Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 1 mars 2017, 15-28.563, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu l'article L. 1226-4 du code du travail ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. [B], a été engagé, le 1er septembre 2004, par la société Entreprise nettoyage bâtiment industrie Marcel Louise en qualité d'agent de propreté ; qu'à compter de septembre 2012, il a été placé en arrêt de travail pour maladie ; que déclaré définitivement inapte à tous les postes de l'entreprise au terme de deux visites médicales, les 22 octobre et 5 novembre 2012, il n'a pas été reclassé ;

Attendu que pour débouter le salarié de ses demandes, l'arrêt retient qu'à l'expiration du délai prévu par l'article L. 1226-4 du code du travail, soit à compter du 5 décembre 2012, l'intéressé a perçu le salaire correspondant à l'emploi qu'il occupait avant la suspension de son contrat de travail, que le point de savoir si le salarié a été mis en congés payés forcés pendant une partie de cette période ou si la mention de ces congés payés résulte d'une erreur de secrétariat est indifférent à la solution du litige, puisqu'en tout état de cause il a été entièrement rempli de ses droits à rémunération ;

Attendu cependant qu'à l'issue du délai préfix d'un mois prévu par l'article L. 1226-4 du code du travail, l'employeur, tenu, en l'absence de reclassement ou de licenciement du salarié déclaré inapte, de reprendre le paiement du salaire, ne peut substituer à cette obligation le paiement d'une indemnité de congés payés non pris, ni contraindre le salarié à prendre ses congés ;

Qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il soit nécessaire de statuer sur les autres branches du moyen :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute le salarié de ses demandes tendant au paiement de rappels de salaires au titre des mois de décembre 2012 et janvier 2013, de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ainsi que pour préjudices moral et financier, et d'une indemnité de licenciement, l'arrêt rendu le 15 septembre 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion, autrement composée ;

Condamne la société Entreprise nettoyage bâtiment industrie Marcel Louise aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Entreprise nettoyage bâtiment industrie Marcel Louise à payer à M. [B] la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du premier mars deux mille dix-sept.MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat aux Conseils, pour M. [B]

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté M. [O] [B] de ses demandes tendant au paiement de rappels de salaires au titre des mois de décembre 2012 et janvier 2013, de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et abusive, préjudices moral et financier et d'une indemnité de licenciement.

AUX MOTIFS QUE la prise d'acte de la rupture, alternative aux licenciement et à la démission, se définit comme la situation de fait, dans laquelle l'une des parties au contrat considère que le comportement de l'autre rend impossible le maintien du contrat de travail ; que la prise d'acte de la rupture du contrat par le salarié, qui n'est soumise à aucun formalisme, est motivée généralement par le non-paiement des salaires et accessoires ; qu'il résulte de l'article L.1226-4 du code du travail que lorsque, à l'issue d'un délai d'un mois à compter de la date de l'examen médical de reprise du travail, le salarié déclaré inapte n'est pas reclassé dans l'entreprise ou s'il n'est pas licencié, l'employeur lui verse, dès l'expiration de ce délai, le salaire correspondant à l'emploi que celui-ci occupait avant la suspension de son contrat de travail ; que ces dispositions s'appliquent également en cas d'inaptitude à tout emploi dans l'entreprise constatée par le médecin du travail ; qu'en l'espèce il résulte des bulletins de salaire de M. [B] [O] des mois de décembre 2012 et janvier 2013, et des éléments comptables que produit l'employeur pour établir le versement effectif des sommes litigieuses, qu'à l'expiration du délai susvisé, soit à compter du 5 décembre 2012, ce salarié a perçu le salaire correspondant à l'emploi que celui-ci occupait avant la suspension de son contrat de travail ; le point de savoir si comme le soutient l'intimé M. [B] [O] a été mis " en congés payés forcés » pendant une partie de cette période ou si comme le prétend l'appelante la mention de ces congés payés résulte d'une erreur de secrétariat, est indifférent à la solution du litige, puisqu'en tout état de cause ce salarié a été entièrement rempli de ses droits à rémunération ; qu'il en résulte que l'absence injustifiée de M. [B] de son poste de travail sans en avoir informé son employeur depuis le 10 janvier 2013, date de saisine du conseil de prud'hommes, doit être interprétée comme une démission, et que dès lors, il y a lieu d'infirmer la décision entreprise en ce qu'elle a jugé que la rupture du contrat de travail est sans cause réelle et sérieuse et par conséquent, abusive, et alloué au salarié des indemnités de rupture ; qu'il découle également de ce qui précède qu'aucune somme ne restait due à M. [B] au titre du salaire du mois de décembre 2012 et de celui de janvier 2013 ; que le jugement du conseil de prud'hommes sera également nécessairement infirmé en ce qu'il a ordonné à la SARL ENBI Marcel Louise de remettre à M. [B] son certificat de travail et l'attestation Pôle Emploi avec pour motif de rupture : " rupture s'analysant en un licenciement sans cause réelle et sérieuse pour manquement de l'employeur suite à l'inaptitude médicale ".

ALORS QUE le manquement de l'employeur à son obligation de reprendre le paiement des salaires par application de l'article L.1226-4 du code du travail constitue une rupture du contrat de travail qui doit s'analyser en un licenciement sans cause réelle et sérieuse employeur ; que caractérise la méconnaissance de cette obligation par l'employeur le fait de substituer au paiement du salaire le paiement d'une indemnité de congés payés non pris, ou de contraindre le salarié à prendre ses congés ; qu'en jugeant que M. [O] [B] avait été rempli de ses droits à rémunération peu important qu'il ait ou non été « mis en congés payés forcés », la Cour d'appel a violé les articles L. 1226-4 et L.3141-1 et s. du code du travail ensemble l'article 1134 du code civil.

ET ALORS QUE la démission résulte de la manifestation, de la part du salarié, d'une volonté claire et non équivoque de mettre fin aux relations contractuelles ; qu'en retenant que l'absence injustifiée de M. [O] [B] de son poste de travail s'analysait en une démission quand M. [O] [B] avait été déclaré définitivement inapte à tout poste dans l'entreprise et n'avait pas été reclassé en sorte que son absence était justifiée par le fait qu'il n'avait pas de poste, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil.

QU'en tout cas, une absence injustifiée ne caractérise pas une manifestation claire et non équivoque de mettre fin aux relations contractuelles ; qu'en retenant que l'absence injustifiée de M. [O] [B] de son poste de travail s'analysait en une démission, la cour d'appel a violé les articles L.1231-1 du code du travail et 1134 du code civil.ECLI:FR:CCASS:2017:SO00413
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