Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 1 décembre 2016, 15-50.035, Inédit
Cour de cassation - Chambre sociale
- N° de pourvoi : 15-50.035
- ECLI:FR:CCASS:2016:SO02229
- Non publié au bulletin
- Solution : Rejet
- Président
- Mme Goasguen (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Texte intégral
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, (Paris, 19 mars 2015), que Mme X... a été engagée par la société César (la société) en qualité de responsable grands comptes à partir du 19 mai 2011 avec une reprise d'ancienneté au 25 mai 1982 ; que la société a été successivement placée en redressement judiciaire le 10 août 2011 puis soumise à un plan de redressement par jugement du 27 février 2013 qui a désigné M. Y... comme commissaire à l'exécution du plan ; que licenciée pour motif économique par lettre du 30 septembre 2011, l'intéressée a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;
Sur les premier et troisième moyens :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les moyens annexés qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à des dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail alors, selon le moyen, que l'allocation de dommages-intérêts au salarié suppose la constatation d'une faute de l'employeur ; que la cour d'appel, pour faire droit à la « demande de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail », s'est bornée à relever la difficulté rencontrée par la salariée pour obtenir les documents nécessaires à la vérification des sommes à lui revenir, sans constater la moindre faute de l'employeur, dont elle a par ailleurs constaté qu'il était alors sous le coup d'une procédure de redressement judiciaire à l'origine des dites « difficultés » de la salariée ; que la cour d'appel a ainsi violé les articles 1147 et 1134 du code civil, ensemble l'article L. 1221-1 du code du travail ;
Mais attendu qu'ayant relevé la difficulté rencontrée par la salariée pour obtenir les documents lui permettant de vérifier le calcul de sa rémunération, la cour d'appel a par là-même caractérisé une faute de l'employeur ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société César et M. Y..., ès qualités, aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société César à payer à Mme X... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du premier décembre deux mille seize.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour la société César et M. Y..., ès qualités.
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR fixé des créances de Mme X... au passif du redressement judiciaire de la société César au titre de la rémunération variable pour les exercices 2010-2011, et 2011-2012, et des congés payés afférents ;
AUX MOTIFS QUE la salariée expose que suivant l'avenant à son contrat de travail en date du 1er juillet 2010, il était prévu qu'elle percevrait outre une rémunération annuelle de 36.404 euros « une rémunération variable d'un montant maximum de 14.000 euros, versée en fonction d'objectifs définis chaque année par la société » ; d'après l'annexe 1 de l'avenant, «100 % du bonus sera versé avec l'accord des grands comptes sur l'atteinte d'un objectif d'équipe ceci dans un souci de solidarité (...) il sera calculé sur la réalisation de 100 % du plan César en chiffre d'affaires net facturé et de pour César (domestique + Fob ) et 1.811.000 euros pour Nounours. Le bonus n'est payable dans sa totalité que pour 100 % de la réalisation de l'objectif groupe et sera versé le 30 juin 2011. La société prendra en compte les difficultés d'approvisionnement et rémunérera à partir de 80 % de réalisation la prime au prorata de la performance » ; elle conteste le mode de calcul retenu par les intimés qui estiment que la prime doit être calculée sur le chiffre d'affaires après rabais, remises et retours de fin d'année et soutient que le chiffre d'affaires retenu ne prend pas en compte le FOB, (free on board) à hauteur de 932.074 euros, en dépit de la disposition contractuelle, des commandes ont été annulées en raison du manque de stock ce qui ne lui est pas imputable, la prime a toujours été calculée sur le chiffre d'affaires réalisé avant rabais remises et retours, lesdites remises correspondent à des actes unilatéraux de la part de son employeur vis à vis des clients et par suite, ne lui sont pas opposables et ne peuvent être défalquées du chiffre d'affaires sur lequel est calculée la prime ; les intimés exposent que les chiffres d'affaires nets réalisés au cours de l'exercice s'élèvent respectivement à 5.204.387 euros pour César et à 1.791.734 euros pour Nounours, que l'objectif n'a donc pas été atteint ni à 100 %, ni même à 80 %, qu' en conséquence la prime n'est pas due ; les conventions tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites et doivent être exécutées de bonne foi ; d'après le contrat, le bonus est calculé à partir d'un chiffre d'affaires net facturé ; si M. Z... atteste que le contrat a bien été établi comme les années précédentes, sur un chiffre d'affaires facturé avant retours et remises de fin d'année et si M. A..., responsable compte-clés, au même titre que la salariée, déclare que les avenants au contrat de travail ont toujours été basés sur une réalisation de chiffre d'affaires mais avant retour, et remises, il est à relever que la SA César verse un avenant pour l'année 2008, précisant que la part variable de la rémunération variable était calculée en fonction d'objectifs individuels et collectifs sur un « chiffre d'affaires net après retours» ; outre que la formule employée sur l'avenant remis à la salariée n'évoque pas les retours puisqu'il est seulement fait mention du « chiffre d'affaires net facturé la cour observe que le document produit n'est pas identifiable, s'agissant de la copie d'un document non signé et comportant seulement un paraphe et apparemment annexé à un avenant lui-même non signé par la salariée et concernant une autre société, la société Nounours et non la SA César ; par ailleurs, M. B..., directeur commercial, a, dans un courriel du 22 juin 2011, indiqué « // a été réalisé 90 % de l'objectif budgétaire ventes. A noter que dans leur contrat, il est prévu de verser la prime à partir de 80 % de réalisation au prorata pour un CA net facturé de 10.290 Keuros (différent du CA au budget). Donc en réalité, ils ont réalisé 92% ce qui devrait donner droit à 92 % de la prime... » ; plus loin, ce directeur commercial précise que nombre de commandes ont été annulées car pas de stocks et livraisons tardives et conclut de la manière suivante « Ils ( Didier et Valérie soit Mme X...) n'ont pas démérité dans leur rôle commercial dans un période compliquée (...) » ; il ressort de l'ensemble de ces éléments, que ne peuvent être opposées à la salariée les décisions de l'employeur vis à vis des clients et relatives aux rabais, remises et retours de fin d'année ; de même, il est contractuellement prévu que le Free on Board doit être intégré dans le chiffre d'affaires ; dans ces conditions, au regard de l'atteinte des objectifs à hauteur de 92 %, le directeur commercial ayant tout à la fois qualité et compétence pour constater le respect par les commerciaux des objectifs fixés, la salariée est fondée en sa demande à concurrence de la somme de 12.880 euros à laquelle s'ajoutent les congés payés afférents ; sa créance sera inscrite au passif de la société César ;
Sur la prime pour l'année 2012 : pour cet exercice, les objectifs n'ont pas été fixés par l'employeur. Il incombe en conséquence au juge de la fixer ; par ailleurs dans la mesure où une prime sur objectifs constitue une part variable de la rémunération en contrepartie de son activité en sorte qu'elle s'acquiert au fur et à mesure si bien qu'en cas de départ antérieurement au versement de la prime, la salariée peut prétendre à son paiement au prorata de son temps de présence ; dans ces conditions, la cour arrête le montant de la prime à la somme de 8.166 euros, outre les congés payés afférents ;
1°) ALORS QUE s'il est contractuellement prévu que l'employeur détermine unilatéralement dans l'exercice de son pouvoir de direction, les objectifs dont dépend la rémunération variable, ces objectifs s'imposent au salarié dès lors qu'ils sont réalisables, et ont été portés à sa connaissance en début d'exercice; que l'employeur sous les mêmes conditions, peut modifier les objectifs d'un exercice à l'autre; qu'en se référant, pour dire que le chiffre d'affaires à atteindre s'entendait « avant remises et retours», aux pratiques mises en place par l'employeur lors des précédents exercices, la cour d'appel a méconnu les dispositions du contrat de travail autorisant la société César à modifier les objectifs d'un exercice à l'autre, dès lors qu'ils demeuraient réalisables; qu'elle a ainsi violé les articles 1134 du code civil et L.1221-1 du code du travail ;
2°) ALORS QUE lorsque les objectifs dont dépend la rémunération variable se réfèrent à un "chiffre d'affaires net", celui-ci, qui ne se confond pas avec le chiffre d'affaires hors taxe, s'entend du chiffre d'affaires effectivement encaissé après déduction des rabais, remises et retours, lesquels participent à la réalisation des opérations de ventes effectuées par les commerciaux concernés par ces objectifs; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé les articles 1134 du code civil et L.1221-1 du code du travail ;
3°) ALORS QUE lorsque l'employeur, placé en redressement judiciaire, n'a pu définir les objectifs dont dépend la rémunération variable comme le prévoit le contrat de travail, le juge détermine le montant de cette rémunération en se référant aux critères de l'exercice précédent ; qu'en jugeant que Mme X... au titre de l'année 2012 (exercice 2011/2012), pouvait prétendre au paiement du montant maximum de la rémunération variable faute d'objectifs définis par l'employeur, la cour d'appel a violé les articles 1134 du code civil et L.1221-1 du code du travail.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR CONDAMNE la société CESAR à payer à Mme X... une somme de 1.200 euros en réparation du préjudice résultant de la résistance à verser des documents de nature à permettre de vérifier la pertinence du solde de tout compte ;
AUX MOTIFS QUE la salariée allègue du préjudice subi à défaut pour elle d'avoir pu obtenir les documents pourtant réclamés et de nature à lui permettre de vérifier le calcul de sa rémunération et en sollicite réparation ; la difficulté rencontrée pour obtenir les documents nécessaires à la vérification des sommes à lui revenir est à l'origine d'un préjudice avéré que la cour arrête à la somme de 1200 euros ;
ALORS QUE l'allocation de dommages et intérêts au salarié suppose la constatation d'une faute de l'employeur ; que la cour d'appel, pour faire droit à la « demande de dommages et intérêt pour exécution déloyale du contrat de travail », s'est bornée à relever la difficulté rencontrée par la salariée pour obtenir les documents nécessaires à la vérification des sommes à lui revenir, sans constater la moindre faute de l'employeur, dont elle a par ailleurs constaté qu'il était alors sous le coup d'une procédure de redressement judiciaire à l'origine desdites « difficultés » de la salariée ; que la cour d'appel a ainsi violé les articles 1147 et 1134 du code civil, ensemble l'article L.1221-1 du code du travail.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR fixé une créance au profit de Mme X... au passif du redressement judiciaire de la société César, au titre du remboursement de frais professionnels ;
AUX MOTIFS PROPRES QU'il est exact que la salariée a travaillé jusqu'au 7 octobre 2011 et a exposé des frais ; toutefois, elle a perçu une avance sur frais lors de la remise du solde de tout compte et la cour ne dispose pas des justificatifs de nature à lui permettre de vérifier si ladite avance n'a pas couvert les frais allégués ; le jugement sera confirmé sur ce point ;
ET AUX MOTIFS REPUTES ADOPTES DES PREMIERS JUGES QUE Mme X... revendique la somme de 374,96 euros à titre de remboursement de frais ; qu'ils ressort des pièces versées aux débats que Mme X... n'a communiqué que deux tableaux faisant apparaître des frais à hauteur de 338,58 euros et 35,90 euros, soit un total de 374,48 euros ; qu'elle n'a communiqué aucun élément permettant de démontrer qu'elle avait subi un quelconque préjudice ; qu'elle ne justifie par aucune pièce de l'engagement réel de ces frais ;
ALORS QUE la contradiction entre les motifs et le dispositif d'une décision, équivaut à un défaut de motifs ; que l'arrêt, tout en considérant dans ses motifs qu'il y a lieu de débouter la salariée de sa demande de remboursement de frais, et de confirmer le jugement de ce chef, énonce dans son dispositif : « fixe la créance de Mme X... au passif du redressement judiciaire de la SA César aux sommes suivantes : (…) - 374,96 euros au titre du remboursement de frais professionnels » ; que la cour d'appel par cette contradiction, a entaché son arrêt d'un défaut de motifs en violation de l'article 455 du code de procédure civile.