Cour de cassation, civile, Chambre civile 1, 22 juin 2017, 14-20.310, Publié au bulletin

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :



Statuant tant sur le pourvoi principal formé par la société Lacheteau que sur le pourvoi incident relevé par M. Y... ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. Y... est l'auteur de dessins stylisés, apposés sur des bouteilles de vin, identifiant des mets par référence aux vins auxquels ils sont associés ; qu'il est en outre titulaire des marques semi-figuratives françaises « poulet chicken pollo », « poisson fish pesce », « agneau lamb agnello », et communautaires « agneau lamb agnello », « canard duck pato », « spaghetti pasta tortellini » et « boeuf beef ternera », composées de ces dessins, déposées pour les premières le 24 juillet 1998 et pour les secondes les 22, 29 juin 1999 et 31 octobre 2000, désignant des produits en classe 33 ; qu'il a concédé à la société Vinival une licence d'exploitation exclusive pour le monde entier portant sur ces marques et dessins ; que la société Vinival a exploité ces dessins sur des bouteilles de sa gamme dénommée « boire et manger » ; qu'à la suite de la cessation définitive d'activité de la société Planète terroirs dirigée par M. Y..., à laquelle celui-ci avait transféré le bénéfice du contrat, la société Vinival a cessé de régler les redevances à compter du mois de juillet 2004 ; que, constatant que la société Lacheteau, venant aux droits de la société Vinival, commercialisait des bouteilles de vin comportant des dessins associant mets et vins, M. Y... l'a assignée en contrefaçon de droits d'auteur et de marques ainsi qu'en parasitisme ; qu'il a, en outre, demandé le transfert à son profit des marques verbales « boire et manger » et « drink & eat » déposées par cette société les 18 février 2003 et 3 mai 2005 en classe 33 ;

Sur le premier moyen du pourvoi principal :

Délibéré par la chambre commerciale de la Cour de cassation, après débats à l'audience publique du 3 mai 2016, où étaient présents : Mme Mouillard, président, Mme Darbois, conseiller rapporteur, Mme Riffault-Silk, conseiller doyen, Mmes Laporte, Bregeon, M. Fédou, Mmes Orsini, Poillot-Peruzzetto, M. Sémériva, conseillers, M. Contamine, Mmes Tréard, Le Bras, M. Gauthier, conseillers référendaires, M. Graveline, greffier de chambre ;

Attendu que la société Lacheteau fait grief à l'arrêt de la condamner pour contrefaçon de marque pour la période postérieure au 27 décembre 2004, alors, selon le moyen :

1°/ que l'appréciation globale du risque de confusion doit se fonder sur la comparaison de l'impression d'ensemble spécifique produite par chacun des signes incriminés et chacune des marques invoquées par le demandeur à l'action en contrefaçon ; qu'en procédant à un examen groupé de l'ensemble des signes en présence, quand il lui appartenait de comparer l'impression d'ensemble produite par chacune des marques invoquées par M. Y... et par chacun des signes incriminés, la cour d'appel a violé l'article L. 713-3 du code de la propriété intellectuelle, tel qu'il doit s'interpréter à la lumière de la directive (CE) n° 89/104 rapprochant les législations des Etats membres sur les marques ;

2°/ que le titulaire d'une marque qui continue, même après la résiliation du contrat de licence, à solliciter régulièrement le paiement de redevances pour l'usage de sa marque et qui indique, quelques années plus tard, à son ancien licencié qu'il « souhaite reprendre la libre disposition de ses signes » à compter d'une certaine date, consent, par là même, nécessairement à l'usage que son ancien licencié fait de sa marque jusqu'à cette dernière date ; qu'en retenant, au contraire, que le fait que M. Y... ait émis des factures correspondant aux redevances jusqu'en mars 2007 et ait indiqué qu'il souhaitait reprendre la libre disposition de ses signes à compter du 1er mai 2007 ne saurait « suffire à caractériser un réel accord jusqu'à cette date d'un usage des marques par la société Vinival, devenue Lacheteau », la cour d'appel a violé les articles 1134 du code civil et L. 713-3 du code de la propriété intellectuelle ;

Mais attendu, d'une part, qu'après avoir décrit les représentations semi-figuratives des dessins puis l'habillage des bouteilles incriminées, l'arrêt relève, d'abord, que, visuellement, en dépit de la différence dans la présentation des éléments figuratifs et de détails sur la représentation des animaux et de l'ajout d'un macaron « boire et manger », il résulte de la reproduction enfantine de dessins, séparés, d'animaux présentant une configuration très proche, ou de mêmes sortes de pâtes, une impression de grande similitude et que cette impression d'ensemble est confortée par la reproduction, en dessous de ces dessins, de la même manière, sur une ligne en lettres capitales d'imprimerie, des trois éléments verbaux désignant les animaux ou aliments représentés ; que l'arrêt relève ensuite que, sur le plan phonétique, nonobstant l'ajout du macaron ou la modification de certains éléments verbaux, une prononciation scandée de trois appellations aux sonorités différentes, avec reprise de termes connus, demeure prépondérante ; qu'il relève enfin qu'intellectuellement, les illustrations renvoient au même concept de présentation ludique de dessins représentant les animaux ou aliments dénommés dans trois langues pour présenter des produits similaires à ceux désignés par les marques françaises et communautaires et en déduit que ces habillages sont de nature à créer un risque de confusion dans l'esprit du public entre les signes en présence ; qu'ainsi, la cour d'appel a procédé à la comparaison de l'impression d'ensemble produite par chacune des marques invoquées par M. Y... et par chacun des signes incriminés ;

Et attendu, d'autre part, qu'après avoir prononcé la résiliation du contrat de licence à effet du 1er juillet 2004 pour non-paiement des redevances, c'est par une appréciation souveraine des faits et circonstances de la cause que la cour d'appel a estimé que la preuve n'était pas rapportée d'un réel accord des parties sur l'usage ultérieur des marques par la société Lacheteau ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le premier moyen du pourvoi incident, ci-après annexé :

Attendu que M. Y... fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes en réparation d'actes de contrefaçon de droits d'auteur ;

Attendu que l'arrêt énonce, à bon droit, qu'il incombe à celui qui agit en contrefaçon d'une oeuvre, d'identifier ce qui en caractérise l'originalité ; qu'ayant relevé que M. Y... n'identifiait aucune combinaison d'éléments caractéristiques, alors que la société Lacheteau lui en faisait le reproche, la cour d'appel a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision de ce chef ;

Et sur le second moyen du pourvoi incident :

Délibéré par la chambre commerciale de la Cour de cassation dans les mêmes conditions ;

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur le deuxième moyen du pourvoi principal :

Délibéré par la chambre commerciale de la Cour de cassation dans les mêmes conditions ;

Vu l'article 1382, devenu 1240 du code civil, ensemble le principe de la liberté du commerce et de l'industrie ;

Attendu que pour condamner la société Lacheteau pour parasitisme, l'arrêt relève, par motifs propres et adoptés, que celle-ci a poursuivi le concept créé par M. Y... avec les dessins d'autres produits, en déclinant certains d'entre eux par l'adjonction du terme « Big », et déposé une marque semi-figurative « dinde turkey pavo » dans le style propre à M. Y..., correspondant à la déclinaison trilingue mise en place par ce dernier, qu'elle s'est approprié une façon innovante de représenter sur une bouteille de vin un dessin décoratif suggérant de façon ludique l'association du breuvage à un plat et qu'elle a ainsi, en étendant ce concept, cherché à profiter sans bourse délier de son succès économique, à son seul avantage et au mépris des intérêts de M. Y... ;

Qu'en statuant ainsi, alors que, les idées étant de libre parcours, le seul fait de reprendre, en le déclinant, un concept mis en oeuvre par un concurrent ne constitue pas un acte de parasitisme, la cour d'appel a violé les texte et principe susvisés ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le troisième moyen du pourvoi principal :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société Lacheteau pour parasitisme, en ce qu'il la condamne à payer à M. Y... la somme totale de 400 000 euros, incluant l'indemnité provisionnelle de 300 000 euros, en réparation de son préjudice économique, ainsi que la somme de 15 000 euros, en réparation de son préjudice moral pour contrefaçon et parasitisme, et en ce qu'il statue sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 12 mars 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Condamne M. Y... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux juin deux mille dix-sept.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits au pourvoi principal par la SCP Hémery et Thomas-Raquin, avocat aux Conseils, pour la société Lacheteau

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir retenu que la société LACHETEAU s'était rendue coupable d'actes de contrefaçon de marque pour la période postérieure au 27 décembre 2004, d'avoir, en conséquence, condamné la société LACHETEAU à payer à Monsieur Y... les sommes de 300.000 € à titre de provision à valoir sur le préjudice définitif, de 20.000 € au titre de la liquidation de l'astreinte, de 15.000 € au titre du préjudice moral et à la somme totale de 400.000 €, incluant l'indemnité provisionnelle précitée, à titre de réparation de son préjudice économique pour contrefaçon de marque et parasitisme, et d'avoir ordonné une mesure d'interdiction ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE « pour s'opposer à l'action en contrefaçon de ces marques la société LACHETEAU soutient qu'elle ne les aurait exploité que le cadre du contrat de licence qui lui a été consenti jusqu'en 2004, qu'ensuite qu'elle aurait modifié l'habillage de ses bouteilles, dont les illustrations ne reproduiraient pas les marques et n'en constitueraient pas une imitation génératrice d'un risque de confusion, subsidiairement, qu'YDP aurait tacitement autorisé l'usage des marques modifiées jusqu'au 1er mai 2007 et, plus subsidiairement, qu'YDP serait déchu de ses droits de marques pour les boissons alcooliques (à l'exception des bières) avec effet au 23 décembre 2008, que l'action serait prescrite pour les faits antérieurs au 29 avril 2005, qu'enfin la protection des marques est territorialement limitée ; qu'il est admis que le contrat de licence précité, qui a, en particulier, fait l'objet d'une extension à de nouvelles marques par avenant n° 2 du 1er octobre 1999 autorisait la société VINIVAL à exploiter les marques actuellement revendiquées ; que ce contrat entré en vigueur dès sa signature, soit le 15 octobre 1998, d'une durée de 5 ans a été tacitement renouvelé dès lors que n'a pas été signifié à son terme conformément à son article 8 « une intention de non renouvellement [...] dans un délai se situant avant une période de six mois antérieure à l'expiration du terme » ; que la société LACHETEAU soutient néanmoins qu'il aurait ensuite été résilié en application de article 9 par la société Planète Terroirs selon courrier du 23 juin 2003, à effet du 23 décembre 2003 ; que cependant le contrat a perduré cette résiliation ayant été considérée comme nulle et non avenue par la société VINIVAL selon fax du 5 décembre 2003 ; que la société LACHETEAU est ainsi mal fondée à prétendre actuellement que la résiliation aurait été réalisée au 23 décembre 2003 ; qu'il ne saurait pas plus être retenu que le contrat serait devenu caduc le 12 mai 2004 à raison de la liquidation judiciaire de la société PLANETE TERROIRS, la convention de transfert n'ayant pas modifié les droits initiaux des parties tirés du contrat de licence ; qu'en revanche, c'est à raison que le tribunal a prononcé la résiliation de ce contrat à effet du 1er juillet 2004 après avoir relevé qu'il n'était pas contesté qu'à compter de cette date les redevances n'étaient plus payées ; que le défaut de paiement constitue en effet un manquement grave à l'exécution du contrat ; que le jugement sera confirmé sur ce point ; que les modifications incriminées des marques, qui s'avèrent en fait avoir été réalisées avant la résiliation du contrat de licence (ce qui apparaît conforté par un procès-verbal de constat du 25 novembre 2013) ne sauraient constituer des contrefaçons pendant la durée de ce contrat, ayant nécessairement été exploitées avec le consentement du titulaire des marques ; qu'en revanche elles sont susceptibles de caractériser des actes de contrefaçon , comme la reproduction des marques, pour la période postérieure durant laquelle leur exploitation n'a pas été autorisée ; qu'à cet égard la société LACHETEAU ne saurait valablement prétendre qu'elle aurait bénéficié après l'arrêt de ses paiements d'une autorisation tacite d'exploitation jusqu'au 1er mai 2007 ; que le seul fait qu'YDP ait pu émettre des factures correspondants aux redevances jusqu'en mars 2007 compte tenu du maintien sans contrepartie d'une exploitation, ou ait indiqué le 27 mars 2007 qu'il souhaitait reprendre la libre disposition de ses signes à compter du 1er mai 2007, ne saurait en effet suffire à caractériser un réel accord jusqu'à cette date d'un usage des marques par la société VINIVAL devenue LACHETEAU, quand bien même la première action judiciaire n'aurait été intentée que le 27 décembre 2007 (référé aux fins de cessation des agissements reprochés) ; qu'il n'est pas dénié que postérieurement à la date de résiliation du contrat le site internet « boire-et-manger » de la société LACHETEAU a continué à présenter des bouteilles reproduisant les marques telles que déposées, et un procès-verbal de constat du 16 juillet 2007 montre que, de même, le site « vinival.fr » présentait encore de telles bouteilles sur une de ses pages ; que si le contrat d'hébergement de ces sites a été effectivement résilié au 31 mai 2009, les vins présentés en vue de leur promotion par la représentation de bouteilles figurant les marques telles que déposées constituent le support d'une contrefaçon par reproduction, peu important que ces sites n'offrent pas les produits à la vente ; que certes les illustrations utilisées pour les vins par ailleurs commercialisés par la société LACHETEAU après la date de résiliation du contrat ne constituent pas la reproduction à l'identique des marques complexes telles que déposées, faute de les reproduire sans modification ni ajout en tous les éléments la composant, étant relevé qu'il n'est argué d'aucune modification de la marque CANARD DUCK PATO et il convient donc de rechercher s'il existe entre les signes en présence un risque de confusion ; que visuellement, la non reprise d'une présentation en partie supérieure d'animaux ou aliments sur trois rangées avec un décor apposé en parie basse et d'un espace vide en partie centrale, l'ajout en position haute des bouteilles d'un macaron « Boire et Manger » ou quelques différences de détails (inversion de profil, mélange de taille des animaux) n'exclut pas l'impression de grande similitude résultant de la reproduction d'une apposition enfantine de dessins, séparés, d'animaux présentant une configuration très proche, ou de mêmes sortes de pâtes, ainsi que le souligne le tableau comparatif d'YDP produit en pièce 88 ; que cette impression est confortée par la reproduction en dessous de ces dessins, de la même manière, sur une ligne en lettres capitales d'imprimerie, de trois éléments verbaux différents pour désigner les animaux ou aliments représentés ; que nonobstant l'ajout du macaron « Boire et Manger » ou la modification de certains éléments verbaux une prononciation scandée de trois appellations aux sonorités différentes avec reprise de termes connus demeure prépondérante au plan phonétique ; qu'enfin intellectuellement, les illustrations renvoient strictement au même concept de présentation ludique de dessins représentant les animaux dénommés dans trois langues (ou de pâtes) avec trois dénominations pour présenter des produits (vins) similaires à ceux désignés par les marques françaises « poulet pollo chicken », « poisson pesce fish » et communautaires « agnelet lamb agnello » « spaghetti pasta tortellini » et « boeuf beef ternera » ; que l'exploitation non autorisée de telles reprises est constitutive d'une contrefaçon par imitation des marques antérieures, dès lors qu'elle est de nature à créer un risque de confusion dans l'esprit du public qui spontanément associera les signes en présence et sera enclin à leur attribuer une origine commune, d'autant qu'ils ont la même fonction qui consiste à permettre d'immédiatement savoir accorder une boisson alcoolique à un type de viande ou à du poisson ou à des pâtes, ce qui n'apparaît pas très habituel dans la présentation de ce type de produit au vu des pièces versées aux débats par l'appelante » ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « sur le contrat de licence : que la société LACHETEAU venant aux droits de la société VINIVAL ne conteste pas ne plus payer les redevances depuis le 01/07/2004 ainsi qu'elle le reconnaît dans son courrier du 05/05/2007 adressé à Monsieur Y... admettant que « le contrat du 15/10/98 est caduc depuis la mise en liquidation judiciaire de la société PLANETE TERROIRS et sa cessation définitive d'activité » ; que le contrat de licence n'a pas été repris par la société PLANETE TERROIRS INTERNATIONAL qui a repris le fonds de commerce ; qu'il convient de prononcer sa résiliation à compter du 01/07/2004 ; que la disparition du contrat de licence qui laissait intacts les droits d'auteur de Monsieur Y... n'autorisait plus la poursuite de l'exploitation sans le paiement à ce dernier de droits de redevance correspondants ; que la société LACHETEAU est ainsi particulièrement malvenue à exciper de l'action éventuelle en contrefaçon d'un tiers (le mandataire de la société liquidée) dont elle dit qu'il pourrait être titulaire de droits ce qui suppose implicitement qu'elle-même n'en a aucun pour s'interdire d'arrêter l'exploitation des marques qu'elle sait pertinemment ne pas lui appartenir ; que dès lors, force est de constater que la société LACHETEAU qui continue à exploiter depuis le 01/07/2004 les marques déposées sans justifier détenir un titre encore valable l'y autorisant se rend nécessairement et incontestablement coupable de contrefaçon à l'égard de Monsieur Y... ; (
) que le fait pour la société LACHETEAU de ne reproduire qu'une partie des dessins inventés par Monsieur Y... (reprise des rangées de modèles de pâtes et non un dessin complet comprenant une assiette de spaghettis ; reprise du seul dessin de l'agneau et non de la haie et des côtelettes etc.) constitue une contrefaçon ; qu'en effet, le dépôt de la marque portant sur un signe complexe (dessin et texte) confère une protection sur la marque dans son ensemble mais également sur tout élément pouvant être dissocié pourvu que cet élément soit distinctif ; qu'en l'espèce, les dessins ont été repris tels quels dans la forme stylisée créée par Monsieur Y... ; que d'autre part, ils font partie du processus mis en oeuvre par l'auteur ; (
) qu'en poursuivant l'exploitation des marques sans autorisation de Monsieur Y..., la société LACHETEAU commet des actes de contrefaçon au préjudice de Monsieur Y... » ;

ALORS, D'UNE PART, QUE l'appréciation globale du risque de confusion doit se fonder sur la comparaison de l'impression d'ensemble spécifique produite par chacun des signes incriminés et chacune des marques invoquées par le demandeur à l'action en contrefaçon ; qu'en procédant à un examen groupé de l'ensemble des signes en présence, quand il lui appartenait de comparer l'impression d'ensemble produite par chacune des marques invoquées par Monsieur Y... et par chacun des signes incriminés, la cour d'appel a violé l'article L. 713-3 du code de la propriété intellectuelle, tel qu'il doit s'interpréter à la lumière de la directive (CE) n° 89/104 rapprochant les législations des Etats membres sur les marques ;

ALORS, D'AUTRE PART, QUE le titulaire d'une marque qui continue, même après la résiliation du contrat de licence, à solliciter régulièrement le paiement de redevances pour l'usage de sa marque et qui indique, quelques années plus tard, à son ancien licencié qu'il « souhaite reprendre la libre disposition de ses signes » à compter d'une certaine date, consent, par là même, nécessairement à l'usage que son ancien licencié fait de sa marque jusqu'à cette dernière date ; qu'en retenant, au contraire, que le fait que Monsieur Y... ait émis des factures correspondant aux redevances jusqu'en mars 2007 et ait indiqué qu'il souhaitait reprendre la libre disposition de ses signes à compter du 1er mai 2007 ne saurait « suffire à caractériser un réel accord jusqu'à cette date d'un usage des marques par la société VINIVAL devenue LACHETEAU », la cour d'appel a violé les articles 1134 du code civil et L. 713-3 du code de la propriété intellectuelle.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir retenu que la société LACHETEAU s'était rendue coupable de parasitisme et d'avoir, en conséquence, condamné la société LACHETEAU à payer à Monsieur Y... les sommes de 300.000 € à titre de provision à valoir sur le préjudice définitif, de 15.000 € au titre du préjudice moral et à la somme totale de 400.000 €, incluant l'indemnité provisionnelle précitée, à titre de réparation de son préjudice économique pour contrefaçon de marque et parasitisme, et d'avoir ordonné une mesure d'interdiction ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE « les premiers juges ont exactement retenu que la société LACHETEAU « a également décliné les dessins sous différentes gammes » et poursuivi le concept avec d'autres dessins ; qu'il n'est pas sérieusement dénié que les déclinaisons « big fish, crustacés, dinde et fromage » du concept préexistant ont été réalisées et la société LACHETEAU ne saurait prétendre qu'il s'agit des mêmes faits que ceux poursuivis au titre de la contrefaçon alors que les motifs ou les gammes sont différents ; qu'en réalité, il s'est approprié une façon innovante de représenter sur une bouteille de vin un dessin, non pas pour en illustrer l'étiquette classiquement apposée sur une tel produit, mais pour décorer la bouteille afin de suggérer de manière purement ludique l'association du breuvage à un type de plat ; que si elle a contribué, lorsqu'elle était licenciée, à accroître la valeur économique de ce concept, il n'en demeure pas moins qu'elle n'ignorait pas qu'il présentait un fort potentiel, même s'il peut être perçu comme infantilisant (selon une étude du CSA) et en l'étendant, elle a en fait cherché à profiter sans bourse délier de son succès économique à son seul avantage et au mépris des intérêts d'YDP ; que c'est à raison que les premiers juges ont retenu que ce comportement fautif, générateur d'un préjudice à compter de la date de résiliation du contrat de licence, devait être sanctionné » ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « la société LACHETEAU a non seulement poursuivi l'exploitation de la marque mais a également décliné les dessins sous différentes gammes en y joignant le nom de Big comme par exemple « Big Fish » pour signaler une gamme supérieure et en déposant, à titre de marque, le dessin d'une dinde dénommé « Dinde, Turkey, Pavo » dans le style stylisé propre à Monsieur Y... et correspondant à la déclinaison trilingue mise en place par l'auteur ; qu'elle reconnaît poursuivre le concept avec d'autres dessins (crustacés, fromage, dinde) ; que le parasitisme consiste en l'utilisation des efforts intellectuels d'autrui générant des économies injustifiées ; qu'en l'espèce, en s'appropriant le concept de Monsieur Y... et en le déclinant sous toutes les formes possibles sans indemniser et/ou associer Monsieur Y..., auteur des marques originales, la société LACHETEAU commet des actes parasitaires qui doivent être sanctionnés » ;

ALORS QUE les idées et concepts sont de libre parcours et ne sont, en conséquence, susceptibles d'aucune appropriation ; que le simple fait de s'inspirer de la prestation d'un concurrent, en reprenant ou « déclinant » une idée ou un concept mis en oeuvre par celui-ci, n'est pas en soi fautif ; qu'en retenant que la société LACHETEAU aurait commis une faute en « s'appropri[ant] une façon innovante de représenter sur une bouteille de vin un dessin, non pas pour en illustrer l'étiquette classiquement apposée sur un tel produit, mais pour décorer la bouteille afin de suggérer de manière purement ludique l'association du breuvage à un type de plat » et en cherchant ainsi à profiter, sans bourse délier, du succès économique de ce concept, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil et le principe constitutionnellement garanti de la liberté du commerce et de l'industrie.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société LACHETEAU à payer à Monsieur Y... la somme de 15.000 € au titre du préjudice moral et à la somme totale de 400.000 €, incluant l'indemnité provisionnelle précitée, à titre de réparation de son préjudice économique pour contrefaçon de marque et parasitisme ;

AUX MOTIFS QU'« aux termes de son rapport du 14 février 2012 l'expert judiciaire a estimé que du 1er juillet 2004 au 31 décembre 2010 :
- le nombre de bouteilles vendues imitant tout ou partie des marques déposées (jusqu'en 2010, pour les mets suivants : Fromage, Crustacés, Dinde, Cochon) était de 646.790 pour un total de bouteilles BOIRE & MANGER de 3.456.186 et de bags in box de 83.362,
- la marge après les coûts directement liés à la fabrication, la plus souvent retenue pour une entreprise lésée ce qui n'est pas le cas en l'espèce, s'élève à 669.112 euros pour les produits BOIRE & MANGER et 132.737 pour les produits approchants (les marges arrières déduites étant évaluées à 990.000 euros) la marge après coûts commerciaux s'élevant respectivement à 431.344 euros et 87.462 euros, et la marge après tous les frais à 67.389 euros et 22.783 euros, marge qui selon lui doit être prise en compte,
- le montant des redevances auxquelles YDP aurait pu prétendre est de 121.894 euros, celle relative aux produits approchants s'élevant à 24.655 euros ;
que les parties ne s'accordent pas sur ces conclusions ; qu'YDP réclame 1.200.000 euros (ce qui représenterait environ, selon lui, un bénéfice annuel de 180.000 euros) en réparation de son préjudice économique, 200.000 euros pour dépréciation portée à ses droits et 50.000 euros pour préjudice moral ; que la société LACHETEAU estime n'être redevable que de redevances contractuelles pour 90.268 euros, le cas échéant en tenant compte des bénéfices réalisés 24.655 euros, voire 64.950 euros et, tout au plus, que d'une indemnisation totale de 200.000 euros (qui aboutirait, selon elle, à un taux de redevance légèrement inférieur à 0,005 euros par col ou habillage) ; qu'elle sollicite la restitution du surplus versé à titre provisionnel et le rejet des demandes pour perte de valeur distincte et préjudice moral ; que, compte tenu des actes de contrefaçon de marques retenus, ainsi que des actes de parasitisme admis, de leur importance, durée et conséquences économiques telles qu'elles résultent du présent arrêt en ce compris l'affaiblissement de la valeur distinctive de la marque du fait des atteintes retenues et des constatations ainsi que de l'analyse comptable de l'expert judiciaire du manque à gagner et des bénéfices réalisés par la société LACHETEAU, et au vu des observations des parties, la cour estime disposer d'éléments suffisant d'appréciation, sans qu'il y ait lieu à nouvelle expertise, pour que l'entier préjudice économique subi par YDP sera réparé par l'allocation d'une somme totale de 400.000 euros à titre de dommages et intérêts (laquelle inclut la somme de 300.000 euros allouée à titre provisionnel en première instance) ; qu'il n'y a pas lieu à allocation d'une autre somme pour dépréciation portée aux droits d'YDP déjà prise en compte ; que le préjudice moral nécessairement subi par le titulaire des droits de marque du fait de l'atteinte à ces marques, à laquelle se sont ajoutés des actes de parasitisme a été justement évalué par les premiers juges à 15.000 euros et le jugement sera confirmé de ce chef » ;

ALORS, D'UNE PART, QUE chacun des chefs de préjudice résultant d'actes de contrefaçon et de parasitisme doit faire l'objet d'une évaluation distincte ; qu'en se bornant à affirmer, de manière particulièrement vague et générale, que « compte tenu des actes de contrefaçon retenus ainsi que des actes de parasitisme admis, de leur importance, durée et conséquences économiques telles qu'elles résultent du présent arrêt, en ce compris l'affaiblissement de la valeur distinctive de la marque du fait des atteintes retenues et des constatations ainsi que de l'analyse comptable de l'expert judiciaire du manque à gagner et des bénéfices réalisés par la société LACHETEAU, et au vu des observations des parties », il y avait lieu d'évaluer le préjudice économique de Monsieur Y... à la somme de 400.000 € et le préjudice moral résultant des actes de contrefaçon de marques et de parasitisme à la somme de 15.000 €, sans procéder à une évaluation distincte des différents chefs de préjudice qu'elle a retenus, résultant, d'une part, des actes de contrefaçon et, d'autre part, des actes de parasitisme, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1382 du code civil et L. 716-14 du code de la propriété intellectuelle ;

ALORS, D'AUTRE PART, EN TOUTE HYPOTHESE, QU'en se bornant à évaluer le préjudice économique résultant des actes de contrefaçon et de parasitisme à la somme de 400.000 €, sans s'expliquer sur le montant du manque à gagner de Monsieur Y... du fait de la commercialisation des bouteilles revêtues des dessins incriminés, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1382 du code civil et L. 716-14 du code de la propriété intellectuelle ;

ALORS, DE TROISIEME PART, QUE le préjudice résultant d'actes de parasitisme ne peut être évalué en considération du profit réalisé par l'auteur du dommage ; qu'en prenant néanmoins en compte les « bénéfices réalisés par la société LACHETEAU » pour évaluer le préjudice de Monsieur Y... résultant des actes de parasitisme, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil ainsi que le principe de la réparation intégrale ;

ALORS, DE QUATRIEME PART, SUBSIDIAIREMENT, QU'en statuant au terme d'une motivation ne permettant pas de s'assurer qu'elle n'a pas pris en considération les bénéfices réalisés par la société LACHETEAU dans l'évaluation du préjudice résultant des actes de parasitisme, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil et du principe de la réparation intégrale ;

ALORS, ENFIN, QUE l'article L. 716-14 du code de la propriété intellectuelle, qui impose aux juges du fond de prendre en considération, pour la fixation des dommages-intérêts alloués au titre de la contrefaçon de marque, les bénéfices réalisés par le contrefacteur, n'est applicable qu'aux faits postérieurs au 30 octobre 2007, date d'entrée en vigueur de la loi n° 2007-1544 du 29 octobre 2007 ; qu'en prenant en considération, dans son évaluation du préjudice résultant des actes de contrefaçon, les bénéfices réalisés par la société LACHETEAU du 1er juillet 2014 au 31 décembre 2010, sans distinguer les périodes antérieure et postérieure à l'entrée en vigueur de la loi n° 2007-1544 du 29 octobre 2007, la cour d'appel a violé les articles 1382 du code civil et L. 716-14 du code de la propriété intellectuelle. Moyens produits au pourvoi incident par la SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat aux Conseils, pour M. Y...

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR, infirmant le jugement, débouté Monsieur Yves Dominique Y... de ses demandes au titre de la contrefaçon de droits d'auteur ;

AUX MOTIFS QUE, sur le droit d'auteur, que pour combattre le grief de contrefaçon de droits d'auteur sur les dessins, par ailleurs déposés à titre de marques, la société Lacheteau fait valoir que YDP ne démontrerait pas sa qualité d'auteur, que ces dessins seraient dénués de l'originalité requise pour prétendre accéder à une protection au titre du droit d'auteur et qu'en tout état de cause elle n'aurait pas reproduit leur combinaison ; mais que la qualité d'auteur appartient, sauf preuve contraire, à celui sous le nom duquel l'oeuvre est divulguée ; que le fait qu'un imprimeur ait également signé le contrat de licence pour la réalisation des étiquettes alors qu'il y est mentionné qu'YDP serait créateur des dessins des trois marques visées dans ce contrat ne saurait démontrer une quelconque ambiguïté sur sa qualité, alors qu'il a par ailleurs déposé à titre de marque sous son nom chacun des dessins en cause ; qu'en l'absence de revendication contraire, YDP est ainsi présumé à l'égard de la société Lacheteau avoir la qualité d'auteur ; en revanche que l'originalité des dessins invoqués, l'action en contrefaçon étant subordonnée à la condition que la création revendiquée soit une oeuvre de l'esprit protégeable au sens de la loi, c'est à dire originale ; qu'à cet égard des accords contractuels ou le versement de redevances sont indifférents ; Que pour conclure à l'originalité de ses dessins YDP se contente d'énoncer qu'aucun élément ne permettrait de dire que la stylisation par lui adoptée appartiendrait au domaine public alors qu'il aurait été retenu le 12 mai 2009 en référé par la cour d'appel de Toulouse qu'ils auraient « une forme stylisée particulière » ; que ce faisant il n'invoque aucune combinaison d'éléments caractéristiques, alors que la société Lacheteau relève explicitement l'absence d'une telle démonstration et soutient que les représentations de poules, poissons, vaches et pâtes versées aux débats (pièce 28) démontreraient l'absence d'originalité de ces dessins ; qu'il ressort de l'examen auquel la Cour s'est livrée, qu'effectivement les dessins revendiqués donnent à voir en partie haute des formes familières de profils de poissons ou de poules, de boeufs en pied de profil ou des têtes de boeufs de face, de moutons de face, de canards se dandinant ou en vol, ou d'aliments tels des côtes d'agneau et de 3 sortes de pâtes, dans une représentation appartenant au fond commun de l'univers de dessins simplifiés ou stylisés, tout comme le décor, situé en-dessous d'un espace vide en partie basse, qui évoque dans un graphisme réaliste l'environnement naturel connu dans lequel chacun des animaux précités évolue habituellement (algues pour les poisons, tas de paille pour les poules, champs d'herbe clôturés pour les boeufs, haies pour les montons, étangs pour les canards), ou qui montre banalement pour le thème des pâtes un plat de spaghetti prêt à être dégusté ; Que le fait de présenter sur fond noir en partie haute sur trois rangées les représentations connues d'animaux ou de pâtes en les disposant parfois en quinconce ou en alternant deux dessins (boeufs et têtes de boeufs, moutons et côtes d'agneau) ou les lignes (canards en vol et se dandinant) et en mentionnant sous ces lignes en lettres capitales d'imprimerie trois noms de pâtes, ou en trois langues ceux correspondant aux animaux représentés) et en plaçant également le décor dans la partie inférieure sur une ligne, en le répétant ou non, confère à la représentation de chacun des dessins un aspect d'ensemble naïf, à la manière de réalisations d'écoliers ; Que si cette combinaison renvoie incontestablement à un genre ludique de nature à séduire, et procède de choix arbitraires, il ne peut pour autant être admis qu'elle traduit un réel effort créatif au sens du droit d'auteur, ni que chacun des dessins porterait ainsi l'empreinte de la personnalité de son auteur ; qu'en conséquence, la décision entreprise sera infirmée en ce qu'elle a admis que les dessins revendiqués bénéficiaient de la protection du droit d'auteur et condamné la société Lacheteau à ce titre, et toutes les demandes fondées sur les dispositions des livres I et II du Code de la propriété intellectuelle seront rejetées ; qu'il sera ajouté que si YDP prétend avoir également créé les évolutions de ces dessins, divulguées dans un article de mai 2003 de la revue Vinicole Internationale, qui reprendraient, selon lui, les formes des animaux reproduites dans ses marques, ces dessins, pour les mêmes motifs que ci-dessus, ne sauraient pas plus bénéficier de la protection au titre du droit d'auteur ;

ALORS, D'UNE PART, QUE toute création est éligible à la protection par le droit d'auteur dès lors qu'elle porte l'empreinte de la personnalité de son auteur c'est-à-dire porte la marque de son apport intellectuel ; que le caractère naïf d'un dessin n'est pas exclusif de son originalité ; qu'en se fondant, pour dénier toute originalité aux dessins de Monsieur Y..., sur le fait que chacun des dessins présentait un aspect d'ensemble naïf, à la manière de réalisations d'écoliers, la cour d'appel qui a statué par un motif inopérant, impropre à écarter l'originalité des dessins de Monsieur Y..., a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 111-1, L. 112-1 et L. 112-2 du code de la propriété intellectuelle ;

ALORS, D'AUTRE PART, QUE la protection légale du droit d'auteur est indépendante du mérite de l'oeuvre ou de toute considération d'ordre artistique ; qu'en affirmant, pour exclure la protection du droit d'auteur, que le fait de présenter sur fond noir en partie haute sur trois rangées les représentations connues d'animaux ou de pâtes en les disposant parfois en quinconce ou en alternant deux dessins (boeufs et têtes de boeufs, moutons et côtes d'agneau) ou les lignes (canards en vol et se dandinant) et en mentionnant sous ces lignes en lettres capitales d'imprimerie trois noms de pâtes, ou en trois langues ceux correspondant aux animaux représentés et en plaçant également le décor dans la partie inférieure sur une ligne, en le répétant ou non, conférait à la représentation de chacun des dessins un aspect d'ensemble naïf, à la manière de réalisations d'écoliers, la cour d'appel qui a porté une appréciation subjective sur le mérite de l'oeuvre, a violé l'article L. 112-1 du code de la propriété intellectuelle ;

ALORS, DE TROISIÈME PART, QU'une oeuvre est originale à la seule condition de porter l'empreinte personnelle de son auteur, peu important le caractère relatif de son originalité ; qu'en se bornant, pour dénier toute originalité aux dessins de Monsieur Y..., à constater que, si la combinaison consistant à présenter sur fond noir en partie haute sur trois rangées les représentations connues d'animaux ou de pâtes en les disposant parfois en quinconce ou en alternant deux dessins (boeufs et têtes de boeufs, moutons et côtes d'agneau) ou les lignes (canards en vol et se dandinant) et en mentionnant sous ces lignes en lettres capitales d'imprimerie trois noms de pâtes, ou en trois langues ceux correspondant aux animaux représentés et en plaçant également le décor dans la partie inférieure sur une ligne, en le répétant ou non, renvoyait incontestablement à un genre ludique de nature à séduire et procédait de choix arbitraires, il ne pouvait pour autant être admis qu'elle traduisait un réel effort créatif au sens du droit d'auteur, ce qui n'était pas pour autant de nature à exclure toute empreinte de la personnalité de son auteur, la cour d'appel a violé les articles L. 111-1, L. 112-1 et L. 112-2 du code de la propriété intellectuelle ;

ALORS, DE QUATRIÈME PART, QU'une combinaison d'éléments banals peut, en elle-même, présenter un caractère original, si une telle combinaison résulte d'un effort créatif portant l'empreinte de la personnalité de son auteur ; que Monsieur Y... avait fait valoir qu'aucun élément produit ne permettait de considérer que la stylisation adoptée dans ses dessins appartenait au domaine public et que la cour d'appel, statuant en référé le 12 mai 2009, avait relevé que les dessins, auxquels était associée la dénomination en trois langues, avaient « une forme stylisée particulière » laquelle donnait en outre « un caractère manifestement distinctif en matière de vin » ; qu'en se bornant, pour débouter Monsieur Y... de ses demandes au titre de la contrefaçon de droits d'auteur, à affirmer que si cette combinaison renvoyait incontestablement à un genre ludique de nature à séduire et procédait de choix arbitraires, il ne pouvait pour étant être admis qu'elle traduisait un réel effort créatif au sens du droit d'auteur, ni que chacun des dessins porterait l'empreinte de la personnalité de son auteur, sans justifier en quoi étaient dépourvus d'originalité les dessins stylisés décorant les bouteilles de vins et représentant des mets – poisson, poulet, boeuf, agneau, canard, pâtes-destinés à faciliter le choix du vin en l'associant aux mets qu'il accompagne, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 111-1, L. 112-1 et L. 112-2 du code de la propriété intellectuelle.

SECOND MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR, infirmant le jugement, dit n'y avoir lieu à transfert de marques ;

AUX MOTIFS QUE Monsieur Y... demande de confirmer le transfert de marques prononcé à son profit, soutenant que le dépôt effectué par la société Lacheteau présenterait un caractère frauduleux, serait dépourvu de caractère distinctif et porterait atteinte à ses droits de marques antérieurs, soutenant qu'il aurait employé les appellations préalablement à leur dépôt et que celles-ci parasiteraient ses marques dont elles seraient devenues 'indissociables' ; qu'il demande subsidiairement d'être autorisé à utiliser les marques adverses et plus subsidiairement de prononcer leur nullité ; que la société Lacheteau qui relève que les marques en cause ne sont pas exactement identifiées dans le dispositif du jugement s'oppose à ces demandes, faisant valoir qu'en réalité les premiers juges auraient statué ultra petita, que la preuve d'une fraude ne serait pas rapportée, pas plus que d'une reproduction ou imitation des signes déposés par Monsieur Y... et que les marques auraient été déposées de bonne foi plus de trois ans avant la demande d'utilisation de ces marques (interprétée par les premiers juges comme une demande de transfert) ; qu'il sera relevé que la société Lacheteau justifie avoir enregistré dès le 9 août 1999 une marque française verbale 'Boire et Manger' pour les boissons alcooliques (à l'exception des bières) et que dans son exploit introductif d'instance du 29 avril 2008 Monsieur Y... ne formulait effectivement aucune prétention quant à des marques verbales enregistrées par la société Lacheteau les 18 février 2003 et 3 mai 2005 (étant relevé qu'en réalité quatre marques verbales ont été enregistrées à ces dates ainsi que précisé par la société Lacheteau en page 66 de ses écritures) ; que ce n'est qu'en réponse à une demande reconventionnelle d'interdiction d'usage de deux de ces marques que Monsieur Y... a réagi, alors que manifestement plus de trois ans s'étaient écoulés depuis la publication des demandes d'enregistrement ; qu'il n'est par ailleurs nullement démontré que ces dépôts caractériseraient une fraude, alors que la société Lacheteau bénéficiait déjà d'une dénomination similaire quelque mois après la signature du contrat de licence des marques de Monsieur Y... ; qu'enfin les appellations incriminées ne désignent nullement les marques semi figuratives de ce dernier, quoique relevant de la même idée 'd'accord mets/vins', laquelle peut être autrement formulée, et n'en constituent pas la dénomination nécessaire ; qu'en l'absence de fraude caractérisée, la demande de transfert s'avère prescrite et la décision entreprise sera infirmée sur ce point ; que le simple fait que les dénominations incriminées aient été utilisées pour l'exploitation de bouteilles jugées contrefaisantes ne saurait suffire à justifier une mesure d'autorisation de leur utilisation alors que la société Lacheteau détient sans fraude des droits de propriété sur ces appellations ; qu'il n'y a pas plus lieu à nullité de ces marques pour fraude, ni pour absence de caractère distinctif, étant observé qu'il ne saurait être sérieusement soutenu que les expressions en cause seraient dépourvues d'un tel caractère pour les produits désignés, ou par rapport aux marques de Monsieur Y... qui a choisi un tout autre concept pour évoquer une association mets/boissons alcooliques, savoir, non pas une dénomination en forme de slogan par la liaison de deux verbes, mais l'adjonction à des noms particuliers d'animaux ou d'aliments la figuration stylisée de ces derniers ce qui exclut tout risque de confusion ; que toutes les demandes de Monsieur Y... au titre des marques adverses seront, en conséquence, rejetées ;

ALORS, D'UNE PART, QUE le transfert de marques peut être demandé, à titre de sanction, indépendamment d'une action en revendication de marque pour contrefaçon ; que Monsieur Y... faisait valoir que le transfert des marques « Boire & Manger » et « Drink and Eat » sollicité à son profit était une sanction prévue par l'article L. 716-15 du code de la propriété intellectuelle qui autorisait le juge à prononcer la confiscation au profit de la partie lésée des marques qui avaient été l'instrument ayant servi à faciliter les faits de contrefaçon mais qu'il n'avait jamais entendu revendiquer la paternité des marques litigieuses ; qu'en retenant, pour débouter Monsieur Yves Dominique Y... de sa demande de transfert des marques « Boire & Manger » et « Drink and Eat » à son profit, qu'il n'était pas démontré que les dépôts effectués par la société Lacheteau caractérisaient une fraude et qu'en l'absence de fraude caractérisée, la demande de transfert s'avérait prescrite, cependant que Monsieur Y... n'avait nullement entendu revendiquer la paternité des marques « Boire & Manger » et « Drink and Eat » mais avait uniquement demandé que la société Lacheteau soit condamnée, à titre de sanction, à transférer ces marques à son profit, la cour d'appel a violé l'article L. 716-15 du code de la propriété intellectuelle, ensemble l'article L. 712-6 du même code, par fausse application ;

ALORS, D'AUTRE PART, QUE Monsieur Y... faisait valoir que la société Lacheteau avait apposé les marques « Boire & Manger » et « Drink and Eat » déposées par ses soins sur les marques de Monsieur Y..., tant est si bien que ces marques étaient devenues indissociables, les marques nominatives déposées par la société Lacheteau n'étant que la dénomination des marques figuratives de Monsieur Y... et que, si ces marques, telles qu'elles étaient déposées, étaient des marques nominatives, telles qu'elles étaient utilisées, c'est-à-dire purement et simplement incorporées aux marques de Monsieur Y..., ne correspondaient nullement aux dépôts initialement effectués par la société Lacheteau (conclusions d'appel de Monsieur Y... p. 30) ; qu'en se bornant à retenir que le simple fait que les dénominations incriminées aient été utilisées pour l'exploitation de bouteilles jugées contrefaisantes ne saurait suffire à justifier une mesure d'autorisation de leur utilisation alors que la société Lacheteau détenait sans fraude des droits de propriété sur ces appellations, sans répondre aux conclusions dirimantes de Monsieur Y... faisant valoir que les marques nominatives « Boire & Manger » et « Drink and Eat » déposées par la société Lacheteau avaient été purement et simplement incorporées aux marques de Monsieur Y... de telle sorte qu'elles ne correspondaient nullement aux dépôts initialement effectués, ce qui justifiait que Monsieur Y... utilise ces marques qui n'étaient que la dénomination de ses propres marques, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. ECLI:FR:CCASS:2017:C100789
Retourner en haut de la page