Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 22 mars 2017, 15-23.103, Inédit
Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 22 mars 2017, 15-23.103, Inédit
Cour de cassation - Chambre sociale
- N° de pourvoi : 15-23.103
- ECLI:FR:CCASS:2017:SO00564
- Non publié au bulletin
- Solution : Cassation partielle
Audience publique du mercredi 22 mars 2017
Décision attaquée : Cour d'appel de Basse-Terre, du 18 mai 2015- Président
- Mme Lambremon (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme [W] a été engagée le 7 mai 2007 en qualité de comptable par la société Manioukani Spa international ; que le 7 avril 2011 Mme [W] a saisi le conseil de prud'hommes de Basse-Terre aux fins de voir prononcer la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts exclusifs de l'employeur ; que le 27 avril 2011, l'employeur a annoncé la tenue d'élections de délégués du personnel ; que le 7 juin 2011, le syndicat Union des travailleurs de la santé -UGTG, a communiqué la liste de ses candidats dont Mme [W] ; que celle-ci a été licenciée pour faute grave par lettre du 22 juin 2011 ; que par jugement du 3 novembre 2011, le tribunal d'instance de Basse-Terre a déclaré recevable la candidature de l'intéressée aux élections professionnelles et annulé lesdites élections ; que le 14 décembre 2011, la salariée a sollicité sa réintégration au poste de comptable, à laquelle l'employeur s'est opposé ; que devant la juridiction prud'homale, celle-ci a demandé en dernier lieu de voir prononcer la nullité de son licenciement et sa réintégration, ainsi que le paiement de rappels de salaire, de dommages-intérêts et indemnités de rupture ;
Sur le premier moyen, ci-après annexé :
Attendu que l'employeur est sans intérêt à critiquer le rejet de la demande d'annulation du jugement par la cour d'appel dès lors que cette dernière, saisie de l'entier litige en vertu de l'effet dévolutif de l'appel prévu par l'article 562, alinéa 2, du code de procédure civile, a statué sur le fond du litige par des motifs propres ; que le moyen est irrecevable ;
Mais sur le troisième moyen :
Vu l'article L. 2411-7 du code du travail ;
Attendu que pour dire nul le licenciement, l'arrêt retient que c'est par lettre signifiée par acte huissier le 7 juin 2011 à 14h45, remis en main propre à Mme [W], que l'employeur a notifié à celle-ci une convocation à l'entretien préalable en vue d'un licenciement pour faute grave, ainsi qu'une mise à pied conservatoire ; qu'Il ressort des mentions figurant sur la lettre du 7 juin 2011 par laquelle le syndicat UTS -UGTG a adressé à l'employeur la liste de ses candidats en vue des élections du délégué du personnel, sur laquelle figure Mme [W], que ce courrier a été envoyé à M. [Q] par télécopie le 7 juin 2011 à 12h37, qu'il s'ensuit que l'employeur a engagé la procédure de licenciement, après avoir reçu la candidature de l'intéressée aux élections de délégués du personnel ;
Mais attendu que pour l'application de l'article L. 2411-7, c'est au moment de l'envoi de la convocation à l'entretien préalable au licenciement que l'employeur doit avoir connaissance de la candidature d'un salarié aux élections professionnelles ;
Qu'en statuant ainsi sans constater que le dépôt de la liste des candidatures était antérieur à l'engagement de la procédure de licenciement résultant de la remise à l'huissier de la lettre de convocation à l'entretien préalable, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les deuxième et quatrième moyens :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déclare nul le licenciement de Mme [W], d'ordonner sa réintégration et de condamner la société Manioukani à lui verser la somme de 110 660 euros à titre d'indemnité correspondant au montant de la rémunération que celle-ci aurait perçue depuis son licenciement, l'arrêt rendu le 18 mai 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Basse-Terre ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Basse-Terre, autrement composée ;
Condamne Mme [W] aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, signé et prononcé par Mme Slove, conseiller le plus ancien non empêché, en remplacement du président empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile, en son audience publique du vingt-deux mars deux mille dix-sept.MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat aux Conseils, pour la société Manioukani Spa international.
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté la société MANIOUKANI de sa demande de nullité du jugement, d'AVOIR déclaré nul le licenciement de Madame [W], d'AVOIR ordonné sa réintégration à son poste avec maintien de tous ses avantages, sous astreinte de 250 euros par jour de retard, et d'AVOIR condamné l'exposante à verser à Madame [W] la somme de 110.660 euros à titre d'indemnité correspondant au montant de la rémunération que celle-ci aurait perçue depuis son licenciement ;
AUX MOTIFS QUE « Sur la demande de nullité du jugement :contrairement à ce qu'affirme la Société MANIOUKANI au soutien de sa demande de nullité du jugement déféré, celui-ci comporte non seulement un exposé des prétentions et moyens de la salariée, mais comporte également un rappel du contenu des conclusions de l'employeur, en indiquant notamment que Mme [W] avait décidé de limiter son activité dans l'entreprise en n'intervenant plus que sur les comptes de la S.A. MANIOUKANI et en ne tenant pas compte de la comptabilité des autres entreprises du groupe. Par ailleurs si la Société MANIOUKANI entendait invoquer une cause de récusation à l'égard de l'un des conseillers prud'hommes composant le bureau de jugement, il lui appartenait, en application des dispositions de l'article 342 du code de procédure civile, de le faire avant la clôture des débats devant les premiers juges. Enfin une 'mauvaise application des règles de droit', reposant sur des dispositions contradictoires dans le dispositif du jugement, si elle peut donner lieu à réformation en cause d'appel, ne saurait justifier la nullité du jugement. En conséquence la demande de nullité du jugement sera rejetée » ;
1. ALORS QUE toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, par un tribunal impartial ; que l'exigence d'impartialité s'impose aux juridictions à l'encontre desquelles le grief peut être invoqué indépendamment de la mise en oeuvre des procédures de récusation ou de renvoi, dès lors qu'il ne relève pas d'un des cas visés par l'article L 1457-1 du code du travail ; qu'en l'espèce, la société MANIOUKANI avait fait valoir que l'un des conseillers prud'hommes ayant participé à la formation de jugement avait été salarié, membre du comité d'entreprise d'une société dirigée par l'actuel représentant légal de la société MANIOUKANI (Monsieur [Q]), que des conflits très durs avaient opposé ledit comité d'entreprise et la direction de la société, et que ce conseiller prud'homal avait, à l'époque, rédigé un courrier, versé aux débats, aux termes duquel il qualifiait Monsieur [Q], notamment, de « despote naviguant en eaux troubles dans l'égocentrisme et la tyrannie », de « chacal qui n'attend rien d'autre que sa proie lui tombe entre les dents » ; que ces éléments, qui ne relevaient d'aucun des cas visés par l'article L.1457-1 du code du travail, étaient de nature à faire naître un doute légitime sur l'impartialité du conseiller prud'homal ; que, pour écarter la demande de nullité du jugement fondée sur la méconnaissance de l'exigence d'impartialité, la cour d'appel a retenu que la société MANIOUKANI aurait dû former une demande de récusation et y procéder avant la clôture des débats ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article L.1457-1 du Code du travail, ensemble l'article 6, §1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
2. ET ALORS subsidiairement QUE toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, par un tribunal impartial ; que si la récusation ne peut être demandée après la clôture des débats, encore faut-il que la partie ait connaissance de la cause de récusation avant ladite clôture ; qu'en opposant à l'exposante qu'elle aurait dû former une demande de récusation en temps utile, sans constater que la société MANIOUKANI avait été informée de la composition de la formation jugement avant la clôture des débats, la cour d'appel a violé les articles L. 1457-1 et R. 1457-1 du code du travail, 342 du code de procédure civile, et 6, §1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION (SUBSIDIAIRE)
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR déclaré nul le licenciement de Madame [W], d'AVOIR ordonné sa réintégration à son poste avec maintien de tous ses avantages, sous astreinte de 250 euros par jour de retard, et d'AVOIR condamné l'exposante à verser à Madame [W] la somme de 110.660 euros à titre d'indemnité correspondant au montant de la rémunération que celle-ci aurait perçue depuis son licenciement ;
AUX MOTIFS QUE « (…) Sur les demandes de nullité du licenciement et de réintégration. La cour constate que si lors de la saisine initiale du conseil de prud'hommes, Mme [W] a sollicité le prononcé de la résiliation judiciaire de son contrat de travail, elle a par la suite, tant devant les premiers juges que devant la cour, demandé à titre principal que soit déclaré nul son licenciement et que soit ordonnée sa réintégration sous astreinte, la demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail n'étant plus formée qu'à titre subsidiaire. (…) il sera fait droit à la demande de nullité du licenciement, mais aussi à la demande subséquente de réintégration de Mme [W]. Sur les demandes pécuniaires de Mme [W] : Le salarié protégé, licencié sans autorisation préalable, qui demande sa réintégration, est fondé à obtenir le versement d'une indemnité égale au montant de la rémunération qu'il aurait dû percevoir jusqu'à sa réintégration. Il n'y a pas lieu de déduire de cette indemnité les revenus qu'il a pu percevoir de tiers au cours de cette période. Sur la base d'un salaire brut mensuel de 2515 € revendiqué par Mme [W], dont le montant n'est pas contesté par l'employeur, et ressortant de la fiche de paie de janvier 2011 déjà produite devant les premiers juges, il sera alloué à Mme [W] la somme de 110'660 € qu'elle sollicite au titre des salaires qu'elle aurait dû percevoir depuis son départ, de juillet 2011 à mars 2015 » ;
1. ALORS QUE le juge tranche le litige conformément aux règles de droit qui sont applicables ; que lorsqu'un salarié a demandé la résiliation judiciaire de son contrat de travail et que son employeur le licencie ultérieurement, le juge doit d'abord rechercher si la demande de résiliation était justifiée, et c'est seulement dans le cas contraire qu'il peut se prononcer sur le licenciement notifié par l'employeur ; qu'ainsi, lorsque le salarié, licencié après avoir demandé la résiliation judiciaire de son contrat, souhaite que la contestation de son licenciement soit, en toute hypothèse, examinée, il doit renoncer à sa demande en résiliation judiciaire ; qu'en l'espèce, il résulte des constatations de la cour d'appel que Madame [W] a demandé la résiliation de son contrat de travail le 7 avril 2011, et a été licenciée le 22 juin 2011 ; que, pour prononcer la nullité de ce licenciement, elle a retenu que la demande en résiliation judiciaire, bien que formée antérieurement à ce dernier, l'avait été à titre subsidiaire ; qu'il s'inférait de ces constatations que la salariée n'avait pas renoncé à sa demande en résiliation judiciaire ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article 12 du code de procédure civile et l'article L. 1231-1 du code du travail ;
2. ALORS QU'en outre, nul ne peut se contredire au détriment d'autrui ; qu'en statuant comme elle l'a fait, alors que, non seulement la salariée n'avait pas renoncé à sa demande en résiliation mais, en outre, demandait à ce que la nullité de son contrat soit sanctionnée par une réintégration, la cour d'appel a violé le principe de l'estoppel, ensemble l'article 12 du code de procédure civile et l'article L. 1231-1 du code du travail.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION (SUBSIDIAIRE)
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR déclaré nul le licenciement de Madame [W], d'AVOIR ordonné sa réintégration à son poste avec maintien de tous ses avantages, sous astreinte de 250 euros par jour de retard, et d'AVOIR condamné l'exposante à verser à Madame [W] la somme de 110.660 euros à titre d'indemnité correspondant au montant de la rémunération que celle-ci aurait perçue depuis son licenciement ;
AUX MOTIFS QUE « (…) Sur les demandes de nullité du licenciement et de réintégration (…). Selon les dispositions des articles L. 2411-3 et L. 2411-7 du code du travail, l'autorisation de l'inspecteur du travail est requise pendant six mois pour le licenciement d'un candidat aux élections de délégués du personnel, à partir de la publication des candidatures, la durée de six mois courant à partir de l'envoi par lettre recommandée de la candidature à l'employeur. Cette autorisation est également requise lorsque la lettre du syndicat notifiant à l'employeur la candidature aux fonctions de délégués du personnel a été reçue par l'employeur ou lorsque le salarié a fait la preuve que l'employeur a eu connaissance de l'imminence de sa candidature, avant que le candidat ait été convoqué à l'entretien préalable au licenciement. En l'espèce, par courrier du 27 avril 2011, le gérant de la Société MANIOUKANI fait savoir aux organisations syndicales que la direction envisage de procéder à l'élection des délégués du personnel pour l'ensemble de l'unité économique et sociale formée par les trois établissements implantés à la Marina [Établissement 1], commune de [Localité 1], à savoir la Société MANIOUKANI, la SARL BANARI et la SARL KALANA, la date envisagée pour le premier tour de scrutin étant fixée au mardi 14 juin 2011. Il est précisé dans ce courrier que l'effectif de l'unité s'élevant à 43 salariés, le nombre de délégués à élire sera de deux titulaires et deux suppléants. La direction invitait les organisations syndicales à établir la liste de leurs candidats et à prendre contact avec M. [Q], gérant des trois entreprises de l'unité, afin de négocier le protocole préélectoral le 25 mai 2011 à la chambre de commerce et d'industrie de Basse-Terre. Au cas où aucune organisation syndicale ne se manifesterait, la direction fixerait les conditions de déroulement des opérations électorales et les communiquerait au personnel. Par courrier du 7 juin 2011, adressé par télécopie le même jour au gérant de la Société MANIOUKANI, M. [Q], le syndicat Union des Travailleurs de la Santé-U.G.T.G., faisait savoir à ce dernier que, conformément au protocole d'accord préélectoral du 30 mai 2011, il lui était communiqué la liste des candidats qu'il présentait en vue des élections des délégués du personnel prévues le 14 juin dans le cadre de l'unité économique et sociale des sociétés MANIOUKANI, BANARI et KALANA, cette liste comportant comme titulaire le nom de Mme [W] pour le collège I. Par jugement du 3 novembre 2011, le tribunal d'instance de Basse-Terre statuant en matière de contentieux électoral professionnel, déclarait recevable la candidature de Mme [W] en qualité de candidate U.T.S.-U.G.T.G. aux élections professionnelles de l'UES Société MANIOUKANI, SARL KALANA et SARL BANARI, mais annulait les élections tendant à la désignation de délégués du personnel qui s'étaient déroulées les 14 et 29 juin 2011, lesdites élections devant être réitérées conformément au protocole préélectoral et aux dispositions légales. À la suite de ce jugement Mme [W], par lettre datée du 14 décembre 2011, signifiée par acte huissier le 28 décembre 2011, demandait au président-directeur général de la Société MANIOUKANI, sa réintégration au poste de comptable qu'elle occupait au sein de la Société MANIOUKANI et faisait savoir qu'elle se tenait à l'entière disposition de son employeur pour toute réintégration aux date et heure qu'il souhaitait. Par lettre recommandée avec avis de réception, en date du 2 janvier 2012, l'employeur faisait savoir à Mme [W] qu'il n'entendait pas donner de suite favorable à sa demande de réintégration. Il faisait valoir notamment qu'il n'avait eu connaissance de sa candidature aux élections de délégués du personnel que postérieurement à la signification par huissier de la lettre convoquant la salariée à un entretien préalable en vue d'une procédure de licenciement. Il y a lieu de préciser qu'en déclarant recevable la candidature de Mme [W] en qualité de candidate UTS-UGTG, le juge instance a statué sur la contestation opposée par la Société MANIOUKANI qui d'une part entendait voir déclarer irrecevable la liste déposée par ce syndicat, pour avoir été déposée par télécopie au siège de la seule Société MANIOUKANI, en violation des dispositions du protocole et en dehors du délai imparti, et en l'absence de signature des candidats présentés, et d'autre part soutenait que la candidature de Mme [W] était frauduleuse, et qu'elle avait été proposée dans le seul but de faire échec à une procédure de licenciement, alors qu'elle avait antérieurement saisi le conseil de prud'hommes aux fins d'obtenir la résiliation de son contrat de travail. Il y a lieu de rappeler que lorsque l'employeur engage la procédure de licenciement avant d'avoir connaissance d'une candidature ou de son imminence, le salarié, même s'il est élu, ne bénéficie pas du statut protecteur au titre de la procédure en cours. En l'espèce, c'est par lettre signifiée par acte huissier le 7 juin 2011 à 14h45, remis en main propre à Mme [W], que l'employeur a notifié à celle-ci une convocation à l'entretien préalable en vue d'un licenciement pour faute grave, ainsi qu'une mise à pied conservatoire. Il ressort des mentions figurant sur la lettre du 7 juin 2011 par laquelle le syndicat U.T.S. -U.G.T.G. a adressé à l'employeur la liste de ses candidats en vue des élections du délégué du personnel, sur laquelle figure Mme [W], que ce courrier a été envoyé à M. [P] [Q] par télécopie le 7 juin 2011 à 12h37. Il résulte de ces constatations, que contrairement à ce que soutient l'employeur, celui-ci a engagé la procédure de licenciement, après avoir reçu la candidature de Mme [W] aux élections de délégués du personnel. En conséquence cette dernière est fondée à se prévaloir du statut protecteur édicté par l'article L. 2411-1 du code du travail ; Si l'employeur invoque une faute grave à l'encontre de Mme [W], alors que le licenciement de celle-ci est nul, en revanche il n'oppose aucun moyen de fait ou de droit relatif à une quelconque impossibilité de procéder à la réintégration de Mme [W], ne faisant pas état notamment d'une éventuelle incompatibilité du comportement de Mme [W] avec la réintégration dans son poste. En conséquence, non seulement il sera fait droit à la demande de nullité du licenciement, mais aussi à la demande subséquente de réintégration de Mme [W]. Sur les demandes pécuniaires de Mme [W] : Le salarié protégé, licencié sans autorisation préalable, qui demande sa réintégration, est fondé à obtenir le versement d'une indemnité égale au montant de la rémunération qu'il aurait dû percevoir jusqu'à sa réintégration. Il n'y a pas lieu de déduire de cette indemnité les revenus qu'il a pu percevoir de tiers au cours de cette période. Sur la base d'un salaire brut mensuel de 2515 € revendiqué par Mme [W], dont le montant n'est pas contesté par l'employeur, et ressortant de la fiche de paie de janvier 2011 déjà produite devant les premiers juges, il sera alloué à Mme [W] la somme de 110'660 € qu'elle sollicite au titre des salaires qu'elle aurait dû percevoir depuis son départ, de juillet 2011 à mars 2015 » ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE « Madame [W] sollicite de son employeur le paiement de dommages et intérêts pour violation du statut protecteur ; qu'en date du 27 avril 2011, Monsieur [Q] informait l'ensemble de ses salariés de la tenue d'une élection des délégués du personnels pour l'ensemble de l'unité économique et sociale ; que le protocole d'accord préélectoral du 30 mai 23011 indiquait comme date limite du dépôt des candidatures le 7 juin 2011 au plus tard ; que le syndicat UTS-UGC faisait parvenir par fax à Monsieur [Q] la liste des candidats dont Madame [W] comme candidate titulaire du collège I )a ladite élection du 7 juin à 12 heures 36 ; que le même jour 14 heures 45 l'employeur faisait délivrer à Madame [W] par huissier de justice une convocation à un entretien préalable à une éventuelle mensure de licenciement ; que la SA MANIOUKANI n'a pas hésité à contester la régularité de cette candidature, jusqu'en cassation, que le tribunal d'instance de Basse terre a validé cette candidature ; qu'aucune autorisation administrative n'était demandée à l'administration du travail, la SA MANIOUKANI persistait dans son projet de licencier Madame [W] ; que l'article L. 2411-7 du code du travail stipule que « l'autorisation de licenciement est requise pendant six mois pour le candidat, au premier ou au deuxième tour, aux fonctions de délégué du personnel, à partir de la publication des candidatures. La durée de six mois court à partir de l'envoi par lettre recommandée de la candidature à l'employeur. Cette autorisation est également requise lorsque la lettre du syndicat notifiant à l'employeur la candidature aux fonctions de délégué du personnel a été reçue par l'employeur ou lorsque le salarié a fait la preuve que l'employeur a eu connaissance de l'imminence de sa candidature avant que le candidat ait été convoqué à l'entretien préalable au licenciement ; que la preuve d'une candidature imminente peut résulter de l'annonce faite par le salarié de son intention de se porter candidat au cours d'une réunion en présence de l'employeur ; que la cour de cassation du 12 juillet 2006 b°04-47724, 1er moyen, dit, l'employeur qui conteste au salarié le bénéfice de cette protection doit établir que la convocation à l'entretien préalable a précédé la formalisation de la candidature dont il est en sa qualité d'organisateur des élections destinataire, et qu'il lui appartient d'enregistrer ; que le conseil constate la violation du statut protecteur pour non-respect de la procédure de licenciement et prononce la nullité de la rupture » ;
ALORS QU'aux termes de l'article L. 2411-7 du code du travail, l'autorisation de licenciement est requise pendant six mois pour le candidat, au premier ou au deuxième tour, aux fonctions de délégué du personnel, à partir de la publication des candidatures ; que la durée de six mois court à partir de l'envoi par lettre recommandée de la candidature à l'employeur ; que cette autorisation est également requise lorsque la lettre du syndicat notifiant à l'employeur la candidature aux fonctions de délégué du personnel a été reçue par l'employeur ou lorsque le salarié a fait la preuve que l'employeur a eu connaissance de l'imminence de sa candidature avant que le candidat ait été convoqué à l'entretien préalable au licenciement ; qu'en l'espèce, pour considérer que Madame [W] pouvait prétendre au bénéfice de cette protection, la cour d'appel a retenu que le courrier de convocation à l'entretien préalable avait été remis à la salariée le 7 juin à 14 heures 45, et qu'une télécopie du syndicat UTC UGCT mentionnant Madame [W] sur la liste des candidats en vue des élections des délégués du personnel avait été envoyée le même jour à 12 heures 37 ; qu'en statuant ainsi, en se fondant sur le moment auquel la salarié avait reçu le courrier de convocation à l'entretien préalable, et celui auquel le syndicat avait envoyé la liste des candidats, d'où il ne pouvait s'inférer que l'employeur avait connaissance, avant l'engagement de la procédure de licenciement, de la candidature de la salariée, la cour d'appel, qui n'a pas caractérisé cette connaissance, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 2411-7 du code du travail.
QUATRIEME MOYEN DE CASSATION (SUBSIDIAIRE)
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné l'exposante à verser à Madame [W] la somme de 110.660 euros à titre d'indemnité correspondant au montant de la rémunération que celle-ci aurait perçue depuis son licenciement ;
AUX MOTIFS QUE « (…) Sur les demandes pécuniaires de Mme [W] : Le salarié protégé, licencié sans autorisation préalable, qui demande sa réintégration, est fondé à obtenir le versement d'une indemnité égale au montant de la rémunération qu'il aurait dû percevoir jusqu'à sa réintégration. Il n'y a pas lieu de déduire de cette indemnité les revenus qu'il a pu percevoir de tiers au cours de cette période. Sur la base d'un salaire brut mensuel de 2515 € revendiqué par Mme [W], dont le montant n'est pas contesté par l'employeur, et ressortant de la fiche de paie de janvier 2011 déjà produite devant les premiers juges, il sera alloué à Mme [W] la somme de 110.660 € qu'elle sollicite au titre des salaires qu'elle aurait dû percevoir depuis son départ, de juillet 2011 à mars 2015 » ;
1. ALORS QUE le salarié protégé, licencié sans autorisation préalable, qui demande sa réintégration pendant la période de protection a droit, au titre de la méconnaissance de son statut protecteur, à la rémunération qu'il aurait perçue jusqu'à sa réintégration ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a fait droit à la demande que la salariée formait à ce titre ; qu'en statuant ainsi, quand elle avait retenu la protection de la salariée avait débuté le 7 juin 2011, et que la réintégration avait été demandée le 14 décembre 2011, ce dont il s'inférait que la demande de réintégration avait été formée, ainsi que soutenait l'employeur, après l'expiration de la période de protection, la cour d'appel a violé l'article L. 2411-7 du code du travail ;
2. ET ALORS en tout état de cause QUE la cour d'appel aurait dû, à tout le moins, se prononcer sur le moyen de l'exposante tiré de ce que la demande de réintégration avait été formée après l'expiration de la période de protection ; qu'en s'en abstenant, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
3. ET ALORS subsidiairement QU'il convient de déduire de l'indemnité allouée au salarié protégé qui demande sa réintégration, les revenus qu'il a, le cas échéant, perçu de tiers ; qu'en refusant de procéder à cette déduction, la cour d'appel a violé l'article L. 2411-7, ensemble le principe de réparation intégrale du préjudice ;
4. ET ALORS plus subsidiairement encore QU'à tout le moins, cette indemnité doit être limitée à 30 mois de rémunération, durée de la protection accordée aux représentants du personnel ; qu'en allouant à la salariée une indemnité représentant 44 mois de salaire, la cour d'appel a violé l'article L. 2411-7 du code du travail.ECLI:FR:CCASS:2017:SO00564
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme [W] a été engagée le 7 mai 2007 en qualité de comptable par la société Manioukani Spa international ; que le 7 avril 2011 Mme [W] a saisi le conseil de prud'hommes de Basse-Terre aux fins de voir prononcer la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts exclusifs de l'employeur ; que le 27 avril 2011, l'employeur a annoncé la tenue d'élections de délégués du personnel ; que le 7 juin 2011, le syndicat Union des travailleurs de la santé -UGTG, a communiqué la liste de ses candidats dont Mme [W] ; que celle-ci a été licenciée pour faute grave par lettre du 22 juin 2011 ; que par jugement du 3 novembre 2011, le tribunal d'instance de Basse-Terre a déclaré recevable la candidature de l'intéressée aux élections professionnelles et annulé lesdites élections ; que le 14 décembre 2011, la salariée a sollicité sa réintégration au poste de comptable, à laquelle l'employeur s'est opposé ; que devant la juridiction prud'homale, celle-ci a demandé en dernier lieu de voir prononcer la nullité de son licenciement et sa réintégration, ainsi que le paiement de rappels de salaire, de dommages-intérêts et indemnités de rupture ;
Sur le premier moyen, ci-après annexé :
Attendu que l'employeur est sans intérêt à critiquer le rejet de la demande d'annulation du jugement par la cour d'appel dès lors que cette dernière, saisie de l'entier litige en vertu de l'effet dévolutif de l'appel prévu par l'article 562, alinéa 2, du code de procédure civile, a statué sur le fond du litige par des motifs propres ; que le moyen est irrecevable ;
Mais sur le troisième moyen :
Vu l'article L. 2411-7 du code du travail ;
Attendu que pour dire nul le licenciement, l'arrêt retient que c'est par lettre signifiée par acte huissier le 7 juin 2011 à 14h45, remis en main propre à Mme [W], que l'employeur a notifié à celle-ci une convocation à l'entretien préalable en vue d'un licenciement pour faute grave, ainsi qu'une mise à pied conservatoire ; qu'Il ressort des mentions figurant sur la lettre du 7 juin 2011 par laquelle le syndicat UTS -UGTG a adressé à l'employeur la liste de ses candidats en vue des élections du délégué du personnel, sur laquelle figure Mme [W], que ce courrier a été envoyé à M. [Q] par télécopie le 7 juin 2011 à 12h37, qu'il s'ensuit que l'employeur a engagé la procédure de licenciement, après avoir reçu la candidature de l'intéressée aux élections de délégués du personnel ;
Mais attendu que pour l'application de l'article L. 2411-7, c'est au moment de l'envoi de la convocation à l'entretien préalable au licenciement que l'employeur doit avoir connaissance de la candidature d'un salarié aux élections professionnelles ;
Qu'en statuant ainsi sans constater que le dépôt de la liste des candidatures était antérieur à l'engagement de la procédure de licenciement résultant de la remise à l'huissier de la lettre de convocation à l'entretien préalable, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les deuxième et quatrième moyens :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déclare nul le licenciement de Mme [W], d'ordonner sa réintégration et de condamner la société Manioukani à lui verser la somme de 110 660 euros à titre d'indemnité correspondant au montant de la rémunération que celle-ci aurait perçue depuis son licenciement, l'arrêt rendu le 18 mai 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Basse-Terre ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Basse-Terre, autrement composée ;
Condamne Mme [W] aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, signé et prononcé par Mme Slove, conseiller le plus ancien non empêché, en remplacement du président empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile, en son audience publique du vingt-deux mars deux mille dix-sept.MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat aux Conseils, pour la société Manioukani Spa international.
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté la société MANIOUKANI de sa demande de nullité du jugement, d'AVOIR déclaré nul le licenciement de Madame [W], d'AVOIR ordonné sa réintégration à son poste avec maintien de tous ses avantages, sous astreinte de 250 euros par jour de retard, et d'AVOIR condamné l'exposante à verser à Madame [W] la somme de 110.660 euros à titre d'indemnité correspondant au montant de la rémunération que celle-ci aurait perçue depuis son licenciement ;
AUX MOTIFS QUE « Sur la demande de nullité du jugement :contrairement à ce qu'affirme la Société MANIOUKANI au soutien de sa demande de nullité du jugement déféré, celui-ci comporte non seulement un exposé des prétentions et moyens de la salariée, mais comporte également un rappel du contenu des conclusions de l'employeur, en indiquant notamment que Mme [W] avait décidé de limiter son activité dans l'entreprise en n'intervenant plus que sur les comptes de la S.A. MANIOUKANI et en ne tenant pas compte de la comptabilité des autres entreprises du groupe. Par ailleurs si la Société MANIOUKANI entendait invoquer une cause de récusation à l'égard de l'un des conseillers prud'hommes composant le bureau de jugement, il lui appartenait, en application des dispositions de l'article 342 du code de procédure civile, de le faire avant la clôture des débats devant les premiers juges. Enfin une 'mauvaise application des règles de droit', reposant sur des dispositions contradictoires dans le dispositif du jugement, si elle peut donner lieu à réformation en cause d'appel, ne saurait justifier la nullité du jugement. En conséquence la demande de nullité du jugement sera rejetée » ;
1. ALORS QUE toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, par un tribunal impartial ; que l'exigence d'impartialité s'impose aux juridictions à l'encontre desquelles le grief peut être invoqué indépendamment de la mise en oeuvre des procédures de récusation ou de renvoi, dès lors qu'il ne relève pas d'un des cas visés par l'article L 1457-1 du code du travail ; qu'en l'espèce, la société MANIOUKANI avait fait valoir que l'un des conseillers prud'hommes ayant participé à la formation de jugement avait été salarié, membre du comité d'entreprise d'une société dirigée par l'actuel représentant légal de la société MANIOUKANI (Monsieur [Q]), que des conflits très durs avaient opposé ledit comité d'entreprise et la direction de la société, et que ce conseiller prud'homal avait, à l'époque, rédigé un courrier, versé aux débats, aux termes duquel il qualifiait Monsieur [Q], notamment, de « despote naviguant en eaux troubles dans l'égocentrisme et la tyrannie », de « chacal qui n'attend rien d'autre que sa proie lui tombe entre les dents » ; que ces éléments, qui ne relevaient d'aucun des cas visés par l'article L.1457-1 du code du travail, étaient de nature à faire naître un doute légitime sur l'impartialité du conseiller prud'homal ; que, pour écarter la demande de nullité du jugement fondée sur la méconnaissance de l'exigence d'impartialité, la cour d'appel a retenu que la société MANIOUKANI aurait dû former une demande de récusation et y procéder avant la clôture des débats ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article L.1457-1 du Code du travail, ensemble l'article 6, §1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
2. ET ALORS subsidiairement QUE toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, par un tribunal impartial ; que si la récusation ne peut être demandée après la clôture des débats, encore faut-il que la partie ait connaissance de la cause de récusation avant ladite clôture ; qu'en opposant à l'exposante qu'elle aurait dû former une demande de récusation en temps utile, sans constater que la société MANIOUKANI avait été informée de la composition de la formation jugement avant la clôture des débats, la cour d'appel a violé les articles L. 1457-1 et R. 1457-1 du code du travail, 342 du code de procédure civile, et 6, §1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION (SUBSIDIAIRE)
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR déclaré nul le licenciement de Madame [W], d'AVOIR ordonné sa réintégration à son poste avec maintien de tous ses avantages, sous astreinte de 250 euros par jour de retard, et d'AVOIR condamné l'exposante à verser à Madame [W] la somme de 110.660 euros à titre d'indemnité correspondant au montant de la rémunération que celle-ci aurait perçue depuis son licenciement ;
AUX MOTIFS QUE « (…) Sur les demandes de nullité du licenciement et de réintégration. La cour constate que si lors de la saisine initiale du conseil de prud'hommes, Mme [W] a sollicité le prononcé de la résiliation judiciaire de son contrat de travail, elle a par la suite, tant devant les premiers juges que devant la cour, demandé à titre principal que soit déclaré nul son licenciement et que soit ordonnée sa réintégration sous astreinte, la demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail n'étant plus formée qu'à titre subsidiaire. (…) il sera fait droit à la demande de nullité du licenciement, mais aussi à la demande subséquente de réintégration de Mme [W]. Sur les demandes pécuniaires de Mme [W] : Le salarié protégé, licencié sans autorisation préalable, qui demande sa réintégration, est fondé à obtenir le versement d'une indemnité égale au montant de la rémunération qu'il aurait dû percevoir jusqu'à sa réintégration. Il n'y a pas lieu de déduire de cette indemnité les revenus qu'il a pu percevoir de tiers au cours de cette période. Sur la base d'un salaire brut mensuel de 2515 € revendiqué par Mme [W], dont le montant n'est pas contesté par l'employeur, et ressortant de la fiche de paie de janvier 2011 déjà produite devant les premiers juges, il sera alloué à Mme [W] la somme de 110'660 € qu'elle sollicite au titre des salaires qu'elle aurait dû percevoir depuis son départ, de juillet 2011 à mars 2015 » ;
1. ALORS QUE le juge tranche le litige conformément aux règles de droit qui sont applicables ; que lorsqu'un salarié a demandé la résiliation judiciaire de son contrat de travail et que son employeur le licencie ultérieurement, le juge doit d'abord rechercher si la demande de résiliation était justifiée, et c'est seulement dans le cas contraire qu'il peut se prononcer sur le licenciement notifié par l'employeur ; qu'ainsi, lorsque le salarié, licencié après avoir demandé la résiliation judiciaire de son contrat, souhaite que la contestation de son licenciement soit, en toute hypothèse, examinée, il doit renoncer à sa demande en résiliation judiciaire ; qu'en l'espèce, il résulte des constatations de la cour d'appel que Madame [W] a demandé la résiliation de son contrat de travail le 7 avril 2011, et a été licenciée le 22 juin 2011 ; que, pour prononcer la nullité de ce licenciement, elle a retenu que la demande en résiliation judiciaire, bien que formée antérieurement à ce dernier, l'avait été à titre subsidiaire ; qu'il s'inférait de ces constatations que la salariée n'avait pas renoncé à sa demande en résiliation judiciaire ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article 12 du code de procédure civile et l'article L. 1231-1 du code du travail ;
2. ALORS QU'en outre, nul ne peut se contredire au détriment d'autrui ; qu'en statuant comme elle l'a fait, alors que, non seulement la salariée n'avait pas renoncé à sa demande en résiliation mais, en outre, demandait à ce que la nullité de son contrat soit sanctionnée par une réintégration, la cour d'appel a violé le principe de l'estoppel, ensemble l'article 12 du code de procédure civile et l'article L. 1231-1 du code du travail.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION (SUBSIDIAIRE)
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR déclaré nul le licenciement de Madame [W], d'AVOIR ordonné sa réintégration à son poste avec maintien de tous ses avantages, sous astreinte de 250 euros par jour de retard, et d'AVOIR condamné l'exposante à verser à Madame [W] la somme de 110.660 euros à titre d'indemnité correspondant au montant de la rémunération que celle-ci aurait perçue depuis son licenciement ;
AUX MOTIFS QUE « (…) Sur les demandes de nullité du licenciement et de réintégration (…). Selon les dispositions des articles L. 2411-3 et L. 2411-7 du code du travail, l'autorisation de l'inspecteur du travail est requise pendant six mois pour le licenciement d'un candidat aux élections de délégués du personnel, à partir de la publication des candidatures, la durée de six mois courant à partir de l'envoi par lettre recommandée de la candidature à l'employeur. Cette autorisation est également requise lorsque la lettre du syndicat notifiant à l'employeur la candidature aux fonctions de délégués du personnel a été reçue par l'employeur ou lorsque le salarié a fait la preuve que l'employeur a eu connaissance de l'imminence de sa candidature, avant que le candidat ait été convoqué à l'entretien préalable au licenciement. En l'espèce, par courrier du 27 avril 2011, le gérant de la Société MANIOUKANI fait savoir aux organisations syndicales que la direction envisage de procéder à l'élection des délégués du personnel pour l'ensemble de l'unité économique et sociale formée par les trois établissements implantés à la Marina [Établissement 1], commune de [Localité 1], à savoir la Société MANIOUKANI, la SARL BANARI et la SARL KALANA, la date envisagée pour le premier tour de scrutin étant fixée au mardi 14 juin 2011. Il est précisé dans ce courrier que l'effectif de l'unité s'élevant à 43 salariés, le nombre de délégués à élire sera de deux titulaires et deux suppléants. La direction invitait les organisations syndicales à établir la liste de leurs candidats et à prendre contact avec M. [Q], gérant des trois entreprises de l'unité, afin de négocier le protocole préélectoral le 25 mai 2011 à la chambre de commerce et d'industrie de Basse-Terre. Au cas où aucune organisation syndicale ne se manifesterait, la direction fixerait les conditions de déroulement des opérations électorales et les communiquerait au personnel. Par courrier du 7 juin 2011, adressé par télécopie le même jour au gérant de la Société MANIOUKANI, M. [Q], le syndicat Union des Travailleurs de la Santé-U.G.T.G., faisait savoir à ce dernier que, conformément au protocole d'accord préélectoral du 30 mai 2011, il lui était communiqué la liste des candidats qu'il présentait en vue des élections des délégués du personnel prévues le 14 juin dans le cadre de l'unité économique et sociale des sociétés MANIOUKANI, BANARI et KALANA, cette liste comportant comme titulaire le nom de Mme [W] pour le collège I. Par jugement du 3 novembre 2011, le tribunal d'instance de Basse-Terre statuant en matière de contentieux électoral professionnel, déclarait recevable la candidature de Mme [W] en qualité de candidate U.T.S.-U.G.T.G. aux élections professionnelles de l'UES Société MANIOUKANI, SARL KALANA et SARL BANARI, mais annulait les élections tendant à la désignation de délégués du personnel qui s'étaient déroulées les 14 et 29 juin 2011, lesdites élections devant être réitérées conformément au protocole préélectoral et aux dispositions légales. À la suite de ce jugement Mme [W], par lettre datée du 14 décembre 2011, signifiée par acte huissier le 28 décembre 2011, demandait au président-directeur général de la Société MANIOUKANI, sa réintégration au poste de comptable qu'elle occupait au sein de la Société MANIOUKANI et faisait savoir qu'elle se tenait à l'entière disposition de son employeur pour toute réintégration aux date et heure qu'il souhaitait. Par lettre recommandée avec avis de réception, en date du 2 janvier 2012, l'employeur faisait savoir à Mme [W] qu'il n'entendait pas donner de suite favorable à sa demande de réintégration. Il faisait valoir notamment qu'il n'avait eu connaissance de sa candidature aux élections de délégués du personnel que postérieurement à la signification par huissier de la lettre convoquant la salariée à un entretien préalable en vue d'une procédure de licenciement. Il y a lieu de préciser qu'en déclarant recevable la candidature de Mme [W] en qualité de candidate UTS-UGTG, le juge instance a statué sur la contestation opposée par la Société MANIOUKANI qui d'une part entendait voir déclarer irrecevable la liste déposée par ce syndicat, pour avoir été déposée par télécopie au siège de la seule Société MANIOUKANI, en violation des dispositions du protocole et en dehors du délai imparti, et en l'absence de signature des candidats présentés, et d'autre part soutenait que la candidature de Mme [W] était frauduleuse, et qu'elle avait été proposée dans le seul but de faire échec à une procédure de licenciement, alors qu'elle avait antérieurement saisi le conseil de prud'hommes aux fins d'obtenir la résiliation de son contrat de travail. Il y a lieu de rappeler que lorsque l'employeur engage la procédure de licenciement avant d'avoir connaissance d'une candidature ou de son imminence, le salarié, même s'il est élu, ne bénéficie pas du statut protecteur au titre de la procédure en cours. En l'espèce, c'est par lettre signifiée par acte huissier le 7 juin 2011 à 14h45, remis en main propre à Mme [W], que l'employeur a notifié à celle-ci une convocation à l'entretien préalable en vue d'un licenciement pour faute grave, ainsi qu'une mise à pied conservatoire. Il ressort des mentions figurant sur la lettre du 7 juin 2011 par laquelle le syndicat U.T.S. -U.G.T.G. a adressé à l'employeur la liste de ses candidats en vue des élections du délégué du personnel, sur laquelle figure Mme [W], que ce courrier a été envoyé à M. [P] [Q] par télécopie le 7 juin 2011 à 12h37. Il résulte de ces constatations, que contrairement à ce que soutient l'employeur, celui-ci a engagé la procédure de licenciement, après avoir reçu la candidature de Mme [W] aux élections de délégués du personnel. En conséquence cette dernière est fondée à se prévaloir du statut protecteur édicté par l'article L. 2411-1 du code du travail ; Si l'employeur invoque une faute grave à l'encontre de Mme [W], alors que le licenciement de celle-ci est nul, en revanche il n'oppose aucun moyen de fait ou de droit relatif à une quelconque impossibilité de procéder à la réintégration de Mme [W], ne faisant pas état notamment d'une éventuelle incompatibilité du comportement de Mme [W] avec la réintégration dans son poste. En conséquence, non seulement il sera fait droit à la demande de nullité du licenciement, mais aussi à la demande subséquente de réintégration de Mme [W]. Sur les demandes pécuniaires de Mme [W] : Le salarié protégé, licencié sans autorisation préalable, qui demande sa réintégration, est fondé à obtenir le versement d'une indemnité égale au montant de la rémunération qu'il aurait dû percevoir jusqu'à sa réintégration. Il n'y a pas lieu de déduire de cette indemnité les revenus qu'il a pu percevoir de tiers au cours de cette période. Sur la base d'un salaire brut mensuel de 2515 € revendiqué par Mme [W], dont le montant n'est pas contesté par l'employeur, et ressortant de la fiche de paie de janvier 2011 déjà produite devant les premiers juges, il sera alloué à Mme [W] la somme de 110'660 € qu'elle sollicite au titre des salaires qu'elle aurait dû percevoir depuis son départ, de juillet 2011 à mars 2015 » ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE « Madame [W] sollicite de son employeur le paiement de dommages et intérêts pour violation du statut protecteur ; qu'en date du 27 avril 2011, Monsieur [Q] informait l'ensemble de ses salariés de la tenue d'une élection des délégués du personnels pour l'ensemble de l'unité économique et sociale ; que le protocole d'accord préélectoral du 30 mai 23011 indiquait comme date limite du dépôt des candidatures le 7 juin 2011 au plus tard ; que le syndicat UTS-UGC faisait parvenir par fax à Monsieur [Q] la liste des candidats dont Madame [W] comme candidate titulaire du collège I )a ladite élection du 7 juin à 12 heures 36 ; que le même jour 14 heures 45 l'employeur faisait délivrer à Madame [W] par huissier de justice une convocation à un entretien préalable à une éventuelle mensure de licenciement ; que la SA MANIOUKANI n'a pas hésité à contester la régularité de cette candidature, jusqu'en cassation, que le tribunal d'instance de Basse terre a validé cette candidature ; qu'aucune autorisation administrative n'était demandée à l'administration du travail, la SA MANIOUKANI persistait dans son projet de licencier Madame [W] ; que l'article L. 2411-7 du code du travail stipule que « l'autorisation de licenciement est requise pendant six mois pour le candidat, au premier ou au deuxième tour, aux fonctions de délégué du personnel, à partir de la publication des candidatures. La durée de six mois court à partir de l'envoi par lettre recommandée de la candidature à l'employeur. Cette autorisation est également requise lorsque la lettre du syndicat notifiant à l'employeur la candidature aux fonctions de délégué du personnel a été reçue par l'employeur ou lorsque le salarié a fait la preuve que l'employeur a eu connaissance de l'imminence de sa candidature avant que le candidat ait été convoqué à l'entretien préalable au licenciement ; que la preuve d'une candidature imminente peut résulter de l'annonce faite par le salarié de son intention de se porter candidat au cours d'une réunion en présence de l'employeur ; que la cour de cassation du 12 juillet 2006 b°04-47724, 1er moyen, dit, l'employeur qui conteste au salarié le bénéfice de cette protection doit établir que la convocation à l'entretien préalable a précédé la formalisation de la candidature dont il est en sa qualité d'organisateur des élections destinataire, et qu'il lui appartient d'enregistrer ; que le conseil constate la violation du statut protecteur pour non-respect de la procédure de licenciement et prononce la nullité de la rupture » ;
ALORS QU'aux termes de l'article L. 2411-7 du code du travail, l'autorisation de licenciement est requise pendant six mois pour le candidat, au premier ou au deuxième tour, aux fonctions de délégué du personnel, à partir de la publication des candidatures ; que la durée de six mois court à partir de l'envoi par lettre recommandée de la candidature à l'employeur ; que cette autorisation est également requise lorsque la lettre du syndicat notifiant à l'employeur la candidature aux fonctions de délégué du personnel a été reçue par l'employeur ou lorsque le salarié a fait la preuve que l'employeur a eu connaissance de l'imminence de sa candidature avant que le candidat ait été convoqué à l'entretien préalable au licenciement ; qu'en l'espèce, pour considérer que Madame [W] pouvait prétendre au bénéfice de cette protection, la cour d'appel a retenu que le courrier de convocation à l'entretien préalable avait été remis à la salariée le 7 juin à 14 heures 45, et qu'une télécopie du syndicat UTC UGCT mentionnant Madame [W] sur la liste des candidats en vue des élections des délégués du personnel avait été envoyée le même jour à 12 heures 37 ; qu'en statuant ainsi, en se fondant sur le moment auquel la salarié avait reçu le courrier de convocation à l'entretien préalable, et celui auquel le syndicat avait envoyé la liste des candidats, d'où il ne pouvait s'inférer que l'employeur avait connaissance, avant l'engagement de la procédure de licenciement, de la candidature de la salariée, la cour d'appel, qui n'a pas caractérisé cette connaissance, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 2411-7 du code du travail.
QUATRIEME MOYEN DE CASSATION (SUBSIDIAIRE)
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné l'exposante à verser à Madame [W] la somme de 110.660 euros à titre d'indemnité correspondant au montant de la rémunération que celle-ci aurait perçue depuis son licenciement ;
AUX MOTIFS QUE « (…) Sur les demandes pécuniaires de Mme [W] : Le salarié protégé, licencié sans autorisation préalable, qui demande sa réintégration, est fondé à obtenir le versement d'une indemnité égale au montant de la rémunération qu'il aurait dû percevoir jusqu'à sa réintégration. Il n'y a pas lieu de déduire de cette indemnité les revenus qu'il a pu percevoir de tiers au cours de cette période. Sur la base d'un salaire brut mensuel de 2515 € revendiqué par Mme [W], dont le montant n'est pas contesté par l'employeur, et ressortant de la fiche de paie de janvier 2011 déjà produite devant les premiers juges, il sera alloué à Mme [W] la somme de 110.660 € qu'elle sollicite au titre des salaires qu'elle aurait dû percevoir depuis son départ, de juillet 2011 à mars 2015 » ;
1. ALORS QUE le salarié protégé, licencié sans autorisation préalable, qui demande sa réintégration pendant la période de protection a droit, au titre de la méconnaissance de son statut protecteur, à la rémunération qu'il aurait perçue jusqu'à sa réintégration ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a fait droit à la demande que la salariée formait à ce titre ; qu'en statuant ainsi, quand elle avait retenu la protection de la salariée avait débuté le 7 juin 2011, et que la réintégration avait été demandée le 14 décembre 2011, ce dont il s'inférait que la demande de réintégration avait été formée, ainsi que soutenait l'employeur, après l'expiration de la période de protection, la cour d'appel a violé l'article L. 2411-7 du code du travail ;
2. ET ALORS en tout état de cause QUE la cour d'appel aurait dû, à tout le moins, se prononcer sur le moyen de l'exposante tiré de ce que la demande de réintégration avait été formée après l'expiration de la période de protection ; qu'en s'en abstenant, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
3. ET ALORS subsidiairement QU'il convient de déduire de l'indemnité allouée au salarié protégé qui demande sa réintégration, les revenus qu'il a, le cas échéant, perçu de tiers ; qu'en refusant de procéder à cette déduction, la cour d'appel a violé l'article L. 2411-7, ensemble le principe de réparation intégrale du préjudice ;
4. ET ALORS plus subsidiairement encore QU'à tout le moins, cette indemnité doit être limitée à 30 mois de rémunération, durée de la protection accordée aux représentants du personnel ; qu'en allouant à la salariée une indemnité représentant 44 mois de salaire, la cour d'appel a violé l'article L. 2411-7 du code du travail.