Cour de cassation, civile, Chambre civile 3, 24 mai 2017, 16-15.750, Publié au bulletin
Cour de cassation, civile, Chambre civile 3, 24 mai 2017, 16-15.750, Publié au bulletin
Cour de cassation - Chambre civile 3
- N° de pourvoi : 16-15.750
- ECLI:FR:CCASS:2017:C300610
- Publié au bulletin
- Solution : Cassation
Audience publique du mercredi 24 mai 2017
Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, du 26 janvier 2016- Président
- M. Chauvin
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu les articles 17, c, et 19 de la loi du 6 juillet 1989 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 26 janvier 2016) et les pièces de la procédure, que la société Les résidences de la région parisienne, propriétaire d'un appartement donné en location à M. et Mme Y..., au titre du régime des logements à loyer moyen, leur a adressé une proposition de renouvellement du bail à compter du 1er octobre 2013, moyennant un loyer réévalué en application des articles précités ;
Attendu que, pour fixer le loyer du bail renouvelé, l'arrêt retient que la valeur moyenne du prix des loyers des cinq appartements de comparaison retenus est de 995,47 euros et qu'en conséquence le prix du loyer actuel du logement des époux Y... est manifestement sous-évalué ;
Qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si les références produites concernaient ou non des logements soumis au même régime locatif que l'appartement en cause, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 26 janvier 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée ;
Condamne la société les Résidences de la région parisienne aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société les Résidences de la région parisienne et la condamne à verser la somme de 3 000 euros à M. et Mme Y... ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre mai deux mille dix-sept.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Le Griel, avocat aux Conseils, pour M. et Mme Y...
Le pourvoi fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir rejeté les demandes de M. et Mme Y... aux fins de constater la nullité de l'offre de renouvellement du bail contenant proposition de nouveau loyer, rejeté l'ensemble de leurs demandes et fixé à la somme de 995,47 € par mois le loyer à compter du renouvellement du bail le 1er octobre 2013,
Aux motifs que le loyer de M. et Mme Y..., pour un appartement de 61 ou 58,8 m2, était en dernier lieu de 367,53 € ; que la société Les Résidences de la Région Parisienne a fourni dans son assignation 6 éléments de comparaison, actualisés par 4 références supplémentaires lors de l'audience devant le tribunal d'instance ; que ces dix références, situées à Sèvres, portent toutes sur des 3 pièces et d'une surface de 48 à 70 m2 ; que les surfaces trop éloignées étant écartées, seront prises en considération les 6 références portant sur des surfaces comprises entre 58 et 66 m2, dont 5 portent sur des logements proches de l'appartement de M. et Mme Y... ; que, s'agissant des autres critères prendre en considération pour les 5 appartements retenus, les critères d'environnement et de standing vont de moyen ou bon à exceptionnellement très bon, ce qui correspond à l'état de l'appartement de M. et Mme Y... ; que les autres critères sont respectés ; que des références incomplètes, c'est-à-dire comportant moins de références que ce qui est exigé, peuvent être validées ; que la société Les Résidences de la Région Parisienne a fourni 5 références correspondant aux exigences légales sans qu'un grief particulier soit allégué de ce chef par M. et Mme Y... ; qu'au vu de l'ensemble des critères exigés par la loi, il apparaît donc que la demande de la société Les Résidences de la Région Parisienne en fixation de loyer réévalué est recevable et qu'il n'y a pas lieu de déclarer nulle son offre de renouvellement ; que les prix des loyers de ces 5 appartements étant de 936,86 €, 964,96 €, 1 080 €, 936 € et 1 059,57 €, la valeur moyenne est de 995,47 € ; qu'il apparaît que celui actuel du logement de M. et Mme Y... est manifestement sous-évalué ;
1° Alors que sous le régime de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989, il ne peut pas y avoir de réévaluation du loyer lors du renouvellement du contrat de bail, sauf si le loyer en cours est manifestement sous-évalué, ce que le bailleur doit établir par référence aux loyers habituellement constatés dans le voisinage pour des logements comparables, dans les conditions définies aux articles 17 c) et 19 de ce texte et conformément aux critères du décret n° 90-780 du 31 août 1990 ; que M. et Mme Y..., rappelant que la comparabilité des références ainsi produites reposait sur l'unicité du régime juridique locatif applicable à l'ensemble des éléments comparés, avait soutenu que, tandis que leur bail avait été conclu dans le cadre du régime des logements à loyer moyen, la société Les Résidences de la Région Parisienne, bailleur, ne justifiait pas que les références qu'elle proposait fussent soumises au même régime ; que les pièces produites par cette dernière, émanant de l'OLAP, ne l'établissaient pas davantage ; qu'en faisant dès lors droit à la demande de la société Les Résidences de la Région Parisienne, sans avoir recherché, comme elle y était invitée, si l'ensemble des références examinées relevaient du même régime locatif que l'appartement de M. et Mme Y..., la cour a privé sa décision de base légale au regard des articles 17 c) et 19 de la loi n° 89-42 du 6 juillet 1989 ;
2° Alors que le juge ne peut, pour justifier sa décision, se fonder sur des motifs dont la généralité ne permet pas à la Cour de cassation d'exercer son contrôle sur la conformité de la décision attaquée aux règles de droit ; qu'en l'espèce, M. et Mme Y... avaient notamment soutenu que les références proposées par le bailleur ne permettaient de vérifier ni l'unicité du régime locatif entre les appartements comparés, ni, comme l'impose le décret n° 90-780 du 31 août 1990, l'époque de construction des immeubles ou la qualité des équipements desdits appartements ; que, pour faire droit à la demande du bailleur, la cour s'est bornée à retenir que, outre les critères tirés de la localisation, de la surface, de la proximité, de l'environnement et du standing considérés, « les autres critères » légaux et réglementaires «sont respectés » ; qu'en se déterminant ainsi, sans avoir procédé à l'examen d'aucun de ces autres critères, dont la nature est d'ailleurs indéterminée, la cour a violé les articles 17 c) et 19 de la loi n° 89-42 du 6 juillet 1989, ensemble l'article 455 du code de procédure civile.ECLI:FR:CCASS:2017:C300610
Sur le moyen unique :
Vu les articles 17, c, et 19 de la loi du 6 juillet 1989 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 26 janvier 2016) et les pièces de la procédure, que la société Les résidences de la région parisienne, propriétaire d'un appartement donné en location à M. et Mme Y..., au titre du régime des logements à loyer moyen, leur a adressé une proposition de renouvellement du bail à compter du 1er octobre 2013, moyennant un loyer réévalué en application des articles précités ;
Attendu que, pour fixer le loyer du bail renouvelé, l'arrêt retient que la valeur moyenne du prix des loyers des cinq appartements de comparaison retenus est de 995,47 euros et qu'en conséquence le prix du loyer actuel du logement des époux Y... est manifestement sous-évalué ;
Qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si les références produites concernaient ou non des logements soumis au même régime locatif que l'appartement en cause, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 26 janvier 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée ;
Condamne la société les Résidences de la région parisienne aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société les Résidences de la région parisienne et la condamne à verser la somme de 3 000 euros à M. et Mme Y... ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre mai deux mille dix-sept.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Le Griel, avocat aux Conseils, pour M. et Mme Y...
Le pourvoi fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir rejeté les demandes de M. et Mme Y... aux fins de constater la nullité de l'offre de renouvellement du bail contenant proposition de nouveau loyer, rejeté l'ensemble de leurs demandes et fixé à la somme de 995,47 € par mois le loyer à compter du renouvellement du bail le 1er octobre 2013,
Aux motifs que le loyer de M. et Mme Y..., pour un appartement de 61 ou 58,8 m2, était en dernier lieu de 367,53 € ; que la société Les Résidences de la Région Parisienne a fourni dans son assignation 6 éléments de comparaison, actualisés par 4 références supplémentaires lors de l'audience devant le tribunal d'instance ; que ces dix références, situées à Sèvres, portent toutes sur des 3 pièces et d'une surface de 48 à 70 m2 ; que les surfaces trop éloignées étant écartées, seront prises en considération les 6 références portant sur des surfaces comprises entre 58 et 66 m2, dont 5 portent sur des logements proches de l'appartement de M. et Mme Y... ; que, s'agissant des autres critères prendre en considération pour les 5 appartements retenus, les critères d'environnement et de standing vont de moyen ou bon à exceptionnellement très bon, ce qui correspond à l'état de l'appartement de M. et Mme Y... ; que les autres critères sont respectés ; que des références incomplètes, c'est-à-dire comportant moins de références que ce qui est exigé, peuvent être validées ; que la société Les Résidences de la Région Parisienne a fourni 5 références correspondant aux exigences légales sans qu'un grief particulier soit allégué de ce chef par M. et Mme Y... ; qu'au vu de l'ensemble des critères exigés par la loi, il apparaît donc que la demande de la société Les Résidences de la Région Parisienne en fixation de loyer réévalué est recevable et qu'il n'y a pas lieu de déclarer nulle son offre de renouvellement ; que les prix des loyers de ces 5 appartements étant de 936,86 €, 964,96 €, 1 080 €, 936 € et 1 059,57 €, la valeur moyenne est de 995,47 € ; qu'il apparaît que celui actuel du logement de M. et Mme Y... est manifestement sous-évalué ;
1° Alors que sous le régime de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989, il ne peut pas y avoir de réévaluation du loyer lors du renouvellement du contrat de bail, sauf si le loyer en cours est manifestement sous-évalué, ce que le bailleur doit établir par référence aux loyers habituellement constatés dans le voisinage pour des logements comparables, dans les conditions définies aux articles 17 c) et 19 de ce texte et conformément aux critères du décret n° 90-780 du 31 août 1990 ; que M. et Mme Y..., rappelant que la comparabilité des références ainsi produites reposait sur l'unicité du régime juridique locatif applicable à l'ensemble des éléments comparés, avait soutenu que, tandis que leur bail avait été conclu dans le cadre du régime des logements à loyer moyen, la société Les Résidences de la Région Parisienne, bailleur, ne justifiait pas que les références qu'elle proposait fussent soumises au même régime ; que les pièces produites par cette dernière, émanant de l'OLAP, ne l'établissaient pas davantage ; qu'en faisant dès lors droit à la demande de la société Les Résidences de la Région Parisienne, sans avoir recherché, comme elle y était invitée, si l'ensemble des références examinées relevaient du même régime locatif que l'appartement de M. et Mme Y..., la cour a privé sa décision de base légale au regard des articles 17 c) et 19 de la loi n° 89-42 du 6 juillet 1989 ;
2° Alors que le juge ne peut, pour justifier sa décision, se fonder sur des motifs dont la généralité ne permet pas à la Cour de cassation d'exercer son contrôle sur la conformité de la décision attaquée aux règles de droit ; qu'en l'espèce, M. et Mme Y... avaient notamment soutenu que les références proposées par le bailleur ne permettaient de vérifier ni l'unicité du régime locatif entre les appartements comparés, ni, comme l'impose le décret n° 90-780 du 31 août 1990, l'époque de construction des immeubles ou la qualité des équipements desdits appartements ; que, pour faire droit à la demande du bailleur, la cour s'est bornée à retenir que, outre les critères tirés de la localisation, de la surface, de la proximité, de l'environnement et du standing considérés, « les autres critères » légaux et réglementaires «sont respectés » ; qu'en se déterminant ainsi, sans avoir procédé à l'examen d'aucun de ces autres critères, dont la nature est d'ailleurs indéterminée, la cour a violé les articles 17 c) et 19 de la loi n° 89-42 du 6 juillet 1989, ensemble l'article 455 du code de procédure civile.