Cour de cassation, civile, Chambre civile 3, 23 février 2017, 15-26.505, Inédit
Cour de cassation - Chambre civile 3
- N° de pourvoi : 15-26.505
- ECLI:FR:CCASS:2017:C300222
- Non publié au bulletin
- Solution : Rejet
- Président
- M. Chauvin (président)
Texte intégral
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, ci-après annexé :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 28 avril 2015), que M. X... et Mme Y... ont acquis une maison dont ils ont modifié la charpente pour y créer une mezzanine avant de la revendre, trois ans plus tard, à M. A... et Mme Z... ; qu'ayant des doutes sur la solidité de la charpente, ceux-ci ont obtenu la désignation d'un expert et, après dépôt du rapport, ont assigné leurs vendeurs en indemnisation sur le fondement de la responsabilité décennale ;
Attendu que M. X... et Mme Y... font grief à l'arrêt de les condamner à payer à M. A... et Mme Z... certaines sommes au titre de la reprise des désordres et au titre du trouble de jouissance ;
Mais attendu qu'ayant relevé que le poteau de la cuisine n'était pas conçu pour supporter une surcharge concentrée de trente tonnes et souverainement retenu, par motifs propres et adoptés, que la " mutilation " de la charpente compromettait la solidité du plancher de la cuisine, celle de l'entrait et celle d'une cloison, la cour d'appel, qui a caractérisé l'existence d'un dommage actuel compromettant la solidité de l'ouvrage, a pu déduire, de ces seuls motifs, que la responsabilité décennale de M. X... et Mme Y... était engagée ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... et Mme Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. X... et Mme Y... ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois février deux mille dix-sept.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat aux Conseils, pour M. X... et Mme Y...
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné Monsieur Franck X... et Madame Catherine Y... à payer à Madame Anne-Marie Z... et Monsieur Pierre A... la somme de 9 160 € au titre de la reprise des désordres et celle de 500 € à titre de dommages-intérêts au titre de leur préjudice de jouissance ;
AUX MOTIFS PROPRES QU'« en application des articles 1792 et 1792-1 du Code civil, le vendeur d'un immeuble dans lequel il a été procédé à des travaux de rénovation peut être déclaré responsable, envers les acquéreurs, des désordres affectant cet immeuble, sur le fondement des articles 1792 et suivants, sans qu'il soit nécessaire de justifier d'un contrat de louage d'ouvrage ou de maîtrise d'oeuvre, dès lors que l'importance des travaux réalisés les assimile à des travaux de construction d'un ouvrage. Les travaux exécutés par Monsieur Franck X... et Madame Catherine Y... ont été décrits par l'expert comme ayant consisté dans l'installation d'une mezzanine avec amputation d'une partie de l'arbalétrier et d'une contrefiche de deux fermes de la charpente afin de créer un volume circulable et donc aménageable, les suppressions opérées ayant été compensées par la pose d'un montant vertical intermédiaire de renfort 5 qui récupère les charges en toiture et descend dans un poteau 7 situé au niveau de la cuisine. Il s'agit en cela de travaux d'une importance certaine, aboutissant à la création d'une surface habitable supplémentaire, emportant à la fois disparition de certains éléments et apport d'éléments nouveaux, faisant appel en cela aux techniques des travaux du bâtiment ; ils consistent donc dans la réalisation d'un ouvrage au sens des dispositions de l'article 1792 du Code civil. L'expert judiciaire B... indique que le poteau 7 installé dans la cuisine a été conçu pour supporter une charge d'habitation répartie et normalisée de 1. 5 KN/ m ² et non pas une charge concentrée, ponctuelle, de 30 KN/ m ² ; qu'il existe donc un risque de poinçonnement du plancher du rez-de-chaussée, au droit du poteau additionnel, qui pourrait générer un affaissement du plancher et une flexion de l'entrait 4 qui pourrait alors écraser la cloison Placostyl située sous cet entrait. Comme l'a justement retenu le premier juge, les désordres ainsi constatés par l'expert ayant consisté dans la mutilation de la charpente compromettent la solidité du plancher de la cuisine, celle d'un entrait et partant de la cloison située dessous ; ils relèvent en cela de la garantie décennale de l'article 1792 susvisé, peu important qu'ils ne portent aucune atteinte à la solidité de la charpente ou des murs qui ne subissent aucune poussée et ne compromettent pas en cela la solidité de la maison dans son ensemble. Les désordres susvisés n'étaient pas apparents pour les acquéreurs profanes au moment de leur acquisition ainsi qu'il ressort des explications de l'expert ; Monsieur Franck X... et Madame Catherine Y... doivent donc être déclarés responsables vis-à-vis de leurs acquéreurs, des désordres de nature décennale susvisés » ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « l'expert estime que ces travaux n'ont pas été réalisés dans les règles de l'art, les désordres affectant la seule charpente qui est en bois et apparente. Il décrit un problème avec l'appui du poteau 7 dans la cuisine, au rez-de-chaussée conçu pour supporter une surcharge d'habitation répartie et normalisée de 1, 5 KN et non pas une charge concentrée, ponctuelle de 30 KN. Selon lui, il existe en conséquence un risque de poinçonnement du plancher du rez-de-chaussée, au droit du poteau additionnel en bois qui génèrerait un affaissement du plancher et donc une flexion de l'entrait 4 qui pourrait écraser la cloison Placostyl située sous l'entrait au rez-de-chaussée. Il ajoute que la solidité et la stabilité globale des structures ne sont pas compromises à l'exception faite du plancher de la cuisine au rez6 de-chaussée. Il qualifie cette situation comme n'étant ni satisfaisante, ni acceptable même s'il n'existe aucun risque d'effondrement de la charpente ou des murs. La solidité et la stabilité du plancher du rez-de-chaussée et de la cloison Placostyl sont donc affectées par ces désordres qui consistent ainsi en dommages affectant des éléments constitutifs de la maison et la rendent impropre à sa destination. L'actualité du désordre réside dans l'existence du risque d'affaissement » ;
1°/ ALORS QUE ne peuvent relever de la garantie décennale que des désordres qui compromettent actuellement la solidité de l'ouvrage, ou dont il est certain qu'ils compromettront la solidité de l'ouvrage dans le délai décennal ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel a relevé, par motifs propres, que les travaux réalisés par les consorts X...- Y... ont créé un « risque de poinçonnement du plancher du rez-de-chaussée, au droit du poteau additionnel, qui pourrait générer un affaissement du plancher et une flexion de l'entrait 4 qui pourrait alors écraser la cloison Placostyl située sous cet entrait » et, par motifs adoptés, que « l'actualité du désordre réside dans l'existence du risque d'affaissement » ; que ce faisant, la Cour d'appel n'a fait que constater l'existence d'un simple risque de désordres futurs purement hypothétiques ; qu'en jugeant pourtant que ces désordres compromettaient la solidité du plancher de la cuisine, celle d'un entrait et de la cloison située en dessous et relevaient en conséquence de la garantie décennale, la Cour d'appel a violé l'article 1792 du Code civil ;
2°/ ET ALORS QUE ne peuvent relever de la garantie décennale que des désordres qui compromettent actuellement la solidité de l'ouvrage, ou dont il est certain qu'ils compromettront la solidité de l'ouvrage dans le délai décennal ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel a relevé, par motifs propres, que les travaux réalisés par les consorts X...- Y... ont créé un « risque de poinçonnement du plancher du rez-de-chaussée, au droit du poteau additionnel, qui pourrait générer un affaissement du plancher et une flexion de l'entrait 4 qui pourrait alors écraser la cloison Placostyl située sous cet entrait » et par motifs adoptés, que « l'actualité du désordre réside dans l'existence du risque d'affaissement » ; qu'en jugeant que ces désordres relevaient de la garantie décennale, sans constater qu'ils compromettraient certainement la solidité de l'ouvrage dans le délai décennal, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1792 du Code civil ;
3°/ ET ALORS ENFIN QUE ne peuvent relever de la garantie décennale que les désordres qui rendent actuellement l'immeuble impropre à sa destination, ou dont il est certain que l'atteinte à la destination interviendra dans le délai décennal ; qu'en retenant, par motifs adoptés, que les désordres relevés rendaient la maison impropre à sa destination, sans nullement caractériser l'atteinte à l'habitabilité de celle-ci ni constater qu'une telle atteinte surviendrait de manière certaine dans le délai décennal, la Cour d'appel a derechef privé sa décision de base légale au regard de l'article 1792 du Code civil.