Cour de cassation, civile, Chambre civile 3, 12 mai 2016, 15-12.477, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


Sur le moyen unique :

Vu les articles 1732 du code civil et 7 c) de la loi du 6 juillet 1989 ;

Attendu, selon le jugement attaqué rendu en dernier ressort (juridiction de proximité d'Asnières, 23 juillet 2013), que Mme X..., preneur à bail d'un logement appartenant à Mme Y..., a assigné celle-ci, après avoir donné congé et libéré les lieux, en restitution du dépôt de garantie ; que Mme X... a demandé, à titre reconventionnel, le remboursement de réparations locatives et des dommages-intérêts ;

Attendu que, pour accueillir la demande principale et rejeter la demande reconventionnelle, le jugement retient qu'en l'absence d'état des lieux de sortie contradictoire, Mme X... est présumée les avoir rendus en bon état de réparations locatives et que compte tenu des conclusions d'un rapport du service communal d'hygiène et de santé caractérisant des infractions en matière d'humidité de l'appartement et de défaut du système électrique auxquelles la bailleresse devait mettre un terme dans un délai de trois mois, Mme Y... est particulièrement mal venue de tenter de mettre ces travaux à la charge de la locataire ;

Qu'en statuant ainsi, par des motifs insuffisants pour établir que les désordres dont elle relevait l'existence avaient eu lieu sans la faute de Mme X..., la juridiction de proximité n'a pas donné de base légale à sa décision ;

Et attendu que la cassation du chef du jugement ordonnant la restitution du dépôt de garantie entraîne la cassation, par voie de conséquence nécessaire, du chef du jugement rejetant la demande reconventionnelle de Mme Y... ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 23 juillet 2013, entre les parties, par la juridiction de proximité d'Asnières ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant la juridiction de proximité de Courbevoie ;

Condamne Mme X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne Mme X... à payer à la SCP Matuchansky, Vexliard et Poupot la somme de 2 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze mai deux mille seize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Matuchansky, Vexliard et Poupot, avocat aux Conseils, pour Mme Y...

IL EST FAIT GRIEF au jugement attaqué d'avoir condamné madame Y..., bailleresse, à payer à madame X... la somme de 1 300 euros, majorée des intérêts légaux à compter du 30 juin 2012, au titre de la restitution du dépôt de garantie, et d'avoir rejeté les demandes de madame Y... envers madame X...,

AUX MOTIFS QUE, sur la demande de madame X... de restitution du dépôt de garantie : en vertu de l'article 22 de la loi du 07/07/1989, le bailleur est tenu de restituer le dépôt de garantie dans les deux mois de la restitution des clefs par le locataire, déduction faite des sommes restant dues par ce dernier, sous réserve qu'elles soient dûment justifiées ; qu'à défaut de restitution dans le délai prévu, le solde du dépôt de garantie restant dû au locataire, après arrêté des comptes, produit intérêt au taux légal au profit du locataire ; que l'article 1731 du code civil dispose qu'en l'absence d'état des lieux, le locataire est présumé avoir reçu les lieux en bon état de réparations locatives et doit les rendre tels, sauf la preuve contraire ; qu'en l'absence d'état des lieux de sortie contradictoire, il incombe au bailleur de démontrer l'existence de dégradations imputables au locataire durant la durée de son bail pour réfuter la restitution du dépôt de garantie ; qu'en l'espèce, il résulte des pièces versées aux débats, notamment : le contrat de location, l'état des lieux d'entrée contradictoire, le rapport du service communal d'hygiène et de santé d'Asnières en date du 30/11/2011, l'attestation de l'agence Dionis, gérante à l'appartement, du 09/05/2012, la lettre de madame Ariane Y... à madame X... du 01/06/2012, la lettre recommandée AR adressée par madame X... à madame Ariane Y... le 19/07/2012, que le montant du dépôt de garantie de 1 300 euros versé par madame X... à la signature du bail conclu avec madame Simone Y..., portant sur un appartement situé 26 avenue Saint Joseph à Asnières, n'a pas été restitué par madame Ariane Y..., venue aux droits de la bailleresse, dans le délai de deux mois suivant la restitution des clés en date du 30/04/2012 ; qu'en l'absence d'état des lieux de sorte contradictoire, madame X... est présumée les avoir rendus en bon état de réparations locatives, conformément aux dispositions de l'article 1731 du code civil ; que compte tenu des conclusions du rapport du service communal d'hygiène et de santé d'Asnières en date du 30/11/2011, caractérisant des infractions en matière d'humidité de l'appartement en cause et de défaut du système électrique auxquelles la bailleresse devait mettre un terme dans un délai de 3 mois, madame Ariane Y... est particulièrement mal venue de tenter de mettre ces travaux à la charge de la locataire ; que madame X... est en conséquence bien fondée à solliciter la restitution du dépôt de garantie de 1.300 € outre les intérêts légaux à compter du 30/06/2012, conformément aux dispositions de l'article 22 de la loi du 06/07/1989 ; que sur les demandes reconventionnelles de madame Ariane Y... : en raison du caractère bien-fondé de la demande de restitution du dépôt de garantie litigieux, il convient de débouter madame Ariane Y... de ses demandes reconventionnelles (jugement, p. 2 – 4),

1°) ALORS D'UNE PART QUE l'état des lieux de sortie produit devant la juridiction de proximité par la bailleresse portait la mention « établi contradictoirement le 30 avril 2012 en deux exemplaires entre les soussignés qui le reconnaissent sincère et exact », et était revêtu de la signature de madame X..., précédée de la mention « je me porte fort de l'accord de mon mari » ; qu'en retenant « l'absence d'état des lieux de sortie contradictoire », la juridiction de proximité a dénaturé, par omission ce document et méconnu l'interdiction faite au juge de dénaturer les éléments de preuve qui lui sont soumis ;

2°) ALORS D'AUTRE PART QUE le preneur répond des dégradations survenues au cours de la location, à moins qu'il prouve qu'elles ont eu lieu sans sa faute ; qu'en ne procédant ce point à aucune des recherches qui lui étaient demandées par la bailleresse, laquelle avait produit aux débats, notamment, l'état des lieux d'entrée dont il résultait que les locaux avaient été loués à l'état neuf, outre l'attestation du gérant de l'entreprise AIBB faisant apparaître d'importantes dégradations (moisissures), la juridiction de proximité a privé sa décision de base légale au regard des articles 1732 du code civil et 7 c) de la loi du 6 juillet 1989 ;

1°) ALORS ENFIN QUE la cassation qui sera prononcée du chef de l'arrêt condamnant madame Y... à restituer à madame X... la somme de 1 300 euros, au titre du dépôt de garantie, entraînera par voie de conséquence la censure du jugement en ce qu'il a débouté madame Y... de sa demande indemnitaire, conformément aux dispositions de l'article 624 du code de procédure civile.

ECLI:FR:CCASS:2016:C300565
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