Cour de cassation, criminelle, Chambre criminelle, 8 février 2017, 16-80.389, Publié au bulletin
Cour de cassation - Chambre criminelle
- N° de pourvoi : 16-80.389
- ECLI:FR:CCASS:2017:CR00378
- Publié au bulletin
- Solution : Cassation et désignation de juridiction
Texte intégral
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Statuant sur le pourvoi formé par :
- M. Jean X...,
contre l'arrêt de la cour d'assises de TARN-ET-GARONNE, en date du 25 novembre 2015, qui, pour vol avec arme en récidive, dégradations volontaires par incendie en récidive et vol aggravé en récidive, l'a condamné à trente ans de réclusion criminelle ainsi que contre l'arrêt du même jour par lequel la cour a prononcé sur les intérêts civils ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 25 janvier 2017 où étaient présents : M. Guérin, président, M. Stephan, conseiller rapporteur, M. Castel, M. Raybaud, Mme Caron, M. Moreau, Mme Drai, conseillers de la chambre, M. Laurent, Mme Carbonaro, M. Beghin, conseillers référendaires ;
Avocat général : M. Gaillardot ;
Greffier de chambre : M. Bétron ;
Sur le rapport de M. le conseiller STEPHAN, les observations de la société civile professionnelle BOULLEZ, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général GAILLARDOT ;
Vu le mémoire produit ;
I-Sur le pourvoi en ce qu'il est formé contre l'arrêt pénal :
Sur le moyen unique de cassation proposé contre l'arrêt pénal, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 14, § 3 g, du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, 591 et 593 du code de procédure pénale, ensemble le droit au respect de la présomption d'innocence et le principe de non-incrimination ;
" il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré l'accusé coupable des chefs de vol aggravé et de destruction du bien d'autrui par incendie et de l'avoir condamné à la peine de trente ans de réclusion criminelle ;
" alors que toute personne accusée d'une infraction est présumée innocente jusqu'à ce que sa culpabilité ait été légalement établie ; que tout accusé bénéficie du privilège de non-incrimination ; que le fait que l'accusé ne reconnaisse pas sa culpabilité ne saurait justifier le prononcé de la peine ; qu'en l'espèce, pour justifier « le prononcé de peines fermes significatives », la cour d'assises a pris en compte le « positionnement » des accusés « consistant à nier les évidences à l'audience » ; qu'en prononçant ainsi, la cour d'assises a violé le privilège de non incrimination " ;
Vu l'article 591 du code de procédure pénale, ensemble l'article 365-1 dudit code ;
Attendu que, selon le second de ces textes, en cas de condamnation par la cour d'assises, la motivation consiste dans l'énoncé des principaux éléments à charge qui l'ont convaincue de la culpabilité de l'accusé ; qu'en l'absence d'autre disposition légale le prévoyant, la cour et le jury ne doivent pas motiver le choix de la peine qu'ils prononcent dans les conditions définies à l'article 362 du code susvisé ;
Attendu que la feuille de motivation, intégralement reproduite dans l'arrêt, comporte les énonciations suivantes : " la gravité des faits, au cours desquels les accusés n'ont pas hésité à exercer des violences graves sur des victimes âgées, les antécédents judiciaires des accusés et leur positionnement consistant à nier les évidences à l'audience, ce qui est de pronostic très défavorable pour l'avenir, justifient le prononcé de peines fermes significatives, étant relevé que M. Jean X... se trouve en état de récidive légale " ;
Mais attendu que ces énonciations, qui relèvent non pas de la déclaration de culpabilité mais de la motivation de la peine, contreviennent au principe ci-dessus énoncé ;
Qu'en conséquence, la cassation est encourue ;
Par ces motifs, et sans qu'il soit besoin d'examiner le moyen proposé contre l'arrêt civil :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'assises de Tarn-et-Garonne, en date du 25 novembre 2015, ensemble la déclaration du jury et des débats, qui l'ont précédé ;
CASSE et ANNULE, par voie de conséquence, l'arrêt du même jour par lequel la cour a prononcé sur les intérêts civils ;
DIT qu'en application de l'article 612-1 du code de procédure pénale, et dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice, la cassation aura effet à l'égard de M. Johnny X..., condamné par le même arrêt ;
Et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'assises du Tarn, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'assises de Tarn-et-Garonne et sa mention en marge ou à la suite des arrêts annulés ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le huit février deux mille dix-sept ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.