Cour de cassation, civile, Chambre civile 3, 15 décembre 2016, 15-23.069, Publié au bulletin
Cour de cassation - Chambre civile 3
- N° de pourvoi : 15-23.069
- ECLI:FR:CCASS:2016:C301438
- Publié au bulletin
- Solution : Rejet
- Président
- M. Chauvin
Texte intégral
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 20 mai 2015), que la société Latin franchise, titulaire du droit au bail commercial concédé par la SCI Rue de la Pompe le 20 octobre 1999, a formé, le 29 décembre 2009, une demande de renouvellement que la bailleresse a laissée sans réponse ; que la locataire, faisant valoir qu'au 1er juillet 2010, par le jeu de la clause d'échelle mobile figurant au bail venu à expiration, le loyer avait augmenté de plus d'un quart par rapport au prix du loyer fixé au bail initial, en a sollicité la révision sur le fondement de l'article L. 145-39 du code de commerce ;
Attendu que la société locataire fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevable sa demande, alors, selon le moyen, qu'aux termes de l'article L. 145-39 du code de commerce, par dérogation à l'article L. 145-38 du code civil, si le bail est assorti d'une clause d'échelle mobile, la révision peut être demandée chaque fois que, par le jeu de cette clause, le loyer se trouve augmenté ou diminué de plus d'un quart par rapport au prix précédemment fixé contractuellement, ou par décision de justice ; que la cour d'appel, pour déclarer irrecevable l'action en révision du loyer exercée par la société Latin Franchise, a retenu comme loyer de référence le loyer du bail renouvelé, qu'elle a considéré comme le « nouveau loyer », en son montant résultant du jeu de la clause d'échelle mobile, dans le silence du bailleur dans les trois mois de la demande de renouvellement ; que néanmoins, à défaut d'accord pour « fixer » le nouveau loyer, le loyer du bail expiré, objet d'augmentations successives, n'était pas le « nouveau loyer », faute pour celui-ci d'avoir été fixé contractuellement ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé la disposition susvisée ;
Mais attendu qu'ayant relevé que la demande de renouvellement notifiée par la locataire, le 24 décembre 2009 , avait mis fin au bail du 20 octobre 1999 et qu'un nouveau bail avait pris effet le 1er janvier 2010, définissant un nouveau loyer, fût-il égal au montant du loyer qui était en cours sous le précédent bail, et retenu à bon droit que le loyer à prendre en considération pour apprécier la variation d'un quart permettant d'exercer l'action en révision de l'article L. 145-39 du code de commerce était le loyer initial du bail en cours à la date de la demande de révision, la cour d'appel en a exactement déduit qu'à défaut de variation d'un quart du loyer entre le 1er janvier 2010 et le 1er juillet 2010, la demande de révision était irrecevable ;
D'où il suit, que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Latin franchise aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Latin franchise et la condamne à payer la somme de 3 000 euros à SCI Rue de la Pompe ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quinze décembre deux mille seize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils, pour la société Latin franchise.
Le moyen fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir déclaré irrecevable la demande en révision formée par la société Latin Franchise sur le fondement de l'article L. 145-39 du code de commerce,
AUX MOTIFS QU'aux termes de l'article L.145-39 du code de commerce : « si le bail est assorti d'une clause d'échelle mobile, la révision peut être demandée chaque fois que, par le jeu de cette clause, le loyer se trouve augmenté ou diminué de plus d'un quart par rapport au prix précédemment fixé contractuellement ou par décision judiciaire » ; que l'article R. 145-22 alinéa 1er du même code précise que « le juge adapte le jeu de l'échelle mobile à la valeur locative au jour de la demande » ; qu'il est constant que le bail du 20 octobre 1999 comprend une clause d'échelle mobile énoncée comme suit sous le titre « révision du loyer » : « les parties conviennent expressément que le loyer sera révisé chaque année et pour la première fois le 20 octobre 2000 en fonction des variations de l'indice du coût de la construction, tel qu'il est établi par l'Insee. Pour le calcul de cette révision, il est expressément convenu que l'indice de base à prendre en considération sera celui du premier trimestre 1999 soit 1071, dont la moyenne est de 1065), l'indice de référence étant celui du premier trimestre de l'année de la révision ; la révision prendra effet sans que les parties soient tenues à aucune notification préalable. En cas de retard dans la publication de l'indice, le preneur sera tenu de payer à titre provisionnel un loyer égal à celui du trimestre précédent et l'ajustement sera effectué dès la publication de l'indice » ; que par application de cette clause, le prix du loyer payable au 3ème trimestre 2010 soit pour la période du 1er juillet 2010 au 30 septembre 2010 était de 213 941 € ; que pour conclure à l'irrecevabilité de la demande en fixation du loyer, à la valeur locative formée par la société Latin Franchise en application de l'article L. 145-39 du code de commerce, la société Rue de la Pompe fait valoir qu'un nouveau bail distinct du précédent en date du 20 octobre 1999 a pris effet à compter du 1er janvier 2010, date à laquelle le renouvellement s'est trouvé acquis par application des dispositions de l'article L.145-10 du code de commerce ; qu'elle souligne que les parties se sont abstenues en l'espèce d'agir en fixation judiciaire du prix en renouvellement dans le délai de la prescription biennale ce qui vaut acceptation du loyer tel qu'il résulte de l'application des dispositions légales qui prévoient en ce cas que le prix du nouveau bail est le même que celui défini au précédent bail ; qu'elle soutient en conséquence que pour l'appréciation des conditions d'application de l'article L.145-39 du code de commerce, il doit être tenu compte du « loyer du bail en cours au jour de la demande » c'est à dire du bail du 1er janvier 2010, et que les conditions d'application de l'article L.145-39 ne se trouvaient pas réunies lors de la demande de révision du loyer formée le 12 octobre 2010 ; que la société Latin Franchise adhère pour sa part aux motifs du premier juge qui a retenu que le « renouvellement du bail, non suivi d'une instance en fixation du loyer renouvelé ni d'aucun acte de nature contractuelle n'a pas eu pour effet de fixer un nouveau loyer contractuellement ou par décision judiciaire, au sens de l'article L.145-39 du code de commerce ; que force est de relever en l'espèce que par application des dispositions de l'article L.145-39 du code de commerce, la demande de renouvellement notifiée par la locataire à la bailleresse le 24 décembre 2009 a eu pour effet de mettre fin au bail tacitement prolongé du 20 octobre 1999, que le bailleur n'ayant pas répondu à cette demande dans un délai de trois mois est réputé ainsi qu'il est énoncé à l'article L. 145-10 avoir accepté le principe du renouvellement du bail précédent, que le « nouveau bail » selon les termes de l'article L. 145-12 a pris effet au premier jour du trimestre civil suivant la demande de renouvellement, c'est à dire le 1er janvier 2010 ; que par ailleurs, aucune des parties n'ayant saisi le juge des loyers commerciaux, aux fins de le voir fixer le loyer du bail renouvelé, l'action s'est trouvée prescrite passé le délai de deux ans de la prescription biennale édictée par l'article L.145-60 du code de commerce ; qu'il s'infère de ces éléments qu'un nouveau bail a pris effet le 1er janvier 2010, faisant la loi des parties, et définissant un nouveau loyer, fût il égal au montant du loyer en cours sous le précédent bail ; que le loyer à prendre en considération pour apprécier si la variation d'un quart ouvrant droit à la demande de révision de l'article L.145-39 est établie, est dès lors le loyer initial du bail en cours à la date de la demande de révision ; que la demande de la locataire tendant à voir retenir le prix du bail du 20 octobre 1999 revient à faire produire effet au bail définitivement expiré alors qu'un nouveau bail a pris effet entre les parties au 1er janvier 2010 ; qu'elle ne saurait en conséquence prospérer ; que l'augmentation de plus du quart entre le prix du loyer au 1er janvier 2010 et le prix atteint par le jeu de la clause d'échelle mobile au 1er juillet 2010 n'étant pas réalisée, les conditions de la recevabilité de la demande en révision prévue par l'article L. 145-39 ne sont pas réunies ; que le jugement doit être réformé en toutes ses dispositions ;
ALORS QU'aux termes de l'article L.145-39 du code de commerce, par dérogation à l'article L. 145-38 du code civil, si le bail est assorti d'une clause d'échelle mobile, la révision peut être demandée chaque fois que, par le jeu de cette clause, le loyer se trouve augmenté ou diminué de plus d'un quart par rapport au prix précédemment fixé contractuellement, ou par décision de justice ; que la cour d'appel, pour déclarer irrecevable l'action en révision du loyer exercée par la société Latin Franchise, a retenu comme loyer de référence le loyer du bail renouvelé, qu'elle a considéré comme le « nouveau loyer », en son montant résultant du jeu de la clause d'échelle mobile, dans le silence du bailleur dans les trois mois de la demande de renouvellement ; que néanmoins, à défaut d'accord pour « fixer » le nouveau loyer, le loyer du bail expiré, objet d'augmentations successives, n'était pas le « nouveau loyer », faute pour celui-ci d'avoir été fixé contractuellement ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé la disposition susvisée.