Cour de cassation, civile, Chambre civile 2, 24 novembre 2016, 15-19.925, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


Donne acte à la caisse primaire d'assurance maladie du Loiret du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre le ministre chargé de la sécurité sociale ;

Sur le premier moyen :

Vu les articles L. 141-1, L. 315-1, L. 315-2, L. 433-1, alinéa 5, L. 442-5, R. 142-24, D. 433-2, D. 433-3 du code de la sécurité sociale ;

Attendu qu'il résulte des quatrième, septième et huitième de ces textes que l'indemnité journalière peut être rétablie, pour une durée qui n'excède pas un mois, en cas d'absence de rémunération liée à une activité salariée, lorsque l'inaptitude de la victime procède de l'accident du travail ou de la maladie professionnelle au titre desquels cette indemnité avait été servie avant consolidation ; qu'il appartient, en vertu des deuxième et troisième de ces textes, rendus applicables à la branche accident du travail par les cinquième et septième, au service du contrôle médical, dont les avis s'imposent à la caisse primaire d'assurance maladie, de se prononcer, s'il y a lieu, sur le lien existant entre l'inaptitude et l'accident ou la maladie antérieure ; qu'il en résulte qu'en cas de différend sur ce point, la juridiction de sécurité sociale ne peut statuer sur le rétablissement de l'indemnité journalière qu'après mise en oeuvre de la procédure d'expertise médicale technique ;

Attendu, selon le jugement attaqué, rendu en dernier ressort, et les productions, que, victime d'un accident du travail le 10 novembre 2012, ayant fait l'objet d'un avis d'inaptitude à son poste de travail par le médecin du travail le 20 mars 2014, M. X... a demandé le bénéfice de l'indemnité temporaire d'inaptitude à la caisse primaire d'assurance maladie du Loiret (la caisse) ; que sa demande ayant été rejetée à la suite d'un avis défavorable du service du contrôle médical, M. X... a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale ;

Attendu que, pour accorder le bénéfice de l'indemnité litigieuse à M. X..., le jugement retient que, dans le formulaire de demande produit, le médecin du travail atteste avoir établi le 20 mars 2014 un certificat d'inaptitude pour M. X... qui est susceptible d'être en lien avec l'accident du travail ou la maladie professionnelle en date du 10 novembre 2012 ; que le médecin conseil de la caisse a rendu un avis défavorable motivé par l'absence de relations entre l'inaptitude au poste et le sinistre ; que cependant, le délai relativement court écoulé entre l'accident du travail et la déclaration d'inaptitude au poste de travail avec, entre les deux, deux avis d'inaptitude du même médecin du travail faisant référence à l'accident du travail, et une date de consolidation font présumer un lien de causalité entre les deux et le médecin conseil, en se contentant de dire qu'il n'y a pas de lien entre les deux, n'apporte aucun élément de nature à renverser cette présomption ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'il ressortait de ses constatations qu'il existait une difficulté d'ordre médical sur l'origine professionnelle de l'inaptitude qui ne pouvait être tranchée qu'après mise en oeuvre d'une expertise médicale technique, le tribunal a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief du pourvoi :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 31 mars 2015, entre les parties, par le tribunal des affaires de sécurité sociale d'Orléans ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le tribunal des affaires de sécurité sociale de Blois ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre novembre deux mille seize.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Foussard et Froger, avocat aux Conseils, pour la caisse primaire d'assurance maladie du Loiret

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Le jugement attaqué encourt la censure ;

EN CE QU'il a infirmé la décision du 10 juillet 2014 et a décidé que M. X... devait bénéficier du versement de l'indemnité temporaire d'inaptitude pour la période du 21 mars 2014 au 15 mai 2014 ;

AUX MOTIFS QUE « Monsieur Olivier X..., électricien, a été victime d'un accident du travail le 10 novembre 2012, et a été déclaré inapte à son poste de travail le 20 mars 2014 par le Médecin du Travail, le Docteur Martine Y..., avant d'être licencié le 15 mai 2014; que conformément à l'article D. 433-2 du Code de Sécurité Sociale, la victime dont l'accident du travail ou la maladie professionnelle a été reconnu et qui a été déclarée inapte par le Médecin du Travail a droit à l'indemnité temporaire d'inaptitude de l'article L. 433-1 dans les conditions prévues aux articles L. 442-5 et D. 433-3 ; que par combinaison des articles L. 442-5 et L. 315-1 du Code de Sécurité Sociale, le contrôle médical de la caisse porte sur tous les éléments d'ordre médical qui commandent l'attribution et le service de l'ensemble des prestations de l'assurance maladie, maternité et invalidité ; que l'article D. 433-3 précise que pour bénéficier de cette indemnité, la victime adresse un formulaire de demande incluant mention portée par le Médecin du Travail d'un lien susceptible d'être établi entre l'inaptitude et l'accident du travail ou la maladie professionnelle ; que parallèlement, elle doit justifier ne percevoir aucune rémunération liée au poste de travail, l'indemnité lui est alors versée à compter du 1er jour qui suit l'avis d'inaptitude jusqu'au jour du licenciement ou du reclassement ; que dans le formulaire de demande produit, le Médecin du Travail, le Docteur Martine Y..., certifie avoir établi le 20 mars 2014 un certificat d'inaptitude pour Monsieur Olivier X... qui est susceptible d'être en lien avec l'accident du travail ou la maladie professionnelle en date du 10 novembre 2012 ; qu'il ne s'agit nullement là d'une affirmation ; que par ailleurs, le médecin conseil de la caisse a lui rendu un avis défavorable motivé par l'absence de relations entre l'inaptitude au poste et le sinistre ; cependant, que le délai relativement court écoulé entre l'accident du travail (10.11.12) et la déclaration d'inaptitude au poste de travail (20.03,14) avec entre les deux, deux avis d'inaptitude (05 et 20.03,13) du même Médecin du Travail faisant référence expressément à l'accident du travail, et une date de consolidation (03.06.13) font présumer un lien de causalité entre les deux et le médecin conseil en se contentant de dire qu'il n'y a pas de lien entre les deux, n'apporte aucun élément de nature à renverser cette présomption ; que dès lors, il doit être fait droit à la demande de Monsieur Olivier X... tendant au versement de l'indemnité temporaire d'inaptitude du 21 mars au 15 mai 2014 et la décision de la Commission de Recours Amiable du 10 juillet 2014 devra être infirmée ; » ;

ALORS QUE, premièrement, il incombe à l'assuré, dès lors qu'il se prévaut d'un droit, d'établir que les conditions sont remplies pour qu'il puisse en bénéficier ; qu'en fondant sa décision sur une présomption de lien de cause à effet, puis en retenant que la CPAM n'apportait d'éléments pour renverser cette présomption, les juges du fond ont violé la règle selon laquelle l'assuré a la charge de prouver l'existence de lien de cause à effet dès lors que ce lien est une condition d'attribution du droit ;

ALORS QUE, deuxièmement, et en tout cas, ayant la charge de la preuve, l'assuré ne peut se borner à produire des éléments, permettant de présumer le lien de cause à effet dès lors que l'objet de la preuve qui lui incombe porte sur la réalité du lien de cause à effet et non une simple présomption ; que de ce point de vue également, le jugement encourt la censure pour violation de la règle définissant l'objet de la preuve incombant à l'assuré ;

ALORS QUE, troisièmement, et plus subsidiairement, étant en présence d'une difficulté d'ordre médical, les juges du fond ne pouvaient statuer sans mettre en place une expertise médicale au sens de l'article L. 141-1 et L. 141-2 du code de la sécurité sociale ; qu'en statuant comme ils l'ont fait, ils ont violé les articles L. 141-1 et L. 141-2 du code de la sécurité sociale.

SECOND MOYEN DE CASSATION

Le jugement attaqué encourt la censure ;

EN CE QU'il a infirmé la décision du 10 juillet 2014 et a décidé que M. X... devait bénéficier du versement de l'indemnité temporaire d'inaptitude pour la période du 21 mars 2014 au 15 mai 2014 ;

AUX MOTIFS QUE « Monsieur Olivier X..., électricien, a été victime d'un accident du travail le 10 novembre 2012, et a été déclaré inapte à son poste de travail le 20 mars 2014 par le Médecin du Travail, le Docteur Martine Y..., avant d'être licencié le 15 mai 2014 ; que conformément à l'article D. 433-2 du Code de Sécurité Sociale, la victime dont l'accident du travail ou la maladie professionnelle a été reconnu et qui a été déclarée inapte par le Médecin du Travail a droit à l'indemnité temporaire d'inaptitude de l'article L. 433-1 dans les conditions prévues aux articles L. 442-5 et D. 433-3 ; que par combinaison des articles L. 442-5 et L. 315-1 du Code de Sécurité Sociale, le contrôle médical de la caisse porte sur tous les éléments d'ordre médical qui commandent l'attribution et le service de l'ensemble des prestations de l'assurance maladie, maternité et invalidité ; que l'article D. 433-3 précise que pour bénéficier de cette indemnité, la victime adresse un formulaire de demande incluant mention portée par le Médecin du Travail d'un lien susceptible d'être établi entre l'inaptitude et l'accident du travail ou la maladie professionnelle ; que parallèlement, elle doit justifier ne percevoir aucune rémunération liée au poste de travail, l'indemnité lui est alors versée à compter du 1er jour qui suit l'avis d'inaptitude jusqu'au jour du licenciement ou du reclassement ; que dans le formulaire de demande produit, le Médecin du Travail, le Docteur Martine Y..., certifie avoir établi le 20 mars 2014 un certificat d'inaptitude pour Monsieur Olivier X... qui est susceptible d'être en lien avec l'accident du travail ou la maladie professionnelle en date du 10 novembre 2012 ; qu'il ne s'agit nullement là d'une affirmation ; que par ailleurs, le médecin conseil de la caisse a lui rendu un avis défavorable motivé par l'absence de relations entre l'inaptitude au poste et le sinistre ; cependant, que le délai relativement court écoulé entre l'accident du travail (10.11.12) et la déclaration d'inaptitude au poste de travail (20.03,14) avec entre les deux, deux avis d'inaptitude (05 et 20.03,13) du même Médecin du Travail faisant référence expressément à l'accident du travail, et une date de consolidation (03.06.13) font présumer un lien de causalité entre les deux et le médecin conseil en se contentant de dire qu'il n'y a pas de lien entre les deux, n'apporte aucun élément de nature à renverser cette présomption ; que dès lors, il doit être fait droit à la demande de Monsieur Olivier X... tendant au versement de l'indemnité temporaire d'inaptitude du 21 mars au 15 mai 2014 et la décision de la Commission de Recours Amiable du 10 juillet 2014 devra être infirmée ; » ;

ALORS QUE, il résulte des articles L. 433-1, D. 433-2 et D. 433-5 du code de la sécurité sociale et L. 1226-11 du code du travail que l'indemnité temporaire d'inaptitude est servie au maximum pendant un mois ; qu'en octroyant cette indemnité, pour la période comprise entre le 21 mars 2014 et le 15 mai 2014, excédant la durée d'un mois, les juges du fond ont violé les articles L. 433-1, D. 433-2 et D. 433-5 du code de la sécurité sociale et L. 1226-11 du code du travail.ECLI:FR:CCASS:2016:C201683
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