Cour de cassation, civile, Chambre civile 1, 22 septembre 2016, 15-21.176, Publié au bulletin

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Pau, 7 mai 2015), que, par contrat du 27 décembre 2005, la société Siemens Lease services (la bailleresse) a loué à Mme X... (la locataire), pour une durée de soixante-douze mois, moyennant un loyer mensuel de 951,95 euros, un dispositif médical dénommé « Skinstation Radiancy », fabriqué par la société israélienne Radiancy et ayant fait l'objet d'une déclaration CE de conformité par cette dernière après délivrance d'un certificat de conformité, le 1er janvier 2002, par la société Kema ; que la locataire a assigné la bailleresse pour obtenir, notamment, à titre principal, la nullité du contrat et, à titre subsidiaire, sa caducité à compter du 1er janvier 2008 ; que, reconventionnellement, la bailleresse a demandé, en particulier, que soit constatée l'acquisition de la clause résolutoire pour défaut de paiement de loyers ;

Attendu que la locataire fait grief à l'arrêt de constater la résiliation du contrat de location au 1er novembre 2009, de la condamner, à restituer l'équipement à la bailleresse, à lui payer une somme égale au trentième du loyer à compter du 1er novembre 2009, jusqu'à restitution du matériel, à titre d'indemnité de jouissance, ainsi qu'une somme de 27 655,02 euros avec intérêts au taux légal sur la somme de 3 470,13 euros à compter du 1er novembre 2009, d'ordonner la capitalisation des intérêts et de rejeter toutes autres demandes, alors, selon le moyen :

1°/ que le juge ne peut fonder sa décision sur un document écrit en langue anglaise qui n'est pas assorti de sa traduction en langue française sans en préciser le sens ; qu'en se fondant sur le certificat de marquage CE émanant de la société Kema, établi en anglais et non assorti d'une traduction française, versé aux débats par la bailleresse, pour énoncer que cette société démontrait que l'équipement électro-médical dénommé « Skinstation Radiancy », fabriqué par la société israélienne Radiancy et commercialisé en France par la société CPL, objet du contrat de location conclu le 27 décembre 2005 avec la locataire avait fait l'objet d'une certification CE, sans préciser la signification, en français, de ce document, la cour d'appel a violé les articles 455 du code de procédure civile et 111 de l'Ordonnance de Villers-Cotterêts du 25 août 1539 ;

2°/ que dans ses conclusions d'appel, la locataire avait fait valoir que le certificat de conformité du 1er janvier 2002 émanant de la société Kema, produit aux débats par la bailleresse en pièce n° 8-3 portait sur des systèmes de traitement dermatologique (« dermatological treatment systems »), sans mentionner aucunement l'appareil « Skinstation », pour en conclure que la bailleresse ne démontrait pas que cet appareil avait bénéficié d'une certification et d'un marquage CE conformes aux exigences du code de la santé publique et qu'en conséquence, le contrat de location était entaché de nullité ; que la cour d'appel qui a énoncé que la bailleresse démontrait que l'équipement électro-médical dénommé « Skinstation Radiancy », objet du contrat de location conclu le 27 décembre 2005 avec la locataire avait fait l'objet d'une certification CE par la société Kema à compter du 1er janvier 2002, sans répondre au moyen des conclusions d'appel de l'exposante faisant valoir que ce certificat ne mentionnait pas l'appareil « Skinstation », a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

3°/ qu'aucun dispositif médical ne peut être importé, mis sur le marché, mis en service ou utilisé s'il n'est conforme aux exigences essentielles de santé et de sécurité, conformité attestée par un certificat de conformité CE ; qu'en énonçant que la bailleresse démontrait que l'équipement électro-médical dénommé « Skinstation Radiancy », objet du contrat de location conclu le 27 décembre 2005 avec la locataire avait fait l'objet d'une certification CE par la société Kema à compter du 1er janvier 2002, sans préciser en quoi le certificat produit aurait porté sur l'appareil « Skinstation » qu'il ne mentionnait pas, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1131 du code civil, L. 5211-3, R. 5211-12, R. 5211-14 et R. 5211-17 du code de la santé publique ;

4°/ qu'aucun dispositif médical ne peut être importé, mis sur le marché, mis en service ou utilisé s'il n'est conforme aux exigences essentielles de santé et de sécurité, conformité attestée par un certificat de conformité CE ; qu'en énonçant que l'exposante ne pouvait prétendre que le contrat de location de l'appareil « Skinstation Radiancy » conclu le 27 décembre 2005 serait devenu caduc en janvier 2008 à l'expiration de la durée de validité du certificat CE, la cour d'appel a violé les articles 1131 du code civil, L. 5211-3, R. 5211-12, R. 5211-14 et R. 5211-17 du code de la santé publique ;

Mais attendu, d'abord, que l'ordonnance de Villers-Cotterêts ne concerne que les actes de procédure et qu'il appartient au juge du fond, dans l'exercice de son pouvoir souverain, d'apprécier la force probante des éléments qui lui sont soumis ;

Attendu, ensuite, que, sous le couvert de griefs non fondés de défaut de réponse à conclusions et de manque de base légale, le moyen ne tend qu'à remettre en discussion, devant la Cour de cassation, les constatations et appréciations souveraines par lesquelles la cour d'appel, qui a statué au vu de la déclaration de conformité traduite en français, visant nommément le dispositif médical loué et faisant référence au certificat de conformité délivré par la société Kema, a estimé que le bien objet du contrat de location avait fait l'objet d'une certification CE ;

Attendu, enfin, que le certificat de conformité en cours de validité, préalable à l'importation, la mise en service ou l'utilisation du produit, est exigé au jour de la conclusion du contrat ;

D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux septembre deux mille seize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Hémery et Thomas-Raquin, avocat aux Conseils, pour Mme X....

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR constaté la résiliation du contrat de location de l'équipement électro-médical dénommé "Skinstation radiancy" intervenu entre la société Siemens leaser services et Mme X... le 27 décembre 2005 avec effet au 1er novembre 2009, d'AVOIR condamné Mme X... à restituer ledit équipement à la société Siemens lease services et à payer à celle-ci, une somme égale au trentième du loyer à compter du 1er novembre 2009 jusqu'à restitution du matériel, à titre d'indemnité de jouissance, ainsi qu'une somme de 27 655,02 euros avec intérêts au taux légal sur la somme de 3 470,13 euros à compter du 1er novembre 2009, d'AVOIR ordonné la capitalisation des intérêts et d'AVOIR rejeté toutes autres demandes

AUX MOTIFS QU'en application des dispositions des articles 1131 et suivants du code civil, tout contrat doit avoir une cause licite ; que si le contrat porte sur un dispositif médical, ce dispositif doit, préalablement à sa mise sur le marché et à son utilisation, recevoir le certificat prévu à l'article L.5211-3 du code de la santé publique, attestant ses performances ainsi que sa conformité à des exigences essentielles concernant la sécurité et la santé des patients, des utilisateurs et des tiers ; qu'en l'espèce, la société Siemens Lease Services démontre que l'équipement électro médical dénommé "Skinstation Radiancy", fabriqué par la société israélienne Radiancy et commercialisé en France par la société CPL, objet du contrat de location conclu le 27 décembre 2005 avec Mme X..., a fait l'objet d'une certification CE par la société Kema valable à compter du 1er janvier 2002 (pièce n°8.3 et 23) ; qu'elle justifie encore de l'habilitation de la société Kema à délivrer ce certificat de conformité au titre de la directive 93/42/CEE relative aux dispositifs médicaux (pièce n°9) ; que les courriers échangés entre l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé et la société CPL les 25 octobre 2007, 17 avril 2008 et 20 février 2009 opposés par Mme X... n'établissent nullement, comme elle le prétend, la non-conformité de l'équipement qui lui a été loué, puisqu'ils ne pointent, au terme de la demande formée dans le premier du 25 octobre 2007 au vendeur, que les anomalies affectant d'autres équipements (Dermaskin et Orralight), et non celui loué (Skinstation Radiancy) ; que la cause du contrat de location du 27 décembre 2005 est donc parfaitement licite ; que, par ailleurs, Mme X... ne produit aucune pièce démontrant le caractère dangereux et inefficace de l'équipement et ne saurait reprocher à la société Siemens Lease Services un manquement à l'obligation de délivrance qui repose en réalité sur le fournisseur du matériel, la société CPL, comme mentionné du reste expressément aux articles 6.4 et 6.5 du contrat, et non sur le bailleur ; qu'elle ne rapporte pas davantage la preuve d'un manquement à l'obligation d'information, celle-ci reposant du reste exclusivement sur l'absence de certification de l'équipement ci-dessus écartée ; que s'agissant enfin de sa demande de nullité du contrat fondée sur le dol, si en son principe, elle est recevable pour la première fois en appel, elle suppose, pour prospérer, l'existence de manoeuvres dolosives qui ont vicié son consentement ; que l'examen du bon de commande du 9 décembre 2005 et du contrat de location du 27 décembre 2005 ne comporte aucune ambiguïté sur le montage juridique proposé à Mme X... ; que l'article 2 des conditions générales annexées au bon de commande précise bien que le "présent contrat est conclu sous les conditions d'acceptation du dossier de location par l'un des organismes financiers..." ; que c'est ce dossier de location qui fixe clairement et dans le détail les obligations de chaque partie, et Mme X... les a approuvées en signant le contrat du 27 décembre 2005 ; que Mme X... ne peut donc soutenir avoir été victime d'un dol ; qu'enfin, elle ne peut non plus prétendre que le contrat de location serait devenu caduc en janvier 2008, à l'expiration du délai de validité du certificat CE, l'exigence de la certification ne s'imposant en effet que comme un préalable à la commercialisation de l'équipement ; que le contrat de location est donc parfaitement valable et doit produire pleinement effet ; que le jugement du tribunal de grande instance de Bayonne du 24 février 2014 sera infirmé en toutes ses dispositions ; que les pièces du dossier et notamment les tableaux joints aux courriers de la société Siemens Lease Services des 21 octobre et 30 novembre 2011, établissent que Mme X... a cessé de régler les loyers à compter du mois de septembre 2009, ce qu'elle ne conteste d'ailleurs pas ; que l'article 10 des conditions du contrat prévoit que le contrat pourra être résilié de plein droit par le bailleur huit jours après une mise en demeure après une lettre recommandée avec accusé de réception demeurée infructueuse en cas de non-respect par le locataire de l'une quelconque de ses obligations ; que la société Siemens Lease Services a adressé cette mise en demeure rappelant les termes de cet article par lettre recommandée du 21 octobre 2009, retirée par Mme X... le 22 octobre 2009 ; qu'à défaut de régularisation dans le délai de huit jours, la résiliation est donc intervenue le 1er novembre suivant ; que constat en sera fait ; que Mme X... sera tenue de restituer l'équipement loué dans les conditions définies au dispositif et qui ne nécessitent pas le prononcé d'une astreinte ; que Mme X... ne formule dans ses conclusions aucune observation sur le montant des sommes réclamées par la société Siemens Lease Services ; que l''article 11-2 des conditions du contrat, qui fixe les conditions de la restitution, précise qu'à défaut de restitution immédiate de l'équipement en fin de contrat ou après résiliation, le bailleur pourra mettre en recouvrement auprès du locataire, sans mise en demeure préalable, une somme égale au montant du dernier loyer facturé pour une période équivalente, ladite somme étant versée à titre d'indemnité de privation de jouissance ; que Mme X... sera tenue au paiement de cette indemnité ; qu'elle devra en outre le paiement des sommes suivantes : - 3 470,13 euros correspondant aux loyers impayés des mois de septembre, octobre et novembre 2009 (3 X 1 166,71 euros), - 300,00 euros correspondant à l'indemnité mensuelle de 100,00 euros prévue par l'article 4.4 en cas de non-paiement de loyer à l'échéance, - 86,14 euros correspondant aux intérêts sur les loyers de retard prévus par le même article 4.4, - 23 798,75 euros correspondant aux loyers de décembre 2009 à décembre 2011(25 X 951,95 euros) à titre d'indemnité de résiliation prévue par l'article 10 ; que l'article 10-2 prévoit encore qu'à titre de pénalité pour inexécution du contrat, le locataire paiera en sus au bailleur une somme égale à 6% du montant hors taxe de l'indemnité de résiliation stipulée ci-dessus ; que cette somme s'analyse comme une clause pénale qu'en application des dispositions de l'article 1152 alinéa 2 du code civil, le juge peut, même d'office, modérer si elle est manifestement excessive ; qu'en l'espèce, au regard de l'économie générale du contrat favorable au bailleur, le montant de cette somme apparaît élevée et sera ramenée à 1 euro ; que Mme X... devra donc verser la somme totale de 27 656,02 euros ; que s'agissant des intérêts au taux de 1,5% par mois réclamés par la société Siemens Lease Services sur les seuls loyers impayés (3 470,13 euros), ils excèdent le taux d'usure fixé en 2005 à 8,87% et seront donc, pour compenser le retard dans le paiement, ramenés au taux légal ; que conformément aux dispositions de l'article 15-4 des conditions du contrat et de l'article 1154 du code civil, les intérêts seront capitalisés ;

ALORS D'UNE PART QUE le juge ne peut fonder sa décision sur un document écrit en langue anglaise qui n'est pas assorti de sa traduction en langue française sans en préciser le sens ; qu'en se fondant sur le certificat de marquage CE émanant de la société Kema, établi en anglais et non assorti d'une traduction française, versé aux débats par la société Siemens lease services, pour énoncer que cette société démontrait que l'équipement électro-médical dénommé "Skinstation Radiancy", fabriqué par la société israélienne Radiancy et commercialisé en France par la société CPL, objet du contrat de location conclu le 27 décembre 2005 avec Mme X... avait fait l'objet d'une "certification CE", sans préciser la signification, en français, de ce document, la Cour d'appel a violé les articles 455 du code de procédure civile et 111 de l'Ordonnance de Villers-Cotterêts du 25 août 1539 ;

ALORS D'AUTRE PART ET SUBSIDIAIREMENT QUE dans ses conclusions d'appel, l'exposante avait fait valoir que le certificat de conformité du 1er janvier 2002 émanant de la société Kema, produit aux débats par la société Siemens lease services en pièce n°8-3 portait sur des systèmes de traitement dermatologique ("dermatological treatment systems"), sans mentionner aucunement l'appareil "Skinstation", pour en conclure que la société Siemens lease services ne démontrait pas que cet appareil avait bénéficié d'une certification et d'un marquage CE conformes aux exigences du code de la santé publique et qu'en conséquence, le contrat de location était entaché de nullité (conclusions d'appel p.3 à 6 et notamment p.3 § dernier et p.4) ; que la cour d'appel qui a énoncé que la société Siemens lease services démontrait que l'équipement électro-médical dénommé "Skinstation Radiancy", objet du contrat de location conclu le 27 décembre 2005 avec Mme X... avait fait l'objet d'une certification CE par la société Kema à compter du 1er janvier 2002, sans répondre au moyen des conclusions d'appel de l'exposante faisant valoir que ce certificat ne mentionnait pas l'appareil "Skinstation", a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

ALORS EN OUTRE ET SUBSIDIAIREMENT QU'aucun dispositif médical ne peut être importé, mis sur le marché, mis en service ou utilisé s'il n'est conforme aux exigences essentielles de santé et de sécurité, conformité attestée par un certificat de conformité CE ; qu'en énonçant que la société Siemens lease services démontrait que l'équipement électro-médical dénommé "Skinstation Radiancy", objet du contrat de location conclu le 27 décembre 2005 avec Mme X... avait fait l'objet d'une certification CE par la société Kema à compter du 1er janvier 2002, sans préciser en quoi le certificat produit aurait porté sur l'appareil "Skinstation" qu'il ne mentionnait pas, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au 1131 du code civil, L. 5211-3, R. 5211-12, R. 5211-14 et R. 5211-17 du code de la santé publique ;

ALORS ENFIN ET SUBSIDIAIREMENT QU'aucun dispositif médical ne peut être importé, mis sur le marché, mis en service ou utilisé s'il n'est conforme aux exigences essentielles de santé et de sécurité, conformité attestée par un certificat de conformité CE ; qu'en énonçant que l'exposante ne pouvait prétendre que le contrat de location de l'appareil "Skinstation Radiancy" conclu le 27 décembre 2005 serait devenu caduc en janvier 2008 à l'expiration de la durée de validité du certificat CE, la cour d'appel a violé les articles 1131 du code civil, L. 5211-3, R. 5211-12, R. 5211-14 et R. 5211-17 du code de la santé publique.ECLI:FR:CCASS:2016:C100979
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