Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 22 février 2017, 15-25.023, Inédit
Cour de cassation - Chambre sociale
- N° de pourvoi : 15-25.023
- ECLI:FR:CCASS:2017:SO00330
- Non publié au bulletin
- Solution : Rejet
- Président
- M. Chauvet (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Texte intégral
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 7 juillet 2015), que Mme X..., engagée par la société Fiducial (Sofiral) le 7 novembre 2007 en qualité d'avocat salarié et, en dernier lieu, responsable du bureau de Montesson, a été licenciée le 8 juin 2011 pour insuffisance professionnelle ;
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse et de le condamner à payer des dommages et intérêts, alors, selon le moyen :
1°/ que le comportement invoqué par l'employeur pour justifier le licenciement d'un salarié doit présenter un caractère volontaire pour être qualifié de fautif ; qu'en retenant que les griefs relatifs à des oublis de renvois d'appel ou à des déplacements insuffisants chez les clients relevaient en réalité de comportements fautifs sans constater que l'employeur reprochait à sa salariée une volonté délibérée d'enfreindre ses instructions, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1232-1 et L. 1235-1 du code du travail ;
2°/ subsidiairement, que si la lettre de licenciement fixe les termes du litige au regard des griefs invoqués, il appartient au juge de qualifier les faits invoqués et de se prononcer sur le bien-fondé des motifs ainsi dégagés ; qu'après avoir relevé que le second grief invoqué par la société Fiducial relevait de la faute et non de l'insuffisance professionnelle, la cour d'appel s'est contentée d'en déduire que ce motif ne pouvait justifier le licenciement prononcé selon elle à tort pour insuffisance professionnelle ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher si les fautes ainsi identifiées ne constituaient pas une cause réelle et sérieuse susceptible de justifier le licenciement prononcé, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1232-1 et L. 1235-1 du code du travail ;
Mais attendu que, peu important la qualification susceptible d'être ou non attribuée à certains reproches adressés à la salariée, la cour d'appel, faisant usage des pouvoirs qu'elle tient de l'article L. 1235-1 du code du travail, a retenu que l'ensemble de ces reproches n'était pas fondé et que l'insuffisance de résultat n'était pas imputable aux capacités de l'intéressée, mais à des absences de personnels au sein du bureau dont elle avait la responsabilité et au fait qu'elle-même, après son congé maternité, n'avait repris son activité qu'à temps partiel ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Fiducial (Sofiral) aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Fiducial (Sofiral) et la condamne à payer à Mme X... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux février deux mille dix-sept.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Gaschignard, avocat aux Conseils, pour la société Fiducial (Sofiral)
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit le licenciement de Mme X... sans cause réelle et sérieuse et d'avoir condamné la société Fiduciaire nationale juridique et fiscale Fiducial Sofiral à lui verser une somme de 30 150 € avec intérêts au taux légal ;
AUX MOTIFS QU'en sa qualité de responsable du bureau de Montesson, Mme X... devait, en sus de l'exercice de son activité d'avocat, gérer ce bureau en développant l'activité d'avocat, gérer ce bureau en développant l'activité du secteur en fonction d'un budget fixé par la société Fiducial, déterminant en particulier le chiffre d'affaire à réaliser ; qu'il n'est pas contesté que, pendant les trois premières années de son contrat avec la société Fiducial, Mme X... n'a fait l'objet d'aucun reproche ni même critique sur la façon dont elle s'acquittait de ses responsabilités alors que le bureau du Pecq lui avait été confié, précédemment à celui de Montesson ; que les premières critiques adressées à Mme X... datent de la visite le 13 janvier 2011, du directeur régional, suivie d'une lettre de celui-ci à Mme X..., en date du 26 janvier, lui demande de « redresser la barre », après avoir pointé, au 30 septembre 2010 : - un écart de facturation négatif de 45 % par rapport au budget fixé ; - un retard dans la facturation du bureau ; que le directeur régional concluait sa lettre en prévoyant un rendez-vous à la fin du mois de février 2011, dès la parution du « tableau de bord » ; qu'il n'est cependant justifié d'aucune nouvelle visite ou lettre de reproche adressée par ce directeur à Mme X... postérieurement au février 2011, le licenciement intervenant après convocation préalable du 12 mai, le 8 juin ; que l'insuffisance professionnelle procède, pour un salarié, de son incapacité professionnelle à fournir le travail que l'employeur est en droit d'attendre de lui ; que l'insuffisance professionnelle, contrairement à l'insuffisance de résultat, ne peut donc résulter de la seule absence d'atteinte d'objectifs, précisément et préalablement assignés au salarié, et doit n'être imputable qu'au salarié, à l'exclusion de tout autre élément susceptible d'expliquer l'insuffisance invoquée par l'employeur à l'appui du licenciement ; que les trois premières années passées par Mme X... au sein de la société Fiducial, exemptes de toute appréciation négative sur la salariée, n'ont révélé aucune faiblesse ou inadaptation de celle-ci dans l'exercice de ses fonctions de responsable de bureau ; qu'à suivre la société Fiducial ce seraient les chiffres figurant sur les divers tableaux de bord qu'elle établit mensuellement, pour l'activité de ses bureaux locaux, qui auraient traduit cette insuffisance professionnelle, non apparue pendant trois ans ; qu'en outre, les reproches faits à Mme X... dans la lettre de licenciement ont trait d'une part, strictement aux mauvais résultats comptables de son activité, la société Fiducial estimant, comme le précise la lettre, que cette « insuffisance de résultat est la conséquence directe d'une insuffisance professionnelle » et, d'autre part, à un « manque d'initiative et d'implication de (sa) part » ; que, en premier lieu, contrairement aux dires de la société Fiducial, et comme rappelé ci-dessus, l'insuffisance de résultats imputée à Mme X... ne peut, à elle seule, caractériser l'insuffisance professionnelle alléguée et de d'autant, que sont survenues des circonstances étrangères aux capacités de Mme X..., - tenant à une désorganisation incontestable de son bureau, par suite d'absence de personnel – susceptibles d'expliquer les résultats reprochés à Mme X... ; que, en second lieu, l'autre grief caractérisant l'insuffisance professionnelle, sous couvert de « manque d'initiative et d'implication » - se rapporte à des comportements, en réalité, fautifs – et en tous, présentés comme tels dans la lettre de licenciement – puisqu'il s'agit de critiques concernant certains « oublis » ou des déplacements insuffisants chez les clients, « malgré les réguliers rappels » en ce sens du directeur régional ; que ces faits, relevant d'une inobservation des instructions de l'employeur, ne sauraient fonder un licenciement pour insuffisance professionnelle ; qu'en dernier lieu, le seul reproche susceptible de fonder une insuffisance professionnelle, est relatif à la prétendue « inertie » dont Mme X... aurait fait preuve « par rapport à la souffrance du bureau » ; que ce grief est cependant mal fondé puisque : - d'une part, comme le rappel des faits en tête du présent arrêt en témoigne, Mme X... n'a eu de cesse de solliciter de son employeur un renfort de personnel – face aux absences successives voire cumulées de la secrétaire et de l'assistante juridique du bureau – alors qu'ellemême, après son congé maternité, n'avait repris son activité le 13 janvier 2010, qu'à temps partiel, - d'autre part, lorsqu'elle évoquait la situation difficile du bureau avec son directeur régional, il lui était répondu par son interlocuteur que sa situation n'avait rien de critique, lui-même ayant eu dans son bureau deux collaboratrices en congé maternité simultanément, sans que l'organisation du bureau n'ait eu à en souffrir ; que l'insuffisance professionnelle alléguée n'est pas établie ; que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse ; qu'il sera alloué à Mme X... l'indemnité de 30 150 € qu'elle réclame à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et dont le montant paraît justifié au regard de l'ancienneté de l'appelante au sein de la société Fiducial et des circonstances vexatoires d'un licenciement pour une prétendue insuffisance professionnelle ;
1° - ALORS QUE le comportement invoqué par l'employeur pour justifier le licenciement d'un salarié doit présenter un caractère volontaire pour être qualifié de fautif ; qu'en retenant que les griefs relatifs à des oublis de renvois d'appel ou à des déplacement insuffisants chez les clients relevaient en réalité de comportements fautifs sans constater que l'employeur reprochait à sa salariée une volonté délibérée d'enfreindre ses instructions, la cour a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1232-1 et L. 1235-1 du code du travail ;
2° - ALORS subsidiairement QUE, si la lettre de licenciement fixe les termes du litige au regard des griefs invoqués, il appartient au juge de qualifier les faits invoqués et de se prononcer sur le bien-fondé des motifs ainsi dégagés ; qu'après avoir relevé que le second grief invoqué par la société Fiducial relevait de la faute et non de l'insuffisance professionnelle, la cour s'est contentée d'en déduire que ce motif ne pouvait justifier licenciement prononcé selon elle à tort pour insuffisance professionnelle ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher si les fautes ainsi identifiées ne constituaient pas une cause réelle et sérieuse susceptible de justifier le licenciement prononcé, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1232-1 et L. 1235-1 du code du travail.