Cour de cassation, civile, Chambre civile 1, 28 septembre 2016, 15-19.313, Publié au bulletin

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Poitiers,13 février 2015), que, suivant contrat portant la date du 2 juillet 2010 pour la signature par la société Essentiel (la société) et le 5 juillet suivant pour celle de la société Cabinet immobilier Jacques Bailly (l'agent immobilier), la première a confié à la seconde un mandat en vue de vendre des locaux commerciaux, comportant une clause d'exclusivité interdisant de les céder par l'intermédiaire d'un autre mandataire ; qu'ayant été informée de leur cession par l'entremise d'un autre professionnel, l'agent immobilier a, le 12 octobre 2011, adressé à la société une vaine mise en demeure et, le 18 novembre 2011, l'a assignée en paiement de la clause pénale prévue au mandat ;

Attendu que l'agent immobilier fait grief à l'arrêt de dire nul le mandat de vente et de rejeter sa demande en paiement, alors, selon le moyen, que la charge de la preuve de la remise tardive du mandat de vente incombe au mandant qui l'invoque pour justifier sa demande en nullité dudit mandat ; qu'en décidant le contraire, aux motifs « qu'il n'est pas établi, faute de date certaine du courrier simple daté du 5 juillet 2010, que le cabinet Bailly ait effectivement remis par la poste à cette date, l'exemplaire du mandat destiné au mandant », la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et violé les articles 1315 du code civil et 78 alinéa 1er du décret n° 72-678 du 20 juillet 1972 ;

Mais attendu qu'en l'absence de date certaine du mandat, la formalité de l'enregistrement chronologique de cet acte, exigée par l'article 72, alinéa 4, du décret n° 72-678 du 20 juillet 1972, n'est pas régulièrement accomplie, de sorte qu'il est nul ; que l'arrêt constate qu'il n'est pas établi, faute de date certaine de la lettre simple datée du 5 juillet 2010, que l'agent immobilier ait effectivement expédié par la poste, à cette date, l'exemplaire du mandat destiné à la société, qui indique l'avoir reçu ultérieurement ; qu'il en résulte qu'à défaut de date certaine, le mandat était nul ; que, par ce motif de pur droit, substitué, dans les conditions de l'article 1015 du code de procédure civile, à ceux critiqués, l'arrêt, qui a constaté cette nullité, se trouve légalement justifié ;
PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Cabinet immobilier Jacques Bailly aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit septembre deux mille seize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Marlange et de La Burgade, avocat aux Conseils, pour la société Cabinet immobilier Jacques Bailly.

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'AVOIR constaté la nullité du mandat de vente signé les 2 et 5 juillet 2010 et débouté le Cabinet Jacques Bailly de toutes ses demandes,

AUX MOTIFS QUE « l'article 78 alinéa 1 du décret n° 72-678 du 20 juillet 1972 prévoit que : "Lorsqu'un mandat est assorti d'une clause d'exclusivité ou d'une clause pénale, ou lorsqu'il comporte une clause aux termes je laquelle une commission sera due par le mandant, même si l'opération est conçue sans les soins de l'intermédiaire, cette clause ne peut recevoir application que si elle résulte d'une stipulation expresse d'un mandat dont un exemplaire a été remis au mandant. Celte clause est mentionnée en caractères très apparents." ; a remise de l'exemplaire au mandant doit être immédiate, sous peine d'entacher le mandat de nullité. (Civ. 1, 25 février 2010, n° 08- 14787) ; que l'intimée soutient que cette remise immédiate n'impose pas la présence physique des parties et peut avoir lieu par courrier tournant, dès lors que, comme en l'espèce, le mandataire, à réception du mandat signé du mandant, l'a signé et en a retourné un exemplaire le même jour au mandant ; que le mandat en cause a été paraphé, signé et daté de Mme X... pour la SARL Essentiel le 2 juillet 2010 et le 5 juillet 2010 pour le cabinet Bailly qui produit une lettre simple datée du 5 juillet 2010, adressant l'exemplaire du mandat de vente destiné au mandant ; qu'à supposer que la remise du mandat par courrier tournant puisse être assimilée à une remise immédiate, ce que n'exclut pas le texte précité, il n'est pas établi, faute de date certaine du courrier simple daté du 5 juillet 2010, que le cabinet Bailly ait effectivement remis par la poste à cette date, l'exemplaire du mandat destiné au mandant ; que sur ce point, l'appelante ne précise pas la date de réception du mandat , indiquant simplement dans ses écritures , avoir reçu le mandat par courrier postérieurement au 5 juillet 2010 ; que dans ces conditions, faute de preuve d'une remise immédiate du mandat au mandant en mains propres ou par courrier tournant, la nullité du mandat doit être constatée ce qui implique, par infirmation du jugement, le rejet des demandes en paiement de l'intimée » (arrêt attaqué, p. 3),

ALORS QUE la charge de la preuve de la remise tardive du mandat de vente incombe au mandant qui l'invoque pour justifier sa demande en nullité dudit mandat ; qu'en décidant le contraire, aux motifs « qu'il n'est pas établi, faute de date certaine du courrier simple daté du 5 juillet 2010, que le cabinet Bailly ait effectivement remis par la poste à cette date, l'exemplaire du mandat destiné au mandant », la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et violé les articles 1315 du code civil et 78 alinéa 1er du décret n° 72-678 du 20 juillet 1972.

ECLI:FR:CCASS:2016:C101050
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