Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 26 janvier 2017, 15-27.209, Inédit
Cour de cassation - Chambre sociale
- N° de pourvoi : 15-27.209
- ECLI:FR:CCASS:2017:SO00154
- Non publié au bulletin
- Solution : Cassation
- Président
- M. Lacabarats (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Texte intégral
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu les articles 3 et 4 de l'accord national du 29 janvier 2000 portant révision provisoire des classifications dans la métallurgie pour les ingénieurs et cadres confirmés et les articles 1er, 21 et 22 de la convention collective nationale des ingénieurs et cadres de la métallurgie du 13 mars 1972 modifiée ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Spie communications ayant considéré que la convention collective n'était pas applicable aux cadres "transposés" ayant acquis cette qualité par l'effet de l'accord national, le syndicat Fédération générale des mines et de la métallurgie CFDT a saisi la juridiction prud'homale ;
Attendu que, pour accueillir la demande de la fédération, l'arrêt retient qu'il est permis de s'interroger sur l'objet du rapprochement incontestable, entre les "cadres transposés" aux coefficients de 60 à 92, et l'article 21 précité, s'il n'était de soumettre les premiers au régime du second, et que cette évidence est confortée par la lecture de la grille de transposition figurant à l'article 4 de l'accord du 29 janvier 2000 qui crée une base de niveaux unique et fait apparaître dans la grille de transposition, à l'intérieur d'une colonne, intitulée "classification de la convention collective nationale des ingénieurs et cadres de 1972", les coefficients 60 à 240 ;
Attendu cependant que selon l'article 3 de l'accord national du 29 janvier 2000 portant révision provisoire des classifications dans la métallurgie pour les ingénieurs et cadres confirmés, aux articles 1er, 21 et 22 de la convention collective nationale des ingénieurs et cadres de la métallurgie du 13 mars 1972 modifiée, il est ajouté, parallèlement à la position I et sans condition d'âge ou d'ancienneté, les six coefficients de classement suivants : 60, 68, 76, 80, 86 et 92 ; selon l'article 4 de cet accord, il est institué, à partir de l'an 2000 et à titre transitoire, une grille de transposition permettant, pour les salariés qui remplissent les conditions définies à l'article 2, de bénéficier de la qualité de cadre au sens des conventions collectives de branche de la métallurgie, et de déterminer le coefficient de classement résultant de cette convention collective, correspondant au coefficient de même niveau résultant de l'accord national du 21 juillet 1975 modifié sur la classification ; qu'il en résulte qu'un salarié bénéficiant de la qualité de cadre en vertu des dispositions prévues par cet accord ne peut bénéficier du mécanisme de progression automatique triennal prévu pour les ingénieurs et cadres confirmés ;
Qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 20 octobre 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée ;
Condamne le syndicat Fédération générale des mines et de la métallurgie CFDT aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, prononcé et signé par M. Lacabarats, conseiller le plus ancien faisant fonction de président, et Mme Schmeitzky-Lhuillery, conseiller le plus ancien en ayant délibéré, conformément à l'article 452 du code de procédure civile, en l'audience publique du vingt-six janvier deux mille dix-sept.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat aux Conseils, pour la société Spie communications
Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR dit qu'en application de la convention collective des ingénieurs et cadres de la métallurgie et de l'accord du 29 janvier 2000, les articles 21 et 22 de la convention doivent être appliqués à l'ensemble des cadres, y compris les cadres ayant un coefficient de classement 60, 68, 76, 80, 86, 92, d'AVOIR enjoint à la société SPIE COMMUNICATIONS d'appliquer les articles 21 et 22 de la convention collective des ingénieurs et cadres de la métallurgie à l'ensemble de ses salariés cadres et de régulariser la situation des salariés cadres aux coefficients de classement 60, 68, 76, 80, 86 et 92 et d'AVOIR condamné la société SPIE COMMUNICATIONS à verser à la FGMM CFDT la somme de 5.000 de dommages et intérêts ;
AUX MOTIFS QU' « ainsi que l'ont exactement retenu les premiers juges, le débat opposant les parties a trait à l'interprétation combinée, d'une part, des articles 21 et 22 de la convention collective des ingénieurs et cadres de la métallurgie du 13 mars 1972 et, d'autre part, de l'article 3 de l'accord national du 29 janvier 2000 – étant rappelé que les articles 21 et 22 définissent la qualification de cadre et prévoient trois positions à ce titre (I, II et III), dont la position I qui institue des règles d'avancement automatique, fonction de l'ancienneté, tandis que l'article 3 de l'accord du 29 janvier 2000 (qui a instauré une classification unique pour tous les salariés de la branche) stipule : "aux articles 1er, 21 et 22 de la convention collective nationale des ingénieurs et cadres de la métallurgie du 13 mars 1972, il est ajouté parallèlement à la position I et sans condition d'âge ou d'ancienneté les six coefficients de classement suivants : 60, 68, 76, 80, 86, 92" ; que la société SPIE COMMUNICATIONS estime que ce dernier texte n'a pas pour effet d'intégrer à la position I, les salariés disposant de ces six coefficients et qualifiés de "cadres transposés" ; que ces derniers demeurent donc en dehors du système d'avancement automatique prévu à l'article 21 qui ne leur est pas applicable et qu'elle ne leur applique donc pas, ainsi qu'elle l'a exposé à ses délégués du personnel, en dépit de leur opposition, dans ses correspondances des 6 et 12 juillet 2012 ; mais qu'au-delà de l'analyse sémantique des textes en cause, à laquelle se livrent les deux parties, il est permis de s'interroger sur l'objet du rapprochement incontestable entre les "cadres transposés" aux coefficients de 60 à 92, et l'article 21 précité, s'il n'était de soumettre les premiers au régime du second ; que cette évidence est confortée par la lecture de la grille de transposition figurant à l'article 4 de l'accord du 29 janvier 2000 qui crée une base de niveaux unique et fait apparaître dans la grille de transposition, à l'intérieur d'une colonne, intitulée "classification de la convention collective nationale des ingénieurs et cadres de 1972", les coefficients 60 à 240 ; que, dans ces conditions, la cour ne peut que faire siens les motifs des premiers juges et confirmer la décision entreprise qui a accueilli l'interprétation et les demandes de la Fédération Générale des Mines de la Métallurgie de la CFDT » ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QU' « il ressort des écritures des parties que la question soumise au tribunal est celle de savoir si les articles 21 et 22 de la convention collective des ingénieurs et cadres de la métallurgie, qui prévoient un avancement automatique des salariés sur la grille de classification, sont applicables aux salariés dit "transposés", c'est-à-dire les salariés devenus cadres au titre de l'accord du 29 janvier 2000 ; que l'article 3 de cet accord stipule qu' "aux articles 1er, 21 et 22 de la Convention Collective Nationale des Ingénieurs et Cadres de la métallurgie du 13 mars 1972 modifiée, il est ajouté, parallèlement à la position I et sans condition d'âge ou d'ancienneté, les six coefficients de classements suivants : 60, 68, 76, 80, 86, 92" ; qu'il résulte de la lettre de cet accord du 29 janvier 2000 que ses dispositions ne se substituent pas aux articles 21 et 22 de la convention collective mais qu'aux coefficients de classement de la position I déjà existants, sont ajoutés, sans condition d'âge et d'ancienneté, six nouveaux coefficients 60 à 92 et que sauf à ajouter des stipulations qui n'y figurent pas, l'accord ne prévoit pas d'exclure du bénéfice des articles 21 et 22 de la convention, les salariés auxquels est conféré le statut de cadre en vertu de la nouvelle classification ; qu'en outre, l'exclusion de certains cadres du bénéfice des articles 21 et 22, en ce qu'elle génère une différenciation entre ces salariés selon qu'ils sont ou non transposés, est contraire au principe d'égalité de traitement ; qu'enfin, il convient de constater que la société SPIE Communications donne peu d'explications sur le motif de son refus d'appliquer la convention aux cadres transposés et le fait, qui n'est d'ailleurs pas démontré, que ceux-ci n'occupent pas les mêmes types de postes que les cadres de la position I, II et III en raison du niveau de diplômes, de la condition d'âge et des années d'expérience du salarié ne peut justifier ce refus alors que l'accord du 29 janvier 2000 confère le statut de cadre à ces salariés, sans condition d'âge ou d'ancienneté ; que dès lors que les accords et conventions collectives ont un caractère impératif et qu'ils doivent être exécutés de bonne foi, il convient de constater que la combinaison des articles 21 et 22 de la convention collective des ingénieurs et cadres de la métallurgie et de l'accord du 29 janvier 2000 ne permet pas, ainsi que le soutient la société SPIE Communications, de refuser aux cadres "transposés" les mêmes conditions d'avancement automatique que celles qui sont appliquées aux cadres en vertu des articles 21 et 22 de la convention ; que par conséquent, en application des engagements conventionnels précités, la société SPIE Communications doit appliquer les articles 21 et 22 de la convention collective des ingénieurs et cadres de la métallurgie à l'ensemble de ses salariés cadres, y compris les cadres de coefficient de classement 60, 68, 76, 80, 86, 92 et il lui sera fait injonction de régulariser la situation des salariés concernés ; (…) que malgré les demandes réitérées des élus et du syndicat demandeur, la société SPIE Communications a persisté dans son refus d'appliquer les articles 21 et 22 aux cadres transposés en violation de la convention collective des ingénieurs et cadres de la métallurgie ; que le préjudice ainsi subi par le syndicat devra être réparé par l'allocation de la somme de 5.000 euros » ;
1. ALORS QUE l'accord national du 29 janvier 2000 portant révision provisoire des classifications dans la métallurgie a pour objet d'étendre la catégorie des cadres et l'application des dispositions de la convention collective nationale des ingénieurs et cadres de la métallurgie du 13 mars 1972 à certains salariés qui occupent un emploi relevant de l'accord national du 27 juillet 1975 sur la classification des salariés non-cadres ; qu'il prévoit que peuvent bénéficier de la qualité de cadre, les salariés qui occupent un emploi classé au moins au coefficient 255 selon l'accord du 27 juillet 1975, disposent d'une autonomie suffisante pour remplir leurs missions et ont manifesté la volonté d'assumer cette autonomie par la conclusion d'une convention de forfait ; que selon l'article 3, pour accueillir ces salariés dans la classification des cadres, « aux articles 1er, 21 et 22 de la convention collective nationale des ingénieurs et cadres de la métallurgie du 13 mars 1972, il est ajouté parallèlement à la position I et sans condition d'âge ou d'ancienneté, les six coefficients de classement suivants : 60, 68, 76, 80, 86, 92 » ; qu'il en résulte que les salariés qui deviennent cadres en application de l'accord du 29 janvier 2000 ne sont pas intégrés dans la position I et ne bénéficient pas du système de majoration automatique de coefficient, en fonction de l'ancienneté du salarié, prévu par les articles 21 et 22 de la convention collective des ingénieurs et cadres de la métallurgie, pour les cadres relevant de la position I ; qu'en affirmant que le rapprochement opéré par l'article 3 de l'accord entre les six coefficients qu'il crée et l'article 21 a manifestement pour objet de soumettre ces coefficients au régime de progression automatique de coefficient prévu par l'article 21, pour retenir que les salariés classés cadres en application de l'accord du 29 janvier 2000 doivent bénéficier du mécanisme de progression de coefficient prévu par les articles 21 et 22, la cour d'appel a violé les articles 3 et 4 de l'accord du 29 janvier 2000, ensemble les articles 21 et 22 de la convention collective du 13 mars 1972 ;
2. ALORS QUE selon les articles 21 et 22 de la convention collective des ingénieurs et cadres de la métallurgie, les cadres de la position I sont les salariés titulaires d'un diplôme d'ingénieur ou d'un diplôme équivalent, qui sont engagés pour remplir immédiatement ou au bout d'un certain temps des fonctions d'ingénieur ou cadre ; qu'ils accèdent à la position II, dès qu'ils ont 3 ans d'ancienneté en position I, dont une année d'expérience dans l'entreprise, et ont atteint l'âge de 27 ans ; que ces ingénieurs ou cadres débutants sont classés, selon leur âge et leur ancienneté, aux coefficients 60, 68, 76, 84 et 92 ; qu'en revanche, selon les articles 3 et 4 de l'accord du 29 janvier 2000, les salariés qui deviennent cadres en application de l'accord du 29 janvier 2000 sont classés « sans condition d'âge et d'ancienneté » dans les coefficients 60, 68, 76, 80, 86 ou 92 en fonction uniquement de l'emploi qu'ils occupent et de la classification de cet emploi dans l'accord du 21 janvier 1975 sur la classification des salariés non-cadres ; qu'il ne résulte donc pas de ces deux textes un système de classification unique, ni même des niveaux de classification identiques ; qu'en affirmant le contraire, pour retenir que les « cadres transposés » visés par l'accord du 29 janvier 2000 doivent bénéficier du système d'avancement automatique de coefficient prévu par l'article 21 de la convention collective nationale des ingénieurs et cadres de la métallurgie du 13 mars 1972, la cour d'appel a violé les textes précités ;
3. ALORS QUE les articles 21 et 22 de la convention collective des ingénieurs et cadres de la métallurgie prévoient les critères de classification des cadres dans les positions I, II et III et définissent un système de majoration automatique de coefficient, en fonction de l'ancienneté du salarié, pour les cadres des positions I et II ; que l'accord du 29 janvier 2000, qui étend l'application des dispositions de la convention collective des ingénieurs et cadres de la métallurgie à d'autres salariés que ceux visés par l'article 1er de cette convention, précise que ces salariés seront classés dans des coefficients de classement « ajoutés » « parallèlement à la position I et sans condition d'âge et d'ancienneté » aux articles 1er, 21 et 22 de cette convention ; qu'il en résulte que les salariés visés par cet accord n'entrent pas dans l'une des positions définies par les articles 21 et 22 et ne bénéficient pas, par suite, du système de progression automatique de coefficient qu'ils prévoient ; qu'en affirmant que l'accord du 29 janvier 2000 ne prévoit pas d'exclure des articles 21 et 22 de la convention nationale des ingénieurs et cadres de la métallurgie les salariés auxquels est conféré le statut de cadre en vertu de la nouvelle classification, la cour d'appel a violé les textes précités ;
4. ALORS QUE le principe d'égalité de traitement n'interdit pas de traiter de façon différente des salariés placés en situation différente ; que les « cadres transposés » obtiennent la qualité de cadre, en application de l'accord du 29 janvier 2000, en fonction du niveau de classement de leur emploi dans la grille de classification des non-cadres, de l'autonomie dont ils bénéficient dans l'exercice de leurs fonctions et de la volonté manifestée d'exercer cette autonomie par la conclusion d'une convention de forfait ; que les cadres de la position I obtiennent quant à eux la qualité de cadre en raison de leur âge, des diplômes dont ils sont titulaires et de leur vocation à exercer après quelques années d'expérience des fonctions d'ingénieur ou cadre de la position II ; qu'en conséquence, les « cadres transposés » et les cadres de la position I ne sont pas placés dans la même situation au regard du mécanisme de progression de coefficient en fonction de l'ancienneté prévu par les articles 21 et 22 de la convention collective du 13 mars 1972 ; qu'en affirmant néanmoins par motifs adoptés que l'exclusion des « cadres transposés » du bénéfice des articles 21 et 22 est contraire au principe d'égalité de traitement, la cour d'appel a violé le principe précité ;
5. ALORS QUE le principe d'égalité de traitement n'interdit pas les différences de traitement justifiées par des raisons objectives et pertinentes ; que selon les articles 3 et 4 de l'accord du 29 janvier 2000, d'une part, et les articles 21 et 22 de la convention collective du 13 mars 1972, d'autre part, les coefficients de classement des « cadres transposés » sont définis uniquement par la fonction tenue par le salarié, tandis que les coefficients de classement des cadres de la position I sont définis en fonction de l'âge et de l'ancienneté du salarié ; que cette circonstance justifie d'exclure les « cadres transposés » du mécanisme de progression de coefficient en fonction de l'ancienneté du salarié, prévu par les articles 21 et 22 ; qu'en affirmant néanmoins par motifs adoptés que l'exclusion des « cadres transposés » du bénéfice des articles 21 et 22 est contraire au principe d'égalité de traitement, la cour d'appel a violé le principe précité.