Cour de cassation, civile, Chambre civile 3, 15 décembre 2016, 15-23.831, Inédit
Cour de cassation, civile, Chambre civile 3, 15 décembre 2016, 15-23.831, Inédit
Cour de cassation - Chambre civile 3
- N° de pourvoi : 15-23.831
- ECLI:FR:CCASS:2016:C301415
- Non publié au bulletin
- Solution : Cassation
Audience publique du jeudi 15 décembre 2016
Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, du 17 juin 2015- Président
- M. Chauvin (président)
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 17 juin 2015), que la SCI Mehdi, propriétaire de locaux commerciaux à usage de glacier et salon de thé donnés à bail à la société Violette Partenaire, lui a délivré, le 22 septembre 2008, un congé avec refus de renouvellement et offre d'une indemnité d'éviction ; que, le 2 décembre 2010, elle lui a délivré un commandement visant à faire cesser l'activité de fabrication de crêpes et de gaufres contraire à la destination du bail ; que, le 18 mai 2011, elle a exercé son droit de repentir ; que, le 18 octobre 2012, elle a délivré à la locataire un nouveau commandement visant la clause résolutoire et la sommant de mettre un terme à l'activité de fabrication de crêpes et de gaufres ; que la société Violette Partenaire a assigné la SCI Mehdi en fixation de l'indemnité d'éviction et en opposition au commandement du 2 décembre 2010 ; qu'à titre reconventionnel, la SCI Mehdi a sollicité l'acquisition de la clause résolutoire ;
Sur le second moyen :
Vu l'article 1315, devenu 1353, du code civil ;
Attendu que celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver ; que, réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation ;
Attendu que, pour dire que la locataire a commis une infraction à la clause de destination du bail et suspendre les effets de la clause résolutoire, l'arrêt retient que la fabrication de crêpes et de gaufres sur place est établie et que la société locataire ne justifie pas avoir régularisé la situation dans le mois de la délivrance du commandement ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'il appartenait à la bailleresse d'établir la persistance de l'infraction après l'expiration du délai de mise en demeure, la cour d'appel, qui a inversé la charge de la preuve, a violé le texte susvisé ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le premier moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 17 juin 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne la SCI Medhi aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la SCI Mehdi et la condamne à payer à la société Violette Partenaire la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quinze décembre deux mille seize.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat aux Conseils, pour la société Violette partenaire
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir déclaré recevable la demande de prononcé de la résiliation du bail formée par la SCI Medhi, d'avoir jugé que la vente de crêpes et de gaufres sur place et à emporter n'était pas une activité conforme à la clause de destination du bail, d'avoir accordé à la société Violette partenaire un délai d'un mois pour régulariser cette infraction et suspendu les effets de la clause résolutoire pendant ce temps, et d'avoir dit qu'à défaut de régularisation dans le délai la clause résolutoire produirait ses effets et la SCI Mehdi pourrait poursuivre l'expulsion de la société Violette partenaire ;
AUX MOTIFS QUE, contrairement à ce que soutient la société Violette partenaire, la SCI Mehdi a soumis à la cour l'intégralité du dispositif du jugement dont elle a relevé appel et dont elle sollicite l'infirmation ; qu'elle critique le débouté de sa demande de constat de la résiliation du bail au 2 janvier 2011, notamment en raison du caractère continu de l'infraction au bail ; que si les demandes de constat de la résiliation de plein droit du bail au 18 novembre 2012 et de résiliation judiciaire du bail n'ont effectivement pas été présentées aux premiers juges, comme le prétend l'intimée, elles ne peuvent être qualifiées de demandes nouvelles puisque, conformément à l'article 565 du code de procédure civile, elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au tribunal, l'objet des demandes étant la résiliation du bail en date du 20 mars 2000 ;
ALORS QUE la société Violette Partenaire faisait valoir que, devant le tribunal, la société Mehdi avait uniquement demandé la résiliation de plein droit du bail à compter du 2 janvier 2011, par l'effet du commandement du 2 décembre 2010 ; que devant la cour d'appel, la société Mehdi avait soumis aux juges un tout autre litige, en demandant le constat de l'acquisition de la clause résolutoire, non plus par l'effet du commandement du 2 décembre 2010, auquel elle avait renoncé, mais par l'effet du commandement du 18 octobre 2012 ; que le tribunal n'avait pas statué sur cette prétention, qui ne lui avait pas été soumise, de sorte qu'en application de l'article 562 du code de procédure civile cette demande devait être déclarée irrecevable, sauf à priver la société Violette Partenaire du double degré de juridiction (concl., p. 10 in fine à 13) ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir jugé que la vente de crêpes et de gaufres sur place et à emporter n'était pas une activité conforme à la clause de destination du bail, d'avoir accordé à la société Violette partenaire un délai d'un mois à compter de la signification de l'arrêt pour régulariser l'infraction de fabrication de crêpes sur place, d'avoir suspendu les effets de la clause résolutoire contenue dans le commandement du 18 octobre 2012 à la régularisation de l'infraction dans le délai prescrit et d'avoir dit que si l'infraction était régularisée dans le délai accordé, la clause résolutoire ne jouerait pas et que, dans le cas contraire, elle produirait ses effets et que la SCI Mehdi pourrait poursuivre l'expulsion de la société Violette partenaire ;
AUX PREMIERS MOTIFS QUE le bail du 20 mars 2000 liant les parties, contient une clause résolutoire à défaut d'exécution par le preneur d'une seule des clauses du bail ; que la SCI Mehdi ne demande pas le constat de la résiliation du bail en application de la sommation du 2 décembre 2010 mais pour persistance de l'infraction au bail visée par le commandement délivré au preneur pour inexécution des obligations locatives en date du 18 octobre 2012, de sorte que l'exercice du droit de repentir ne l'empêche pas d'invoquer une infraction qui aurait persisté après la notification du repentir ;
ALORS QUE l'exercice du droit de repentir est irrévocable ; que le propriétaire ne peut tenter de faire échec à son repentir en invoquant des manquements au contrat antérieurs, portés à sa connaissance avant l'exercice dudit droit, mais qui auraient persisté ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que le 22 septembre 2008, la société Medhi a notifié à la société Violette partenaire un congé avec refus de renouvellement et une offre d'indemnité d'éviction (arrêt, p. 2 § 6) ; que le 2 décembre 2010, la société Mehdi a notifié à sa locataire une sommation visant la clause résolutoire d'avoir à faire cesser l'infraction aux clauses du bail, « à savoir la fabrication de crêpes et de gaufres sur place » (arrêt, p. 2 § 7) ; que le 18 mai 2011, la société Mehdi a exercé son droit de repentir avec offre de renouvellement (arrêt, p. 2 §8) ; qu'il ressort de ces constatations que la société Mehdi ne pouvait invoquer, le 18 octobre 2012, le fait que la société Violette partenaire aurait persisté à fabriquer des crêpes sur place ; qu'en jugeant le contraire (arrêt, p. 5 § 4), la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, violant ainsi les articles L. 145-41, L. 145-58 et L. 145-59 du code de commerce ;
AUX DEUXIÈMES MOTIFS QUE la fabrication de crêpes sur place est suffisamment établie par la production du procès-verbal dressé par huissier le 24 juin 2012 aux termes duquel ce dernier a constaté à l'extérieur des locaux, devant le local commercial, la présence d'une double crêpière, d'un pot de pâte à tartiner, de confiture, et de sucre, et la présence d'un salarié au niveau de cette installation, préparant des crêpes à plusieurs reprises ; que ce constat confirme celui dressé par le même huissier au même endroit, le 23 octobre 2010, qui avait également relevé la présence d'une double crêpière et d'un gaufrier en avancée sur la rue devant le local commercial, ainsi que la présence de panneaux mentionnant le prix de prix de diverses variétés de crêpes et de gaufres ; que la société Violette Partenaire, pour contester la réalité de cette fabrication sur place de crêpes, ne produit qu'un procès-verbal de constat qu'elle a fait dresser le 15 novembre 2012, aux termes duquel aucune crêpe n'a été fabriquée sur place ; qu'or, ce constat ne fait la preuve que de l'absence de fabrication sur place de crêpes le jour où l'huissier s'est déplacé mais la société locataire qui ne produit aux débats aucune autre pièce émanant de ses clients, voisins ne fait pas la preuve qu'à l'exception du jour de passage de son huissier elle ait cessé la fabrication de crêpes ; que la clause de destination du bail « glacier, salon de thé et vente de boissons chaudes ou froides et de pâtisseries à emporter ou consommer sur place, à l'exclusion de toute fabrication », exclut précisément la fabrication sur place de crêpes sur la crêpière ;
1°) ALORS QUE toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu'un mois après un commandement demeuré infructueux ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que le commandement du 18 octobre 2012 ne visait que la clause résolutoire « d'avoir à faire cesser l'infraction aux clauses du bail de fabrication de crêpes sur place » (arrêt, p. 2 § 9) ; que la cour d'appel a relevé que l'huissier avait constaté « à l'extérieur des locaux, devant le local commercial, la présence d'une double crêpière (…) » (arrêt, p. 5 § 5 et 6) ; qu'il ressort de ces constatations qu'aucune fabrication de crêpes « sur place », à l'intérieur des locaux loués, ne pouvait être reprochée à la société Violette partenaire ; que seule la fabrication de crêpes sur le trottoir, c'est-à-dire sur le domaine public, à l'extérieur des locaux, a été constatée ; qu'en jugeant pourtant que « la fabrication de crêpes sur place » était établie et constituait une infraction à la clause de destination du bail, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, violant ainsi l'article L. 145-41 du code de commerce ;
2°) ALORS QU' en tout état de cause, la société Violette partenaire faisait valoir que, compte tenu des stipulations du bail, seule la fabrication de crêpes à l'intérieur des locaux loués pouvait constituer une infraction aux clauses du bail (concl., p. 30 à 33) ; qu'en jugeant que « la fabrication de crêpes sur place » était établie et constituait une infraction à la clause de destination du bail, sans rechercher, comme il lui était demandé, si les articles 1 et 2 du bail interdisaient la fabrication de crêpes à l'extérieur des locaux loués, ce qui n'était pas le cas, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 du code civil et L. 145-41 du code de commerce ;
AUX TROISIÈMES MOTIFS QU' au surplus, la SCI Mehdi est bien fondée à soutenir que la vente de crêpes et de gaufres sur place ou à emporter n'est pas une activité incluse dans celle de glacier, salon de thé et pâtisserie, les crêpes et gaufres étant des produits spécifiques cuits ou réchauffés sur place, nullement assimilables aux pâtisseries qui sont préparées à l'avance ; qu'elle ne sont pas servies habituellement dans des salons de thé mais soit dans des crêperies soit à l'extérieur, compte tenu des odeurs que leur préparation occasionne ; qu'en conséquence, la vente de crêpes et gaufres sur place ou à emporter n'est pas une activité conforme à la clause de destination du bail ; que l'infraction à la clause de destination du bail est établie et le locataire ne justifie pas avoir régularisé la situation dans le mois de la délivrance du commandement ;
1°) ALORS QUE la cour d'appel a constaté que le commandement du 18 octobre 2012 ne visait que la clause résolutoire « d'avoir à faire cesser l'infraction aux clauses du bail de fabrication de crêpes sur place » (arrêt, p. 2 § 9) ; que la vente de crêpes et de gaufres, sur place ou à emporter, n'était pas visée par le commandement du 18 octobre 2012 ; que la cour d'appel a pourtant énoncé que la société Medhi était fondée à soutenir que la vente de crêpes et de gaufres sur place ou à emporter n'était pas une activité incluse dans celle de glacier et de salon de thé, et que cette activité n'était pas conforme à la clause de destination du bail ; qu'elle en a déduit que l'infraction à cette clause était établie et que la société Violette partenaire ne justifiait pas avoir régularisé la situation dans le mois de la délivrance du commandement (arrêt, p. 5 in fine et p. 6 § 1) ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, dont il résultait que seule la fabrication de crêpes sur place pouvait permettre de mettre en oeuvre la clause résolutoire, violant ainsi l'article L. 145-41 du code de commerce ;
2°) ALORS QU' en tout état de cause la société Violette partenaire faisait valoir que l'activité de vente de crêpes et de gaufres était incluse dans l'activité de « salon de thé », autorisant la vente de « pâtisseries » ; que la société Violette partenaire démontrait (concl., p. 28) que la société Mehdi donnait, dans ses écritures, une définition partielle de l'activité de « salon de thé »; que la cour d'appel s'est bornée à énoncer que l'activité de vente de crêpes et de gaufres n'était pas incluse dans celle de glacier, salon de thé et pâtisserie, ces produits n'étant pas assimilables aux pâtisseries, ni servis habituellement dans des salons de thé (arrêt, p. 5 in fine) ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme il lui était demandé, si, compte tenu de la définition complète de salon de thé, rappelée par la locataire, l'activité de vente de crêpes et de gaufres était incluse dans celle de salon de thé, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil ;
3°) ALORS QU' en toute hypothèse il appartient au bailleur d'établir la persistance de l'infraction aux clauses du bail après l'expiration du délai de mise en demeure ; qu'en jugeant pourtant que « la société locataire, qui ne produit aux débats aucune autre pièce émanant de ses clients, voisins, ne fait pas la preuve qu'à l'exception du jour de passage de son huissier elle ait cessé la fabrication de crêpes » (arrêt, p. 5 § 7) et que « le locataire ne justifie pas avoir régularisé la situation dans le mois de la délivrance du commandement » (arrêt, p. 6 § 1), la cour d'appel a inversé la charge de la preuve, violant les articles 1315 du code civil et L. 145-41 du code de commerce ;
ET AUX AUTRES MOTIFS QUE l'allégation de mauvaise foi de la société bailleresse est sans fondement ; que la tolérance invoquée ou la connaissance supposée de l'appartenance de la locataire à la chaîne Häagen-Dazs d'ailleurs connue comme glacier essentiellement, par le bailleur ne valent pas accord pour changement de destination du bail, contraire aux dispositions du règlement de copropriété que le bailleur est tenu de respecter ; que dans ces conditions, la clause résolutoire de plein droit du bail liant les parties trouve à s'appliquer, faute de régularisation de l'infraction à la clause de destination du bail dans le mois de la délivrance du commandement visant la clause résolutoire du 18 octobre 2012 ;
ALORS QUE la clause résolutoire doit être invoquée de bonne foi par le bailleur ; que la société Violette partenaire faisait valoir que la société Mehdi avait eu connaissance, dès le 24 juillet 2008, de la présence d'une crêpière devant les locaux loués, mais qu'elle avait attendu près de deux ans et demi pour faire signifier une mise en demeure visant la clause résolutoire ; que la société Mehdi n'avait pas obtenu satisfaction dans la procédure de première instance de révision du loyer, ce dernier étant passé, à compter du 13 juin 2007, de 128.658,50 euros à 46.200 euros annuels ; que la société Medhi avait refusé de renouveler le bail et que, durant la procédure de fixation en indemnité d'éviction, elle avait essayé d'évincer la société Violette partenaire des locaux sans avoir à lui payer une quelconque somme, en lui délivrant une mise en demeure visant la clause résolutoire (concl., p 21 et 23 ; p.33 et 34) ; que la cour d'appel s'est contentée d'énoncer que l'allégation de mauvaise foi était sans fondement, la tolérance invoquée ou la connaissance supposée de l'appartenance de la locataire à la chaîne Häagen-Dazs ne valant pas accord pour un changement de destination du bail contraire aux dispositions du règlement de copropriété (arrêt, p. 6 § 2) ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme il lui était demandé, si la clause résolutoire était mise en oeuvre de mauvaise foi par la société Mehdi, pour évincer la société Violette partenaire des locaux sans avoir à lu payer la moindre somme, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 145-41 du code de commerce et 1134 du code civil.
ECLI:FR:CCASS:2016:C301415
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 17 juin 2015), que la SCI Mehdi, propriétaire de locaux commerciaux à usage de glacier et salon de thé donnés à bail à la société Violette Partenaire, lui a délivré, le 22 septembre 2008, un congé avec refus de renouvellement et offre d'une indemnité d'éviction ; que, le 2 décembre 2010, elle lui a délivré un commandement visant à faire cesser l'activité de fabrication de crêpes et de gaufres contraire à la destination du bail ; que, le 18 mai 2011, elle a exercé son droit de repentir ; que, le 18 octobre 2012, elle a délivré à la locataire un nouveau commandement visant la clause résolutoire et la sommant de mettre un terme à l'activité de fabrication de crêpes et de gaufres ; que la société Violette Partenaire a assigné la SCI Mehdi en fixation de l'indemnité d'éviction et en opposition au commandement du 2 décembre 2010 ; qu'à titre reconventionnel, la SCI Mehdi a sollicité l'acquisition de la clause résolutoire ;
Sur le second moyen :
Vu l'article 1315, devenu 1353, du code civil ;
Attendu que celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver ; que, réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation ;
Attendu que, pour dire que la locataire a commis une infraction à la clause de destination du bail et suspendre les effets de la clause résolutoire, l'arrêt retient que la fabrication de crêpes et de gaufres sur place est établie et que la société locataire ne justifie pas avoir régularisé la situation dans le mois de la délivrance du commandement ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'il appartenait à la bailleresse d'établir la persistance de l'infraction après l'expiration du délai de mise en demeure, la cour d'appel, qui a inversé la charge de la preuve, a violé le texte susvisé ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le premier moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 17 juin 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne la SCI Medhi aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la SCI Mehdi et la condamne à payer à la société Violette Partenaire la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quinze décembre deux mille seize.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat aux Conseils, pour la société Violette partenaire
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir déclaré recevable la demande de prononcé de la résiliation du bail formée par la SCI Medhi, d'avoir jugé que la vente de crêpes et de gaufres sur place et à emporter n'était pas une activité conforme à la clause de destination du bail, d'avoir accordé à la société Violette partenaire un délai d'un mois pour régulariser cette infraction et suspendu les effets de la clause résolutoire pendant ce temps, et d'avoir dit qu'à défaut de régularisation dans le délai la clause résolutoire produirait ses effets et la SCI Mehdi pourrait poursuivre l'expulsion de la société Violette partenaire ;
AUX MOTIFS QUE, contrairement à ce que soutient la société Violette partenaire, la SCI Mehdi a soumis à la cour l'intégralité du dispositif du jugement dont elle a relevé appel et dont elle sollicite l'infirmation ; qu'elle critique le débouté de sa demande de constat de la résiliation du bail au 2 janvier 2011, notamment en raison du caractère continu de l'infraction au bail ; que si les demandes de constat de la résiliation de plein droit du bail au 18 novembre 2012 et de résiliation judiciaire du bail n'ont effectivement pas été présentées aux premiers juges, comme le prétend l'intimée, elles ne peuvent être qualifiées de demandes nouvelles puisque, conformément à l'article 565 du code de procédure civile, elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au tribunal, l'objet des demandes étant la résiliation du bail en date du 20 mars 2000 ;
ALORS QUE la société Violette Partenaire faisait valoir que, devant le tribunal, la société Mehdi avait uniquement demandé la résiliation de plein droit du bail à compter du 2 janvier 2011, par l'effet du commandement du 2 décembre 2010 ; que devant la cour d'appel, la société Mehdi avait soumis aux juges un tout autre litige, en demandant le constat de l'acquisition de la clause résolutoire, non plus par l'effet du commandement du 2 décembre 2010, auquel elle avait renoncé, mais par l'effet du commandement du 18 octobre 2012 ; que le tribunal n'avait pas statué sur cette prétention, qui ne lui avait pas été soumise, de sorte qu'en application de l'article 562 du code de procédure civile cette demande devait être déclarée irrecevable, sauf à priver la société Violette Partenaire du double degré de juridiction (concl., p. 10 in fine à 13) ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir jugé que la vente de crêpes et de gaufres sur place et à emporter n'était pas une activité conforme à la clause de destination du bail, d'avoir accordé à la société Violette partenaire un délai d'un mois à compter de la signification de l'arrêt pour régulariser l'infraction de fabrication de crêpes sur place, d'avoir suspendu les effets de la clause résolutoire contenue dans le commandement du 18 octobre 2012 à la régularisation de l'infraction dans le délai prescrit et d'avoir dit que si l'infraction était régularisée dans le délai accordé, la clause résolutoire ne jouerait pas et que, dans le cas contraire, elle produirait ses effets et que la SCI Mehdi pourrait poursuivre l'expulsion de la société Violette partenaire ;
AUX PREMIERS MOTIFS QUE le bail du 20 mars 2000 liant les parties, contient une clause résolutoire à défaut d'exécution par le preneur d'une seule des clauses du bail ; que la SCI Mehdi ne demande pas le constat de la résiliation du bail en application de la sommation du 2 décembre 2010 mais pour persistance de l'infraction au bail visée par le commandement délivré au preneur pour inexécution des obligations locatives en date du 18 octobre 2012, de sorte que l'exercice du droit de repentir ne l'empêche pas d'invoquer une infraction qui aurait persisté après la notification du repentir ;
ALORS QUE l'exercice du droit de repentir est irrévocable ; que le propriétaire ne peut tenter de faire échec à son repentir en invoquant des manquements au contrat antérieurs, portés à sa connaissance avant l'exercice dudit droit, mais qui auraient persisté ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que le 22 septembre 2008, la société Medhi a notifié à la société Violette partenaire un congé avec refus de renouvellement et une offre d'indemnité d'éviction (arrêt, p. 2 § 6) ; que le 2 décembre 2010, la société Mehdi a notifié à sa locataire une sommation visant la clause résolutoire d'avoir à faire cesser l'infraction aux clauses du bail, « à savoir la fabrication de crêpes et de gaufres sur place » (arrêt, p. 2 § 7) ; que le 18 mai 2011, la société Mehdi a exercé son droit de repentir avec offre de renouvellement (arrêt, p. 2 §8) ; qu'il ressort de ces constatations que la société Mehdi ne pouvait invoquer, le 18 octobre 2012, le fait que la société Violette partenaire aurait persisté à fabriquer des crêpes sur place ; qu'en jugeant le contraire (arrêt, p. 5 § 4), la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, violant ainsi les articles L. 145-41, L. 145-58 et L. 145-59 du code de commerce ;
AUX DEUXIÈMES MOTIFS QUE la fabrication de crêpes sur place est suffisamment établie par la production du procès-verbal dressé par huissier le 24 juin 2012 aux termes duquel ce dernier a constaté à l'extérieur des locaux, devant le local commercial, la présence d'une double crêpière, d'un pot de pâte à tartiner, de confiture, et de sucre, et la présence d'un salarié au niveau de cette installation, préparant des crêpes à plusieurs reprises ; que ce constat confirme celui dressé par le même huissier au même endroit, le 23 octobre 2010, qui avait également relevé la présence d'une double crêpière et d'un gaufrier en avancée sur la rue devant le local commercial, ainsi que la présence de panneaux mentionnant le prix de prix de diverses variétés de crêpes et de gaufres ; que la société Violette Partenaire, pour contester la réalité de cette fabrication sur place de crêpes, ne produit qu'un procès-verbal de constat qu'elle a fait dresser le 15 novembre 2012, aux termes duquel aucune crêpe n'a été fabriquée sur place ; qu'or, ce constat ne fait la preuve que de l'absence de fabrication sur place de crêpes le jour où l'huissier s'est déplacé mais la société locataire qui ne produit aux débats aucune autre pièce émanant de ses clients, voisins ne fait pas la preuve qu'à l'exception du jour de passage de son huissier elle ait cessé la fabrication de crêpes ; que la clause de destination du bail « glacier, salon de thé et vente de boissons chaudes ou froides et de pâtisseries à emporter ou consommer sur place, à l'exclusion de toute fabrication », exclut précisément la fabrication sur place de crêpes sur la crêpière ;
1°) ALORS QUE toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu'un mois après un commandement demeuré infructueux ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que le commandement du 18 octobre 2012 ne visait que la clause résolutoire « d'avoir à faire cesser l'infraction aux clauses du bail de fabrication de crêpes sur place » (arrêt, p. 2 § 9) ; que la cour d'appel a relevé que l'huissier avait constaté « à l'extérieur des locaux, devant le local commercial, la présence d'une double crêpière (…) » (arrêt, p. 5 § 5 et 6) ; qu'il ressort de ces constatations qu'aucune fabrication de crêpes « sur place », à l'intérieur des locaux loués, ne pouvait être reprochée à la société Violette partenaire ; que seule la fabrication de crêpes sur le trottoir, c'est-à-dire sur le domaine public, à l'extérieur des locaux, a été constatée ; qu'en jugeant pourtant que « la fabrication de crêpes sur place » était établie et constituait une infraction à la clause de destination du bail, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, violant ainsi l'article L. 145-41 du code de commerce ;
2°) ALORS QU' en tout état de cause, la société Violette partenaire faisait valoir que, compte tenu des stipulations du bail, seule la fabrication de crêpes à l'intérieur des locaux loués pouvait constituer une infraction aux clauses du bail (concl., p. 30 à 33) ; qu'en jugeant que « la fabrication de crêpes sur place » était établie et constituait une infraction à la clause de destination du bail, sans rechercher, comme il lui était demandé, si les articles 1 et 2 du bail interdisaient la fabrication de crêpes à l'extérieur des locaux loués, ce qui n'était pas le cas, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 du code civil et L. 145-41 du code de commerce ;
AUX TROISIÈMES MOTIFS QU' au surplus, la SCI Mehdi est bien fondée à soutenir que la vente de crêpes et de gaufres sur place ou à emporter n'est pas une activité incluse dans celle de glacier, salon de thé et pâtisserie, les crêpes et gaufres étant des produits spécifiques cuits ou réchauffés sur place, nullement assimilables aux pâtisseries qui sont préparées à l'avance ; qu'elle ne sont pas servies habituellement dans des salons de thé mais soit dans des crêperies soit à l'extérieur, compte tenu des odeurs que leur préparation occasionne ; qu'en conséquence, la vente de crêpes et gaufres sur place ou à emporter n'est pas une activité conforme à la clause de destination du bail ; que l'infraction à la clause de destination du bail est établie et le locataire ne justifie pas avoir régularisé la situation dans le mois de la délivrance du commandement ;
1°) ALORS QUE la cour d'appel a constaté que le commandement du 18 octobre 2012 ne visait que la clause résolutoire « d'avoir à faire cesser l'infraction aux clauses du bail de fabrication de crêpes sur place » (arrêt, p. 2 § 9) ; que la vente de crêpes et de gaufres, sur place ou à emporter, n'était pas visée par le commandement du 18 octobre 2012 ; que la cour d'appel a pourtant énoncé que la société Medhi était fondée à soutenir que la vente de crêpes et de gaufres sur place ou à emporter n'était pas une activité incluse dans celle de glacier et de salon de thé, et que cette activité n'était pas conforme à la clause de destination du bail ; qu'elle en a déduit que l'infraction à cette clause était établie et que la société Violette partenaire ne justifiait pas avoir régularisé la situation dans le mois de la délivrance du commandement (arrêt, p. 5 in fine et p. 6 § 1) ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, dont il résultait que seule la fabrication de crêpes sur place pouvait permettre de mettre en oeuvre la clause résolutoire, violant ainsi l'article L. 145-41 du code de commerce ;
2°) ALORS QU' en tout état de cause la société Violette partenaire faisait valoir que l'activité de vente de crêpes et de gaufres était incluse dans l'activité de « salon de thé », autorisant la vente de « pâtisseries » ; que la société Violette partenaire démontrait (concl., p. 28) que la société Mehdi donnait, dans ses écritures, une définition partielle de l'activité de « salon de thé »; que la cour d'appel s'est bornée à énoncer que l'activité de vente de crêpes et de gaufres n'était pas incluse dans celle de glacier, salon de thé et pâtisserie, ces produits n'étant pas assimilables aux pâtisseries, ni servis habituellement dans des salons de thé (arrêt, p. 5 in fine) ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme il lui était demandé, si, compte tenu de la définition complète de salon de thé, rappelée par la locataire, l'activité de vente de crêpes et de gaufres était incluse dans celle de salon de thé, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil ;
3°) ALORS QU' en toute hypothèse il appartient au bailleur d'établir la persistance de l'infraction aux clauses du bail après l'expiration du délai de mise en demeure ; qu'en jugeant pourtant que « la société locataire, qui ne produit aux débats aucune autre pièce émanant de ses clients, voisins, ne fait pas la preuve qu'à l'exception du jour de passage de son huissier elle ait cessé la fabrication de crêpes » (arrêt, p. 5 § 7) et que « le locataire ne justifie pas avoir régularisé la situation dans le mois de la délivrance du commandement » (arrêt, p. 6 § 1), la cour d'appel a inversé la charge de la preuve, violant les articles 1315 du code civil et L. 145-41 du code de commerce ;
ET AUX AUTRES MOTIFS QUE l'allégation de mauvaise foi de la société bailleresse est sans fondement ; que la tolérance invoquée ou la connaissance supposée de l'appartenance de la locataire à la chaîne Häagen-Dazs d'ailleurs connue comme glacier essentiellement, par le bailleur ne valent pas accord pour changement de destination du bail, contraire aux dispositions du règlement de copropriété que le bailleur est tenu de respecter ; que dans ces conditions, la clause résolutoire de plein droit du bail liant les parties trouve à s'appliquer, faute de régularisation de l'infraction à la clause de destination du bail dans le mois de la délivrance du commandement visant la clause résolutoire du 18 octobre 2012 ;
ALORS QUE la clause résolutoire doit être invoquée de bonne foi par le bailleur ; que la société Violette partenaire faisait valoir que la société Mehdi avait eu connaissance, dès le 24 juillet 2008, de la présence d'une crêpière devant les locaux loués, mais qu'elle avait attendu près de deux ans et demi pour faire signifier une mise en demeure visant la clause résolutoire ; que la société Mehdi n'avait pas obtenu satisfaction dans la procédure de première instance de révision du loyer, ce dernier étant passé, à compter du 13 juin 2007, de 128.658,50 euros à 46.200 euros annuels ; que la société Medhi avait refusé de renouveler le bail et que, durant la procédure de fixation en indemnité d'éviction, elle avait essayé d'évincer la société Violette partenaire des locaux sans avoir à lui payer une quelconque somme, en lui délivrant une mise en demeure visant la clause résolutoire (concl., p 21 et 23 ; p.33 et 34) ; que la cour d'appel s'est contentée d'énoncer que l'allégation de mauvaise foi était sans fondement, la tolérance invoquée ou la connaissance supposée de l'appartenance de la locataire à la chaîne Häagen-Dazs ne valant pas accord pour un changement de destination du bail contraire aux dispositions du règlement de copropriété (arrêt, p. 6 § 2) ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme il lui était demandé, si la clause résolutoire était mise en oeuvre de mauvaise foi par la société Mehdi, pour évincer la société Violette partenaire des locaux sans avoir à lu payer la moindre somme, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 145-41 du code de commerce et 1134 du code civil.