Cour de cassation, civile, Chambre civile 2, 17 novembre 2016, 15-27.832, Publié au bulletin
Cour de cassation, civile, Chambre civile 2, 17 novembre 2016, 15-27.832, Publié au bulletin
Cour de cassation - Chambre civile 2
- N° de pourvoi : 15-27.832
- ECLI:FR:CCASS:2016:C201645
- Publié au bulletin
- Solution : Rejet
Audience publique du jeudi 17 novembre 2016
Décision attaquée : Cour d'appel de Colmar, du 15 mai 2015- Président
- Mme Flise
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Colmar, 15 mai 2015), qu'une collision est survenue le 5 novembre 2006 à un passage à niveau, entre un train et une automobile, à la suite de laquelle Jacques X..., passager de ce véhicule, est décédé, et sa fille Camille, alors âgée de 15 ans et qui conduisait ce véhicule, a été blessée ; que Mme Muriel X..., épouse du défunt, agissant tant en son nom propre qu'en tant que représentante légale de sa fille mineure Clémence X..., et Mme Camille X... (les consorts X...) ont assigné la Société nationale des chemins de fer français (la SNCF) et la société Réseau ferré de France en réparation de leurs préjudices sur le fondement, à titre principal, de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985, à titre subsidiaire, de l'article 1384, alinéa 1, du code civil, en présence de la caisse primaire d'assurance maladie de Colmar ;
Attendu que les consorts X... font grief à l'arrêt de dire que la loi du 5 juillet 1985 n'est pas applicable à l'accident survenu le 5 novembre 2006, alors, selon le moyen :
1°/ que les chemins de fer ne sont exclus du domaine d'application de la loi du 5 juillet 1985 que dans la mesure où ils circulent sur une voie qui leur est propre ; que pour limiter la condamnation de la SNCF, l'arrêt retient que seules les dispositions de l'article 1384, alinéa 1, du code civil avaient vocation à s'appliquer en l'espèce et que compte tenu de leur gravité, les fautes respectives commises par Mme Camille X... et par Jacques X... justifiaient l'exonération de la SNCF à hauteur des trois quarts de leurs dommages ; qu'en statuant ainsi, alors qu'un train qui traverse la chaussée croisant la voie ferrée sur un passage à niveau ouvert aux autres usagers de la route ne circule pas sur une voie qui lui est propre, la cour d'appel a violé l'article 1er de la loi du 5 juillet 1985 ;
2°/ qu'une « voie propre », au sens de l'article 1er de la loi du 5 juillet 1985, ne l'est que dans la mesure où elle n'a pas vocation à croiser une voie routière avec laquelle elle pourrait constituer une aire de circulation ouverte à d'autres usagers, peu important que ces derniers soient en nombre limité ; qu'en relevant, pour écarter l'application des dispositions de la loi du 5 juillet 1985, que le chemin traversant la voie ferrée avait « été spécifiquement surélevé à la hauteur des rails pour permettre ce passage » et « situé dans un milieu rural destiné à être exclusivement utilisé par des riverains et notamment à desservir les vignes environnantes », cependant que l'exclusion des chemins de fer ne peut jouer que lorsqu'ils circulent sur une voie non ouverte aux autres usagers, fussent-ils en nombre limité, la cour d'appel s'est fondée sur des motifs impropres à caractériser l'existence d'une voie propre, et a derechef violé l'article 1er de la loi du 5 juillet 1985 ;
Mais attendu qu'une voie ferrée n'est pas une voie commune aux chemins de fer et aux usagers de la route, ces derniers pouvant seulement la traverser à hauteur d'un passage à niveau, sans pouvoir l'emprunter ; que l'arrêt retient exactement que le train entré en collision avec le véhicule à bord duquel se trouvaient Jacques X... et sa fille circulait, nonobstant la circonstance que l'accident soit survenu à un passage à niveau pouvant être emprunté par d'autres usagers, sur une voie qui lui est propre ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme Muriel X..., tant en son nom personnel qu'ès qualités, et Mme Camille X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept novembre deux mille seize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat aux Conseils, pour les consorts X....
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué, confirmatif de ce chef, d'avoir jugé que la loi du 5 juillet 1985 n'était pas applicable à l'accident du 5 novembre 2006 et accueilli la demande reconventionnelle de la SNCF, d'avoir décidé que les fautes commises par Melle Camille X... et par M. Jacques X... avaient concouru à hauteur des 3/ 4 de leur préjudice et d'avoir limité, en conséquence, la responsabilité de la SNCF à 1/ 4 des conséquences dommageables de l'accident ;
Aux motifs que « c'est à bon droit que le premier juge a écarté l'application des dispositions de cette loi, en retenant que le train circulait sur une voie qui lui est propre, nonobstant la circonstance que l'accident soit survenu à un passage à niveau pouvant être emprunté par d'autres usagers, dès lors que l'aménagement des lieux, la chaussée étant surélevée pour permettre le franchissement de la voie ferrée et l'existence d'une priorité de passage absolue pour les trains excluent tout partage de la chaussée entre le train et les autres usagers (Civ. 2ème 19 mars 1997 : Bull. n° 78). C'est donc à bon droit que le tribunal a considéré que seules les dispositions de l'article 1384 alinéa 1er du code civil avaient vocation à s'appliquer en l'espèce, le train dont la SNCF est la gardienne ayant eu un rôle actif dans l'accident. Les appelantes critiquent toutefois à juste titre le jugement en ce qu'il a rejeté leur demande en considérant que le comportement irrationnel et inexpliqué de la jeune conductrice constituait un événement imprévisible et irrésistible pour la SNCF gardienne du train, l'immobilisation d'un véhicule sur la voie à un passage à niveau dépourvu de barrières n'étant en effet pas imprévisible (Civ. 2ème, 27 mars 2014 : n° 13-13. 790). La faute de la victime, même ne présentant pas les caractères de la force majeure, est néanmoins de nature à exonérer partiellement ou totalement le gardien de la chose instrument du dommage de la responsabilité pesant sur lui. En l'espèce, il est constant que le véhicule conduit par Melle Camille X... s'est immobilisé au milieu de la voie ferrée alors que le train arrivait, le conducteur de la motrice n'ayant pu éviter la collision bien qu'il ait actionné le freinage d'urgence et son avertisseur sonore. Il ne résulte des pièces versées aux débats et notamment de l'enquête de gendarmerie aucun élément de nature à accréditer l'hypothèse d'une panne technique. En revanche, le fait pour Melle Camille X... de prendre le volant alors qu'étant âgée de 15 ans, elle était dépourvue du droit de conduire ce type de véhicule et était par conséquent totalement inexpérimentée en matière de conduite automobile est constitutif d'une faute en relation causale directe avec le dommage, son inexpérience étant en effet de nature à induire des réactions inadaptées en présence d'une situation inattendue. Il est en outre établi qu'elle n'a pas respecté la priorité de passage du train. M. Jacques X... a également commis une faute pour avoir volontairement laissé le volant à sa fille âgée de 15 ans qui n'était pas autorisée à conduire un tel véhicule, cette démarche ne s'inscrivant pas dans un dispositif d'apprentissage anticipé de la conduite automobile et pour l'avoir laissée franchir, de nuit et sans précautions suffisantes, un passage à niveau dont les appelantes prétendent qu'il serait particulièrement dangereux en raison d'une visibilité réduite. Compte-tenu de leur gravité, les fautes respectives commises par Melle Camille X... et par M. Jacques X... ont concouru pour Y à leur dommage (…) » ;
Et aux motifs adoptés que « aux termes de l'article 1er de la loi du 5 juillet 1985, une victime d'un accident de la circulation est en droit d'obtenir une indemnisation dès lors qu'est impliqué un véhicule terrestre à moteur ainsi que ses remorques ou semi-remorques, à l'exception du chemin de fer et des tramways circulant sur des voies propres. Les tramways et les trains sont ainsi exclus du champ d'application de cette loi dès lors qu'ils circulent sur une voie qui leur est propre. Cependant, il a été admis qu'un tramway circulant sur une voie dont les rails sont implantés dans la chaussée ou qui traverse un carrefour ouvert et partagé avec d'autres usagers de la route, situé par conséquent dans un contexte urbain, ne circule pas sur une voie propre contrairement à celui qui se déplace dans un couloir qui lui est réservé et bien délimité. En l'espèce, il s'agit d'un accident entre un train TER et un véhicule qui s'est produit au passage à niveau n° 9 de la voie ferrée, situé sur la ligne Metzeral-Colmar. Il résulte certes des planches photographiques que les rails du train, posés sur un ballast, sont à cet endroit implantés dans le sol afin de permettre à des usagers d'emprunter le chemin qui les traverse. Cependant, le chemin a été spécifiquement surélevé à la hauteur des rails pour permettre ce passage et est en outre situé dans un milieu rural destiné à être exclusivement utilisé par des riverains et notamment à desservir les vignes environnantes, ainsi qu'en témoigne un panneau implanté à l'entrée du chemin vicinal et situé à 150 mètres du passage à niveau litigieux. Enfin, et conformément aux dispositions du code de la route et au regard des mêmes planches photographiques ainsi que d'un arrêté du Préfet du Haut-Rhin du 29 mars 1996, cette voie ferrée bénéficie d'une priorité de passage absolue pour les matériels y circulant normalement ainsi qu'en atteste la présence de panneaux de signalisation d'obligation d'arrêt stop et de position « croix de Saint André » et ce, quand bien même le passage n'est muni ni de barrières ni de demi barrières ni encore de signal lumineux. Dans ces conditions, il y a lieu de constater que la voie ferrée bénéficie d'une voie qui lui est propre et plus particulièrement au passage à niveau litigieux, excluant par la même l'application de la loi du 5 juillet 1985. En conséquence, Mme Muriel X..., Melle Camille X... et Melle Clémence X... sont déboutées de leur demande de condamnation de la SNCF sur ce fondement (…) » ;
Alors, d'une part, que les chemins de fer ne sont exclus du domaine d'application de la loi du 5 juillet 1985 que dans la mesure où ils circulent sur une voie qui leur est propre ; que pour limiter la condamnation de la SNCF, l'arrêt attaqué retient que seules les dispositions de l'article 1384 alinéa 1er du code civil avaient vocation à s'appliquer en l'espèce et que compte tenu de leur gravité, les fautes respectives commises par Melle Camille X... et par M. Jacques X... justifiaient l'exonération de la SNCF à hauteur des Y de leurs dommages ; qu'en statuant ainsi, alors qu'un train qui traverse la chaussée croisant la voie ferrée sur un passage à niveau ouvert aux autres usagers de la route ne circule pas sur une voie qui lui est propre, la cour d'appel a violé l'article 1er de la loi du 5 juillet 1985 ;
Alors, d'autre part, qu'une « voie propre », au sens de l'article 1er de la loi du 5 juillet 1985, ne l'est que dans la mesure où elle n'a pas vocation à croiser une voie routière avec laquelle elle pourrait constituer une aire de circulation ouverte à d'autres usagers, peu important que ces derniers soient en nombre limités ; qu'en relevant, pour écarter l'application des dispositions de la loi du 5 juillet 1985, que le chemin traversant la voie ferrée avait « été spécifiquement surélevé à la hauteur des rails pour permettre ce passage » et « situé dans un milieu rural destiné à être exclusivement utilisé par des riverains et notamment à desservir les vignes environnantes », cependant que l'exclusion des chemins de fer ne peut jouer que lorsqu'ils circulent sur une voie non ouverte aux autres usagers, fussent-ils en nombre limité, la cour d'appel s'est fondée sur des motifs impropres à caractériser l'existence d'une voie propre, et a derechef violé l'article 1er de la loi du 5 juillet 1985.ECLI:FR:CCASS:2016:C201645
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Colmar, 15 mai 2015), qu'une collision est survenue le 5 novembre 2006 à un passage à niveau, entre un train et une automobile, à la suite de laquelle Jacques X..., passager de ce véhicule, est décédé, et sa fille Camille, alors âgée de 15 ans et qui conduisait ce véhicule, a été blessée ; que Mme Muriel X..., épouse du défunt, agissant tant en son nom propre qu'en tant que représentante légale de sa fille mineure Clémence X..., et Mme Camille X... (les consorts X...) ont assigné la Société nationale des chemins de fer français (la SNCF) et la société Réseau ferré de France en réparation de leurs préjudices sur le fondement, à titre principal, de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985, à titre subsidiaire, de l'article 1384, alinéa 1, du code civil, en présence de la caisse primaire d'assurance maladie de Colmar ;
Attendu que les consorts X... font grief à l'arrêt de dire que la loi du 5 juillet 1985 n'est pas applicable à l'accident survenu le 5 novembre 2006, alors, selon le moyen :
1°/ que les chemins de fer ne sont exclus du domaine d'application de la loi du 5 juillet 1985 que dans la mesure où ils circulent sur une voie qui leur est propre ; que pour limiter la condamnation de la SNCF, l'arrêt retient que seules les dispositions de l'article 1384, alinéa 1, du code civil avaient vocation à s'appliquer en l'espèce et que compte tenu de leur gravité, les fautes respectives commises par Mme Camille X... et par Jacques X... justifiaient l'exonération de la SNCF à hauteur des trois quarts de leurs dommages ; qu'en statuant ainsi, alors qu'un train qui traverse la chaussée croisant la voie ferrée sur un passage à niveau ouvert aux autres usagers de la route ne circule pas sur une voie qui lui est propre, la cour d'appel a violé l'article 1er de la loi du 5 juillet 1985 ;
2°/ qu'une « voie propre », au sens de l'article 1er de la loi du 5 juillet 1985, ne l'est que dans la mesure où elle n'a pas vocation à croiser une voie routière avec laquelle elle pourrait constituer une aire de circulation ouverte à d'autres usagers, peu important que ces derniers soient en nombre limité ; qu'en relevant, pour écarter l'application des dispositions de la loi du 5 juillet 1985, que le chemin traversant la voie ferrée avait « été spécifiquement surélevé à la hauteur des rails pour permettre ce passage » et « situé dans un milieu rural destiné à être exclusivement utilisé par des riverains et notamment à desservir les vignes environnantes », cependant que l'exclusion des chemins de fer ne peut jouer que lorsqu'ils circulent sur une voie non ouverte aux autres usagers, fussent-ils en nombre limité, la cour d'appel s'est fondée sur des motifs impropres à caractériser l'existence d'une voie propre, et a derechef violé l'article 1er de la loi du 5 juillet 1985 ;
Mais attendu qu'une voie ferrée n'est pas une voie commune aux chemins de fer et aux usagers de la route, ces derniers pouvant seulement la traverser à hauteur d'un passage à niveau, sans pouvoir l'emprunter ; que l'arrêt retient exactement que le train entré en collision avec le véhicule à bord duquel se trouvaient Jacques X... et sa fille circulait, nonobstant la circonstance que l'accident soit survenu à un passage à niveau pouvant être emprunté par d'autres usagers, sur une voie qui lui est propre ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme Muriel X..., tant en son nom personnel qu'ès qualités, et Mme Camille X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept novembre deux mille seize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat aux Conseils, pour les consorts X....
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué, confirmatif de ce chef, d'avoir jugé que la loi du 5 juillet 1985 n'était pas applicable à l'accident du 5 novembre 2006 et accueilli la demande reconventionnelle de la SNCF, d'avoir décidé que les fautes commises par Melle Camille X... et par M. Jacques X... avaient concouru à hauteur des 3/ 4 de leur préjudice et d'avoir limité, en conséquence, la responsabilité de la SNCF à 1/ 4 des conséquences dommageables de l'accident ;
Aux motifs que « c'est à bon droit que le premier juge a écarté l'application des dispositions de cette loi, en retenant que le train circulait sur une voie qui lui est propre, nonobstant la circonstance que l'accident soit survenu à un passage à niveau pouvant être emprunté par d'autres usagers, dès lors que l'aménagement des lieux, la chaussée étant surélevée pour permettre le franchissement de la voie ferrée et l'existence d'une priorité de passage absolue pour les trains excluent tout partage de la chaussée entre le train et les autres usagers (Civ. 2ème 19 mars 1997 : Bull. n° 78). C'est donc à bon droit que le tribunal a considéré que seules les dispositions de l'article 1384 alinéa 1er du code civil avaient vocation à s'appliquer en l'espèce, le train dont la SNCF est la gardienne ayant eu un rôle actif dans l'accident. Les appelantes critiquent toutefois à juste titre le jugement en ce qu'il a rejeté leur demande en considérant que le comportement irrationnel et inexpliqué de la jeune conductrice constituait un événement imprévisible et irrésistible pour la SNCF gardienne du train, l'immobilisation d'un véhicule sur la voie à un passage à niveau dépourvu de barrières n'étant en effet pas imprévisible (Civ. 2ème, 27 mars 2014 : n° 13-13. 790). La faute de la victime, même ne présentant pas les caractères de la force majeure, est néanmoins de nature à exonérer partiellement ou totalement le gardien de la chose instrument du dommage de la responsabilité pesant sur lui. En l'espèce, il est constant que le véhicule conduit par Melle Camille X... s'est immobilisé au milieu de la voie ferrée alors que le train arrivait, le conducteur de la motrice n'ayant pu éviter la collision bien qu'il ait actionné le freinage d'urgence et son avertisseur sonore. Il ne résulte des pièces versées aux débats et notamment de l'enquête de gendarmerie aucun élément de nature à accréditer l'hypothèse d'une panne technique. En revanche, le fait pour Melle Camille X... de prendre le volant alors qu'étant âgée de 15 ans, elle était dépourvue du droit de conduire ce type de véhicule et était par conséquent totalement inexpérimentée en matière de conduite automobile est constitutif d'une faute en relation causale directe avec le dommage, son inexpérience étant en effet de nature à induire des réactions inadaptées en présence d'une situation inattendue. Il est en outre établi qu'elle n'a pas respecté la priorité de passage du train. M. Jacques X... a également commis une faute pour avoir volontairement laissé le volant à sa fille âgée de 15 ans qui n'était pas autorisée à conduire un tel véhicule, cette démarche ne s'inscrivant pas dans un dispositif d'apprentissage anticipé de la conduite automobile et pour l'avoir laissée franchir, de nuit et sans précautions suffisantes, un passage à niveau dont les appelantes prétendent qu'il serait particulièrement dangereux en raison d'une visibilité réduite. Compte-tenu de leur gravité, les fautes respectives commises par Melle Camille X... et par M. Jacques X... ont concouru pour Y à leur dommage (…) » ;
Et aux motifs adoptés que « aux termes de l'article 1er de la loi du 5 juillet 1985, une victime d'un accident de la circulation est en droit d'obtenir une indemnisation dès lors qu'est impliqué un véhicule terrestre à moteur ainsi que ses remorques ou semi-remorques, à l'exception du chemin de fer et des tramways circulant sur des voies propres. Les tramways et les trains sont ainsi exclus du champ d'application de cette loi dès lors qu'ils circulent sur une voie qui leur est propre. Cependant, il a été admis qu'un tramway circulant sur une voie dont les rails sont implantés dans la chaussée ou qui traverse un carrefour ouvert et partagé avec d'autres usagers de la route, situé par conséquent dans un contexte urbain, ne circule pas sur une voie propre contrairement à celui qui se déplace dans un couloir qui lui est réservé et bien délimité. En l'espèce, il s'agit d'un accident entre un train TER et un véhicule qui s'est produit au passage à niveau n° 9 de la voie ferrée, situé sur la ligne Metzeral-Colmar. Il résulte certes des planches photographiques que les rails du train, posés sur un ballast, sont à cet endroit implantés dans le sol afin de permettre à des usagers d'emprunter le chemin qui les traverse. Cependant, le chemin a été spécifiquement surélevé à la hauteur des rails pour permettre ce passage et est en outre situé dans un milieu rural destiné à être exclusivement utilisé par des riverains et notamment à desservir les vignes environnantes, ainsi qu'en témoigne un panneau implanté à l'entrée du chemin vicinal et situé à 150 mètres du passage à niveau litigieux. Enfin, et conformément aux dispositions du code de la route et au regard des mêmes planches photographiques ainsi que d'un arrêté du Préfet du Haut-Rhin du 29 mars 1996, cette voie ferrée bénéficie d'une priorité de passage absolue pour les matériels y circulant normalement ainsi qu'en atteste la présence de panneaux de signalisation d'obligation d'arrêt stop et de position « croix de Saint André » et ce, quand bien même le passage n'est muni ni de barrières ni de demi barrières ni encore de signal lumineux. Dans ces conditions, il y a lieu de constater que la voie ferrée bénéficie d'une voie qui lui est propre et plus particulièrement au passage à niveau litigieux, excluant par la même l'application de la loi du 5 juillet 1985. En conséquence, Mme Muriel X..., Melle Camille X... et Melle Clémence X... sont déboutées de leur demande de condamnation de la SNCF sur ce fondement (…) » ;
Alors, d'une part, que les chemins de fer ne sont exclus du domaine d'application de la loi du 5 juillet 1985 que dans la mesure où ils circulent sur une voie qui leur est propre ; que pour limiter la condamnation de la SNCF, l'arrêt attaqué retient que seules les dispositions de l'article 1384 alinéa 1er du code civil avaient vocation à s'appliquer en l'espèce et que compte tenu de leur gravité, les fautes respectives commises par Melle Camille X... et par M. Jacques X... justifiaient l'exonération de la SNCF à hauteur des Y de leurs dommages ; qu'en statuant ainsi, alors qu'un train qui traverse la chaussée croisant la voie ferrée sur un passage à niveau ouvert aux autres usagers de la route ne circule pas sur une voie qui lui est propre, la cour d'appel a violé l'article 1er de la loi du 5 juillet 1985 ;
Alors, d'autre part, qu'une « voie propre », au sens de l'article 1er de la loi du 5 juillet 1985, ne l'est que dans la mesure où elle n'a pas vocation à croiser une voie routière avec laquelle elle pourrait constituer une aire de circulation ouverte à d'autres usagers, peu important que ces derniers soient en nombre limités ; qu'en relevant, pour écarter l'application des dispositions de la loi du 5 juillet 1985, que le chemin traversant la voie ferrée avait « été spécifiquement surélevé à la hauteur des rails pour permettre ce passage » et « situé dans un milieu rural destiné à être exclusivement utilisé par des riverains et notamment à desservir les vignes environnantes », cependant que l'exclusion des chemins de fer ne peut jouer que lorsqu'ils circulent sur une voie non ouverte aux autres usagers, fussent-ils en nombre limité, la cour d'appel s'est fondée sur des motifs impropres à caractériser l'existence d'une voie propre, et a derechef violé l'article 1er de la loi du 5 juillet 1985.