son contrat de travail ; que sur ce dernier point, la cour ne peut que constater d'une part l'absence de mise en évidence par l'enquête de gendarmerie, d'une conduite par M. Mathieu Y... de son véhicule personnel sous l'effet de produits stupéfiants et/ou sous l'empire d'un état alcoolique, d'autre part s'agissant de la peine infligée au prévenu, soit un an d'emprisonnement intégralement assorti du sursis simple, sans annulation ou suspension du permis de conduire, la volonté du tribunal correctionnel de détacher la faute commise par M. Mathieu Y... de la relation salariale, la motivation du jugement précisant ainsi que le choix de la peine permettra au prévenu de « continuer à exercer sa profession de chauffeur routier » (sic) ; qu'en définitive, aucun des motifs contenus dans la lettre du 11 mai 2011 ne constitue une cause réelle et sérieuse au licenciement ; qu'il convient donc de confirmer le jugement en ce qu'il a considéré abusif le licenciement de M. Mathieu Y... ; que ne sont pas applicables au licenciement d'un salarié de moins de deux ans d'ancienneté dans l'entreprise, ce qui est le cas en l'espèce, les dispositions relatives à l'absence de cause réelle et sérieuse, prévues à l'article L 1235-3 du code du travail, le salarié ne pouvant alors prétendre, en cas de licenciement abusif, qu'a une indemnité correspondant au préjudice subi ; que c'est dans l'exercice de leur pouvoir souverain d'appréciation, à l'une des circonstances de l'espèce et en considération des moyens de preuve produits par M. Mathieu Y... que les premiers juges ont fixé à la somme de 7.000 euros le montant du préjudice subi par le salarié ; que sur le préavis et les congés payés afférents : le conseil de prud'hommes a fait une exacte application des dispositions de L 1234-1 du code du travail relatives à l'indemnité de préavis ; que le jugement doit être confirmé de ce chef, ainsi que pour la demande formée au titre des congés payés afférents ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE les motifs invoqués inscrits en préambule dans la lettre de licenciement du 11 mai 2011 sont les suivants : - insubordination réitérée et refus injustifié d'exécuter une tache prévue au contrat de travail, - violation d'une règle de sécurité pouvant mettre en péril des personnes ou des biens, - violation de la réglementation en vigueur et des dispositions de la convention collective de transports routiers de marchandises ; que, dans un premier temps, la lettre de licenciement rappelle à M. Mathieu Y... : « Depuis votre embauche, vous avez été sanctionné par trois avertissements disciplinaires successifs. Ces sanctions disciplinaires ont été motivées par de nombreuses fautes professionnelles reconnues par ailleurs par vos soins en présence de votre conseiller. Elles sont rappelées ci-après en détail » ; que la lettre de licenciement rappelle ensuite en détail les « nombreuses fautes professionnelles » en 11 points ; que les points numérotés : « 1 : éclaté un pneu sur le site de la CAL de Royale aux Chênes en manoeuvrant sur le pont-bascule (le 1er juin 2010), 2 : arraché la bâche de la benne [...] sur toute la longueur (le 02 juin 2010), 3 : négligé la surveillance du matériel confié entraînant la rupture d'un tuyau hydraulique et occasionnant l'impossibilité d'effectuer le contre voyage commandé par notre client (le 03 juin 2010), 4 : ces fautes professionnelles qui ont en outre généré, pour mémoire, une perte à l'entreprise de plus de 860 euros en trois jours. » se rapportent donc à des faits des 1er, 2 et 3 juin 2010, et à leurs conséquences financières, qui n'ont pas été sanctionnés dans le délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance et se trouvent donc prescrits ; que les points numérotés : « 5 : des négligences ont été délibérément commises le vendredi 11 mars 2011, notamment à l'occasion de votre travail. Vous avez négligé le matériel de I 'entreprise qui vous est confié et délibérément garé votre véhicule sur le site, à l'extérieur du bâtiment durant le week-end. A ce titre, vous avez ainsi dérogé à la règle prétextant que vous alliez revenir le lendemain matin (samedi) ainsi que vous en aviez volontiers pris l'habitude pour entretenir le camion et effectuer son lavage. Or, il n'en fut rien. Le nettoyage n'a jamais eu lieu ce samedi matin en question. En conséquence, vous avez ainsi abandonné délibérément votre véhicule tout le week-end sur le parc, et en tout état de cause, encouragé et provoqué une incitation au vol de carburant notamment. En tout état de cause, pour des raisons qui vous appartiennent, vous avez délibérément discuté et contourné nos directives et instructions, 6 : de surcroît, vous avez cumulé vos maladresses et omis d'éteindre une veilleuse à l'intérieur de la cabine entraînant le déchargement de la batterie du véhicule. Cet incident vous a donc empêché de démarrer le camion le lundi 14 mars au matin et créé ainsi un contretemps s'agissant du transport que nous vous avions confié.» concernent donc des faits du 11 mars 2011 ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire sous la forme d'un avertissement daté du 30 avril 2011 ; que les points numérotés : » 7 : à l'occasion de la conduite de votre véhicule, le 08 mars 2011, vous avez effectué une infraction de 5ème classe. Au demeurant, cette infraction au règlement CE n° 561/2006 du 15 mars 2006 correspond à un dépassement d'au moins 1 heure 30 minutes de la durée de conduite ininterrompue de 4h 30. A titre indicatif vous aviez déjà comptabilisé cette même infraction le 03 février et 28 janvier derniers, 8 : le véhicule dont vous êtes en charge a suscité toute notre attention depuis votre arrêt de travail en date du 17 mars dernier. Ce dernier a été laissé dans un état lamentable, tant au niveau intérieur de la cabine - laquelle s'apparente à une véritable déchetterie - qu'au niveau extérieur où la vérification quotidienne liée à la sécurité et à l'entretien du véhicule est visiblement totalement inexistante depuis de nombreuses semaines, 9 : la vidange de l'ensemble routier dont vous êtes en charge, est en outre dépassée depuis plusieurs kilomètres. Il vous appartenait uniquement et simplement de surveiller/contrôler la date s'agissant notamment de cet entretien et de nous indiquer le moment venu de sa réalisation, 10 : une dizaine de voyants lumineux clignote tel un sapin de Noël sur le tableau de bord de votre véhicule. Ces voyants sont pourtant des indicateurs essentiels avertissant un éventuel disfonctionnement du véhicule..., 11 : les plaquettes de frein ont dépassé le témoin d'usure endommageant ainsi les disques de l'essieu et occasionnant le remplacement particulièrement couteux de l'ensemble du matériel » intéressent des faits du 08 mars 2011 pour le premier et des faits constatés le 17 mars 2011 pour les suivants, ayant donné lieu à une sanction par avertissement daté du 30 avril 2011 ; que, selon les termes suivants de la lettre de licenciement, si « ces négligences à répétition sont parfaitement inacceptables et témoignent de votre inattention, manque de rigueur et de professionnalisme » il n'en demeure pas moins que les griefs contenus dans la lettre de licenciement pour étayer ces négligences ont fait l'objet de sanctions par avertissements ou sont demeurés sans suite ; qu'au surplus, il est constaté que, des trois avertissements ainsi mentionnés en rappel dans la lettre de licenciement du 11 mai 2011, deux ont été remis en mains propres à M. Mathieu Y... le 30 avril 2011, simultanément à la remise de la convocation à l'entretien préalable ; qu'ainsi, les faits reprochés à M. Mathieu Y... à l'appui de son licenciement sont prescrits ou déjà sanctionnés ; que, d'autre part, la lettre de licenciement indique : « au cours de l'entretien, l'accident de la route dans lequel vous êtes impliqué a été évoqué » ; que cet accident, malheureusement mortel, provoqué par M. Mathieu Y... s'est produit lors du trajet domicile/travail, au volant de son véhicule personnel, le 17 mars 2011 ; qu'évidemment, le temps de trajet domicile/travail entre en compte pour les accidents de travail ; que cependant M. Mathieu Y... a été déclaré apte à reprendre son poste par le médecin du travail au cours de la visite de reprise du 29 avril 2011 ; que M. Mathieu Y... a été placé en congés payés, dès la fin de son arrêt de travail, soit à compter du 10 avril 2011 ; qu'au surplus, dans son jugement du 5 février 2013, le tribunal de grande instance d'Epinal, n'a pas prononcé d'annulation ni de suspension du permis de conduire de M. Mathieu Y... ; que M. Mathieu Y... pouvait donc poursuivre son métier de chauffeur-routier dès la visite de reprise ; qu'ainsi la société Transvert ne démontre pas de trouble objectif caractérisé apporté du fait de cet accident ; qu'en conséquence, au vu de l'ensemble de ces éléments, il apparaît que le licenciement de M. Mathieu Y... est dépourvu de cause réelle et sérieuse ; que M. Mathieu Y... verra sa demande en dommages et intérêts pour licenciement abusif aboutir pour la somme de 7.000 euros ; que sur le préavis et les congés payés sur préavis : le licenciement de M. Mathieu Y... a été requalifié en un licenciement sans cause réelle et sérieuse ; qu'il bénéficie d'une ancienneté inférieure à deux années ; qu'ainsi, en application de l'article L.1234-1 du code du travail, M. Mathieu Y... a droit à un préavis de un mois ; qu'en conséquence, il convient de faire droit à la demande au titre de l'indemnité de préavis pour la somme de 1.932,20 euros, ainsi qu'à la somme de 193,22 euros au titre des congés payés y afférents ;
1°) ALORS QUE, si un fait de vie privée ou personnelle du salarié ne peut en principe justifier un licenciement disciplinaire, il en va autrement lorsque ce fait constitue un manquement du salarié à une des obligations découlant de son contrat de travail ; que, pour dire que l'accident de la circulation causé par M. Y... ayant entrainé le décès d'un usager de la route ne constituait pas un manquement du salarié à une des obligations découlant de son contrat de travail, la cour d'appel s'est bornée à énoncer, d'une part qu'il n'était pas établi que le salarié conduisait sous l'empire de produits stupéfiants ou d'un état alcoolique, d'autre part que la peine de prison d'un an qui lui avait été infligée pour ces faits était assortie du sursis simple et que son permis de conduire n'avait été ni suspendu ni annulé ; qu'en statuant ainsi, par des motifs inopérants, quand elle constatait que le salarié avait été déclaré coupable du chef d'homicide involontaire pour s'être déporté sur la voie de gauche et avoir percuté le véhicule qui circulait normalement sur cette file, ce qui constituait un manquement évident à l'obligation de sécurité et de prudence découlant du contrat de travail de chauffeur routier de M. Y..., la cour d'appel a violé les articles L. 1232-1, L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail ;
2°) ALORS QUE lorsque la démonstration d'un fait dépend d'éléments détenus exclusivement par le salarié, celui-ci est tenu de les produire en vue d'une discussion contradictoire ; qu'en l'espèce, la société Transvert soutenait que M. Y... avait dissimulé ses problèmes de somnolence et que son état de santé était incompatible avec l'exercice des fonctions de conducteur routier ; qu'en retenant dès lors que l'employeur ne démontrait pas que le salarié aurait volontairement dissimulé au médecin du travail le fait de présenter les signes d'une maladie telle que narcolepsie, cataplexie ou hypersomnie, quand il appartenait, au contraire, au salarié de démontrer l'absence de lien entre sa somnolence récurrente avérée et une maladie quelconque du sommeil, la cour d'appel a violé l'article 1315 du code civil ;
3°) ET ALORS, subsidiairement, QUE le juge, à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles ; que, pour dire le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a retenu que l'employeur, qui ne prouvait notamment pas que les problèmes de somnolence du salarié étaient liés à une maladie du sommeil, ne démontrait pas le bien-fondé du licenciement ; qu'en statuant ainsi, en faisant peser sur le seul employeur la preuve du caractère réel et sérieux du licenciement, la cour d'appel a violé l'article L. 1235-1 du code du travail.